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I.

Douce Vierge Marie, humble mère de Dieu
Que tout le ciel contemple,
Vous qui fûtes un lys debout dans l'encens bleu
Sur les marches du temple ;

Épouse agenouillée à qui l'ange parla ;
Ô divine accouchée,
Que virent les bergers, qu'une voix appela,
Sur la roche penchée ;

Qui regardiez dormir, l'abreuvant d'un doux lait,
L'adorant la première,
Un enfant frêle et nu, mais qui, la nuit, semblait
Être fait de lumière ;

Ô morte, qu'enleva dans les plis des rideaux
À la nuit de la tombe
L'essaim des chérubins, qui portent à leur dos
Des ailes de colombe,

Pour vous placer, au bruit de leurs psaltérions
Dont tressaillent les cordes,
Au Ciel où vous régnez, les doigts pleins de rayons
Et de miséricordes ;

Vous qu'un peuple sur qui votre bleu manteau pend
Doucement importune,
Vous qui foulez avec la tête du serpent
Le croissant de la lune ;

Vous à qui Dieu donna les grands voiles d'azur,
Le cortège des Vierges,
La cathédrale immense au maître-autel obscur
Étoilé par les cierges,

La couronne, le sceptre et les souliers bouffants,
Les cantiques en flammes,
Les baisers envoyés par la main des enfants,
Et les larmes des femmes ;

Vous dont l'image, aux jours gros d'orage et d'erreur,
Luisait sous mes paupières,
Et qui m'avez tendu sur les flots en fureur
L'échelle des prières ;

Vous qui m'avez cherché, portant votre fanal,
Aux pentes du Parnasse ;
Vous qui m'avez pêché dans les filets du mal
Et mis dans votre nasse ;

Que n'ai-je, pour le jour où votre fête aura
Mis les cloches en joie,
La règle du marchand qui pour vous aunera
Le velours et la soie !

Que n'ai-je les ciseaux sonores du tailleur,
Pour couper votre robe !
Et que n'ai-je le four qu'allume l'émailleur !
J'émaillerais le globe

Où votre pied se pose, ainsi qu'un oiseau blanc
Planant sur nos désastres,
Globe d'azur et d'or, frêle univers roulant
Son soleil et ses astres !

Que ne suis-je de ceux dont les rois font grand cas,
Et qui sont des orfèvres !
Je vous cisèlerais des bijoux délicats,
Moins vermeils que nos lèvres ;

Mais, puisque je ne suis ni l'émailleur plaisant,
Ni le marchand notable,
Ni l'orfèvre fameux, ni le tailleur croisant
Les jambes sur sa table ;

Que je n'ai nul vaisseau sur les grands océans,
Nul trésor dans mon coffre,
J'ai rimé ce bouquet de vertus que céans
De bon coeur je vous offre.

Je vous offre humblement ce bouquet que voici :
La couleur en est franche
Et le parfum sincère, et ce bouquet choisi
C'est la chasteté blanche ;

C'est l'humilité bleue et douce, et c'est encor
Fleur du coeur, non du bouge,
La pauvreté si riche et toute jaune d'or
Et la charité rouge.

Ce n'est pas que je croie habiter les sommets
De la science avare,
Et je n'ai pas le fruit de la sagesse, mais
L'amour de ce fruit rare ;

Au surplus, je n'ai pas l'améthyste à mon doigt,
Je ne suis pas du temple,
Et je sais qu'un chrétien pur et simple ne doit
À tous que son exemple.

Je ne suis pas un prêtre arrachant au plaisir
Un peuple qu'il relève ;
Je ne suis qu'un rêveur et je n'ai qu'un désir :
Dire ce que je rêve.

II.

Aimez : l'amour vous met au cœur un peu de jour ;
Aimez, l'amour allège ;
Aimez, car le bonheur est pétri dans l'amour
Comme un lys dans la neige !

L'amour n'est pas la fleur facile qu'au printemps
L'on cueille sous son aile,
Ce n'est pas un baiser sur tes lèvres du temps :
C'est la fleur éternelle.

Nous faisons pour aimer d'inutiles efforts,
Pauvres cœurs que nous sommes !
Et nous cherchons l'amour dans l'étreinte des corps,
Et l'amour fuit les hommes !

Et c'est pourquoi l'on voit la haine dans nos yeux
Et dans notre mémoire,
Et ce vautour ouvrir sur nos front soucieux
Son affreuse aile noire ;

Et c'est pourquoi l'on voit jaillir de leur étui
Tant de poignards avides ;
Et c'est pourquoi l'on voit que les cœurs d'aujourd'hui
Sont des sépulcres vides.

Voici l'éternel cri que je sème au vent noir,
Sur la foule futile ;
Tel est le grain d'encens qui fume en l'encensoir
De ma vie inutile.

III.

Cependant bien que j'eusse encor peu combattu
Pour sa sainte querelle,
Mes yeux, l'ayant fixée, ont vu que la vertu
Est étrangement belle ;

Que son corps s'enveloppe en de puissants contours,
Et que sa joue est pleine ;
Qu'elle est comme une ville, assise avec ses tours,
Au milieu de la plaine ;

Que ses yeux sont sereins, ignorant l'éclair vil,
Ainsi que les pleurs lâches ;
Que son sourire est *** comme une aube en avril,
Que, pour de nobles tâches,

Les muscles de ses bras entrent en mouvement,
Comme un arc qui s'anime,
Pendant que son cou porte impérialement
Sa tête magnanime ;

Qu'un astre sur son front luit plus haut que le sort,
Et que sa lèvre est grasse,
Et qu'elle est dans le calme, enveloppant l'effort,
L'autre nom de la grâce ;

Qu'elle est comme le chêne en qui la sève bout
Jusqu'à rompre l'écorce ;
Et qu'elle est, dans l'orage, indomptable et debout,
L'autre nom de la force ;

Que sa mamelle est vaste et pleine d'un bon lait,
Et que le mal recule
Comme une feuille au vent de son geste, et qu'elle est
La compagne d'Hercule.

Et je vous dis : Ô vous qui comme elle régnez,
Ô vierge catholique !
Les saints joyeux sont morts, nos temps sont condamnés !
Au mal mélancolique ;

La joie et la vertu se sont voilé le front,
Ces sœurs sont exilées ;
Et je ne vois pas ceux qui les rappelleront
Avec des voix ailées !

Ô Vierge! Hâtez-vous! Déjà l'ange s'enfuit
Sous le ciel noir qui gronde,
Et le monde déjà s'enfonce dans la nuit,
Comme un noyé dans l'onde !

Tout ce qui fleurissait et parfumait l'été
De la vie et de l'âme,
L'amour loyal de l'homme et la fidélité
Pieuse de la femme,

Ces choses ne sont plus, l'haleine des autans
A balayé ces roses,
Et l'homme a changé l'homme, et les gens de nos temps
Sont repus et moroses ;

Oui, c'est la nuit qui vient, la nuit qui filtre au fond
De l'âme qui décline,
Et grelotte déjà dans cet hiver profond,
Comme une ombre orpheline.

Aussi je crie ; Ô Vous, n'aurez-vous pas pitié
De notre temps qui souffre,
Naufragé qui s'aveugle et qui chante, à moitié
Dévoré par le gouffre ?

Ô vite, envoyez-nous, le cœur plein de pardons
Et les yeux pleins de flammes,
Celui qui doit venir, puisque nous l'attendons :
Lui seul prendra les âmes ;

Sa main se lèvera seulement sur les fronts
Noirs de gloire usurpée,
Et les divins conseils de Dieu lui donneront
La parole et l'épée ;

Il sera le pasteur, il sera le nocher ;
Il fera pour l'Église
Jaillir le sentiment, comme l'eau du rocher
Sous la main de Moïse.

Car rien ne sert d'avoir, pour fonder sur le cœur
Incertain de la foule,
Un monument qui monte et qui sorte vainqueur
Du siècle qui s'écroule,

Une lyre géante, et des lauriers autour
D'un front lourd de conquêtes,
Et les rimes du vers, dramatique tambour
Que frappent deux baguettes ;

De mouvoir une lèvre allumée au soleil,
D'éloquente frottée,
D'où s'échappe un torrent de paroles, pareil
À la lave irritée,

Ni même de tenir à son poing souverain
Le glaive à lame amère
Qu'Achille ramassa sur l'enclume d'airain
Du forgeron Homère,

Qu'Alexandre saisit, qui le passe aux Césars
Dont la gloire est jalouse,
Et que Napoléon cueille dans les hasards,
Aux pieds de Charles douze ;

Tandis qu'il suffira, sous le regard de feu
De l'amour qui féconde,
D'un seul Juste, sur qui souffle l'esprit de Dieu,
Pour transformer le monde.
Or ce vieillard était horrible : un de ses yeux,

Crevé, saignait, tandis que l'autre, chassieux,

Brutalement luisait sous son sourcil en brosse ;

Les cheveux se dressaient d'une façon féroce,

Blancs, et paraissaient moins des cheveux que des crins ;

Le vieux torse solide encore sur les reins,

Comme au ressouvenir des balles affrontées,

Cambré, contrariait les épaules voûtées ;

La main gauche avait l'air de chercher le pommeau

D'un sabre habituel et dont le long fourreau

Semblait, s'embarrassant avec la sabretache,

Gêner la marche et vers la tombante moustache

La main droite parfois montait, la retroussant.


Il était grand et maigre et jurait en toussant.


Fils d'un garçon de ferme et d'une lavandière,

Le service à seize ans le prit. Il fit entière,

La campagne d'Égypte. Austerlitz, Iéna,

Le virent. En Espagne un moine l'éborgna :

- Il tua le bon père, et lui vola sa bourse, -

Par trois fois traversa la Prusse au pas de course,

En Hesse eut une entaille épouvantable au cou,

Passa brigadier lors de l'entrée à Moscou,

Obtint la croix et fut de toutes les défaites

D'Allemagne et de France, et gagna dans ces fêtes

Trois blessures, plus un brevet de lieutenant

Qu'il résigna bientôt, les Bourbons revenant,

À Mont-Saint-Jean, bravant la mort qui l'environne,

Dit un mot analogue à celui de Cambronne,

Puis quand pour un second exil et le tombeau,

La Redingote grise et le petit Chapeau

Quittèrent à jamais leur France tant aimée

Et que l'on eut, hélas ! dissous la grande armée,

Il revint au village, étonné du clocher.


Presque forcé pendant un an de se cacher,

Il braconna pour vivre, et quand des temps moins rudes

L'eurent, sans le réduire à trop de platitudes,

Mis à même d'écrire en hauts lieux à l'effet

D'obtenir un secours d'argent qui lui fut fait,

Logea moyennant deux cents francs par an chez une

Parente qu'il avait, dont toute la fortune

Consistait en un champ cultivé par ses fieux,

L'un marié depuis longtemps et l'autre vieux

Garçon encore, et là notre foudre de guerre

Vivait et bien qu'il fût tout le jour sans rien faire

Et qu'il eût la charrue et la terre en horreur,

C'était ce qu'on appelle un soldat laboureur.

Toujours levé dès l'aube et la pipe à la bouche

Il allait et venait, engloutissait, farouche,

Des verres d'eau-de-vie et parfois s'enivrait,

Les dimanches tirait à l'arc au cabaret,

Après dîner faisait un quart d'heure sans faute

Sauter sur ses genoux les garçons de son hôte

Ou bien leur apprenait l'exercice et comment

Un bon soldat ne doit songer qu'au fourniment.

Le soir il voisinait, tantôt pinçant les filles,

Habitude un peu trop commune aux vieux soudrilles,

Tantôt, geste ample et voix forte qui dominait

Le grillon incessant derrière le chenet,

Assis auprès d'un feu de sarments qu'on entoure

Confusément disait l'Elster, l'Estramadoure,

Smolensk, Dresde, Lutzen et les ravins vosgeois

Devant quatre ou cinq gars attentifs et narquois

S'exclamant et riant très fort aux endroits farce.


Canonnade compacte et fusillade éparse,

Chevaux éventrés, coups de sabre, prisonniers

Mis à mal entre deux batailles, les derniers

Moments d'un officier ajusté par derrière,

Qui se souvient et qu'on insulte, la barrière

Clichy, les alliés jetés au fond des puits,

La fuite sur la Loire et la maraude, et puis

Les femmes que l'on force après les villes prises,

Sans choix souvent, si bien qu'on a des mèches grises

Aux mains et des dégoûts au cœur après l'ébat

Quand passe le marchef ou que le rappel bat,

Puis encore, les camps levés et les déroutes.


Toutes ces gaîtés, tous ces faits d'armes et toutes

Ces gloires défilaient en de longs entretiens,

Entremêlés de gros jurons très peu chrétiens

Et de grands coups de poing sur les cuisses voisines.


Les femmes cependant, sœurs, mères et cousines,

Pleuraient et frémissaient un peu, conformément

À l'usage, tout en se disant : « Le vieux ment. »


Et les hommes fumaient et crachaient dans la cendre.


Et lui qui quelquefois voulait bien condescendre

À parler discipline avec ces bons lourdauds

Se levait, à grands pas marchait, les mains au dos

Et racontait alors quelque fait politique

Dont il se proclamait le témoin authentique,

La distribution des Aigles, les Adieux,

Le Sacre et ce Dix-huit Brumaire radieux,

Beau jour où le soldat qu'un bavard importune

Brisa du même coup orateurs et tribune,

Où le dieu Mars mis par la Chambre hors la Loi

Mit la Loi hors la Chambre et, sans dire pourquoi,

Balaya du pouvoir tous ces ergoteurs glabres,

Tous ces législateurs qui n'avaient pas de sabres !


Tel parlait et faisait le grognard précité

Qui mourut centenaire à peu près l'autre été.

Le maire conduisit le deuil au cimetière.

Un feu de peloton fut tiré sur la bière

Par le garde champêtre et quatorze pompiers

Dont sept revinrent plus ou moins estropiés

À cause des mauvais fusils de la campagne.

Un tertre qu'une pierre assez grande accompagne

Et qu'orne un saule en pleurs est l'humble monument

Où notre héros dort perpétuellement.

De plus, suivant le vœu dernier du camarade,

On grava sur la pierre, après ses nom et grade,

Ces mots que tout Français doit lire en tressaillant :

« Amour à la plus belle et gloire au plus vaillant. »
Down at the end of Charters Street
In a dim-lit part of town,
There stands the old Alhambra and
They’re going to pull it down.
We warned them up at the council, but
They said it’s a waste of space,
There’s not been a film for twenty years
Since the Carol Ransome case.

Carol was found in a pool of blood
By the curtains, up on the stage,
Somebody took a knife to her
In a crazed, death-dealing rage,
They never discovered just who it was
But the cinema closed right down,
Nobody wanted to go again
In this hick, one hotel town.

That was the end of our childhood fun
Our own theatre of dreams,
No more Saturday Matinées
Or milk shakes or ice creams,
Nothing to do in this one horse town
But to chase the girls in the park,
And get some serious kissing done
When the day was getting dark.

So Al and Joe and Mary Ann
And me, I must admit,
Broke on into the cinema
And found ourselves in the pit,
Right in front of the dusty stage
Where the curtains hung in shreds,
Barely hiding the giant screen
That was covered in old cobwebs.

We’d played in there for an hour or so
Running between the rows,
Making the Hammond ***** screech
Like a fat man touching his toes,
When suddenly there was a swishing sound
And the curtains began to part,
And something flickered up on the screen
As if it was going to start.

We stood stock still and we held our breath
When the speakers grumbled and groaned,
‘It looks like we’ve got an audience!’
A voice on the speakers moaned.
Then faces peered from the ancient screen
From the days of black and white,
But there wasn’t a single projection beam
From the room where it used to light.

A shimmering glow from the screen fell on
The first few rows of seats,
And one dimensional girls appeared
With ice creams and with treats,
The figures spilled from the silver screen
And onto the wooden stage,
Dracula, framed in black and white
And Frankenstein in a rage.

We were all of us petrified by blood
And Al was thinking to run,
But ‘Don’t you move!’ said an ugly hood
On the screen, and pointing a gun.
They made us sit in the second row
And paraded their long-gone fame,
Bela Lugosi’s fangs and cloak
And the Hunchback of Notre Dame.

Then as they faded a woman walked
From the wings, and out on the stage,
And a man that we knew as Grocer George
Flew suddenly into a rage.
He knifed the woman a dozen times
And he beat her down to the floor,
And over the screams of Mary Ann
We made a break for the door.

The screen went dark and the stage was bare
And the curtains hung like shrouds,
We said that we’d never go back in there
As we lay, looked up at the clouds,
But we each went in to the grocery store
And we whispered, ‘Carol’s back!’
‘We know what you did,’ said Mary Ann
And George’s eyes went black.

He chased us out of his grocery
And he closed the store for good,
Then policeman Andy found him hanging
Down in the Maple wood.
They’d better not take the Alhambra down
Or the ghosts of the silver screen,
Will all get out, and they’ll roam about
Without a theatre of dreams!

David Lewis Paget
Martin Narrod May 2014
They told me the only thing that could cure heartache was war, and since the war wouldn't take me I figure the only thing to do now is take up a life of crime. Gabriel Garcia Marquez says in Love in the Time of Cholera that the only cure for heartache is to find other hearts to break. Five years have passed and I still remember without fail the flint of a lighter, the squint of an eye, and the bell of your dress. I dream a dream each night, sweet variation of the story of you. It comes down to a letter sometimes, I go to the window well with a notebook and a pencil and I draft a sonnet, sometimes a verse, any form of an expression to idle the time it takes for me to find you. I know stars that haven't lived as long. The way I cupped my hands over your ears, the way rapture lived and loved, you kissing me in the shade of the palm trees up their on Notre Damen Ave. I know the curve of the Earth wrapped in the shades of the skin on your body. I live every day for the chance that I will meet you again.
Letter to an ex-girlfriend
Poppy Halafihi Jan 2019
Non, tout ne se passe pas pour une raison.
C’est nous qui décidons de nos actions,
C’est nous qui décidons de les faire.
Quelquefois on se fait mal à cause de l’action d’un autre.
Oui, ce n’est pas toujours notre faute,
Et la plupart du temps, il n’y a rien que l’on pouvait faire pour l’arrêter.

Vos actions peuvent faire mal aux autres,
Et les faire souffrir.
Il ne faut pas rester déprimé si ça arrive.
Vous n’êtes pas seul!
Oui c’est très dur et ça peut faire très peur.
Il faut qu’on réussisse à accepter ce qui s’est passé,
Pour réussir à continuer.

On se dit toujours que tout se passe pour une raison,
Quand on a très mal et qu’on veut se sentir mieux,
Mais pour moi c’est pire!
Car ça veut dire que tout ce qui nous arrive devait nous arriver?
Non ce n’est pas possible, ce n’était pas prévu sur notre chemin.
Par contre ce sont nos actions qui déterminent où on va ensuite,
Et bien sûr on va apprendre pleins de choses sur notre route.

Nous, nous avons le contrôle même si on pense que nous l’avons perdu,
On dirige notre vie.
Fais le et n’aie pas peur.
Je ne peux pas changer le passé,
Mais moi, je décide où je veux aller maintenant,
Vous pouvez aussi.

By
Coco 07
We won’t all agree.
Tous le monde ne serait pas d’accord.
Bite Schoen, Fraulein !
Jouons avec les mots rébus
Nus et sincères.
Appelons une chatte une chatte
Et une bite une bite.
Mouillons et bandons
Suçons voluptueusement nos mots tabous
Jusqu'à la moelle
Appelons cul Luc
Et bite Tobie
Lâchons-nous
Sans laisse et sans harnais
Vive la bagatelle sans filet
Quand j'avance tu recules
Comment veux-tu comment veux-tu
Que je te culbute ?
Ou tu préfères encule
Soyons salaud féminin salope
Vicieuse masculin vicieux
Jouissons de toutes nos jutes
Buvons nos vins clairet
Et nos sirops typhon
Universels et panachés
Tu préfères à la cuillère ou directement au pis du mammifère ?
Jouissons, mignonne
Cochon cochonne
Allons voir si la rose
Qui ce matin avait éclose
N'a point perdu cette vesprée
Les plis de sa verge pourprée
Baisons Baisons
Qu'un sang impur arrose nos sillons.
Tu préfères zizi, anguille, oiseau ?
Moi je me présente quand même
Je m'appelle Orphie et si tu veux
Tu peux prononcer Orphée
Et toi ma chatte de lynx, ma pie qui chante,
Tu dis utérus comme si tu voulais me dire
Que tu es musicale et que je dois
Te prendre à la hussarde de ma clé d'ut
Ou ai-je mal compris, serait-ce ma clé de huit ?
Moi j'appelle ton repaire palourde,
Conque de lambi ou hortensia,
Zmeu, car tu te transformes quand tu veux
En nuage de cerfs-volants
Et tu m'emportes avec toi tourbillonneuse
Tourbillonneuse oui car tu réinventes la syntaxe et le lexique
Tourbillonneuse, adjectif qualificatif, féminin singulier
Dans le creux profond de tes dents acérées
Quand tu me suces j'oublie tout
J'oublie que tu t'appelles Eurydice
Et je jouis en Aura dans tous ses orifices
Ne sois pas vulgaire
Ne me dis pas je t'aime
Mais dis-moi chaque fois que ça te chatouille
J'ai envie de toi.
Ou baise-moi là tout de suite
Et tout de suite ne veut pas dire vite
C'est lentement que je veux t'administrer mon vit
A petites doses
Tu préfères devant ou derrière ?
En haut ou en bas ou côte à côte ?
A propos
Tu sais que lès ça veut dire à côté
Et que ça a la même racine latine que latéral ?

Lentement disais-je
Parcourons nos bréviaires
Et chantons nos poèmes lubriques
Et cantiques tantriques

Veux-tu que je te fouette de ma langue rose
Et que j'engloutisse de mes grosses lèvres tes petites lèvres
Fais couler ta liqueur que je m'en pourlèche
Suce-moi le sein
Je veux que mon aréole change de couleur
Et que mon mamelon devienne de la taille de mon dard.
J'aime quand tu dis ça
Tu dis fais moi ça
Ou j'aime ça, tu savoures
Et même dans un simple ça va chez toi
Je sens que tu es dans tous ses états.
Tu veux que je t'apaises et en même temps
Tu ne penses qu'à brûler de plus belle.

Et chaque fois que je renais des cendres de tes caresses
Tu as tes yeux d'anthropologue qui réclament encore le tout et les parties
Et je fais mine de me plaindre
Je te dis que tu es Insatiable
Mais déjà je bande Incurable
Car il suffit que tu me regardes
Avec ces yeux de chatte lynx de ces instants-là
Pour que je batte des cils.

Tu es caniculaire en permanence
Tu es humide et généreuse quand tu chantes
Je te prends, tu me prends par la barbichette
Le premier qui jouira
Aura une sucette
Et moi je tire la chevillette et la chevillette cherra
Car je sais que tu es mon ombre et que je suis la tienne
Nous nous fondons dans nos ombres respectives dans le miroir
Et c'est dans nos ombres que nous nous faisons tous ces câlins jouissifs
C'est à travers elles que nous montrons
Nos envies et désirs d'immortalité
A travers les petites morts répétées
Les petites extases quotidiennes
Des mots quels qu'il soient qui nous lient
En de petits cailloux sur la route qui mène aux neiges du parinirvana.

Alors pour résumer notre texte

Je commence par le titre,
A toi la dédicace et à moi la préface.
Préliminaires obligatoires.
Tu m''exposes les grandes lignes de notre mémoire
Et je procède à l'introduction et au développement.
A toi la thèse à moi l'antithèse ou vice et versa.
Avant de conclure par une virgule
Je récapitule et j'écris le mot faim
Et toi tu continues sur le même rythme
Car notre histoire n'a pas de fin,
Notre histoire est Insatiable et Immortelle.
Tu es la Muse je suis le Musc
Et notre film se lit non pas en noir et blanc
Mais en yin et yang,
Tu voudrais que j'improvise
Les chemins qui mènent au septième ciel
Pour notre prochain congrès
Que je vienne les mains vides
Sans notes ni croquis
Pour te couronner reine et courtisane.

Mais demanderais-tu au peintre de venir à toi
Sans son pinceau, ses fusains, ses tubes d'aquarelle et son papier canson

Ou au photographe sans son posemètre, son trépied et ses filtres, son appareil photo et ses objectifs

Et un auteur de théâtre pourrait-il officier sans donner des indications?

Des orientations, des pistes pour que les acteurs puissent mieux jouer leurs personnages

Eh bien moi je voudrais écrire de concert avec toi les didascalies de notre lune de miel.

Pense au Cantique des Cantiques
Pense à Salomon, à son épouse et aux jeunes filles ,
Penses-y bien, ma sans rivale,
Ma muse venue au monde sept fois
Et dont aucune galante n 'arrive aux chevilles
Comment veux-tu qu'on se retrouve dans la mare aux nénuphars
Deux canards mandarins batifolant
Sans didascalies...
Tu connais les soixante-quatre manières du kama
Tu sais la différence entre baratement et percement
Et tu veux goûter le chalumeau du miel
Lors du congrès de la corneille
Alors tandis que tu me provoques du regard et du geste
En dansant comme une bayadère accomplie
Souviens toi des didascalies.
Je suis ton vert-galant, ton esclave, ton cornac
Ton renifleur, ton cunnilingue, ton Sigisté
Si tu veux tu seras ma nymphe, mon myrte, ma lanterne, ma crête,
Ma landie, ma douceur, mon amour de Vénus
Mon gaude mihi, mon impudique
Organisons nos langues et nos boutons
Nos protubérances.
Pour qu'aucune partie ne soit honteuse
Pour que toutes soient honnêtes
Il faut des chapitres et des actes
Dans lesquels les morsures, les égratignures, les baisers
Les succions et les caresses s'emboîtent dans un naturel
Si joliment organisé que chaque posture génère
Une improvisation et que chaque improvisation génère une nouvelle posture.
Alternons les phases pudiques et impudiques
Sans tabou éperonnons-nous
Empalons-nous dans les postures de singe ou d'éléphant
Peu importe si la mentule précède le tentigo
Ou le contraire
Peu importe qui est dessus ou dessous
Qui lèche et qui est léché, qui est mordillé, qui est marqué,
Qui est baisé et pénétré
Si c'est simultanément ou séparément
Nous appartenons nous aussi au règne animal
Et que la verge soit masculine ou féminine
C 'est toujours l'aiguillon de la volupté qui guidera nos didascalies.
Le navire est venu à cheval, à une heure inexacte
Notre frère-matelot, du Panthéon  des Poètes, était à son bord
Jean Pierre Basilic Dantor Frankétienne D’argent
Qui écrivait, à la hâte, le dernier acte
Se trouvait par hasard, miraculeusement sur le port
Il est monté, il est parti sans parler, sans argent
Sans ses chefs d’œuvre, sans une petite maison
C’est la vie, on part à toute saison.

Kalfou te kindeng miwo, miba ye.

Franckétienne n’est pas disparu
Il est quelque part, à Ravine-Sèche,  dans les rues
Son inspiration est dans ‘l’émission le Point’
Nous n’avons pas d’autres choix que de prendre soin
De sa mémoire, de son invention et de son imagination
Franckétienne était un génie Haïtien, poète, dramaturge, spiraliste
Ministre de la culture, faiseur de mots, chanteur, peintre et artiste
Son nom était une longue phrase
Et ses paroles faisaient rire jusqu'à l’extase.

Kalfou te kindeng miwo, miba ye.


De son vivant, il n’avait pas obtenu sa petite maison
C’était un génie légendaire qui a défié l’imagination
La dictature, l’ordinaire, l’inordinaire et l’abstraction
En devenant un mapou, un baobab. Dirait Wendell
Quel potomitan! Quelle cathédrale! Quelle citadelle!
Pour paraphraser le fils du directeur de Mac Donald
« S’il arrive que tu tombes, apprends vite à chevaucher
Ta chute, que ta chute devienne un cheval, ton cheval
Pour continuer le voyage », la randonnée.

Kalfou te kindeng miwo, miba ye.

« Chaque minute compte après cinquante ans »
Disait Franckétienne, puisqu’on peut partir
A n’importe quelle heure, à n’importe quel instant
‘Galaxie plomb gaillé’, pas trop **** du nadir
Une trace invisible sur la tète à la Valentino ou à la Tino Rossi
Frankétienne s’en est allé, l’artiste est parti
Il demeure plus que jamais un Être nouveau
Le géant, l’écrivain, le comédien, le créateur des mots
Est habillé en bretelle comme un gros blanc nègre
Pas comme un monstre de Dr. Frankenstein. Comme une pègre
Le navire est venu à cheval, c’est la mort
Qui nous menace comme si nous avions tort
Nous pleurons maintenant comme la mère
Pour cet octogénaire avancé, pour ce prince de lumière.

Kalfou te kindeng miwo, miba ye.

P.S. Un Hommage à Franckétienne et famille, à Wendell Théodore
Et compagnie,  à Radio Métropole et à tous  les Haïtiens conséquents.
J’offre mes sincères condoléances à tous. Sit ei terra levis!

Copyright © Février 2025, Hébert Logerie, Tous droits réservés
Hébert Logerie est l'auteur de plusieurs recueils de poésie.
Un prêtre de Jupiter,
Père de deux grandes filles,
Toutes deux assez gentilles,
De bien les marier fit son soin le plus cher.
Les prêtres de ce temps vivaient de sacrifices,
Et n'avaient point de bénéfices.
La dot était fort mince. Un jeune jardinier
Se présenta pour gendre ; on lui donna l'aînée.
Bientôt après cet hyménée
La cadette devint la femme d'un potier.
À quelques jours de là, chaque épouse établie
Chez son époux, le père va les voir.
Bon jour, dit-il, je viens savoir
Si le choix que j'ai fait rend heureuse ta vie,
S'il ne te manque rien, si je peux y pourvoir.
Jamais, répond la jardinière,
Vous ne fîtes meilleure affaire :
La paix et le bonheur habitent ma maison ;
Je tâche d'être bonne, et mon époux est bon :
Il sait m'aimer sans jalousie,
Je l'aime sans coquetterie ;
Aussi tout est plaisir, tout jusqu'à nos travaux ;
Nous ne désirons rien, sinon qu'un peu de pluie
Fasse pousser nos artichauts.
- C'est là tout ? - Oui vraiment. -tu seras satisfaite,
Dit le vieillard : demain je célèbre la fête
De Jupiter ; je lui dirai deux mots.
Adieu, ma fille. - Adieu, mon père.
Le prêtre de ce pas s'en va chez la potière
L'interroger, comme sa sœur,
Sur son mari, sur son bonheur.
Oh ! Répond celle-ci, dans mon petit ménage,
Le travail, l'amour, la santé,
Tout va fort bien en vérité ;
Nous ne pouvons suffire à la vente, à l'ouvrage :
Notre unique désir serait que le soleil
Nous montrât plus souvent son visage vermeil
Pour sécher notre poterie.
Vous, pontife du dieu de l'air,
Obtenez-nous cela, mon père, je vous prie ;
Parlez pour nous à Jupiter.
- Très volontiers, ma chère amie :
Mais je ne sais comment accorder mes enfants ;
Tu me demandes du beau temps,
Et ta sœur a besoin de pluie.
Ma foi, je me tairai, de peur d'être en défaut.
Jupiter mieux que nous sait bien ce qu'il nous faut ;
Prétendre le guider serait folie extrême.
Sachons prendre le temps comme il veut l'envoyer :
L'homme est plus cher aux dieux qu'il ne l'est à lui-même ;
Se soumettre, c'est les prier.
O vraie et lamentable image de la vie !
La joie entre par où la douleur est sortie !
Le bonheur prend le lit d'où fuit le désespoir !
À ce qui naît le jour Dieu fait place le soir ;
La coupe de la vie a toujours même dose,
Mais une main la prend quand l'autre la dépose,
Hélas ! et si notre œil pouvait parfois sonder
Ces coupes de bonheur qui semblent déborder,
Ne trouverions-nous pas que chaque joie humaine
Des cendres et des pleurs d'un autre est toujours pleine ?

Du village de sa naissance, le 20 juillet 1800.
Écoutez. Une femme au profil décharné,
Maigre, blême, portant un enfant étonné,
Est là qui se lamente au milieu de la rue.
La foule, pour l'entendre, autour d'elle se rue.
Elle accuse quelqu'un, une autre femme, ou bien
Son mari. Ses enfants ont faim. Elle n'a rien ;
Pas d'argent ; pas de pain ; à peine un lit de paille.
L'homme est au cabaret pendant qu'elle travaille.
Elle pleure, et s'en va. Quand ce spectre a passé,
Ô penseurs, au milieu de ce groupe amassé,
Qui vient de voir le fond d'un cœur qui se déchire,
Qu'entendez-vous toujours ? Un long éclat de rire.

Cette fille au doux front a cru peut-être, un jour,
Avoir droit au bonheur, à la joie, à l'amour.
Mais elle est seule, elle est sans parents, pauvre fille !
Seule ! - n'importe ! elle a du courage, une aiguille,
Elle travaille, et peut gagner dans son réduit,
En travaillant le jour, en travaillant la nuit,
Un peu de pain, un gîte, une jupe de toile.
Le soir, elle regarde en rêvant quelque étoile,
Et chante au bord du toit tant que dure l'été.
Mais l'hiver vient. Il fait bien froid, en vérité,
Dans ce logis mal clos tout en haut de la rampe ;
Les jours sont courts, il faut allumer une lampe ;
L'huile est chère, le bois est cher, le pain est cher.
Ô jeunesse ! printemps ! aube ! en proie à l'hiver !
La faim passe bientôt sa griffe sous la porte,
Décroche un vieux manteau, saisit la montre, emporte
Les meubles, prend enfin quelque humble bague d'or ;
Tout est vendu ! L'enfant travaille et lutte encor ;
Elle est honnête ; mais elle a, quand elle veille,
La misère, démon, qui lui parle à l'oreille.
L'ouvrage manque, hélas ! cela se voit souvent.
Que devenir ! Un jour, ô jour sombre ! elle vend
La pauvre croix d'honneur de son vieux père, et pleure ;
Elle tousse, elle a froid. Il faut donc qu'elle meure !
A dix-sept ans ! grand Dieu ! mais que faire ?... - Voilà
Ce qui fait qu'un matin la douce fille alla
Droit au gouffre, et qu'enfin, à présent, ce qui monte
À son front, ce n'est plus la pudeur, c'est la honte.
Hélas, et maintenant, deuil et pleurs éternels !
C'est fini. Les enfants, ces innocents cruels,
La suivent dans la rue avec des cris de joie.
Malheureuse ! elle traîne une robe de soie,
Elle chante, elle rit... ah ! pauvre âme aux abois !
Et le peuple sévère, avec sa grande voix,
Souffle qui courbe un homme et qui brise une femme,
Lui dit quand elle vient : « C'est toi ? Va-t-en, infâme ! »

Un homme s'est fait riche en vendant à faux poids ;
La loi le fait juré. L'hiver, dans les temps froids ;
Un pauvre a pris un pain pour nourrir sa famille.
Regardez cette salle où le peuple fourmille ;
Ce riche y vient juger ce pauvre. Écoutez bien.
C'est juste, puisque l'un a tout et l'autre rien.
Ce juge, - ce marchand, - fâché de perdre une heure,
Jette un regard distrait sur cet homme qui pleure,
L'envoie au bagne, et part pour sa maison des champs.
Tous s'en vont en disant : « C'est bien ! » bons et méchants ;
Et rien ne reste là qu'un Christ pensif et pâle,
Levant les bras au ciel dans le fond de la salle.

Un homme de génie apparaît. Il est doux,
Il est fort, il est grand ; il est utile à tous ;
Comme l'aube au-dessus de l'océan qui roule,
Il dore d'un rayon tous les fronts de la foule ;
Il luit ; le jour qu'il jette est un jour éclatant ;
Il apporte une idée au siècle qui l'attend ;
Il fait son œuvre ; il veut des choses nécessaires,
Agrandir les esprits, amoindrir les misères ;
Heureux, dans ses travaux dont les cieux sont témoins,
Si l'on pense un peu plus, si l'on souffre un peu moins !
Il vient. - Certe, on le va couronner ! - On le hue !
Scribes, savants, rhéteurs, les salons, la cohue,
Ceux qui n'ignorent rien, ceux qui doutent de tout,
Ceux qui flattent le roi, ceux qui flattent l'égout,
Tous hurlent à la fois et font un bruit sinistre.
Si c'est un orateur ou si c'est un ministre,
On le siffle. Si c'est un poète, il entend
Ce chœur : « Absurde ! faux ! monstrueux ! révoltant ! »
Lui, cependant, tandis qu'on bave sur sa palme,
Debout, les bras croisés, le front levé, l'œil calme,
Il contemple, serein, l'idéal et le beau ;
Il rêve ; et, par moments, il secoue un flambeau
Qui, sous ses pieds, dans l'ombre, éblouissant la haine,
Éclaire tout à coup le fond de l'âme humaine ;
Ou, ministre, il prodigue et ses nuits et ses jours ;
Orateur, il entasse efforts, travaux, discours ;
Il marche, il lutte ! Hélas ! l'injure ardente et triste,
À chaque pas qu'il fait, se transforme et persiste.
Nul abri. Ce serait un ennemi public,
Un monstre fabuleux, dragon ou basilic,
Qu'il serait moins traqué de toutes les manières,
Moins entouré de gens armés de grosses pierres,
Moins haï ! -- Pour eux tous et pour ceux qui viendront,
Il va semant la gloire, il recueille l'affront.
Le progrès est son but, le bien est sa boussole ;
Pilote, sur l'avant du navire il s'isole ;
Tout marin, pour dompter les vents et les courants,
Met tour à tour le cap sur des points différents,
Et, pour mieux arriver, dévie en apparence ;
Il fait de même ; aussi blâme et cris ; l'ignorance
Sait tout, dénonce tout ; il allait vers le nord,
Il avait tort ; il va vers le sud, il a tort ;
Si le temps devient noir, que de rage et de joie !
Cependant, sous le faix sa tête à la fin ploie,
L'âge vient, il couvait un mal profond et lent,
Il meurt. L'envie alors, ce démon vigilant,
Accourt, le reconnaît, lui ferme la paupière,
Prend soin de la clouer de ses mains dans la bière,
Se penche, écoute, épie en cette sombre nuit
S'il est vraiment bien mort, s'il ne fait pas de bruit,
S'il ne peut plus savoir de quel nom on le nomme,
Et, s'essuyant les yeux, dit : « C'était un grand homme ! »

Où vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit ?
Ces doux êtres pensifs, que la fièvre maigrit ?
Ces filles de huit ans qu'on voit cheminer seules ?
Ils s'en vont travailler quinze heures sous des meules ;
Ils vont, de l'aube au soir, faire éternellement
Dans la même prison le même mouvement.
Accroupis sous les dents d'une machine sombre,
Monstre hideux qui mâche on ne sait quoi dans l'ombre,
Innocents dans un bagne, anges dans un enfer,
Ils travaillent. Tout est d'airain, tout est de fer.
Jamais on ne s'arrête et jamais on ne joue.
Aussi quelle pâleur ! la cendre est sur leur joue.
Il fait à peine jour, ils sont déjà bien las.
Ils ne comprennent rien à leur destin, hélas !
Ils semblent dire à Dieu : « Petits comme nous sommes,
« Notre père, voyez ce que nous font les hommes ! »
Ô servitude infâme imposée à l'enfant !
Rachitisme ! travail dont le souffle étouffant
Défait ce qu'a fait Dieu ; qui tue, œuvre insensée,
La beauté sur les fronts, dans les cœurs la pensée,
Et qui ferait - c'est là son fruit le plus certain -
D'Apollon un bossu, de Voltaire un crétin !
Travail mauvais qui prend l'âge tendre en sa serre,
Qui produit la richesse en créant la misère,
Qui se sert d'un enfant ainsi que d'un outil !
Progrès dont on demande : « Où va-t-il ? Que veut-il ? »
Qui brise la jeunesse en fleur ! qui donne, en somme,
Une âme à la machine et la retire à l'homme !
Que ce travail, haï des mères, soit maudit !
Maudit comme le vice où l'on s'abâtardit,
Maudit comme l'opprobre et comme le blasphème !
Ô Dieu ! qu'il soit maudit au nom du travail même,
Au nom du vrai travail, saint, fécond, généreux,
Qui fait le peuple libre et qui rend l'homme heureux !

Le pesant chariot porte une énorme pierre ;
Le limonier, suant du mors à la croupière,
Tire, et le roulier fouette, et le pavé glissant
Monte, et le cheval triste à le poitrail en sang.
Il tire, traîne, geint, tire encore et s'arrête ;
Le fouet noir tourbillonne au-dessus de sa tête ;
C'est lundi ; l'homme hier buvait aux Porcherons
Un vin plein de fureur, de cris et de jurons ;
Oh ! quelle est donc la loi formidable qui livre
L'être à l'être, et la bête effarée à l'homme ivre !
L'animal éperdu ne peut plus faire un pas ;
Il sent l'ombre sur lui peser ; il ne sait pas,
Sous le bloc qui l'écrase et le fouet qui l'assomme,
Ce que lui veut la pierre et ce que lui veut l'homme.
Et le roulier n'est plus qu'un orage de coups
Tombant sur ce forçat qui traîne des licous,
Qui souffre et ne connaît ni repos ni dimanche.
Si la corde se casse, il frappe avec le pié ;
Et le cheval, tremblant, hagard, estropié,
Baisse son cou lugubre et sa tête égarée ;
On entend, sous les coups de la botte ferrée,
Sonner le ventre nu du pauvre être muet !
Il râle ; tout à l'heure encore il remuait ;
Mais il ne bouge plus, et sa force est finie ;
Et les coups furieux pleuvent ; son agonie
Tente un dernier effort ; son pied fait un écart,
Il tombe, et le voilà brisé sous le brancard ;
Et, dans l'ombre, pendant que son bourreau redouble,
Il regarde quelqu'un de sa prunelle trouble ;
Et l'on voit lentement s'éteindre, humble et terni,
Son œil plein des stupeurs sombres de l'infini,
Où luit vaguement l'âme effrayante des choses.
Hélas !

Cet avocat plaide toutes les causes ;
Il rit des généreux qui désirent savoir
Si blanc n'a pas raison, avant de dire noir ;
Calme, en sa conscience il met ce qu'il rencontre,
Ou le sac d'argent Pour, ou le sac d'argent Contre ;
Le sac pèse pour lui ce que la cause vaut.
Embusqué, plume au poing, dans un journal dévot,
Comme un bandit tuerait, cet écrivain diffame.
La foule hait cet homme et proscrit cette femme ;
Ils sont maudits. Quel est leur crime ? Ils ont aimé.
L'opinion rampante accable l'opprimé,
Et, chatte aux pieds des forts, pour le faible est tigresse.
De l'inventeur mourant le parasite engraisse.
Le monde parle, assure, affirme, jure, ment,
Triche, et rit d'escroquer la dupe Dévouement.
Le puissant resplendit et du destin se joue ;
Derrière lui, tandis qu'il marche et fait la roue,
Sa fiente épanouie engendre son flatteur.
Les nains sont dédaigneux de toute leur hauteur.
Ô hideux coins de rue où le chiffonnier morne
Va, tenant à la main sa lanterne de corne,
Vos tas d'ordures sont moins noirs que les vivants !
Qui, des vents ou des cœurs, est le plus sûr ? Les vents.
Cet homme ne croit rien et fait semblant de croire ;
Il a l'œil clair, le front gracieux, l'âme noire ;
Il se courbe ; il sera votre maître demain.

Tu casses des cailloux, vieillard, sur le chemin ;
Ton feutre humble et troué s'ouvre à l'air qui le mouille ;
Sous la pluie et le temps ton crâne nu se rouille ;
Le chaud est ton tyran, le froid est ton bourreau ;
Ton vieux corps grelottant tremble sous ton sarrau ;
Ta cahute, au niveau du fossé de la route,
Offre son toit de mousse à la chèvre qui broute ;
Tu gagnes dans ton jour juste assez de pain noir
Pour manger le matin et pour jeûner le soir ;
Et, fantôme suspect devant qui l'on recule,
Regardé de travers quand vient le crépuscule,
Pauvre au point d'alarmer les allants et venants,
Frère sombre et pensif des arbres frissonnants,
Tu laisses choir tes ans ainsi qu'eux leur feuillage ;
Autrefois, homme alors dans la force de l'âge,
Quand tu vis que l'Europe implacable venait,
Et menaçait Paris et notre aube qui naît,
Et, mer d'hommes, roulait vers la France effarée,
Et le Russe et le *** sur la terre sacrée
Se ruer, et le nord revomir Attila,
Tu te levas, tu pris ta fourche ; en ces temps-là,
Tu fus, devant les rois qui tenaient la campagne,
Un des grands paysans de la grande Champagne.
C'est bien. Mais, vois, là-bas, le long du vert sillon,
Une calèche arrive, et, comme un tourbillon,
Dans la poudre du soir qu'à ton front tu secoues,
Mêle l'éclair du fouet au tonnerre des roues.
Un homme y dort. Vieillard, chapeau bas ! Ce passant
Fit sa fortune à l'heure où tu versais ton sang ;
Il jouait à la baisse, et montait à mesure
Que notre chute était plus profonde et plus sûre ;
Il fallait un vautour à nos morts ; il le fut ;
Il fit, travailleur âpre et toujours à l'affût,
Suer à nos malheurs des châteaux et des rentes ;
Moscou remplit ses prés de meules odorantes ;
Pour lui, Leipsick payait des chiens et des valets,
Et la Bérésina charriait un palais ;
Pour lui, pour que cet homme ait des fleurs, des charmilles,
Des parcs dans Paris même ouvrant leurs larges grilles,
Des jardins où l'on voit le cygne errer sur l'eau,
Un million joyeux sortit de Waterloo ;
Si bien que du désastre il a fait sa victoire,
Et que, pour la manger, et la tordre, et la boire,
Ce Shaylock, avec le sabre de Blucher,
A coupé sur la France une livre de chair.
Or, de vous deux, c'est toi qu'on hait, lui qu'on vénère ;
Vieillard, tu n'es qu'un gueux, et ce millionnaire,
C'est l'honnête homme. Allons, debout, et chapeau bas !

Les carrefours sont pleins de chocs et de combats.
Les multitudes vont et viennent dans les rues.
Foules ! sillons creusés par ces mornes charrues :
Nuit, douleur, deuil ! champ triste où souvent a germé
Un épi qui fait peur à ceux qui l'ont semé !
Vie et mort ! onde où l'hydre à l'infini s'enlace !
Peuple océan jetant l'écume populace !
Là sont tous les chaos et toutes les grandeurs ;
Là, fauve, avec ses maux, ses horreurs, ses laideurs,
Ses larves, désespoirs, haines, désirs, souffrances,
Qu'on distingue à travers de vagues transparences,
Ses rudes appétits, redoutables aimants,
Ses prostitutions, ses avilissements,
Et la fatalité des mœurs imperdables,
La misère épaissit ses couches formidables.
Les malheureux sont là, dans le malheur reclus.
L'indigence, flux noir, l'ignorance, reflux,
Montent, marée affreuse, et parmi les décombres,
Roulent l'obscur filet des pénalités sombres.
Le besoin fuit le mal qui le tente et le suit,
Et l'homme cherche l'homme à tâtons ; il fait nuit ;
Les petits enfants nus tendent leurs mains funèbres ;
Le crime, antre béant, s'ouvre dans ces ténèbres ;
Le vent secoue et pousse, en ses froids tourbillons,
Les âmes en lambeaux dans les corps en haillons :
Pas de cœur où ne croisse une aveugle chimère.
Qui grince des dents ? L'homme. Et qui pleure ? La mère.
Qui sanglote ? La vierge aux yeux hagards et doux.
Qui dit : « J'ai froid ? » L'aïeule. Et qui dit : « J'ai faim ? » Tous !
Et le fond est horreur, et la surface est joie.
Au-dessus de la faim, le festin qui flamboie,
Et sur le pâle amas des cris et des douleurs,
Les chansons et le rire et les chapeaux de fleurs !
Ceux-là sont les heureux. Ils n'ont qu'une pensée :
A quel néant jeter la journée insensée ?
Chiens, voitures, chevaux ! cendre au reflet vermeil !
Poussière dont les grains semblent d'or au soleil !
Leur vie est aux plaisirs sans fin, sans but, sans trêve,
Et se passe à tâcher d'oublier dans un rêve
L'enfer au-dessous d'eux et le ciel au-dessus.
Quand on voile Lazare, on efface Jésus.
Ils ne regardent pas dans les ombres moroses.
Ils n'admettent que l'air tout parfumé de roses,
La volupté, l'orgueil, l'ivresse et le laquais
Ce spectre galonné du pauvre, à leurs banquets.
Les fleurs couvrent les seins et débordent des vases.
Le bal, tout frissonnant de souffles et d'extases,
Rayonne, étourdissant ce qui s'évanouit ;
Éden étrange fait de lumière et de nuit.
Les lustres aux plafonds laissent pendre leurs flammes,
Et semblent la racine ardente et pleine d'âmes
De quelque arbre céleste épanoui plus haut.
Noir paradis dansant sur l'immense cachot !
Ils savourent, ravis, l'éblouissement sombre
Des beautés, des splendeurs, des quadrilles sans nombre,
Des couples, des amours, des yeux bleus, des yeux noirs.
Les valses, visions, passent dans les miroirs.
Parfois, comme aux forêts la fuite des cavales,
Les galops effrénés courent ; par intervalles,
Le bal reprend haleine ; on s'interrompt, on fuit,
On erre, deux à deux, sous les arbres sans bruit ;
Puis, folle, et rappelant les ombres éloignées,
La musique, jetant les notes à poignées,
Revient, et les regards s'allument, et l'archet,
Bondissant, ressaisit la foule qui marchait.
Ô délire ! et d'encens et de bruit enivrées,
L'heure emporte en riant les rapides soirées,
Et les nuits et les jours, feuilles mortes des cieux.
D'autres, toute la nuit, roulent les dés joyeux,
Ou bien, âpre, et mêlant les cartes qu'ils caressent,
Où des spectres riants ou sanglants apparaissent,
Leur soif de l'or, penchée autour d'un tapis vert,
Jusqu'à ce qu'au volet le jour bâille entr'ouvert,
Poursuit le pharaon, le lansquenet ou l'hombre ;
Et, pendant qu'on gémit et qu'on frémit dans l'ombre,
Pendant que le
Quelqu'une des voix
Toujours angélique
- Il s'agit de moi, -
Vertement s'explique :

Ces mille questions
Qui se ramifient
N'amènent, au fond,
Qu'ivresse et folie ;

Reconnais ce tour
Si ***, si facile :
Ce n'est qu'onde, flore,
Et c'est ta famille !

Puis elle chante. Ô
Si ***, si facile,
Et visible à l'oeil nu...
- Je chante avec elle, -

Reconnais ce tour
Si ***, si facile,
Ce n'est qu'onde, flore,
Et c'est ta famille !... etc...

Et puis une voix
- Est-elle angélique ! -
Il s'agit de moi,
Vertement s'explique ;

Et chante à l'instant
En soeur des haleines :
D'un ton Allemand,
Mais ardente et pleine :

Le monde est vicieux ;
Si cela t'étonne !
Vis et laisse au feu
L'obscure infortune.

Ô ! joli château !
Que ta vie est claire !
De quel Age es-tu,
Nature princière
De notre grand frère ! etc...

Je chante aussi, moi :
Multiples soeurs ! voix
Pas du tout publiques !
Environnez-moi
De gloire pudique... etc...
Fable XVII, Livre V.


Polichinelle, à toi nous voilà revenus.
J'y reviens volontiers, c'est un ami d'enfance ;
Garçon d'esprit d'ailleurs, dans son extravagance,
Fertile en mots profonds, des badauds retenus ;
Garçon d'humeur toujours égale,
Non pas comme un quidam que nous avons connu,
Du matin jusqu'au soir plus mauvais que la gale ;
Mais toujours avenant, mais partout bien venu,
Trinquant avec qui le régale,
Et point fier, quoique parvenu.
Rien n'est indifférent dans un homme aussi rare.
Sachez donc, mes amis, quelle ingénuité
En son accoutrement, qui vous paraît bizarre,
Lui fait joindre aux galons, dont le riche se pare,
Les sabots de la pauvreté.
La fortune en tout temps ne lui fut pas prospère.
Il eut un bûcheron pour père ;
Bon homme, en qui l'amour paternel décroissait
Juste dans la mesure où son fils grandissait ;
Et qui disait parfois : « Je crois, Dieu me pardonne,
Que j'aimais mieux l'enfant quand il était petit.
Dieu fait bien ce qu'il fait ; mais d'où vient qu'il me donne
Un fils de si bon appétit ? »
Il est vrai que ce fils, encore à la lisière,
Si j'en crois un voisin qui l'a vu de ses yeux,
Coûtait plus à lui seul que sa famille entière,
Ne faisait rien qui vaille, et n'en mangeait que mieux.
Sur la nature enfin l'avarice l'emporte.
L'indigent est cruel comme l'ambitieux.
Lassé d'une charge aussi forte,
Le bon père, un beau jour, met son fils à la porte.
Voilà Polichinelle à la grâce de Dieu ;
Ce qui, dans le siècle où nous sommes,
Veut dire abandonné des hommes,
Et n'ayant pain, ni feu, ni lieu.
Il ne lui reste rien au monde,
Que deux chemises sans jabots,
Une panse un peu large, une échine un peu ronde,
Un vieil habit et des sabots.
Au surplus, ne sachant rien faire,
Sinon boire et manger, talent assez commun ;
Il apprit vingt métiers, mais il n'en sait pas un :
Comment sortira-t-il d'affaire ?
Il y pense en pleurant. Cet heureux don des pleurs,
Qui dans le cœur d'autrui fait passer nos douleurs,
Bien qu'au cerf rarement l'épreuve en soit utile,
A servi quelquefois l'homme et le crocodile.
Il a sauvé Sinon, je l'ai lu dans Virgile ;
Il sauva notre ami : non pas qu'en larmoyant
Il ait produit l'effet que je viens de décrire,
Au contraire ; on pleurait peut-être en le voyant,
Mais c'était à force de rire.
Cet effet singulier lui tint lieu de talent
Près du sieur Brioché, si fameux dans l'histoire.
« Voilà, dit ce grand homme, un paillasse excellent
Pour mon théâtre de la Foire.
En place de mon grimacier,
Dont le public paraît ne plus se soucier,
Si j'engageais ce bon apôtre ? »
Polichinelle accepte ; il faut gagner son pain.
Hélas ! il serait mort de faim
S'il avait pleuré comme un autre.
Il débute ; en dehors d'abord il se montra,
Et puis en dedans il entra.
Or vous savez, messieurs, mesdames,
Dans son métier s'il prospéra,
S'il fut charmant dans l'opéra,
S'il fut excellent dans les drames.
Auprès de Melpomène il perdit son procès ;
Mais il fit sa fortune en faisant la culbute.
Que d'acteurs contre sa chute
Voudraient changer leurs succès !
Dans son heureux caractère
Rentré pour n'en plus sortir,
Grâce à l'argent des sots qu'il a su divertir,
Il est capitaliste, il est propriétaire.
C'est presque un seigneur, vraiment !
Au reste, employant gaîment
Le bien que gaîment il gagne,
Il a maison de ville et maison de campagne,
Et, ce point-là surtout ne doit pas être omis,
Bonne table pour ses amis.
Aussi, comme il en a ! Bravant mode et coutume,
Chacun sait qu'à sa guise il s'est fait un costume
Où, sans être obligé de se déboutonner,
Il boit, mange et rit tout à l'aise.
Cet habit vaut le nôtre , il l'a fait galonner.
En jabot de dentelle il a changé sa fraise.
Mais quand tout devrait l'inviter
A quitter les sabots, il veut, ne vous déplaise,
Il veut ne les jamais quitter.
La raison qu'il en donne au reste est fort honnête.
« Souvent les parvenus se sont trop oubliés ;
Quand l'orgueil me porte à la tête,
Dit-il, je regarde à mes pieds.
Ils me rappellent tout ; mes parents, leur misère,
La détresse où j'étais quand Brioché me prit. »
« - Polichinelle, en tout le sort te soit prospère !
C'est le fait d'un bon cœur, comme d'un bon esprit
De ne point rougir de son père. »
Je l'ai dit quelque part, les penseurs d'autrefois,
Épiant l'inconnu dans ses plus noires lois,
Ont tous étudié la formation d'Ève.
L'un en fit son problème et l'autre en fit son rêve.
L'horreur sacrée étant dans tout, se pourrait-il
Que la femme, cet être obscur, puissant, subtil,
Fût double, et, tout ensemble ignorée et charnelle,
Fît hors d'elle l'aurore, ayant la nuit en elle ?
Le hibou serait-il caché dans l'alcyon ?
Qui dira le secret de la création ?
Les germes, les aimants, les instincts, les effluves !
Qui peut connaître à fond toutes ces sombres cuves ?
Est-ce que le Vésuve et l'Etna, les reflux
Des forces s'épuisant en efforts superflus,
Le vaste tremblement des feuilles remuées,
Les ouragans, les fleurs, les torrents, les nuées,
Ne peuvent pas finir par faire une vapeur.
Qui se condense en femme et dont le sage a peur ?

Tout fait Tout, et le même insondable cratère
Crée à Thulé la lave et la rose à Cythère.
Rien ne sort des volcans qui n'entre dans les coeurs.
Les oiseaux dans les bois ont des rires moqueurs
Et tristes, au-dessus de l'amoureux crédule.
N'est-ce pas le serpent qui vaguement ondule
Dans la souple beauté des vierges aux seins nus ?
Les grands sages étaient d'immenses ingénus ;
Ils ne connaissaient pas la forme de ce globe,
Mais, pâles, ils sentaient traîner sur eux la robe
De la sombre passante, Isis au voile noir ;
Tout devient le soupçon quand Rien est le savoir ;
Pour Lucrèce, le dieu, pour Job, le kéroubime
Mentaient ; on soupçonnait de trahison l'abîme ;
On croyait le chaos capable d'engendrer
La femme, pour nous plaire et pour nous enivrer,
Et pour faire monter jusqu'à nous sa fumée ;
La Sicile, la Grèce étrange, l'Idumée,
L'Iran, l'Egypte et l'Inde, étaient des lieux profonds ;
Qui sait ce que les vents, les brumes, les typhons
Peuvent apporter d'ombre à l'âme féminine ?
Les tragiques forêts de la chaîne Apennine,
La farouche fontaine épandue à longs flots
Sous l'Olympe, à travers les pins et les bouleaux,
L'antre de Béotie où dans l'ombre diffuse
On sent on ne sait quoi qui s'offre et se refuse,
Chypre et tous ses parfums, Delphe et tous ses rayons,
Le lys que nous cueillons, l'azur que nous voyons,
Tout cela, c'est auguste, et c'est peut-être infâme.
Tout, à leurs yeux, était sphinx, et quand une femme
Venait vers eux, parlant avec sa douce voix,
Qui sait ? peut-être Hermès et Dédale, les bois,
Les nuages, les eaux, l'effrayante Cybèle,
Toute l'énigme était mêlée à cette belle.

L'univers aboutit à ce monstre charmant.
La ménade est déjà presque un commencement
De la femme chimère, et d'antiques annales
Disent qu'avril était le temps des bacchanales,
Et que la liberté de ces fêtes s'accrut
Des fauves impudeurs de la nature en rut ;
La nature partout donne l'exemple énorme
De l'accouplement sombre où l'âme étreint la forme ;
La rose est une fille ; et ce qu'un papillon
Fait à la plante, est fait au grain par le sillon.
La végétation terrible est ignorée.
L'horreur des bois unit Flore avec Briarée,
Et marie une fleur avec l'arbre aux cent bras.
Toi qui sous le talon d'Apollon te cabras,
Ô cheval orageux du Pinde, tes narines
Frémissaient quand passaient les nymphes vipérines,
Et, sentant là de l'ombre hostile à ta clarté,
Tu t'enfuyais devant la sinistre Astarté.
Et Terpandre le vit, et Platon le raconte.
La femme est une gloire et peut être une honte
Pour l'ouvrier divin et suspect qui la fit.
A tout le bien, à tout le mal, elle suffit.

Haine, amour, fange, esprit, fièvre, elle participe
Du gouffre, et la matière aveugle est son principe.
Elle est le mois de mai fait chair, vivant, chantant.
Qu'est-ce que le printemps ? une orgie. A l'instant,
Où la femme naquit, est morte l'innocence.
Les vieux songeurs ont vu la fleur qui nous encense
Devenir femme à l'heure où l'astre éclôt au ciel,
Et, pour Orphée ainsi que pour Ézéchiel,
La nature n'étant qu'un vaste *****, l'ébauche
D'un être tentateur rit dans cette débauche ;
C'est la femme. Elle est spectre et masque, et notre sort
Est traversé par elle ; elle entre, flotte et sort.
Que nous veut-elle ? A-t-elle un but ? Par quelle issue
Cette apparition vaguement aperçue
S'est-elle dérobée ? Est-ce un souffle de nuit
Qui semble une âme errante et qui s'évanouit ?
Les sombres hommes sont une forêt, et l'ombre
Couvre leurs pas, leurs voix, leurs yeux, leur bruit, leur nombre ;
Le genre humain, mêlé sous les hauts firmaments,
Est plein de carrefours et d'entre-croisements,
Et la femme est assez blanche pour qu'on la voie
A travers cette morne et blême claire-voie.
Cette vision passe ; et l'on reste effaré.
Aux chênes de Dodone, aux cèdres de Membré,
L'hiérophante ému comme le patriarche
Regarde ce fantôme inquiétant qui marche.

Non, rien ne nous dira ce que peut être au fond
Cet être en qui Satan avec Dieu se confond :
Elle résume l'ombre énorme en son essence.
Les vieux payens croyaient à la toute puissance
De l'abîme, du lit sans fond, de l'élément ;
Ils épiaient la mer dans son enfantement ;
Pour eux, ce qui sortait de la tempête immense,
De toute l'onde en proie aux souffles en démence
Et du vaste flot vert à jamais tourmenté,
C'était le divin sphinx féminin, la Beauté,
Toute nue, infernale et céleste, insondable,
Ô gouffre ! et que peut-on voir de plus formidable,
Sous les cieux les plus noirs et les plus inconnus,
Que l'océan ayant pour écume Vénus !

Aucune aile ici-bas n'est pour longtemps posée.
Quand elle était petite, elle avait un oiseau ;
Elle le nourrissait de pain et de rosée,
Et veillait sur son nid comme sur un berceau.
Un soir il s'échappa. Que de plaintes amères !
Dans mes bras en pleurant je la vis accourir...
Jeunes filles, laissez, laissez, ô jeunes mères,
Les oiseaux s'envoler et les enfants mourir !

C'est une loi d'en haut qui veut que tout nous quitte.
Le secret du Seigneur, nous le saurons un jour.
Elle grandit. La vie, hélas ! marche si vite !
Elle eut un doux enfant, un bel ange, un amour.
Une nuit, triste sort des choses éphémères !
Cet enfant s'éteignit, sans pleurer, sans souffrir...
Jeunes filles, laissez, laissez, ô jeunes mères,
Les oiseaux s'envoler et les enfants mourir !

Le 22 juin 1842.
Here's a sigh to those who love me,
And a smile to those who hate ;
And whatever sky's above me,
Here's a heart for every fate.
BYRON.


Amis ! c'est donc Rouen, la ville aux vieilles rues,
Aux vieilles tours, débris des races disparues,
La ville aux cent clochers carillonnant dans l'air,
Le Rouen des châteaux, des hôtels, des bastilles,
Dont le front hérissé de flèches et d'aiguilles
Déchire incessamment les brumes de la mer ;

C'est Rouen qui vous a ! Rouen qui vous enlève !
Je ne m'en plaindrai pas. J'ai souvent fait ce rêve
D'aller voir Saint-Ouen à moitié démoli,
Et tout m'a retenu, la famille, l'étude,
Mille soins, et surtout la vague inquiétude
Qui fait que l'homme craint son désir accompli.

J'ai différé. La vie à différer se passe.
De projets en projets et d'espace en espace
Le fol esprit de l'homme en tout temps s'envola.
Un jour enfin, lassés du songe qui nous leurre,
Nous disons : " Il est temps. Exécutons! c'est l'heure. "
Alors nous retournons les yeux : la mort est là !

Ainsi de mes projets. Quand vous verrai-je, Espagne,
Et Venise et son golfe, et Rome et sa campagne,
Toi, Sicile que ronge un volcan souterrain,
Grèce qu'on connaît trop, Sardaigne qu'on ignore,
Cités de l'aquilon, du couchant, de l'aurore,
Pyramides du Nil, cathédrales du Rhin !

Qui sait ? Jamais peut-être. Et quand m'abriterai-je
Près de la mer, ou bien sous un mont blanc de neige,
Dans quelque vieux donjon, tout plein d'un vieux héros,
Où le soleil, dorant les tourelles du faîte,
N'enverra sur mon front que des rayons de fête
Teints de pourpre et d'azur au prisme des vitraux ?

Jamais non plus, sans doute. En attendant, vaine ombre,
Oublié dans l'espace et perdu dans le nombre,
Je vis. J'ai trois enfants en cercle à mon foyer ;
Et lorsque la sagesse entr'ouvre un peu ma porte,
Elle me crie : Ami ! sois content. Que t'importe
Cette tente d'un jour qu'il faut sitôt ployer !

Et puis, dans mon esprit, des choses que j'espère
Je me fais cent récits, comme à son fils un père.
Ce que je voudrais voir je le rêve si beau !
Je vois en moi des tours, des Romes, des Cordoues,
Qui jettent mille feux, muse, quand tu secoues
Sous leurs sombres piliers ton magique flambeau !

Ce sont des Alhambras, de hautes cathédrales,
Des Babels, dans la nue enfonçant leurs spirales,
De noirs Escurials, mystérieux séjour,
Des villes d'autrefois, peintes et dentelées,
Où chantent jour et nuit mille cloches ailées,
Joyeuses d'habiter dans des clochers à jour !

Et je rêve ! Et jamais villes impériales  
N'éclipseront ce rêve aux splendeurs idéales.
Gardons l'illusion ; elle fuit assez tôt.
Chaque homme, dans son coeur, crée à sa fantaisie
Tout un monde enchanté d'art et de poésie.
C'est notre Chanaan que nous voyons d'en haut.

Restons où nous voyons. Pourquoi vouloir descendre,
Et toucher ce qu'on rêve, et marcher dans la cendre ?
Que ferons-nous après ? où descendre ? où courir ?
Plus de but à chercher ! plus d'espoir qui séduise !
De la terre donnée à la terre promise
Nul retour ; et Moïse a bien fait de mourir !

Restons **** des objets dont la vue est charmée.
L'arc-en-ciel est vapeur, le nuage est fumée.
L'idéal tombe en poudre au toucher du réel.
L'âme en songes de gloire ou d'amour se consume.
Comme un enfant qui souffle en un flocon d'écume,
Chaque homme enfle une bulle où se reflète un ciel !

Frêle bulle d'azur, au roseau suspendue,
Qui tremble au moindre choc et vacille éperdue !
Voilà tous nos projets, nos plaisirs, notre bruit !
Folle création qu'un zéphyr inquiète !
Sphère aux mille couleurs, d'une goutte d'eau faite !
Monde qu'un souffle crée et qu'un souffle détruit !

Le saurons-nous jamais ? Qui percera nos voiles,
Noirs firmaments, semés de nuages d'étoiles ?
Mer, qui peut dans ton lit descendre et regarder ?
Où donc est la science ? Où donc est l'origine ?
Cherchez au fond des mers cette perle divine,
Et, l'océan connu, l'âme reste à sonder !

Que faire et que penser ? Nier, douter, ou croire ?
Carrefour ténébreux ! triple route! nuit noire !
Le plus sage s'assied sous l'arbre du chemin,
Disant tout bas : J'irai, Seigneur, où tu m'envoies.
Il espère, et, de ****, dans les trois sombres voies,
Il écoute, pensif, marcher le genre humain !

Mai 1830.
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Le Soleil, le foyer de tendresse et de vie,
Verse l'amour brûlant à la terre ravie,
Et, quand on est couché sur la vallée, on sent
Que la terre est nubile et déborde de sang ;
Que son immense sein, soulevé par une âme,
Est d'amour comme Dieu, de chair comme la femme,
Et qu'il renferme, gros de sève et de rayons,
Le grand fourmillement de tous les embryons !

Et tout croît, et tout monte !

- Ô Vénus, ô Déesse !
Je regrette les temps de l'antique jeunesse,
Des satyres lascifs, des faunes animaux,
Dieux qui mordaient d'amour l'écorce des rameaux
Et dans les nénufars baisaient la Nymphe blonde !
Je regrette les temps où la sève du monde,
L'eau du fleuve, le sang rose des arbres verts
Dans les veines de Pan mettaient un univers !
Où le sol palpitait, vert, sous ses pieds de chèvre ;
Où, baisant mollement le clair syrinx, sa lèvre
Modulait sous le ciel le grand hymne d'amour ;
Où, debout sur la plaine, il entendait autour
Répondre à son appel la Nature vivante ;
Où les arbres muets, berçant l'oiseau qui chante,
La terre berçant l'homme, et tout l'Océan bleu
Et tous les animaux aimaient, aimaient en Dieu !
Je regrette les temps de la grande Cybèle
Qu'on disait parcourir, gigantesquement belle,
Sur un grand char d'airain, les splendides cités ;
Son double sein versait dans les immensités
Le pur ruissellement de la vie infinie.
L'Homme suçait, heureux, sa mamelle bénie,
Comme un petit enfant, jouant sur ses genoux.
- Parce qu'il était fort, l'Homme était chaste et doux.

Misère ! Maintenant il dit : Je sais les choses,
Et va, les yeux fermés et les oreilles closes.
Et pourtant, plus de dieux ! plus de dieux ! l'Homme est Roi,
L'Homme est Dieu ! Mais l'Amour, voilà la grande Foi !
Oh ! si l'homme puisait encore à ta mamelle,
Grande mère des dieux et des hommes, Cybèle ;
S'il n'avait pas laissé l'immortelle Astarté
Qui jadis, émergeant dans l'immense clarté
Des flots bleus, fleur de chair que la vague parfume,
Montra son nombril rose où vint neiger l'écume,
Et fit chanter, Déesse aux grands yeux noirs vainqueurs,
Le rossignol aux bois et l'amour dans les coeurs !

II

Je crois en toi ! je crois en toi ! Divine mère,
Aphrodite marine ! - Oh ! la route est amère
Depuis que l'autre Dieu nous attelle à sa croix ;
Chair, Marbre, Fleur, Vénus, c'est en toi que je crois !
- Oui, l'Homme est triste et laid, triste sous le ciel vaste.
Il a des vêtements, parce qu'il n'est plus chaste,
Parce qu'il a sali son fier buste de dieu,
Et qu'il a rabougri, comme une idole au feu,
Son cors Olympien aux servitudes sales !
Oui, même après la mort, dans les squelettes pâles
Il veut vivre, insultant la première beauté !
- Et l'Idole où tu mis tant de virginité,
Où tu divinisas notre argile, la Femme,
Afin que l'Homme pût éclairer sa pauvre âme
Et monter lentement, dans un immense amour,
De la prison terrestre à la beauté du jour,
La Femme ne sait plus même être courtisane !
- C'est une bonne farce ! et le monde ricane
Au nom doux et sacré de la grande Vénus !

III

Si les temps revenaient, les temps qui sont venus !
- Car l'Homme a fini ! l'Homme a joué tous les rôles !
Au grand jour, fatigué de briser des idoles,
Il ressuscitera, libre de tous ses Dieux,
Et, comme il est du ciel, il scrutera les cieux !
L'Idéal, la pensée invincible, éternelle,
Tout ; le dieu qui vit, sous son argile charnelle,
Montera, montera, brûlera sous son front !
Et quand tu le verras sonder tout l'horizon,
Contempteur des vieux jougs, libre de toute crainte,
Tu viendras lui donner la Rédemption sainte !
- Splendide, radieuse, au sein des grandes mers
Tu surgiras, jetant sur le vaste Univers
L'Amour infini dans un infini sourire !
Le Monde vibrera comme une immense lyre
Dans le frémissement d'un immense baiser !

- Le Monde a soif d'amour : tu viendras l'apaiser.

Ô ! L'Homme a relevé sa tête libre et fière !
Et le rayon soudain de la beauté première
Fait palpiter le dieu dans l'autel de la chair !
Heureux du bien présent, pâle du mal souffert,
L'Homme veut tout sonder, - et savoir ! La Pensée,
La cavale longtemps, si longtemps oppressée
S'élance de son front ! Elle saura Pourquoi !...
Qu'elle bondisse libre, et l'Homme aura la Foi !
- Pourquoi l'azur muet et l'espace insondable ?
Pourquoi les astres d'or fourmillant comme un sable ?
Si l'on montait toujours, que verrait-on là-haut ?
Un Pasteur mène-t-il cet immense troupeau
De mondes cheminant dans l'horreur de l'espace ?
Et tous ces mondes-là, que l'éther vaste embrasse,
Vibrent-ils aux accents d'une éternelle voix ?
- Et l'Homme, peut-il voir ? peut-il dire : Je crois ?
La voix de la pensée est-elle plus qu'un rêve ?
Si l'homme naît si tôt, si la vie est si brève,
D'où vient-il ? Sombre-t-il dans l'Océan profond
Des Germes, des Foetus, des Embryons, au fond
De l'immense Creuset d'où la Mère-Nature
Le ressuscitera, vivante créature,
Pour aimer dans la rose, et croître dans les blés ?...

Nous ne pouvons savoir ! - Nous sommes accablés
D'un manteau d'ignorance et d'étroites chimères !
Singes d'hommes tombés de la vulve des mères,
Notre pâle raison nous cache l'infini !
Nous voulons regarder : - le Doute nous punit !
Le doute, morne oiseau, nous frappe de son aile...
- Et l'horizon s'enfuit d'une fuite éternelle !...

Le grand ciel est ouvert ! les mystères sont morts
Devant l'Homme, debout, qui croise ses bras forts
Dans l'immense splendeur de la riche nature !
Il chante... et le bois chante, et le fleuve murmure
Un chant plein de bonheur qui monte vers le jour !...
- C'est la Rédemption ! c'est l'amour ! c'est l'amour !...

IV

Ô splendeur de la chair ! ô splendeur idéale !
Ô renouveau d'amour, aurore triomphale
Où, courbant à leurs pieds les Dieux et les Héros,
Kallipyge la blanche et le petit Éros
Effleureront, couverts de la neige des roses,
Les femmes et les fleurs sous leurs beaux pieds écloses !
- Ô grande Ariadné, qui jettes tes sanglots
Sur la rive, en voyant fuir là-bas sur les flots,
Blanche sous le soleil, la voile de Thésée,
Ô douce vierge enfant qu'une nuit a brisée,
Tais-toi ! Sur son char d'or brodé de noirs raisins,
Lysios, promené dans les champs Phrygiens  
Par les tigres lascifs et les panthères rousses,
Le long des fleuves bleus rougit les sombres mousses.
- Zeus, Taureau, sur son cou berce comme une enfant
Le corps nu d'Europé, qui jette son bras blanc
Au cou nerveux du Dieu frissonnant dans la vague.
Il tourne lentement vers elle son oeil vague ;
Elle, laisse traîner sa pâle joue en fleur,
Au front de Zeus ; ses yeux sont fermés ; elle meurt
Dans un divin baiser, et le flot qui murmure
De son écume d'or fleurit sa chevelure.
- Entre le laurier-rose et le lotus jaseur
Glisse amoureusement le grand Cygne rêveur
Embrassant la Léda des blancheurs de son aile ;
- Et tandis que Cypris passe, étrangement belle,
Et, cambrant les rondeurs splendides de ses reins,
Étale fièrement l'or de ses larges seins
Et son ventre neigeux brodé de mousse noire,
- Héraclès, le Dompteur, qui, comme d'une gloire,
Fort, ceint son vaste corps de la peau du lion,
S'avance, front terrible et doux, à l'horizon !

Par la lune d'été vaguement éclairée,
Debout, nue, et rêvant dans sa pâleur dorée
Que tache le flot lourd de ses longs cheveux bleus,
Dans la clairière sombre où la mousse s'étoile,
La Dryade regarde au ciel silencieux...
- La blanche Séléné laisse flotter son voile,
Craintive, sur les pieds du bel Endymion,
Et lui jette un baiser dans un pâle rayon...
- La Source pleure au **** dans une longue extase...
C'est la Nymphe qui rêve, un coude sur son vase,
Au beau jeune homme blanc que son onde a pressé.
- Une brise d'amour dans la nuit a passé,
Et, dans les bois sacrés, dans l'horreur des grands arbres,
Majestueusement debout, les sombres Marbres,
Les Dieux, au front desquels le Bouvreuil fait son nid,
- Les Dieux écoutent l'Homme et le Monde infini !

Le 29 avril 1870.
Œil pour œil ! Dent pour dent ! Tête pour tête ! A mort !
Justice ! L'échafaud vaut mieux que le remord.
Talion ! talion !

- Silence aux cris sauvages !
Non ! assez de malheur, de meurtre et de ravages !
Assez d'égorgements ! assez de deuil ! assez
De fantômes sans tête et d'affreux trépassés !
Assez de visions funèbres dans la brume !
Assez de doigts hideux, montrant le sang qui fume,
Noirs, et comptant les trous des linceuls dans la nuit !
Pas de suppliciés dont le cri nous poursuit !
Pas de spectres jetant leur ombre sur nos têtes !
Nous sommes ruisselants de toutes les tempêtes ;
Il n'est plus qu'un devoir et qu'une vérité,
C'est, après tant d'angoisse et de calamité.
Homme, d'ouvrir son cœur, oiseau, d'ouvrir son aile
Vers ce ciel que remplit la grande âme éternelle !
Le peuple, que les rois broyaient sous leurs talons.
Est la pierre promise au temple, et nous voulons
Que la pierre bâtisse et non qu'elle lapide !
Pas de sang ! pas de mort ! C'est un reflux stupide
Que la férocité sur la férocité.
Un pilier d'échafaud soutient mal la cité.
Tu veux faire mourir ! Moi je veux faire naître !
Je mure le sépulcre et j'ouvre la fenêtre.
Dieu n'a pas fait le sang, à l'amour réservé.
Pour qu'on le donne à boire aux fentes du pavé.
S'agit-il d'égorger ? Peuples, il s'agit d'être.
Quoi ! tu veux te venger, passant ? de qui ? du maître ?
Si tu ne vaux pas mieux, que viens-tu faire ici ?
Tout mystère où l'on jette un meurtre est obscurci ;
L'énigme ensanglantée est plus âpre à résoudre ;
L'ombre s'ouvre terrible après le coup de foudre ;
Tuer n'est pas créer, et l'on se tromperait
Si l'on croyait que tout finit au couperet ;
C'est là qu'inattendue, impénétrable, immense.
Pleine d'éclairs subits, la question commence ;
C'est du bien et du mal ; mais le mal est plus grand.
Satan rit à travers l'échafaud transparent.
Le bourreau, quel qu'il soit, a le pied dans l'abîme ;
Quoi qu'elle fasse, hélas ! la hache fait un crime ;
Une lugubre nuit fume sur ce tranchant ;
Quand il vient de tuer, comme, en s'en approchant.
On frémit de le voir tout ruisselant, et comme
On sent qu'il a frappé dans l'ombre plus qu'un homme
Sitôt qu'a disparu le coupable immolé.
Hors du panier tragique où la tête a roulé.
Le principe innocent, divin, inviolable.
Avec son regard d'astre à l'aurore semblable.
Se dresse, spectre auguste, un cercle rouge au cou.
L'homme est impitoyable, hélas, sans savoir où.
Comment ne voit-il pas qu'il vit dans un problème.
Que l'homme est solidaire avec ses monstres même.
Et qu'il ne peut tuer autre chose qu'Abel !
Lorsqu'une tête tombe, on sent trembler le ciel.
Décapitez Néron, cette hyène insensée,
La vie universelle est dans Néron blessée ;
Faites monter Tibère à l'échafaud demain,
Tibère saignera le sang du genre humain.
Nous sommes tous mêlés à ce que fait la Grève ;
Quand un homme, en public, nous voyant comme un rêve.
Meurt, implorant en vain nos lâches abandons.
Ce meurtre est notre meurtre et nous en répondons ;
C'est avec un morceau de notre insouciance.
C'est avec un haillon de notre conscience.
Avec notre âme à tous, que l'exécuteur las
Essuie en s'en allant son hideux coutelas.
L'homme peut oublier ; les choses importunes
S'effacent dans l'éclat ondoyant des fortunes ;
Le passé, l'avenir, se voilent par moments ;
Les festins, les flambeaux, les feux, les diamants.
L'illumination triomphale des fêtes.
Peuvent éclipser l'ombre énorme des prophètes ;
Autour des grands bassins, au bord des claires eaux.
Les enfants radieux peuvent aux cris d'oiseaux
Mêler le bruit confus de leurs lèvres fleuries.
Et, dans le Luxembourg ou dans les Tuileries,
Devant les vieux héros de marbre aux poings crispés.
Danser, rire et chanter : les lauriers sont coupés !
La Courtille au front bas peut noyer dans les verres
Le souvenir des jours illustres et sévères ;
La valse peut ravir, éblouir, enivrer
Des femmes de satin, heureuses de livrer
Le plus de nudité possible aux yeux de flamme ;
L'***** peut murmurer son chaste épithalame ;
Le bal masqué, lascif, paré, bruyant, charmant,
Peut allumer sa torche et bondir follement.
Goule au linceul joyeux, larve en fleurs, spectre rose ;
Mais, quel que soit le temps, quelle que soit la cause.
C'est toujours une nuit funeste au peuple entier
Que celle où, conduisant un prêtre, un guichetier
Fouille au trousseau de clefs qui pend à sa ceinture
Pour aller, sur le lit de fièvre et de torture,
Réveiller avant l'heure un pauvre homme endormi,
Tandis que, sur la Grève, entrevus à demi.
Sous les coups de marteau qui font fuir la chouette.
D'effrayants madriers dressent leur silhouette.
Rougis par la lanterne horrible du bourreau.
Le vieux glaive du juge a la nuit pour fourreau.
Le tribunal ne peut de ce fourreau livide
Tirer que la douleur, l'anxiété, le vide,
Le néant, le remords, l'ignorance et l'effroi.

Qu'il frappe au nom du peuple ou venge au nom du roi.
Justice ! dites-vous. - Qu'appelez-vous justice ?
Qu'on s'entr'aide, qu'on soit des frères, qu'on vêtisse
Ceux qui sont nus, qu'on donne à tous le pain sacré.
Qu'on brise l'affreux bagne où le pauvre est muré,
Mais qu'on ne touche point à la balance sombre !
Le sépulcre où, pensif, l'homme naufrage et sombre.
Au delà d'aujourd'hui, de demain, des saisons.
Des jours, du flamboiement de nos vains horizons,
Et des chimères, proie et fruit de notre étude,
A son ciel plein d'aurore et fait de certitude ;
La justice en est l'astre immuable et lointain.
Notre justice à nous, comme notre destin.
Est tâtonnement, trouble, erreur, nuage, doute ;
Martyr, je m'applaudis ; juge, je me redoute ;
L'infaillible, est-ce moi, dis ? est-ce toi ? réponds.
Vous criez : - Nos douleurs sont notre droit. Frappons.
Nous sommes trop en butte au sort qui nous accable.
Nous sommes trop frappés d'un mal inexplicable.
Nous avons trop de deuils, trop de jougs, trop d'hivers.
Nous sommes trop souffrants, dans nos destins divers.
Tous, les grands, les petits, les obscurs, les célèbres.
Pour ne pas condamner quelqu'un dans nos ténèbres. -
Puisque vous ne voyez rien de clair dans le sort.
Ne vous hâtez pas trop d'en conclure la mort.
Fût-ce la mort d'un roi, d'un maître et d'un despote ;
Dans la brume insondable où tout saigne et sanglote,
Ne vous hâtez pas trop de prendre vos malheurs.
Vos jours sans feu, vos jours sans pain, vos cris, vos pleurs.
Et ce deuil qui sur vous et votre race tombe.
Pour les faire servir à construire une tombe.
Quel pas aurez-vous fait pour avoir ajouté
A votre obscur destin, ombre et fatalité.
Cette autre obscurité que vous nommez justice ?
Faire de l'échafaud, menaçante bâtisse.
Un autel à bénir le progrès nouveau-né,
Ô vivants, c'est démence ; et qu'aurez-vous gagné
Quand, d'un culte de mort lamentables ministres.
Vous aurez marié ces infirmes sinistres,
La justice boiteuse et l'aveugle anankè ?
Le glaive toujours cherche un but toujours manqué ;
La palme, cette flamme aux fleurs étincelantes,
Faite d'azur, frémit devant des mains sanglantes.
Et recule et s'enfuit, sensitive des cieux !
La colère assouvie a le front soucieux.
Quant à moi, tu le sais, nuit calme où je respire,
J'aurais là, sous mes pieds, mon ennemi, le pire,
Caïn juge, Judas pontife, Satan roi.
Que j'ouvrirais ma porte et dirais : Sauve-toi !

Non, l'élargissement des mornes cimetières
N'est pas le but. Marchons, reculons les frontières
De la vie ! Ô mon siècle, allons toujours plus haut !
Grandissons !

Qu'est-ce donc qu'il nous veut, l'échafaud.
Cette charpente spectre accoutumée aux foules.
Cet îlot noir qu'assiège et que bat de ses houles
La multitude aux flots inquiets et mouvants.
Ce sépulcre qui vient attaquer les vivants,
Et qui, sur les palais ainsi que sur les bouges.
Surgit, levant un glaive au bout de ses bras rouges ?
Mystère qui se livre aux carrefours, morceau
De la tombe qui vient tremper dans le ruisseau,
Bravant le jour, le bruit, les cris ; bière effrontée
Qui, féroce, cynique et lâche, semble athée !
Ô spectacle exécré dans les plus repoussants.
Une mort qui se fait coudoyer aux passants,
Qui permet qu'un crieur hors de l'ombre la tire !
Une mort qui n'a pas l'épouvante du rire.
Dévoilant l'escalier qui dans la nuit descend,
Disant : voyez ! marchant dans la rue, et laissant
La boue éclabousser son linceul semé d'astres ;
Qui, sur un tréteau, montre entre deux vils pilastres
Son horreur, son front noir, son œil de basilic ;
Qui consent à venir travailler en public,
Et qui, prostituée, accepte, sur les places,
La familiarité des fauves populaces !

Ô vivant du tombeau, vivant de l'infini,
Jéhovah ! Dieu, clarté, rayon jamais terni.
Pour faire de la mort, de la nuit, des ténèbres,
Ils ont mis ton triangle entre deux pieux funèbres ;
Et leur foule, qui voit resplendir ta lueur.
Ne sent pas à son front poindre une âpre sueur.
Et l'horreur n'étreint pas ce noir peuple unanime.
Quand ils font, pour punir ce qu'ils ont nommé crime.
Au nom de ce qu'ils ont appelé vérité.
Sur la vie, o terreur, tomber l'éternité !
The road led straight to the temple.
Notre Dame, though not Gothic at all.
The huge doors were closed. I chose one on the side,
Not to the main building-to its left wing,
The one in green copper, worn into gaps below.
I pushed. Then it was revealed:
An astonishing large hall, in warm light.
Great statues of sitting women-goddesses,
In draped robes, marked it with a rhythm.
Color embraced me like the interior of a purple-brown flower
Of unheard-of size. I walked, liberated
From worries, pangs of conscience, and fears.
I knew I was there as one day I would be.
I woke up serene, thinking that this dream
Answers my question, often asked:
How is it when one passes the last threshold?
I.

Retournons à l'école, ô mon vieux Juvénal.
Homme d'ivoire et d'or, descends du tribunal
Où depuis deux mille ans tes vers superbes tonnent.
Il paraît, vois-tu bien, ces choses nous étonnent,
Mais c'est la vérité selon monsieur Riancey,
Que lorsqu'un peu de temps sur le sang a passé,
Après un an ou deux, c'est une découverte,
Quoi qu'en disent les morts avec leur bouche verte,
Le meurtre n'est plus meurtre et le vol n'est plus vol.
Monsieur Veuillot, qui tient d'Ignace et d'Auriol,
Nous l'affirme, quand l'heure a tourné sur l'horloge,
De notre entendement ceci fait peu l'éloge,
Pourvu qu'à Notre-Dame on brûle de l'encens
Et que l'abonné vienne aux journaux bien pensants,
Il paraît que, sortant de son hideux suaire,
Joyeux, en panthéon changeant son ossuaire,
Dans l'opération par monsieur Fould aidé,
Par les juges lavé, par les filles fardé,
Ô miracle ! entouré de croyants et d'apôtres,
En dépit des rêveurs, en dépit de nous autres
Noirs poètes bourrus qui n'y comprenons rien,
Le mal prend tout à coup la figure du bien.

II.

Il est l'appui de l'ordre ; il est bon catholique
Il signe hardiment - prospérité publique.
La trahison s'habille en général français
L'archevêque ébloui bénit le dieu Succès
C'était crime jeudi, mais c'est haut fait dimanche.
Du pourpoint Probité l'on retourne la manche.
Tout est dit. La vertu tombe dans l'arriéré.
L'honneur est un vieux fou dans sa cave muré.
Ô grand penseur de bronze, en nos dures cervelles
Faisons entrer un peu ces morales nouvelles,
Lorsque sur la Grand'Combe ou sur le blanc de zinc
On a revendu vingt ce qu'on a payé cinq,
Sache qu'un guet-apens par où nous triomphâmes
Est juste, honnête et bon. Tout au rebours des femmes,
Sache qu'en vieillissant le crime devient beau.
Il plane cygne après s'être envolé corbeau.
Oui, tout cadavre utile exhale une odeur d'ambre.
Que vient-on nous parler d'un crime de décembre
Quand nous sommes en juin ! l'herbe a poussé dessus.
Toute la question, la voici : fils, tissus,
Cotons et sucres bruts prospèrent ; le temps passe.
Le parjure difforme et la trahison basse
En avançant en âge ont la propriété
De perdre leur bassesse et leur difformité
Et l'assassinat louche et tout souillé de lange
Change son front de spectre en un visage d'ange.

III.

Et comme en même temps, dans ce travail normal,
La vertu devient faute et le bien devient mal,
Apprends que, quand Saturne a soufflé sur leur rôle,
Néron est un sauveur et Spartacus un drôle.
La raison obstinée a beau faire du bruit ;
La justice, ombre pâle, a beau, dans notre nuit,
Murmurer comme un souffle à toutes les oreilles ;
On laisse dans leur coin bougonner ces deux vieilles.
Narcisse gazetier lapide Scévola.
Accoutumons nos yeux à ces lumières-là
Qui font qu'on aperçoit tout sous un nouvel angle,
Et qu'on voit Malesherbe en regardant Delangle.
Sachons dire : Lebœuf est grand, Persil est beau
Et laissons la pudeur au fond du lavabo.

IV.

Le bon, le sûr, le vrai, c'est l'or dans notre caisse.
L'homme est extravagant qui, lorsque tout s'affaisse,
Proteste seul debout dans une nation,
Et porte à bras tendu son indignation.
Que diable ! il faut pourtant vivre de l'air des rues,
Et ne pas s'entêter aux choses disparues.
Quoi ! tout meurt ici-bas, l'aigle comme le ver,
Le charançon périt sous la neige l'hiver,
Quoi ! le Pont-Neuf fléchit lorsque les eaux sont grosses,
Quoi ! mon coude est troué, quoi ! je perce mes chausses,
Quoi ! mon feutre était neuf et s'est usé depuis,
Et la vérité, maître, aurait, dans son vieux puits,
Cette prétention rare d'être éternelle !
De ne pas se mouiller quand il pleut, d'être belle
À jamais, d'être reine en n'ayant pas le sou,
Et de ne pas mourir quand on lui tord le cou !
Allons donc ! Citoyens, c'est au fait qu'il faut croire.

V.

Sur ce, les charlatans prêchent leur auditoire
D'idiots, de mouchards, de grecs, de philistins,
Et de gens pleins d'esprit détroussant les crétins
La Bourse rit ; la hausse offre aux badauds ses prismes ;
La douce hypocrisie éclate en aphorismes ;
C'est bien, nous gagnons gros et nous sommes contents
Et ce sont, Juvénal, les maximes du temps.
Quelque sous-diacre, éclos dans je ne sais quel bouge,
Trouva ces vérités en balayant Montrouge,
Si bien qu'aujourd'hui fiers et rois des temps nouveaux,
Messieurs les aigrefins et messieurs les dévots
Déclarent, s'éclairant aux lueurs de leur cierge,
Jeanne d'Arc courtisane et Messaline vierge.

Voilà ce que curés, évêques, talapoins,
Au nom du Dieu vivant, démontrent en trois points,
Et ce que le filou qui fouille dans ma poche
Prouve par A plus B, par Argout plus Baroche.

VI.

Maître ! voilà-t-il pas de quoi nous indigner ?
À quoi bon s'exclamer ? à quoi bon trépigner ?
Nous avons l'habitude, en songeurs que nous sommes,
De contempler les nains bien moins que les grands hommes
Même toi satirique, et moi tribun amer,
Nous regardons en haut, le bourgeois dit : en l'air ;
C'est notre infirmité. Nous fuyons la rencontre
Des sots et des méchants. Quand le Dombidau montre
Son crâne et que le Fould avance son menton,
J'aime mieux Jacques Coeur, tu préfères Caton
La gloire des héros, des sages que Dieu crée,
Est notre vision éternelle et sacrée ;
Eblouis, l'œil noyé des clartés de l'azur,
Nous passons notre vie à voir dans l'éther pur
Resplendir les géants, penseurs ou capitaines
Nous regardons, au bruit des fanfares lointaines,
Au-dessus de ce monde où l'ombre règne encor,
Mêlant dans les rayons leurs vagues poitrails d'or,
Une foule de chars voler dans les nuées.
Aussi l'essaim des gueux et des prostituées,
Quand il se heurte à nous, blesse nos yeux pensifs.
Soit. Mais réfléchissons. Soyons moins exclusifs.
Je hais les cœurs abjects, et toi, tu t'en défies ;
Mais laissons-les en paix dans leurs philosophies.

VII.

Et puis, même en dehors de tout ceci, vraiment,
Peut-on blâmer l'instinct et le tempérament ?
Ne doit-on pas se faire aux natures des êtres ?
La fange a ses amants et l'ordure a ses prêtres ;
De la cité bourbier le vice est citoyen ;
Où l'un se trouve mal, l'autre se trouve bien ;
J'en atteste Minos et j'en fais juge Eaque,
Le paradis du porc, n'est-ce pas le cloaque ?
Voyons, en quoi, réponds, génie âpre et subtil,
Cela nous touche-t-il et nous regarde-t-il,
Quand l'homme du serment dans le meurtre patauge,
Quand monsieur Beauharnais fait du pouvoir une auge,
Si quelque évêque arrive et chante alleluia,
Si Saint-Arnaud bénit la main qui le paya,
Si tel ou tel bourgeois le célèbre et le loue,
S'il est des estomacs qui digèrent la boue ?
Quoi ! quand la France tremble au vent des trahisons,
Stupéfaits et naïfs, nous nous ébahissons
Si Parieu vient manger des glands sous ce grand chêne !
Nous trouvons surprenant que l'eau coule à la Seine,
Nous trouvons merveilleux que Troplong soit Scapin,
Nous trouvons inouï que Dupin soit Dupin !

VIII.

Un vieux penchant humain mène à la turpitude.
L'opprobre est un logis, un centre, une habitude,
Un toit, un oreiller, un lit tiède et charmant,
Un bon manteau bien ample où l'on est chaudement.
L'opprobre est le milieu respirable aux immondes.
Quoi ! nous nous étonnons d'ouïr dans les deux mondes
Les dupes faisant chœur avec les chenapans,
Les gredins, les niais vanter ce guet-apens !
Mais ce sont là les lois de la mère nature.
C'est de l'antique instinct l'éternelle aventure.
Par le point qui séduit ses appétits flattés
Chaque bête se plaît aux monstruosités.
Quoi ! ce crime est hideux ! quoi ! ce crime est stupide !
N'est-il plus d'animaux pour l'admirer ? Le vide
S'est-il fait ? N'est-il plus d'êtres vils et rampants ?
N'est-il plus de chacals ? n'est-il plus de serpents ?
Quoi ! les baudets ont-ils pris tout à coup des ailes,
Et se sont-ils enfuis aux voûtes éternelles ?
De la création l'âne a-t-il disparu ?
Quand Cyrus, Annibal, César, montaient à cru
Cet effrayant cheval qu'on appelle la gloire,
Quand, ailés, effarés de joie et de victoire,
Ils passaient flamboyants au fond des cieux vermeils,
Les aigles leur craient : vous êtes nos pareils !
Les aigles leur criaient : vous portez le tonnerre !
Aujourd'hui les hiboux acclament Lacenaire.
Eh bien ! je trouve bon que cela soit ainsi.
J'applaudis les hiboux et je leur dis : merci.
La sottise se mêle à ce concert sinistre,
Tant mieux. Dans sa gazette, ô Juvénal, tel cuistre
Déclare, avec messieurs d'Arras et de Beauvais,
Mandrin très bon, et dit l'honnête homme mauvais,
Foule aux pieds les héros et vante les infâmes,
C'est tout simple ; et, vraiment, nous serions bonnes âmes
De nous émerveiller lorsque nous entendons
Les Veuillots aux lauriers préférer les chardons !

IX.

Donc laissons aboyer la conscience humaine
Comme un chien qui s'agite et qui tire sa chaîne.
Guerre aux justes proscrits ! gloire aux coquins fêtés !
Et faisons bonne mine à ces réalités.
Acceptons cet empire unique et véritable.
Saluons sans broncher Trestaillon connétable,
Mingrat grand aumônier, Bosco grand électeur ;
Et ne nous fâchons pas s'il advient qu'un rhéteur,
Un homme du sénat, un homme du conclave,
Un eunuque, un cagot, un sophiste, un esclave,
Esprit sauteur prenant la phrase pour tremplin,
Après avoir chanté César de grandeur plein,
Et ses perfections et ses mansuétudes,
Insulte les bannis jetés aux solitudes,
Ces brigands qu'a vaincus Tibère Amphitryon.
Vois-tu, c'est un talent de plus dans l'histrion ;
C'est de l'art de flatter le plus exquis peut-être ;
On chatouille moins bien Henri huit, le bon maître,
En louant Henri huit qu'en déchirant Morus.
Les dictateurs d'esprit, bourrés d'éloges crus,
Sont friands, dans leur gloire et dans leurs arrogances,
De ces raffinements et de ces élégances.
Poète, c'est ainsi que les despotes sont.
Le pouvoir, les honneurs sont plus doux quand ils ont
Sur l'échafaud du juste une fenêtre ouverte.
Les exilés, pleurant près de la mer déserte,
Les sages torturés, les martyrs expirants
Sont l'assaisonnement du bonheur des tyrans.
Juvénal, Juvénal, mon vieux lion classique,
Notre vin de Champagne et ton vin de Massique,
Les festins, les palais, et le luxe effréné,
L'adhésion du prêtre et l'amour de Phryné,
Les triomphes, l'orgueil, les respects, les caresses,
Toutes les voluptés et toutes les ivresses
Dont s'abreuvait Séjan, dont se gorgeait Rufin,
Sont meilleures à boire, ont un goût bien plus fin,
Si l'on n'est pas un sot à cervelle exiguë,
Dans la coupe où Socrate hier but la ciguë !

Jersey, le 5 février 1853.
Il est certains esprits d'un naturel hargneux
Qui toujours ont besoin de guerre ;
Ils aiment à piquer, se plaisent à déplaire,
Et montrent pour cela des talents merveilleux.
Quant à moi, je les fuis sans cesse,
Eussent-ils tous les dons et tous les attributs :
J'y veux de l'indulgence ou de la politesse ;
C'est la parure des vertus.
Un hérisson, qu'une tracasserie
Avait forcé de quitter sa patrie,
Dans un grand terrier de lapins
Vint porter sa misanthropie.
Il leur conta ses longs chagrins,
Contre ses ennemis exhala bien sa bile,
Et finit par prier les hôtes souterrains
De vouloir lui donner asile.
Volontiers, lui dit le doyen :
Nous sommes bonnes gens, nous vivons comme frères,
Et nous ne connaissons ni le tien ni le mien ;
Tout est commun ici : nos plus grandes affaires
Sont d'aller, dès l'aube du jour,
Brouter le serpolet, jouer sur l'herbe tendre :
Chacun, pendant ce temps, sentinelle à son tour,
Veille sur le chasseur qui voudrait nous surprendre ;
S'il l'aperçoit, il frappe, et nous voilà blottis.
Avec nos femmes, nos petits,
Dans la gaîté, dans la concorde,
Nous passons les instants que le ciel nous accorde.
Souvent ils sont prompts à finir ;
Les panneaux, les furets, abrègent notre vie,
Raison de plus pour en jouir.
Du moins par l'amitié, l'amour et le plaisir,
Autant qu'elle a duré nous l'avons embellie :
Telle est notre philosophie.
Si cela vous convient, demeurez avec nous,
Et soyez de la colonie ;
Sinon, faites l'honneur à notre compagnie
D'accepter à dîner, puis retournez chez vous.
À ce discours plein de sagesse,
Le hérisson repart qu'il sera trop heureux
De passer ses jours avec eux.
Alors chaque lapin s'empresse
D'imiter l'honnête doyen
Et de lui faire politesse.
Jusques au soir tout alla bien.
Mais lorsqu'après souper la troupe réunie
Se mit à deviser des affaires du temps,
Le hérisson de ses piquants
Blesse un jeune lapin. Doucement, je vous prie,
Lui dit le père de l'enfant.
Le hérisson, se retournant,
En pique deux, puis trois, et puis un quatrième.
On murmure, on se fâche, on l'entoure en grondant.
Messieurs, s'écria-t-il, mon regret est extrême ;
Il faut me le passer, je suis ainsi bâti,
Et je ne puis pas me refondre.
Ma foi, dit le doyen, en ce cas, mon ami,
Tu peux aller te faire tondre.
John F McCullagh Apr 2019
La flèche et le toit se sont effondrés,
Mais au moins aucun corps n'est mort.
Le vitrail a fondu de la chaleur
et des œuvres d'art inestimables d'ailleurs.
Notre-Dame est ouverte vers le ciel;
Son tabernacle profané.
Un trésor de la foi de l'homme est parti.
Peut-il être recréé?
Un curé âgé parcourt ses allées
Dont les murs résonnent les prières des hommes.
Il regarde les chœurs nus en ruine
et combat les sentiments de désespoir.
“Nous reconstruirons” pense le Père
comme les pierres chauffées deviennent froides.
«Nous élevons nos cœurs au Seigneur
Qui a payé la rançon pour nos âmes. "
This is the French translation of my poem, Ash Tuesday, about the destruction of Notre Dame in Paris
Lila Lily-Thanh Aug 2010
In those days, at every corner of the city
you could find a coffee shop.

There was never a high-rise building,
everything stood together in an unorganized manner,
for they never mastered the art of urban landscaping.

Street vendors had their own way of singing
their promotion songs. You remembered the tune, the words,
which reminded you of those streets.

The sounds of vehicles and their horns and the winds
never stopped. But in those days, they used to be
purer. Clearer. More innocent, perhaps. Less troubled.

Life never stops being tough,
but it was quite beautiful,
then.

When I grew up
the city was still left with fragments of history.
I had no memory of what had happened before I was born,
yet you felt in the air the gentle sadness, and the subtle beauty
from those French buildings. The architecture
slowly faded away as icons from the war,
becoming part of our modern life.
We had to move on,
and so did everyone who had left.

Those buildings, instead, became icons of my childhood,
of what I remembered about the city.
From my elementary school,
you could see the Notre-Dame Cathedral Basilica to your left,
the Central Post Office right in front of you.
I was always taken home via the street former known as
the Rue Catinat.

I would never forget the way it felt every afternoon.
I'm going home.

Those places have changed, and so have people,
and so have I.
The day they demolished Givral Cafe,
Xuan Thu Bookstore, Passage Eden,
the whole street block of memories,
was the day many of us lost something so deep in our heart.
History was gone once again.
And soon enough,
we would allow ourselves to forget once again.

I keep reminding myself,
Hey, it's ok to change.
My city does not repond to me.
It just becomes so foreign,
as if it has always belonged to somebody else
but me. And I keep digging
into the dust, the traces, the pictures
to find solace in what I could remember
about my changed lover.

They say, in the end it does not matter,
modern society needs revolutions.
Evolutions. Higher skyscrapers. Highways.
A North-South express railway even (Idea rejected.)
We need to catch up with the rest of the world.

Oh, dear men, I am fine with that. I am an easy fellow
who seldom feels too strongly about anything in particular.
But my heart keeps aching from some changes you guys make.
It outraged the day you took down my corner of memories.
I was in Boston reading the news my friends sent me,
picturing myself sitting at those steps in front of the Opera House
looking at the mass of broken bricks and dust
that was once a nice, little, iconic coffee shop-
Givral.

When my friend talked to me about changes around that block,
she talked in a tone that almost seemed guilty.
She did not know how to break the news to me
without also breaking me apart.
For just a few months before that,
we were walking down **** Khoi Street (the Rue Catinat, if you may),
taking pictures of the Opera House,
Givral Café, the Continental Hotel,
joking of how we acted like tourists.

Try being a tourist in your own city.
It means seeing everything with a fresh set of eyes,
trying to record everything,
trying to grasp the essence of everything
within a short amount of time.
I guarantee you it is fun.
And it will reinvigorate your love,
your understanding, your hope.

I was disappointed with some decisions others made.
Yet, being a city girl,
I was raised to adapt to them.
To learn that there will be thousands of other coffee shops
bookstores
landmarks
so many choices to overwhelm me
to drive me away from the time
when I had so few.

Will it eventually work? I do not know.
But that corner of the street (now demolished),
that corner of memory (now fading),
I was there.
Yes, I was there.
I will definitely make further edits to this, but I'd like your inputs on the word flow, grammar, construction/order of ideas, etc.

I haven't been away from my city for long, but the changes have been quite drastic recently. The coffee shop mentioned, Givral Café, was built in 1950 during our French colonization period. Ever since it has been a legendary place where many international journalists and writers and others meet. It was taken down on April 2010.

I was born years after the Vietnam War was over, so my memories are not really associated with anything war-related. My childhood was spent around the city center with French architecture around (the Cathedral and the Post Office are still there; the Opera House was renovated, but the whole street block of Givral and Passage Eden I mentioned is now gone.)

There is not much and there is too much to say about that city. I often find it either too difficult or too easy to write about it. You probably feel the same way about something or someone you're in love with. All the words could be dedicated, yet none would be satisfying enough.
Dieu, c'est la beauté, Dieu, beauté même, a parlé
Dans le buisson de flamme à son peuple assemblé,
Aux lèvres de Moïse, aux lèvres des prophètes,
Et ses discours profonds sont clairs comme des fêtes.
Son livre est un chœur vaste où David a chanté,
Et c'est un fleuve, il coule avec l'immensité
De ses vagues, noyant dans leur écume ardente
Ton navire, ô Milton, et ta galère, ô Dante !
Et Jésus a parlé, rouge et bleu sous le ciel,
Et des mots qu'il a dits la terre a fait son miel.
Les lys ont confondu sa robe avec l'aurore,
Sa voix, sur la montagne, elle résonne encore.
Paroles de Jésus, source sous les palmiers
Où s'abattent les cœurs ainsi que des ramiers,
Où les âmes vont boire ainsi que des chamelles !
Nourrice, tu suspends le monde à tes mamelles !
Car Il est aussi beau qu'Il est vrai ; sa beauté
Est mère de la fleur, de l'aube et de l'été.
Le Beau n'est qu'un mot creux, l'idéal qu'un mot vide,
Mais la beauté, c'est Dieu dont notre âme est avide ;
La beauté, mais, poète, elle est au cœur de Dieu
Le lotus de lumière et la rose de feu ;
De plus haut que les Tyrs et les Sions sublimes,
Elle descend sur l'ange, elle est vouée aux cimes,
Soleil des paradis, étoile des matins,
Et nos regards sont faits de ses rayons éteints.
- Beauté, face de Dieu, gouffre des purs délices
Formidable aux élus, devant vous les milices
Célestes dont les seins sont cuirassés d'ardeur,
Guerriers gantés de grâce et chaussés de candeur,
Dont les ailes de feu battent le dos par douze,
Capitaines d'amour dont l'aurore est jalouse
Et dont l'épée au poing n'est qu'un rayon vermeil,
Tremblent comme la brume au lever du soleil !
- Alléluia vers vous, beauté du Père, et gloire !
Gloire à vous sur la terre et sur les luths d'ivoire
Des riants chérubins, votre escabeau vivant !
Gloire à vous sur la lyre et les harpes au vent
Des séraphins chantant dans les apothéoses !
Doigts des anges, courez sur les violons roses !
Formez-vous, doux nuage, autour des encensoirs !
Brûlez, soleils levants ! fumez, parfums des soirs !
Montez vers la colombe, ô blanches innocences,
Montez ! Et vous, Vertus, Principautés, Puissances,
Menez, parmi les lys, le cortège des dieux,
Sur les pas de Jésus miséricordieux !
Fable VI, Livre V.


Quelques brochets jetés dans nos étangs
N'y sont pas tout-à-fait nuisibles.
Craints des poissons de tous les rangs,
Mais au fretin lui seul terribles,
S'ils vivent des petits, ils font vivre les grands.
Des avortons, sans cesse, engloutissant la tourbe,
Ils accroissent d'autant la part des gros mangeurs ;
Et de plus à ces bons nageurs
Ne laissent pas le temps de croupir dans la bourbe.
Il faut dire la vérité :
La critique est utile, et sa sévérité
Dont notre apologue est l'emblème,
Peut avoir au Parnasse un salutaire effet ;
Mais encor, pour cela, faut-il que le brochet
Ne soit pas du fretin lui-même.
Hollow Bones Dec 2014
I will miss you at college, I really will.
I won’t miss the wrinkled brows, at my too-heavy-eyeliner wearing face.
But i’ll probably come home make up free
with a head full of purple hair.
I know i’ll walk through the door sometime and you’ll be horrified.
And maybe you won’t want to sit in Starbucks with me.

And when your friends are bragging about their daughters,
saying mine got a full ride to Notre Dame,
or mine was recently proposed to,
you’re going to say,
“mine is happy.”
And maybe that will be enough.
si seulement j'avais su
que tu es mon monde entier
la flamme de mon âme
qui me sauve toujours si aisé
quand tu m'a embrassé
cette jour
il y a trois ans
sous les arbres de l'automne
des feuilles qui sont
dorées, croustillantes, intemporelles
comme notre chaleur.
je ne l'aurais pas cru
juste un petit poème à propos du debut de mon amour
marriegegirl Jun 2014
Fait

: La Californie est un endroit magnifique pour se marier fou .Donc voyager à Palm Desert pour une affaire élégante à la



Ironwood Country Club .orné de jolies fleurs de ARTISAN événement .Floral .Décor ?Meilleure idée jamais .Comme il est de passer la journée s'est terminée dans la galerie capturé par Kate Prix .Parce que si quelque chose va faire entièrement votre mardi robe de mariée courte .c'est cette affaire complexe .Voir tous ici .\u003cp\u003eColorsSeasonsFallSettingsChurchCountry ClubStylesCasual Elegance
de la mariée .Après avoir été né et a grandi à Seattle .j'ai toujours pensé que je finirais par se marier là un jour .mais après Cory a proposé .le concept d'un mariage à destination devenu très attrayant .J'ai immédiatement pensé à Palm Desert serait l'emplacement de destination parfaite parce que ma famille a été partagerai le temps entre là et Seattle pour les 10 dernières années .Il est assez **** pour profiter du soleil de la Californie à l'automne .mais pas si **** que la planification et Voyage serait trop difficile .Il est l'évasion parfaite .

Dès le début .Cory et moi étions sûrs de deux choses : nous voulions Kate Prix que notre photographe et musique en direct pendant l'heure du cocktail .On nous a présenté Michael Tiernan .un musicien incroyable et DJ qui fait appris comment effectuer une chanson de Dave Matthews pour notre première danse .Il a complété le tout en effectuant Jimmy Buffet et Tom Petty pour les père -fille et mère - fils danses .C'était exactement ce que Cory et moi avions prévu .mais en mieux!

Ironwood Country Club est un lieu étonnant pour notre mariage .Non seulement le club absolument magnifique .mais leur personnel de l'événement a dépassé toutes nos attentes .s'assurer que tout s'est bien passé .La journée s'est déroulée sans accroc.Nous avons loué la鈥 淭il鈥Oui filles pour notre jour de coordination et ils ont fait un travail fabuleux et fait en sorte que la seule chose Cory et moi avons eu à se concentrer sur l'autre était sur ​​notre journée spéciale .Notre fleuriste était Joey lors d'événements Artisan .Je savais que je pouvais lui faire confiance pour prendre le peu de vision que j'ai eue et créer des arrangements de l'église ainsi que de belles pièces du centre d'accueil robes demoiselles d honneur qui a brillé tout au long de la nuit .

Nous n'aurions jamais pensé que notre mariage se révélerait être si belle .détendue .et qui aime s'amuser .Nous savons que nous avons notre photographe incroyable .musicien .coordinateurs et fleuriste à remercier pour cela .C'était vraiment le jour le plus inoubliable de notre vie .et le sera toujours.

Photographie : Kate Prix Photographie robe de mariée courte | Floral Design : ARTISAN événement .Floral .Décor | Robe de mariée : Claire Pettibone | Cérémonie : Sacred Heart Church | Réception: Ironwood Country Club | DJ : Michael Tiernan | calligraphie .invitations .cartes de nom : La Happy | Coordination : Les filles Oui | Dress Shop : La théorie robeARTISAN événement .Floral .Le décor est un membre de notre Little Black Book .Découvrez comment les membres sont choisis en visitant notre page de FAQ .ARTISAN événement floralDécor ... voir le

http://modedomicile.com/goods.php?id=2363
Sonnet.

Croissez, jeune héros ; notre douleur profonde
N'a que ce doux espoir qui la puisse affaiblir.
Croissez, et hâtez-vous de faire voir au monde
Que le plus noble sang peut encor s'ennoblir.

Croissez pour voir sous vous trembler la terre et l'onde :
Un grand prince vous laisse un grand nom à remplir ;
Et ce que se promit sa valeur sans seconde,
C'est par vous que le ciel réserve à l'accomplir.

Vos aïeux vous diront par d'illustres exemples
Comme il faut mériter des sceptres et des temples ;
Vous ne verrez que gloire et que vertus en tous.

Sur des pas si fameux suivez l'ordre céleste ;
Et de tant de héros qui revivent en vous,
Égalez le dernier, vous passerez le reste.
I

La chambre est pleine d'ombre ; on entend vaguement
De deux enfants le triste et doux chuchotement.
Leur front se penche, encore alourdi par le rêve,
Sous le long rideau blanc qui tremble et se soulève...
- Au dehors les oiseaux se rapprochent frileux ;
Leur aile s'engourdit sous le ton gris des cieux ;
Et la nouvelle Année, à la suite brumeuse,
Laissant traîner les plis de sa robe neigeuse,
Sourit avec des pleurs, et chante en grelottant...

II

Or les petits enfants, sous le rideau flottant,
Parlent bas comme on fait dans une nuit obscure.
Ils écoutent, pensifs, comme un lointain murmure...
Ils tressaillent souvent à la claire voix d'or
Du timbre matinal, qui frappe et frappe encor
Son refrain métallique en son globe de verre...
- Puis, la chambre est glacée... on voit traîner à terre,
Épars autour des lits, des vêtements de deuil
L'âpre bise d'hiver qui se lamente au seuil
Souffle dans le logis son haleine morose !
On sent, dans tout cela, qu'il manque quelque chose...
- Il n'est donc point de mère à ces petits enfants,
De mère au frais sourire, aux regards triomphants ?
Elle a donc oublié, le soir, seule et penchée,
D'exciter une flamme à la cendre arrachée,
D'amonceler sur eux la laine et l'édredon
Avant de les quitter en leur criant : pardon.
Elle n'a point prévu la froideur matinale,
Ni bien fermé le seuil à la bise hivernale ?...
- Le rêve maternel, c'est le tiède tapis,
C'est le nid cotonneux où les enfants tapis,
Comme de beaux oiseaux que balancent les branches,
Dorment leur doux sommeil plein de visions blanches !...
- Et là, - c'est comme un nid sans plumes, sans chaleur,
Où les petits ont froid, ne dorment pas, ont peur ;
Un nid que doit avoir glacé la bise amère...

III

Votre coeur l'a compris : - ces enfants sont sans mère.
Plus de mère au logis ! - et le père est bien **** !...
- Une vieille servante, alors, en a pris soin.
Les petits sont tout seuls en la maison glacée ;
Orphelins de quatre ans, voilà qu'en leur pensée
S'éveille, par degrés, un souvenir riant...
C'est comme un chapelet qu'on égrène en priant :
- Ah ! quel beau matin, que ce matin des étrennes !
Chacun, pendant la nuit, avait rêvé des siennes
Dans quelque songe étrange où l'on voyait joujoux,
Bonbons habillés d'or, étincelants bijoux,
Tourbillonner, danser une danse sonore,
Puis fuir sous les rideaux, puis reparaître encore !
On s'éveillait matin, on se levait joyeux,
La lèvre affriandée, en se frottant les yeux...
On allait, les cheveux emmêlés sur la tête,
Les yeux tout rayonnants, comme aux grands jours de fête,
Et les petits pieds nus effleurant le plancher,
Aux portes des parents tout doucement toucher...
On entrait !... Puis alors les souhaits... en chemise,
Les baisers répétés, et la gaîté permise !

IV

Ah ! c'était si charmant, ces mots dits tant de fois !
- Mais comme il est changé, le logis d'autrefois :
Un grand feu pétillait, clair, dans la cheminée,
Toute la vieille chambre était illuminée ;
Et les reflets vermeils, sortis du grand foyer,
Sur les meubles vernis aimaient à tournoyer...
- L'armoire était sans clefs !... sans clefs, la grande armoire !
On regardait souvent sa porte brune et noire...
Sans clefs !... c'était étrange !... on rêvait bien des fois
Aux mystères dormant entre ses flancs de bois,
Et l'on croyait ouïr, au fond de la serrure
Béante, un bruit lointain, vague et joyeux murmure...
- La chambre des parents est bien vide, aujourd'hui
Aucun reflet vermeil sous la porte n'a lui ;
Il n'est point de parents, de foyer, de clefs prises :
Partant, point de baisers, point de douces surprises !
Oh ! que le jour de l'an sera triste pour eux !
- Et, tout pensifs, tandis que de leurs grands yeux bleus,
Silencieusement tombe une larme amère,
Ils murmurent : "Quand donc reviendra notre mère ?"

V

Maintenant, les petits sommeillent tristement :
Vous diriez, à les voir, qu'ils pleurent en dormant,
Tant leurs yeux sont gonflés et leur souffle pénible !
Les tout petits enfants ont le coeur si sensible !
- Mais l'ange des berceaux vient essuyer leurs yeux,
Et dans ce lourd sommeil met un rêve joyeux,
Un rêve si joyeux, que leur lèvre mi-close,
Souriante, semblait murmurer quelque chose...
- Ils rêvent que, penchés sur leur petit bras rond,
Doux geste du réveil, ils avancent le front,
Et leur vague regard tout autour d'eux se pose...
Ils se croient endormis dans un paradis rose...
Au foyer plein d'éclairs chante gaîment le feu...
Par la fenêtre on voit là-bas un beau ciel bleu ;
La nature s'éveille et de rayons s'enivre...
La terre, demi-nue, heureuse de revivre,
A des frissons de joie aux baisers du soleil...
Et dans le vieux logis tout est tiède et vermeil
Les sombres vêtements ne jonchent plus la terre,
La bise sous le seuil a fini par se taire ...
On dirait qu'une fée a passé dans cela ! ...
- Les enfants, tout joyeux, ont jeté deux cris... Là,
Près du lit maternel, sous un beau rayon rose,
Là, sur le grand tapis, resplendit quelque chose...
Ce sont des médaillons argentés, noirs et blancs,
De la nacre et du jais aux reflets scintillants ;
Des petits cadres noirs, des couronnes de verre,
Ayant trois mots gravés en or : "À NOTRE MÈRE !"
« Amis et frères ! en présence de ce gouvernement infâme, négation de toute morale, obstacle à tout progrès social, en présence de ce gouvernement meurtrier du peuple, assassin de la République et violateur des lois, de ce gouvernement né de la force et qui doit périr par la force, de ce gouvernement élevé par le crime et qui doit être terrassé par le droit, le français digne du nom de citoyen ne sait pas, ne veut pas savoir s'il y a quelque part des semblants de scrutin, des comédies de suffrage universel et des parodies d'appel à la nation ; il ne s'informe pas s'il y a des hommes qui votent et des hommes qui font voter, s'il y a un troupeau qu'on appelle le sénat et qui délibère et un autre troupeau qu'on appelle le peuple et qui obéit ; il ne s'informe pas si le pape va sacrer au maître-autel de Notre-Dame l'homme qui - n'en doutez pas, ceci est l'avenir inévitable - sera ferré au poteau par le bourreau ; - en présence de M. Bonaparte et de son gouvernement, le citoyen digne de ce nom ne fait qu'une chose et n'a qu'une chose à faire : charger son fusil, et attendre l'heure.

Jersey, le 31 octobre 1852.


Déclaration des proscrits républicains de Jersey, à propos de l'empire, publiée par le Moniteur, signée pour copie conforme :

VICTOR HUGO, FAURE, FOMBERTAUX.


« Nous flétrissons de l'énergie la plus vigoureuse de notre âme les ignobles et coupables manifestes du Parti du Crime. »

(RIANCEY, JOURNAL L'UNION, 22 NOVEMBRE.)

« Le Parti du Crime relève la tête. »

(TOUS LES JOURNAUX ÉLYSÉENS EN CHOEUR.)



Ainsi ce gouvernant dont l'ongle est une griffe,
Ce masque impérial, Bonaparte apocryphe,
À coup sûr Beauharnais, peut-être Verhueil,
Qui, pour la mettre en croix, livra, sbire cruel,
Rome républicaine à Rome catholique,
Cet homme, l'assassin de la chose publique,
Ce parvenu, choisi par le destin sans yeux,
Ainsi, lui, ce glouton singeant l'ambitieux,
Cette altesse quelconque habile aux catastrophes,
Ce loup sur qui je lâche une meute de strophes,
Ainsi ce boucanier, ainsi ce chourineur
À fait d'un jour d'orgueil un jour de déshonneur,
Mis sur la gloire un crime et souillé la victoire
Il a volé, l'infâme, Austerlitz à l'histoire ;
Brigand, dans ce trophée il a pris un poignard ;
Il a broyé bourgeois, ouvrier, campagnard ;
Il a fait de corps morts une horrible étagère
Derrière les barreaux de la cité Bergère ;
Il s'est, le sabre en main, rué sur son serment ;
Il a tué les lois et le gouvernement,
La justice, l'honneur, tout, jusqu'à l'espérance
Il a rougi de sang, de ton sang pur, ô France,
Tous nos fleuves, depuis la Seine jusqu'au Var ;
Il a conquis le Louvre en méritant Clamar ;
Et maintenant il règne, appuyant, ô patrie,
Son vil talon fangeux sur ta bouche meurtrie
Voilà ce qu'il a fait ; je n'exagère rien ;
Et quand, nous indignant de ce galérien,
Et de tous les escrocs de cette dictature,
Croyant rêver devant cette affreuse aventure,
Nous disons, de dégoût et d'horreur soulevés :
- Citoyens, marchons ! Peuple, aux armes, aux pavés !
À bas ce sabre abject qui n'est pas même un glaive !
Que le jour reparaisse et que le droit se lève ! -
C'est nous, proscrits frappés par ces coquins hardis,
Nous, les assassinés, qui sommes les bandits !
Nous qui voulons le meurtre et les guerres civiles !
Nous qui mettons la torche aux quatre coins des villes !

Donc, trôner par la mort, fouler aux pieds le droit
Etre fourbe, impudent, cynique, atroce, adroit ;
Dire : je suis César, et n'être qu'un maroufle
Etouffer la pensée et la vie et le souffle ;
Forcer quatre-vingt-neuf qui marche à reculer ;
Supprimer lois, tribune et presse ; museler
La grande nation comme une bête fauve ;
Régner par la caserne et du fond d'une alcôve ;
Restaurer les abus au profit des félons
Livrer ce pauvre peuple aux voraces Troplongs,
Sous prétexte qu'il fut, **** des temps où nous sommes,
Dévoré par les rois et par les gentilshommes
Faire manger aux chiens ce reste des lions ;
Prendre gaîment pour soi palais et millions ;
S'afficher tout crûment satrape, et, sans sourdines,
Mener joyeuse vie avec des gourgandines
Torturer des héros dans le bagne exécré ;
Bannir quiconque est ferme et fier ; vivre entouré
De grecs, comme à Byzance autrefois le despote
Etre le bras qui tue et la main qui tripote
Ceci, c'est la justice, ô peuple, et la vertu !
Et confesser le droit par le meurtre abattu
Dans l'exil, à travers l'encens et les fumées,
Dire en face aux tyrans, dire en face aux armées
- Violence, injustice et force sont vos noms
Vous êtes les soldats, vous êtes les canons ;
La terre est sous vos pieds comme votre royaume
Vous êtes le colosse et nous sommes l'atome ;
Eh bien ! guerre ! et luttons, c'est notre volonté,
Vous, pour l'oppression, nous, pour la liberté ! -
Montrer les noirs pontons, montrer les catacombes,
Et s'écrier, debout sur la pierre des tombes.
- Français ! craignez d'avoir un jour pour repentirs
Les pleurs des innocents et les os des martyrs !
Brise l'homme sépulcre, ô France ! ressuscite !
Arrache de ton flanc ce Néron parasite !
Sors de terre sanglante et belle, et dresse-toi,
Dans une main le glaive et dans l'autre la loi ! -
Jeter ce cri du fond de son âme proscrite,
Attaquer le forban, démasquer l'hypocrite
Parce que l'honneur parle et parce qu'il le faut,
C'est le crime, cela ! - Tu l'entends, toi, là-haut !
Oui, voilà ce qu'on dit, mon Dieu, devant ta face !
Témoin toujours présent qu'aucune ombre n'efface,
Voilà ce qu'on étale à tes yeux éternels !

Quoi ! le sang fume aux mains de tous ces criminels !
Quoi ! les morts, vierge, enfant, vieillards et femmes grosses
Ont à peine eu le temps de pourrir dans leurs fosses !
Quoi ! Paris saigne encor ! quoi ! devant tous les yeux,
Son faux serment est là qui plane dans les cieux !
Et voilà comme parle un tas d'êtres immondes
Ô noir bouillonnement des colères profondes !

Et maint vivant, gavé, triomphant et vermeil,
Reprend : « Ce bruit qu'on fait dérange mon sommeil.
Tout va bien. Les marchands triplent leurs clientèles,
Et nos femmes ne sont que fleurs et que dentelles !
- De quoi donc se plaint-on ? crie un autre quidam ;
En flânant sur l'asphalte et sur le macadam,
Je gagne tous les jours trois cents francs à la Bourse.
L'argent coule aujourd'hui comme l'eau d'une source ;
Les ouvriers maçons ont trois livres dix sous,
C'est superbe ; Paris est sens dessus dessous.
Il paraît qu'on a mis dehors les démagogues.
Tant mieux. Moi j'applaudis les bals et les églogues
Du prince qu'autrefois à tort je reniais.
Que m'importe qu'on ait chassé quelques niais ?
Quant aux morts, ils sont morts. Paix à ces imbéciles !
Vivent les gens d'esprit ! vivent ces temps faciles
Où l'on peut à son choix prendre pour nourricier
Le crédit mobilier ou le crédit foncier !
La république rouge aboie en ses cavernes,
C'est affreux ! Liberté, droit, progrès, balivernes
Hier encor j'empochais une prime d'un franc ;
Et moi, je sens fort peu, j'en conviens, je suis franc,
Les déclamations m'étant indifférentes,
La baisse de l'honneur dans la hausse des rentes. »

Ô langage hideux ! on le tient, on l'entend !
Eh bien, sachez-le donc ; repus au cœur content,
Que nous vous le disions bien une fois pour toutes,
Oui, nous, les vagabonds dispersés sur les routes,
Errant sans passe-port, sans nom et sans foyer,
Nous autres, les proscrits qu'on ne fait pas ployer,
Nous qui n'acceptons point qu'un peuple s'abrutisse,
Qui d'ailleurs ne voulons, tout en voulant justice,
D'aucune représaille et d'aucun échafaud,
Nous, dis-je, les vaincus sur qui Mandrin prévaut,
Pour que la liberté revive, et que la honte
Meure, et qu'à tous les fronts l'honneur serein remonte,
Pour affranchir romains, lombards, germains, hongrois,
Pour faire rayonner, soleil de tous les droits,
La république mère au centre de l'Europe,
Pour réconcilier le palais et l'échoppe,
Pour faire refleurir la fleur Fraternité,
Pour fonder du travail le droit incontesté,
Pour tirer les martyrs de ces bagnes infâmes,
Pour rendre aux fils le père et les maris aux femmes,
Pour qu'enfin ce grand siècle et cette nation
Sortent du Bonaparte et de l'abjection,
Pour atteindre à ce but où notre âme s'élance,
Nous nous ceignons les reins dans l'ombre et le silence
Nous nous déclarons prêts, prêts, entendez-vous bien ?
- Le sacrifice est tout, la souffrance n'est rien, -
Prêts, quand Dieu fera signe, à donner notre vie
Car, à voir ce qui vit, la mort nous fait envie,
Car nous sommes tous mal sous ce drôle effronté,
Vivant, nous sans patrie, et vous sans liberté !

Oui, sachez-le, vous tous que l'air libre importune
Et qui dans ce fumier plantez votre fortune,
Nous ne laisserons pas le peuple s'assoupir ;
Oui, nous appellerons, jusqu'au dernier soupir,
Au secours de la France aux fers et presque éteinte,
Comme nos grands -aïeux, l'insurrection sainte
Nous convierons Dieu même à foudroyer ceci
Et c'est notre pensée et nous sommes ainsi,
Aimant mieux, dût le sort nous broyer sous sa roue,
Voir couler notre sang que croupir votre boue.

Jersey, le 28 janvier 1853.

— The End —