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Tu ne vas pas me croire.
Moi-même je n'en reviens pas !
Je suis traumatisé, grand brûlé,
Mutilé de guerre
Tout cela à cause de tes huit soeurs
Tes ombres femelles, les Muses.
Je te raconte, excuse les sanglots,
Les spasmes, les soubresauts de ton petit oiseau orphie
Dépecé, déplumé, vide de toute substance.
Ratatiné. Ratiboisé.
Tes fieffées soeurs, ces gredines m'ont violé !
M'entends-tu?
Je ne suis plus que l'ombre de moi-même
Sans tambour ni trompettes
En plein tunnel de Fréjus
Entre la France et l'Italie.
Je ne me souviens plus très bien du début de mon calvaire :
Je dormais à poings fermés
Je rêvais de toi et je sentais tes paumes chaudes
Qui me dorlotaient et me murmuraient des mots doux
Tu disais que j'étais l'oiseau lyre
L'oiseau de feu l'oiseau paon
Tu voulais que je pavane
En toi sur ton balcon
En faisant mine de regarder les étoiles
Et que comme Marlborough je m'en aille en guerre
Mironton mironton mirontaine
On se ravitaillait tous les deux pour supporter l'exil
Et de provisions en provisions nous ne sortions plus du lit.
Tu me disais "qui aime bien châtie bien"
Et "quand on s'aime on sème "
Et tu me châtiais de va et vient subtils
Et tu semais ma semence aux quatre vents
Sur les champs blancs et roses de ta chair
Tu disais no nu niet
Pour battre la mesure
No nu niet de ta petite voix
No nu niet de ta grosse voix
Une caresse pour marraine
Une caresse pour la Muse
J'étais aux anges
Je dormais du sommeil tranquille
Des orphies
Je croyais que c'étaient des formules bibliques
Et que tu baptisais ainsi l'oiseau
Nonuniet
Je croyais que c'était toi,
C'étaient tes ombres qui se relayaient
C'étaient elles qui étaient à la manoeuvre
Pour me punir de t'avoir choisie toi, mon ange,
Et pas elles, ces diablesses
Déguisées sous leurs masques de la comédia dell'arte.
Rien ne me fut épargné sous la férule de ces Amazones
A huit elles m'ont pénétré par mes neuf orifices
Ou étais-tu alors
Quand j'ai crié ton nom ?
J'ai perdu mon dernier pucelage
J'ai eu beau leur dire
Vietato l'ingresso qui !
Leur dire que j'étais Cagnolo Nogerola detto Roméo
Et que ma Muse à moi n'était aucune d'entre elles
Mais bel et bien toi, Giulietta Cappelletti,
Elles m'ont fait endurer ce que je souhaiterai pas
A mon pire ennemi, foi de Montecchi.
Elles m'ont tatoué la peau de long en large
De phrases inintelligibles
Elles ont gravé dans ma chair des choses insensées :
Chiudi gli occhi e sogna, Farinelli !
Dante, ti amo !
Portami ovunque tu sia. No !
Non smettere mai di splendere con il tuo sorriso !
Nacio nustra maravilhosa historia de amor !
Gracais mi amor por compartir un viaje tan romantico !
I love you forever
Elles m'ont dégusté comme on déguste
Un riso venere con gamberi e crema de zafferano
Elles m'ont emmaillotté de chapelets
Et de litanies
Elles m'ont marqué au chewing gum
Comme on marque au fer rouge
En me laissant leurs mots d'amour.
Je me suis retrouvé au centre de l'arène
Comme un gladiateur en guenilles
Et j'ai chanté de ma plus belle voix de castrat
Un Lascia ch'io pianga
Que n'aurait pas désavoué Haendel...
Me voilà à tes pieds ce matin, émasculé,
Implorant ta miséricorde, Muse bienfaitrice,
Je voudrais que tu me cautérises ces plaies
Que tu me soignes de tes Furies de soeurs
Tu me manques !
Concède-moi cent jours d'indulgence
Comme délai de latence
Le Ciel te le rendra au centuple !
Te saludo Mama
Del nostro Dio
Je sais que seul toi pourra effacer le traumatisme
Me débloquer, me redonner le sourire
Aurais-tu un peu de teinture d'arnica
De la racine de ***** contra et un peu de cyprine
Pour lentement me badigeonner?
I.

Hélas ! que j'en ai vu mourir de jeunes filles !
C'est le destin. Il faut une proie au trépas.
Il faut que l'herbe tombe au tranchant des faucilles ;
Il faut que dans le bal les folâtres quadrilles
Foulent des roses sous leurs pas.

Il faut que l'eau s'épuise à courir les vallées ;
Il faut que l'éclair brille, et brille peu d'instants,
Il faut qu'avril jaloux brûle de ses gelées
Le beau pommier, trop fier de ses fleurs étoilées,
Neige odorante du printemps.

Oui, c'est la vie. Après le jour, la nuit livide.
Après tout, le réveil, infernal ou divin.
Autour du grand banquet siège une foule avide ;
Mais bien des conviés laissent leur place vide.
Et se lèvent avant la fin.

II.

Que j'en ai vu mourir ! - L'une était rose et blanche ;
L'autre semblait ouïr de célestes accords ;
L'autre, faible, appuyait d'un bras son front qui penche,
Et, comme en s'envolant l'oiseau courbe la branche,
Son âme avait brisé son corps.

Une, pâle, égarée, en proie au noir délire,
Disait tout bas un nom dont nul ne se souvient ;
Une s'évanouit, comme un chant sur la lyre ;
Une autre en expirant avait le doux sourire
D'un jeune ange qui s'en revient.

Toutes fragiles fleurs, sitôt mortes que nées !
Alcyions engloutis avec leurs nids flottants !
Colombes, que le ciel au monde avait données !
Qui, de grâce, et d'enfance, et d'amour couronnées,
Comptaient leurs ans par les printemps !

Quoi, mortes ! quoi, déjà, sous la pierre couchées !
Quoi ! tant d'êtres charmants sans regard et sans voix !
Tant de flambeaux éteints ! tant de fleurs arrachées !...
Oh ! laissez-moi fouler les feuilles desséchées,
Et m'égarer au fond des bois !

Deux fantômes ! c'est là, quand je rêve dans l'ombre,
Qu'ils viennent tour à tour m'entendre et me parler.
Un jour douteux me montre et me cache leur nombre.
A travers les rameaux et le feuillage sombre
Je vois leurs yeux étinceler.

Mon âme est une sœur pour ces ombres si belles.
La vie et le tombeau pour nous n'ont plus de loi.
Tantôt j'aide leurs pas, tantôt je prends leurs ailes.
Vision ineffable où je suis mort comme elles,
Elles, vivantes comme moi !

Elles prêtent leur forme à toutes mes pensées.
Je les vois ! je les vois ! Elles me disent : Viens !
Puis autour d'un tombeau dansent entrelacées ;
Puis s'en vont lentement, par degrés éclipsées.
Alors je songe et me souviens...

III.

Une surtout. - Un ange, une jeune espagnole !
Blanches mains, sein gonflé de soupirs innocents,
Un œil noir, où luisaient des regards de créole,
Et ce charme inconnu, cette fraîche auréole
Qui couronne un front de quinze ans !

Non, ce n'est point d'amour qu'elle est morte : pour elle,
L'amour n'avait encor ni plaisirs ni combats ;
Rien ne faisait encor battre son cœur rebelle ;
Quand tous en la voyant s'écriaient : Qu'elle est belle !
Nul ne le lui disait tout bas.

Elle aimait trop le bal, c'est ce qui l'a tuée.
Le bal éblouissant ! le bal délicieux !
Sa cendre encor frémit, doucement remuée,
Quand, dans la nuit sereine, une blanche nuée
Danse autour du croissant des cieux.

Elle aimait trop le bal. - Quand venait une fête,
Elle y pensait trois jours, trois nuits elle en rêvait,
Et femmes, musiciens, danseurs que rien n'arrête,
Venaient, dans son sommeil, troublant sa jeune tête,
Rire et bruire à son chevet.

Puis c'étaient des bijoux, des colliers, des merveilles !
Des ceintures de moire aux ondoyants reflets ;
Des tissus plus légers que des ailes d'abeilles ;
Des festons, des rubans, à remplir des corbeilles ;
Des fleurs, à payer un palais !

La fête commencée, avec ses sœurs rieuses
Elle accourait, froissant l'éventail sous ses doigts,
Puis s'asseyait parmi les écharpes soyeuses,
Et son cœur éclatait en fanfares joyeuses,
Avec l'orchestre aux mille voix.

C'était plaisir de voir danser la jeune fille !
Sa basquine agitait ses paillettes d'azur ;
Ses grands yeux noirs brillaient sous la noire mantille.
Telle une double étoile au front des nuits scintille
Sous les plis d'un nuage obscur.

Tout en elle était danse, et rire, et folle joie.
Enfant ! - Nous l'admirions dans nos tristes loisirs ;
Car ce n'est point au bal que le cœur se déploie,
La centre y vole autour des tuniques de soie,
L'ennui sombre autour des plaisirs.

Mais elle, par la valse ou la ronde emportée,
Volait, et revenait, et ne respirait pas,
Et s'enivrait des sons de la flûte vantée,
Des fleurs, des lustres d'or, de la fête enchantée,
Du bruit des vois, du bruit des pas.

Quel bonheur de bondir, éperdue, en la foule,
De sentir par le bal ses sens multipliés,
Et de ne pas savoir si dans la nue on roule,
Si l'on chasse en fuyant la terre, ou si l'on foule
Un flot tournoyant sous ses pieds !

Mais hélas ! il fallait, quand l'aube était venue,
Partir, attendre au seuil le manteau de satin.
C'est alors que souvent la danseuse ingénue
Sentit en frissonnant sur son épaule nue
Glisser le souffle du matin.

Quels tristes lendemains laisse le bal folâtre !
Adieu parure, et danse, et rires enfantins !
Aux chansons succédait la toux opiniâtre,
Au plaisir rose et frais la fièvre au teint bleuâtre,
Aux yeux brillants les yeux éteints.

IV.

Elle est morte. - A quinze ans, belle, heureuse, adorée !
Morte au sortir d'un bal qui nous mit tous en deuil.
Morte, hélas ! et des bras d'une mère égarée
La mort aux froides mains la prit toute parée,
Pour l'endormir dans le cercueil.

Pour danser d'autres bals elle était encor prête,
Tant la mort fut pressée à prendre un corps si beau !
Et ces roses d'un jour qui couronnaient sa tête,
Qui s'épanouissaient la veille en une fête,
Se fanèrent dans un tombeau.

V.

Sa pauvre mère ! - hélas ! de son sort ignorante,
Avoir mis tant d'amour sur ce frêle roseau,
Et si longtemps veillé son enfance souffrante,
Et passé tant de nuits à l'endormir pleurante
Toute petite en son berceau !

A quoi bon ? - Maintenant la jeune trépassée,
Sous le plomb du cercueil, livide, en proie au ver,
Dort ; et si, dans la tombe où nous l'avons laissée,
Quelque fête des morts la réveille glacée,
Par une belle nuit d'hiver,

Un spectre au rire affreux à sa morne toilette
Préside au lieu de mère, et lui dit : Il est temps !
Et, glaçant d'un baiser sa lèvre violette,
Passe les doigts noueux de sa main de squelette
Sous ses cheveux longs et flottants.

Puis, tremblante, il la mène à la danse fatale,
Au chœur aérien dans l'ombre voltigeant ;
Et sur l'horizon gris la lune est large et pâle,
Et l'arc-en-ciel des nuits teint d'un reflet d'opale
Le nuage aux franges d'argent.

VI.

Vous toutes qu'à ses jeux le bal riant convie,
Pensez à l'espagnole éteinte sans retour,
Jeunes filles ! Joyeuse, et d'une main ravie,
Elle allait moissonnant les roses de la vie,
Beauté, plaisir, jeunesse, amour !

La pauvre enfant, de fête en fête promenée,
De ce bouquet charmant arrangeait les couleurs ;
Mais qu'elle a passé vite, hélas ! l'infortunée !
Ainsi qu'Ophélia par le fleuve entraînée,
Elle est morte en cueillant des fleurs !

Avril 1828.
Jeanne-Marie a des mains fortes,
Mains sombres que l'été tanna,
Mains pâles comme des mains mortes.
- Sont-ce des mains de Juana ?

Ont-elles pris les crèmes brunes
Sur les mares des voluptés ?
Ont-elles trempé dans des lunes
Aux étangs de sérénités ?

Ont-elles bu des cieux barbares,
Calmes sur les genoux charmants ?
Ont-elles roulé des cigares
Ou trafiqué des diamants ?

Sur les pieds ardents des Madones
Ont-elles fané des fleurs d'or ?
C'est le sang noir des belladones
Qui dans leur paume éclate et dort.

Mains chasseresses des diptères
Dont bombinent les bleuisons
Aurorales, vers les nectaires ?
Mains décanteuses de poisons ?

Oh ! quel Rêve les a saisies
Dans les pandiculations ?
Un rêve inouï des Asies,
Des Khenghavars ou des Sions ?

- Ces mains n'ont pas vendu d'oranges,
Ni bruni sur les pieds des dieux :
Ces mains n'ont pas lavé les langes
Des lourds petits enfants sans yeux.

Ce ne sont pas mains de cousine
Ni d'ouvrières aux gros fronts
Que brûle, aux bois puant l'usine,
Un soleil ivre de goudrons.

Ce sont des ployeuses d'échines,
Des mains qui ne font jamais mal,
Plus fatales que des machines,
Plus fortes que tout un cheval !

Remuant comme des fournaises,
Et secouant tous ses frissons,
Leur chair chante des Marseillaises
Et jamais les Eleisons !

Ça serrerait vos cous, ô femmes
Mauvaises, ça broierait vos mains,
Femmes nobles, vos mains infâmes
Pleines de blancs et de carmins.

L'éclat de ces mains amoureuses
Tourne le crâne des brebis !
Dans leurs phalanges savoureuses
Le grand soleil met un rubis !

Une tache de populace
Les brunit comme un sein d'hier ;
Le dos de ces Mains est la place
Qu'en baisa tout Révolté fier !

Elles ont pâli, merveilleuses,
Au grand soleil d'amour chargé,
Sur le bronze des mitrailleuses
A travers Paris insurgé !

Ah ! quelquefois, ô Mains sacrées,
A vos poings, Mains où tremblent nos
Lèvres jamais désenivrées,
Crie une chaîne aux clairs anneaux !

Et c'est un soubresaut étrange
Dans nos êtres, quand, quelquefois,
On veut vous déhâler, Mains d'ange,
En vous faisant saigner les doigts !
THE PROLOGUE.

When that the Knight had thus his tale told
In all the rout was neither young nor old,
That he not said it was a noble story,
And worthy to be drawen to memory;                          recorded
And namely the gentles every one.          especially the gentlefolk
Our Host then laugh'd and swore, "So may I gon,                prosper
This goes aright; unbuckled is the mail;        the budget is opened
Let see now who shall tell another tale:
For truely this game is well begun.
Now telleth ye, Sir Monk, if that ye conne,                       *know
Somewhat, to quiten
with the Knighte's tale."                    match
The Miller that fordrunken was all pale,
So that unnethes
upon his horse he sat,                with difficulty
He would avalen
neither hood nor hat,                          uncover
Nor abide
no man for his courtesy,                         give way to
But in Pilate's voice he gan to cry,
And swore by armes, and by blood, and bones,
"I can a noble tale for the nones
                            occasion,
With which I will now quite
the Knighte's tale."                 match
Our Host saw well how drunk he was of ale,
And said; "Robin, abide, my leve
brother,                         dear
Some better man shall tell us first another:
Abide, and let us worke thriftily."
By Godde's soul," quoth he, "that will not I,
For I will speak, or elles go my way!"
Our Host answer'd; "
Tell on a devil way;             *devil take you!
Thou art a fool; thy wit is overcome."
"Now hearken," quoth the Miller, "all and some:
But first I make a protestatioun.
That I am drunk, I know it by my soun':
And therefore if that I misspeak or say,
Wite it the ale of Southwark, I you pray:             blame it on
For I will tell a legend and a life
Both of a carpenter and of his wife,
How that a clerk hath set the wrighte's cap."   fooled the carpenter
The Reeve answer'd and saide, "Stint thy clap,      hold your tongue
Let be thy lewed drunken harlotry.
It is a sin, and eke a great folly
To apeiren* any man, or him defame,                              injure
And eke to bringe wives in evil name.
Thou may'st enough of other thinges sayn."
This drunken Miller spake full soon again,
And saide, "Leve brother Osewold,
Who hath no wife, he is no cuckold.
But I say not therefore that thou art one;
There be full goode wives many one.
Why art thou angry with my tale now?
I have a wife, pardie, as well as thou,
Yet *n'old I
, for the oxen in my plough,                  I would not
Taken upon me more than enough,
To deemen* of myself that I am one;                               judge
I will believe well that I am none.
An husband should not be inquisitive
Of Godde's privity, nor of his wife.
So he may finde Godde's foison
there,                         treasure
Of the remnant needeth not to enquere."

What should I more say, but that this Millere
He would his wordes for no man forbear,
But told his churlish
tale in his mannere;               boorish, rude
Me thinketh, that I shall rehearse it here.
And therefore every gentle wight I pray,
For Godde's love to deem not that I say
Of evil intent, but that I must rehearse
Their tales all, be they better or worse,
Or elles falsen
some of my mattere.                            falsify
And therefore whoso list it not to hear,
Turn o'er the leaf, and choose another tale;
For he shall find enough, both great and smale,
Of storial
thing that toucheth gentiless,             historical, true
And eke morality and holiness.
Blame not me, if that ye choose amiss.
The Miller is a churl, ye know well this,
So was the Reeve, with many other mo',
And harlotry
they tolde bothe two.                        ribald tales
Avise you* now, and put me out of blame;                    be warned
And eke men should not make earnest of game.                 *jest, fun

Notes to the Prologue to the Miller's Tale

1. Pilate, an unpopular personage in the mystery-plays of the
middle ages, was probably represented as having a gruff, harsh
voice.

2. Wite: blame; in Scotland, "to bear the wyte," is to bear the
blame.

THE TALE.

Whilom there was dwelling in Oxenford
A riche gnof
, that guestes held to board,   miser *took in boarders
And of his craft he was a carpenter.
With him there was dwelling a poor scholer,
Had learned art, but all his fantasy
Was turned for to learn astrology.
He coude* a certain of conclusions                                 knew
To deeme
by interrogations,                                  determine
If that men asked him in certain hours,
When that men should have drought or elles show'rs:
Or if men asked him what shoulde fall
Of everything, I may not reckon all.

This clerk was called Hendy
Nicholas;                 gentle, handsome
Of derne
love he knew and of solace;                   secret, earnest
And therewith he was sly and full privy,
And like a maiden meek for to see.
A chamber had he in that hostelry
Alone, withouten any company,
Full *fetisly y-dight
with herbes swoot,            neatly decorated
And he himself was sweet as is the root                           *sweet
Of liquorice, or any setewall
.                                valerian
His Almagest, and bookes great and small,
His astrolabe,  belonging to his art,
His augrim stones, layed fair apart
On shelves couched
at his bedde's head,                      laid, set
His press y-cover'd with a falding
red.                   coarse cloth
And all above there lay a gay psalt'ry
On which he made at nightes melody,
So sweetely, that all the chamber rang:
And Angelus ad virginem he sang.
And after that he sung the kinge's note;
Full often blessed was his merry throat.
And thus this sweete clerk his time spent
After *his friendes finding and his rent.
    Attending to his friends,
                                                   and providing for the
                                                    cost of his lodging

This carpenter had wedded new a wife,
Which that he loved more than his life:
Of eighteen year, I guess, she was of age.
Jealous he was, and held her narr'w in cage,
For she was wild and young, and he was old,
And deemed himself belike* a cuckold.                           perhaps
He knew not Cato, for his wit was rude,
That bade a man wed his similitude.
Men shoulde wedden after their estate,
For youth and eld
are often at debate.                             age
But since that he was fallen in the snare,
He must endure (as other folk) his care.
Fair was this younge wife, and therewithal
As any weasel her body gent
and small.                      slim, neat
A seint
she weared, barred all of silk,                         girdle
A barm-cloth
eke as white as morning milk                     apron
Upon her lendes
, full of many a gore.                  ***** *plait
White was her smock, and broider'd all before,            robe or gown
And eke behind, on her collar about
Of coal-black silk, within and eke without.
The tapes of her white volupere                      head-kerchief
Were of the same suit of her collere;
Her fillet broad of silk, and set full high:
And sickerly* she had a likerous
eye.          certainly *lascivious
Full small y-pulled were her browes two,
And they were bent, and black as any sloe.                      arched
She was well more blissful on to see           pleasant to look upon
Than is the newe perjenete* tree;                       young pear-tree
And softer than the wool is of a wether.
And by her girdle hung a purse of leather,
Tassel'd with silk, and *pearled with latoun
.   set with brass pearls
In all this world to seeken up and down
There is no man so wise, that coude thenche            fancy, think of
So gay a popelot, or such a *****.                          puppet
Full brighter was the shining of her hue,
Than in the Tower the noble* forged new.                a gold coin
But of her song, it was as loud and yern
,                  lively
As any swallow chittering on a bern
.                              barn
Thereto
she coulde skip, and make a game                 also *romp
As any kid or calf following his dame.
Her mouth was sweet as braket, or as methe                    mead
Or hoard of apples, laid in hay or heath.
Wincing* she was as is a jolly colt,                           skittish
Long as a mast, and upright as a bolt.
A brooch she bare upon her low collere,
As broad as is the boss of a bucklere.
Her shoon were laced on her legges high;
She was a primerole,
a piggesnie ,                        primrose
For any lord t' have ligging
in his bed,                         lying
Or yet for any good yeoman to wed.

Now, sir, and eft
sir, so befell the case,                       again
That on a day this Hendy Nicholas
Fell with this younge wife to rage
and play,       toy, play the rogue
While that her husband was at Oseney,
As clerkes be full subtle and full quaint.
And privily he caught her by the queint,
                          ****
And said; "Y-wis,
but if I have my will,                     assuredly
For *derne love of thee, leman, I spill."
     for earnest love of thee
And helde her fast by the haunche bones,          my mistress, I perish

And saide "Leman, love me well at once,
Or I will dien, all so God me save."
And she sprang as a colt doth in the trave:
And with her head she writhed fast away,
And said; "I will not kiss thee, by my fay.                      faith
Why let be," quoth she,
Jeanne-Marie a des mains fortes,
Mains sombres que l'été tanna,
Mains pâles comme des mains mortes.
- Sont-ce des mains de Juana ?

Ont-elles pris les crèmes brunes
Sur les mares des voluptés ?
Ont-elles trempé dans des lunes
Aux étangs de sérénités ?

Ont-elles bu des cieux barbares,
Calmes sur les genoux charmants ?
Ont-elles roulé des cigares
Ou trafiqué des diamants ?

Sur les pieds ardents des Madones
Ont-elles fané des fleurs d'or ?
C'est le sang noir des belladones
Qui dans leur paume éclate et dort.

Mains chasseresses des diptères
Dont bombinent les bleuisons
Aurorales, vers les nectaires ?
Mains décanteuses de poisons ?

Oh ! quel Rêve les a saisies
Dans les pandiculations ?
Un rêve inouï des Asies,
Des Khenghavars ou des Sions ?

- Ces mains n'ont pas vendu d'oranges,
Ni bruni sur les pieds des dieux :
Ces mains n'ont pas lavé les langes
Des lourds petits enfants sans yeux.

Ce ne sont pas mains de cousine
Ni d'ouvrières aux gros fronts
Que brûle, aux bois puant l'usine,
Un soleil ivre de goudrons.

Ce sont des ployeuses d'échines,
Des mains qui ne font jamais mal,
Plus fatales que des machines,
Plus fortes que tout un cheval !

Remuant comme des fournaises,
Et secouant tous ses frissons,
Leur chair chante des Marseillaises
Et jamais les Eleisons !

Ça serrerait vos cous, ô femmes
Mauvaises, ça broierait vos mains,
Femmes nobles, vos mains infâmes
Pleines de blancs et de carmins.

L'éclat de ces mains amoureuses
Tourne le crâne des brebis !
Dans leurs phalanges savoureuses
Le grand soleil met un rubis !

Une tache de populace
Les brunit comme un sein d'hier ;
Le dos de ces Mains est la place
Qu'en baisa tout Révolté fier !

Elles ont pâli, merveilleuses,
Au grand soleil d'amour chargé,
Sur le bronze des mitrailleuses
A travers Paris insurgé !

Ah ! quelquefois, ô Mains sacrées,
A vos poings, Mains où tremblent nos
Lèvres jamais désenivrées,
Crie une chaîne aux clairs anneaux !

Et c'est un soubresaut étrange
Dans nos êtres, quand, quelquefois,
On veut vous déhâler, Mains d'ange,
En vous faisant saigner les doigts !
The double 12 sorwe of Troilus to tellen,  
That was the king Priamus sone of Troye,
In lovinge, how his aventures fellen
Fro wo to wele, and after out of Ioye,
My purpos is, er that I parte fro ye.  
Thesiphone, thou help me for tendyte
Thise woful vers, that wepen as I wryte!

To thee clepe I, thou goddesse of torment,
Thou cruel Furie, sorwing ever in peyne;
Help me, that am the sorwful instrument  
That helpeth lovers, as I can, to pleyne!
For wel sit it, the sothe for to seyne,
A woful wight to han a drery fere,
And, to a sorwful tale, a sory chere.

For I, that god of Loves servaunts serve,  
Ne dar to Love, for myn unlyklinesse,
Preyen for speed, al sholde I therfor sterve,
So fer am I fro his help in derknesse;
But nathelees, if this may doon gladnesse
To any lover, and his cause avayle,  
Have he my thank, and myn be this travayle!

But ye loveres, that bathen in gladnesse,
If any drope of pitee in yow be,
Remembreth yow on passed hevinesse
That ye han felt, and on the adversitee  
Of othere folk, and thenketh how that ye
Han felt that Love dorste yow displese;
Or ye han wonne hym with to greet an ese.

And preyeth for hem that ben in the cas
Of Troilus, as ye may after here,  
That love hem bringe in hevene to solas,
And eek for me preyeth to god so dere,
That I have might to shewe, in som manere,
Swich peyne and wo as Loves folk endure,
In Troilus unsely aventure.  

And biddeth eek for hem that been despeyred
In love, that never nil recovered be,
And eek for hem that falsly been apeyred
Thorugh wikked tonges, be it he or she;
Thus biddeth god, for his benignitee,  
So graunte hem sone out of this world to pace,
That been despeyred out of Loves grace.

And biddeth eek for hem that been at ese,
That god hem graunte ay good perseveraunce,
And sende hem might hir ladies so to plese,  
That it to Love be worship and plesaunce.
For so hope I my soule best avaunce,
To preye for hem that Loves servaunts be,
And wryte hir wo, and live in charitee.

And for to have of hem compassioun  
As though I were hir owene brother dere.
Now herkeneth with a gode entencioun,
For now wol I gon streight to my matere,
In whiche ye may the double sorwes here
Of Troilus, in loving of Criseyde,  
And how that she forsook him er she deyde.

It is wel wist, how that the Grekes stronge
In armes with a thousand shippes wente
To Troyewardes, and the citee longe
Assegeden neigh ten yeer er they stente,  
And, in diverse wyse and oon entente,
The ravisshing to wreken of Eleyne,
By Paris doon, they wroughten al hir peyne.

Now fil it so, that in the toun ther was
Dwellinge a lord of greet auctoritee,  
A gret devyn that cleped was Calkas,
That in science so expert was, that he
Knew wel that Troye sholde destroyed be,
By answere of his god, that highte thus,
Daun Phebus or Apollo Delphicus.  

So whan this Calkas knew by calculinge,
And eek by answere of this Appollo,
That Grekes sholden swich a peple bringe,
Thorugh which that Troye moste been for-do,
He caste anoon out of the toun to go;  
For wel wiste he, by sort, that Troye sholde
Destroyed ben, ye, wolde who-so nolde.

For which, for to departen softely
Took purpos ful this forknowinge wyse,
And to the Grekes ost ful prively  
He stal anoon; and they, in curteys wyse,
Hym deden bothe worship and servyse,
In trust that he hath conning hem to rede
In every peril which that is to drede.

The noyse up roos, whan it was first aspyed,  
Thorugh al the toun, and generally was spoken,
That Calkas traytor fled was, and allyed
With hem of Grece; and casten to ben wroken
On him that falsly hadde his feith so broken;
And seyden, he and al his kin at ones  
Ben worthy for to brennen, fel and bones.

Now hadde Calkas left, in this meschaunce,
Al unwist of this false and wikked dede,
His doughter, which that was in gret penaunce,
For of hir lyf she was ful sore in drede,  
As she that niste what was best to rede;
For bothe a widowe was she, and allone
Of any freend to whom she dorste hir mone.

Criseyde was this lady name a-right;
As to my dome, in al Troyes citee  
Nas noon so fair, for passing every wight
So aungellyk was hir natyf beautee,
That lyk a thing immortal semed she,
As doth an hevenish parfit creature,
That doun were sent in scorning of nature.  

This lady, which that al-day herde at ere
Hir fadres shame, his falsnesse and tresoun,
Wel nigh out of hir wit for sorwe and fere,
In widewes habit large of samit broun,
On knees she fil biforn Ector a-doun;  
With pitous voys, and tendrely wepinge,
His mercy bad, hir-selven excusinge.

Now was this Ector pitous of nature,
And saw that she was sorwfully bigoon,
And that she was so fair a creature;  
Of his goodnesse he gladed hir anoon,
And seyde, 'Lat your fadres treson goon
Forth with mischaunce, and ye your-self, in Ioye,
Dwelleth with us, whyl you good list, in Troye.

'And al thonour that men may doon yow have,  
As ferforth as your fader dwelled here,
Ye shul han, and your body shal men save,
As fer as I may ought enquere or here.'
And she him thonked with ful humble chere,
And ofter wolde, and it hadde ben his wille,  
And took hir leve, and hoom, and held hir stille.

And in hir hous she abood with swich meynee
As to hir honour nede was to holde;
And whyl she was dwellinge in that citee,
Kepte hir estat, and bothe of yonge and olde  
Ful wel beloved, and wel men of hir tolde.
But whether that she children hadde or noon,
I rede it naught; therfore I late it goon.

The thinges fellen, as they doon of werre,
Bitwixen hem of Troye and Grekes ofte;  
For som day boughten they of Troye it derre,
And eft the Grekes founden no thing softe
The folk of Troye; and thus fortune on-lofte,
And under eft, gan hem to wheelen bothe
After hir cours, ay whyl they were wrothe.  

But how this toun com to destruccioun
Ne falleth nought to purpos me to telle;
For it were a long digressioun
Fro my matere, and yow to longe dwelle.
But the Troyane gestes, as they felle,  
In Omer, or in Dares, or in Dyte,
Who-so that can, may rede hem as they wryte.

But though that Grekes hem of Troye shetten,
And hir citee bisegede al a-boute,
Hir olde usage wolde they not letten,  
As for to honoure hir goddes ful devoute;
But aldermost in honour, out of doute,
They hadde a relik hight Palladion,
That was hir trist a-boven everichon.

And so bifel, whan comen was the tyme  
Of Aperil, whan clothed is the mede
With newe grene, of ***** Ver the pryme,
And swote smellen floures whyte and rede,
In sondry wyses shewed, as I rede,
The folk of Troye hir observaunces olde,  
Palladiones feste for to holde.

And to the temple, in al hir beste wyse,
In general, ther wente many a wight,
To herknen of Palladion servyse;
And namely, so many a ***** knight,  
So many a lady fresh and mayden bright,
Ful wel arayed, bothe moste and leste,
Ye, bothe for the seson and the feste.

Among thise othere folk was Criseyda,
In widewes habite blak; but nathelees,  
Right as our firste lettre is now an A,
In beautee first so stood she, makelees;
Hir godly looking gladede al the prees.
Nas never seyn thing to ben preysed derre,
Nor under cloude blak so bright a sterre  

As was Criseyde, as folk seyde everichoon
That hir behelden in hir blake wede;
And yet she stood ful lowe and stille alloon,
Bihinden othere folk, in litel brede,
And neigh the dore, ay under shames drede,  
Simple of a-tyr, and debonaire of chere,
With ful assured loking and manere.

This Troilus, as he was wont to gyde
His yonge knightes, ladde hem up and doun
In thilke large temple on every syde,  
Biholding ay the ladyes of the toun,
Now here, now there, for no devocioun
Hadde he to noon, to reven him his reste,
But gan to preyse and lakken whom him leste.

And in his walk ful fast he gan to wayten  
If knight or squyer of his companye
Gan for to syke, or lete his eyen bayten
On any woman that he coude aspye;
He wolde smyle, and holden it folye,
And seye him thus, 'god wot, she slepeth softe  
For love of thee, whan thou tornest ful ofte!

'I have herd told, pardieux, of your livinge,
Ye lovers, and your lewede observaunces,
And which a labour folk han in winninge
Of love, and, in the keping, which doutaunces;  
And whan your preye is lost, wo and penaunces;
O verrey foles! nyce and blinde be ye;
Ther nis not oon can war by other be.'

And with that word he gan cast up the browe,
Ascaunces, 'Lo! is this nought wysly spoken?'  
At which the god of love gan loken rowe
Right for despyt, and shoop for to ben wroken;
He kidde anoon his bowe nas not broken;
For sodeynly he hit him at the fulle;
And yet as proud a pekok can he pulle.  

O blinde world, O blinde entencioun!
How ofte falleth al theffect contraire
Of surquidrye and foul presumpcioun;
For caught is proud, and caught is debonaire.
This Troilus is clomben on the staire,  
And litel weneth that he moot descenden.
But al-day falleth thing that foles ne wenden.

As proude Bayard ginneth for to skippe
Out of the wey, so priketh him his corn,
Til he a lash have of the longe whippe,  
Than thenketh he, 'Though I praunce al biforn
First in the trays, ful fat and newe shorn,
Yet am I but an hors, and horses lawe
I moot endure, and with my feres drawe.'

So ferde it by this fers and proude knight;  
Though he a worthy kinges sone were,
And wende nothing hadde had swiche might
Ayens his wil that sholde his herte stere,
Yet with a look his herte wex a-fere,
That he, that now was most in pryde above,  
Wex sodeynly most subget un-to love.

For-thy ensample taketh of this man,
Ye wyse, proude, and worthy folkes alle,
To scornen Love, which that so sone can
The freedom of your hertes to him thralle;  
For ever it was, and ever it shal bifalle,
That Love is he that alle thing may binde;
For may no man for-do the lawe of kinde.

That this be sooth, hath preved and doth yet;
For this trowe I ye knowen, alle or some,  
Men reden not that folk han gretter wit
Than they that han be most with love y-nome;
And strengest folk ben therwith overcome,
The worthiest and grettest of degree:
This was, and is, and yet men shal it see.  

And trewelich it sit wel to be so;
For alderwysest han ther-with ben plesed;
And they that han ben aldermost in wo,
With love han ben conforted most and esed;
And ofte it hath the cruel herte apesed,  
And worthy folk maad worthier of name,
And causeth most to dreden vyce and shame.

Now sith it may not goodly be withstonde,
And is a thing so vertuous in kinde,
Refuseth not to Love for to be bonde,  
Sin, as him-selven list, he may yow binde.
The yerde is bet that bowen wole and winde
Than that that brest; and therfor I yow rede
To folwen him that so wel can yow lede.

But for to tellen forth in special  
As of this kinges sone of which I tolde,
And leten other thing collateral,
Of him thenke I my tale for to holde,
Both of his Ioye, and of his cares colde;
And al his werk, as touching this matere,  
For I it gan, I wol ther-to refere.

With-inne the temple he wente him forth pleyinge,
This Troilus, of every wight aboute,
On this lady and now on that lokinge,
Wher-so she were of toune, or of with-oute:  
And up-on cas bifel, that thorugh a route
His eye perced, and so depe it wente,
Til on Criseyde it smoot, and ther it stente.

And sodeynly he wax ther-with astoned,
And gan hire bet biholde in thrifty wyse:  
'O mercy, god!' thoughte he, 'wher hastow woned,
That art so fair and goodly to devyse?'
Ther-with his herte gan to sprede and ryse,
And softe sighed, lest men mighte him here,
And caughte a-yein his firste pleyinge chere.  

She nas nat with the leste of hir stature,
But alle hir limes so wel answeringe
Weren to womanhode, that creature
Was neuer lasse mannish in seminge.
And eek the pure wyse of here meninge  
Shewede wel, that men might in hir gesse
Honour, estat, and wommanly noblesse.

To Troilus right wonder wel with-alle
Gan for to lyke hir meninge and hir chere,
Which somdel deynous was, for she leet falle  
Hir look a lite a-side, in swich manere,
Ascaunces, 'What! May I not stonden here?'
And after that hir loking gan she lighte,
That never thoughte him seen so good a sighte.

And of hir look in him ther gan to quiken  
So greet desir, and swich affeccioun,
That in his herte botme gan to stiken
Of hir his fixe and depe impressioun:
And though he erst hadde poured up and doun,
He was tho glad his hornes in to shrinke;  
Unnethes wiste he how to loke or winke.

Lo, he that leet him-selven so konninge,
And scorned hem that loves peynes dryen,
Was ful unwar that love hadde his dwellinge
With-inne the subtile stremes of hir yen;  
That sodeynly him thoughte he felte dyen,
Right with hir look, the spirit in his herte;
Blissed be love, that thus can folk converte!

She, this in blak, likinge to Troylus,
Over alle thyng, he stood for to biholde;  
Ne his desir, ne wherfor he stood thus,
He neither chere made, ne worde tolde;
But from a-fer, his maner for to holde,
On other thing his look som-tyme he caste,
And eft on hir, whyl that servyse laste.  

And after this, not fulliche al awhaped,
Out of the temple al esiliche he wente,
Repentinge him that he hadde ever y-iaped
Of loves folk, lest fully the descente
Of scorn fille on him-self; but, what he mente,  
Lest it were wist on any maner syde,
His wo he gan dissimulen and hyde.

Whan he was fro the temple thus departed,
He streyght anoon un-to his paleys torneth,
Right with hir look thurgh-shoten and thurgh-darted,  
Al feyneth he in lust that he soiorneth;
And al his chere and speche also he borneth;
And ay, of loves servants every whyle,
Him-self to wrye, at hem he gan to smyle.

And seyde, 'Lord, so ye live al in lest,  
Ye loveres! For the conningest of yow,
That serveth most ententiflich and best,
Him *** as often harm ther-of as prow;
Your hyre is quit ayein, ye, god wot how!
Nought wel for wel, but scorn for good servyse;  
In feith, your ordre is ruled in good wyse!

'In noun-certeyn ben alle your observaunces,
But it a sely fewe poyntes be;
Ne no-thing asketh so grete attendaunces
As doth youre lay, and that knowe alle ye;  
But that is not the worste, as mote I thee;
But, tolde I yow the worste poynt, I leve,
Al seyde I sooth, ye wolden at me greve!

'But tak this, that ye loveres ofte eschuwe,
Or elles doon of good entencioun,  
Ful ofte thy lady wole it misconstrue,
And deme it harm in hir opinioun;
And yet if she, for other enchesoun,
Be wrooth, than shalt thou han a groyn anoon:
Lord! wel is him that may be of yow oon!'  

But for al this, whan that he say his tyme,
He held his pees, non other bote him gayned;
For love bigan his fetheres so to lyme,
That wel unnethe un-to his folk he fayned
That othere besye nedes him destrayned;  
For wo was him, that what to doon he niste,
But bad his folk to goon wher that hem liste.

And whan that he in chaumbre was allone,
He doun up-on his beddes feet him sette,
And first be gan to syke, and eft to grone,  
And thoughte ay on hir so, with-outen lette,
That, as he sat and wook, his spirit mette
That he hir saw a temple, and al the wyse
Right of hir loke, and gan it newe avyse.

Thus gan he make a mirour of his minde,  
In which he saugh al hoolly hir figure;
And that he wel coude in his herte finde,
It was to him a right good aventure
To love swich oon, and if he dide his cure
To serven hir, yet mighte he falle in grace,  
Or elles, for oon of hir servaunts pace.

Imagininge that travaille nor grame
Ne mighte, for so goodly oon, be lorn
As she, ne him for his desir ne shame,
Al were it wist, but in prys and up-born  
Of alle lovers wel more than biforn;
Thus argumented he in his ginninge,
Ful unavysed of his wo cominge.

Thus took he purpos loves craft to suwe,
And thou
A chaque fois que tu rentres de bonne heure,
Mon coeur se remplit de Bonheur.
Tu illumines nos soirées monotones,
Tu nous fais rire avec tes blagues, même si elles redondonnent.
Avec toi on ne s'ennuie jamais,
On parle, on crie, on s'échange des secrets.
Tu n'hésites pas à nous faire des câlins,
Même quand tu t'en vas de bon matin.
On n'aime pas te voir partir si ****,
On préfère quand tu restes dans le coin.
La Russie, c'est comme le bout du monde,
Heureusement que tu n'es pas James Bond!
On aime te voir à la maison,
Avec tes pyjamas troués et ta barbe de bison.
Même pas peur quand tu vas chez le coiffeur,
On connaît ta tête de pomme par cœur!
On a beau se plaindre de ton penchant pour les sucreries,
Il faut avouer qu'un peu de graisse, c'est aussi confortable qu'un lit.
Même si tu trempes ton pain au fromage dans ton café,
Nous, on a même pas peur de t'embrasser.
On a toujours hâte que tu reviennes,
Même si ca ne fait pas une heure que tu es parti.
Ne t'inquiètes pas on restera les mêmes,
On sera toujours là pour te faire des guilis.
T'es le roi des bisous, t'es le roi des Papas,
On t'aimera toujours, même si tu manges du chocolat!
THE PROLOGUE.

The Sompnour in his stirrups high he stood,
Upon this Friar his hearte was so wood,                        furious
That like an aspen leaf he quoke* for ire:             quaked, trembled
"Lordings," quoth he, "but one thing I desire;
I you beseech, that of your courtesy,
Since ye have heard this false Friar lie,
As suffer me I may my tale tell
This Friar boasteth that he knoweth hell,
And, God it wot, that is but little wonder,
Friars and fiends be but little asunder.
For, pardie, ye have often time heard tell,
How that a friar ravish'd was to hell
In spirit ones by a visioun,
And, as an angel led him up and down,
To shew him all the paines that there were,
In all the place saw he not a frere;
Of other folk he saw enough in woe.
Unto the angel spake the friar tho;
                               then
'Now, Sir,' quoth he, 'have friars such a grace,
That none of them shall come into this place?'
'Yes' quoth the angel; 'many a millioun:'
And unto Satanas he led him down.
'And now hath Satanas,' said he, 'a tail
Broader than of a carrack is the sail.
Hold up thy tail, thou Satanas,' quoth he,
'Shew forth thine erse, and let the friar see
Where is the nest of friars in this place.'
And *less than half a furlong way of space
            immediately
Right so as bees swarmen out of a hive,
Out of the devil's erse there gan to drive
A twenty thousand friars on a rout.                       in a crowd
And throughout hell they swarmed all about,
And came again, as fast as they may gon,
And in his erse they creeped every one:
He clapt his tail again, and lay full still.
This friar, when he looked had his fill
Upon the torments of that sorry place,
His spirit God restored of his grace
Into his body again, and he awoke;
But natheless for feare yet he quoke,
So was the devil's erse aye in his mind;
That is his heritage, of very kind                by his very nature
God save you alle, save this cursed Frere;
My prologue will I end in this mannere.

Notes to the Prologue to the Sompnour's Tale

1. Carrack: A great ship of burden used by the Portuguese; the
name is from the Italian, "cargare," to load

2. In less than half a furlong way of space: immediately;
literally, in less time than it takes to walk half a furlong (110
yards).

THE TALE.

Lordings, there is in Yorkshire, as I guess,
A marshy country called Holderness,
In which there went a limitour about
To preach, and eke to beg, it is no doubt.
And so befell that on a day this frere
Had preached at a church in his mannere,
And specially, above every thing,
Excited he the people in his preaching
To trentals,  and to give, for Godde's sake,
Wherewith men mighte holy houses make,
There as divine service is honour'd,
Not there as it is wasted and devour'd,
Nor where it needeth not for to be given,
As to possessioners,  that may liven,
Thanked be God, in wealth and abundance.
"Trentals," said he, "deliver from penance
Their friendes' soules, as well old as young,
Yea, when that they be hastily y-sung, --
Not for to hold a priest jolly and gay,
He singeth not but one mass in a day.
"Deliver out," quoth he, "anon the souls.
Full hard it is, with flesh-hook or with owls                     *awls
To be y-clawed, or to burn or bake:
Now speed you hastily, for Christe's sake."
And when this friar had said all his intent,
With qui *** patre forth his way he went,
When folk in church had giv'n him what them lest;
              pleased
He went his way, no longer would he rest,
With scrip and tipped staff, *y-tucked high:
      with his robe tucked
In every house he gan to pore
and pry,                   up high* peer
And begged meal and cheese, or elles corn.
His fellow had a staff tipped with horn,
A pair of tables
all of ivory,                         writing tablets
And a pointel
y-polish'd fetisly,                  pencil *daintily
And wrote alway the names, as he stood;
Of all the folk that gave them any good,
Askaunce* that he woulde for them pray.                    see note
"Give us a bushel wheat, or malt, or rey,
                          rye
A Godde's kichel,
or a trip
of cheese,        little cake scrap
Or elles what you list, we may not chese;
                       choose
A Godde's halfpenny,  or a mass penny;
Or give us of your brawn, if ye have any;
A dagon
of your blanket, leve dame,                            remnant
Our sister dear, -- lo, here I write your name,--
Bacon or beef, or such thing as ye find."
A sturdy harlot
went them aye behind,                   manservant
That was their hoste's man, and bare a sack,
And what men gave them, laid it on his back
And when that he was out at door, anon
He *planed away
the names every one,                       rubbed out
That he before had written in his tables:
He served them with nifles* and with fables. --             silly tales

"Nay, there thou liest, thou Sompnour," quoth the Frere.
"Peace," quoth our Host, "for Christe's mother dear;
Tell forth thy tale, and spare it not at all."
"So thrive I," quoth this Sompnour, "so I shall." --

So long he went from house to house, till he
Came to a house, where he was wont to be
Refreshed more than in a hundred places
Sick lay the husband man, whose that the place is,
Bed-rid upon a couche low he lay:
"Deus hic,"* quoth he; "O Thomas friend, good day,"       God be here
Said this friar, all courteously and soft.
"Thomas," quoth he, "God yield it you, full oft       reward you for
Have I upon this bench fared full well,
Here have I eaten many a merry meal."
And from the bench he drove away the cat,
And laid adown his potent* and his hat,                       staff
And eke his scrip, and sat himself adown:
His fellow was y-walked into town
Forth with his knave,
into that hostelry                       servant
Where as he shope
him that night to lie.              shaped, purposed

"O deare master," quoth this sicke man,
"How have ye fared since that March began?
I saw you not this fortenight and more."
"God wot," quoth he, "labour'd have I full sore;
And specially for thy salvation
Have I said many a precious orison,
And for mine other friendes, God them bless.
I have this day been at your church at mess,
                      mass
And said sermon after my simple wit,
Not all after the text of Holy Writ;
For it is hard to you, as I suppose,
And therefore will I teach you aye the glose.
           gloss, comment
Glosing is a full glorious thing certain,
For letter slayeth, as we clerkes
sayn.                       scholars
There have I taught them to be charitable,
And spend their good where it is reasonable.
And there I saw our dame; where is she?"
"Yonder I trow that in the yard she be,"
Saide this man; "and she will come anon."
"Hey master, welcome be ye by Saint John,"
Saide this wife; "how fare ye heartily?"

This friar riseth up full courteously,
And her embraceth *in his armes narrow,
                        closely
And kiss'th her sweet, and chirketh as a sparrow
With his lippes: "Dame," quoth he, "right well,
As he that is your servant every deal.
                            whit
Thanked be God, that gave you soul and life,
Yet saw I not this day so fair a wife
In all the churche, God so save me,"
"Yea, God amend defaultes, Sir," quoth she;
"Algates
welcome be ye, by my fay."                             always
"Grand mercy, Dame; that have I found alway.
But of your greate goodness, by your leave,
I woulde pray you that ye not you grieve,
I will with Thomas speak *a little throw:
              a little while
These curates be so negligent and slow
To ***** tenderly a conscience.
In shrift* and preaching is my diligence                     confession
And study in Peter's wordes and in Paul's;
I walk and fishe Christian menne's souls,
To yield our Lord Jesus his proper rent;
To spread his word is alle mine intent."
"Now by your faith, O deare Sir," quoth she,
"Chide him right well, for sainte charity.
He is aye angry as is a pismire,
                                   ant
Though that he have all that he can desire,
Though I him wrie
at night, and make him warm,                   cover
And ov'r him lay my leg and eke mine arm,
He groaneth as our boar that lies in sty:
Other disport of him right none have I,
I may not please him in no manner case."
"O Thomas, *je vous dis,
Thomas, Thomas,                   I tell you
This maketh the fiend, this must be amended.     is the devil's work
Ire is a thing that high God hath defended,                  forbidden
And thereof will I speak a word or two."
"Now, master," quoth the wife, "ere that I go,
What will ye dine? I will go thereabout."
"Now, Dame," quoth he, "je vous dis sans doute,
Had I not of a capon but the liver,
And of your white bread not but a shiver,                   *thin slice
And after that a roasted pigge's head,
(But I would that for me no beast were dead,)
Then had I with you homely suffisance.
I am a man of little sustenance.
My spirit hath its fost'ring in the Bible.
My body is aye so ready and penible
                        painstaking
To wake,
that my stomach is destroy'd.                           watch
I pray you, Dame, that ye be not annoy'd,
Though I so friendly you my counsel shew;
By God, I would have told it but to few."
"Now, Sir," quoth she, "but one word ere I go;
My child is dead within these weeke's two,
Soon after that ye went out of this town."

"His death saw I by revelatioun,"
Said this friar, "at home in our dortour.
               dormitory
I dare well say, that less than half an hour
Mter his death, I saw him borne to bliss
In mine vision, so God me wiss.
                                 direct
So did our sexton, and our fermerere,
                 infirmary-keeper
That have been true friars fifty year, --
They may now, God be thanked of his love,
Make their jubilee, and walk above.
And up I rose, and all our convent eke,
With many a teare trilling on my cheek,
Withoute noise or clattering of bells,
Te Deum was our song, and nothing else,
Save that to Christ I bade an orison,
Thanking him of my revelation.
For, Sir and Dame, truste me right well,
Our orisons be more effectuel,
And more we see of Christe's secret things,
Than *borel folk,
although that they be kings.             laymen
We live in povert', and in abstinence,
And borel folk in riches and dispence
Of meat and drink, and in their foul delight.
We have this worlde's lust* all in despight
      * pleasure *contempt
Lazar and Dives lived diversely,
And diverse guerdon
hadde they thereby.                         reward
Whoso will pray, he must fast and be clean,
And fat his soul, and keep his body lean
We fare as saith th' apostle; cloth
and food                  clothing
Suffice us, although they be not full good.
The cleanness and the fasting of us freres
Maketh that Christ accepteth our prayeres.
Lo, Moses forty days and forty night
Fasted, ere that the high God full of might
Spake with him in the mountain of Sinai:
With empty womb
of fasting many a day                          stomach
Received he the lawe, that was writ
With Godde's finger; and Eli, well ye wit,
                    know
In Mount Horeb, ere he had any speech
With highe God, that is our live's leech,
            *physician, healer
He fasted long, and was in contemplance.
Aaron, that had the temple in governance,
And eke the other priestes every one,
Into the temple when they shoulde gon
To praye for the people, and do service,
They woulde drinken in no manner wise
No drinke, which that might them drunken make,
But t
THE PROLOGUE. 1

Experience, though none authority                  authoritative texts
Were in this world, is right enough for me
To speak of woe that is in marriage:
For, lordings, since I twelve year was of age,
(Thanked be God that is etern on live),              lives eternally
Husbands at the church door have I had five,2
For I so often have y-wedded be,
And all were worthy men in their degree.
But me was told, not longe time gone is
That sithen* Christe went never but ones                          since
To wedding, in the Cane
of Galilee,                               Cana
That by that ilk
example taught he me,                            same
That I not wedded shoulde be but once.
Lo, hearken eke a sharp word for the *****,
                   occasion
Beside a welle Jesus, God and man,
Spake in reproof of the Samaritan:
"Thou hast y-had five husbandes," said he;
"And thilke
man, that now hath wedded thee,                       that
Is not thine husband:" 3 thus said he certain;
What that he meant thereby, I cannot sayn.
But that I aske, why the fifthe man
Was not husband to the Samaritan?
How many might she have in marriage?
Yet heard I never tellen *in mine age
                      in my life
Upon this number definitioun.
Men may divine, and glosen* up and down;                        comment
But well I wot, express without a lie,
God bade us for to wax and multiply;
That gentle text can I well understand.
Eke well I wot, he said, that mine husband
Should leave father and mother, and take to me;
But of no number mention made he,
Of bigamy or of octogamy;
Why then should men speak of it villainy?
     as if it were a disgrace

Lo here, the wise king Dan
Solomon,                           Lord 4
I trow that he had wives more than one;
As would to God it lawful were to me
To be refreshed half so oft as he!
What gift
of God had he for all his wives?     special favour, licence
No man hath such, that in this world alive is.
God wot, this noble king, *as to my wit,
              as I understand
The first night had many a merry fit
With each of them, so well was him on live.         so well he lived
Blessed be God that I have wedded five!
Welcome the sixth whenever that he shall.
For since I will not keep me chaste in all,
When mine husband is from the world y-gone,
Some Christian man shall wedde me anon.
For then th' apostle saith that I am free
To wed, a' God's half, where it liketh me.             on God's part
He saith, that to be wedded is no sin;
Better is to be wedded than to brin.                              burn
What recketh* me though folk say villainy                 care *evil
Of shrewed* Lamech, and his bigamy?                     impious, wicked
I wot well Abraham was a holy man,
And Jacob eke, as far as ev'r I can.
                              know
And each of them had wives more than two;
And many another holy man also.
Where can ye see, *in any manner age,
                   in any period
That highe God defended* marriage                           forbade 5
By word express? I pray you tell it me;
Or where commanded he virginity?
I wot as well as you, it is no dread,
                            doubt
Th' apostle, when he spake of maidenhead,
He said, that precept thereof had he none:
Men may counsel a woman to be one,
                              a maid
But counseling is no commandement;
He put it in our owen judgement.
For, hadde God commanded maidenhead,
Then had he ******
wedding out of dread;
           condemned *doubt
And certes, if there were no seed y-sow,                          sown
Virginity then whereof should it grow?
Paul durste not commanden, at the least,
A thing of which his Master gave no hest.                      command
The dart* is set up for virginity;                             goal 6
Catch whoso may, who runneth best let see.
But this word is not ta'en of every wight,
But there as* God will give it of his might.             except where
I wot well that th' apostle was a maid,
But natheless, although he wrote and said,
He would that every wight were such as he,
All is but counsel to virginity.
And, since to be a wife he gave me leave
Of indulgence, so is it no repreve                   *scandal, reproach
To wedde me, if that my make
should die,                 mate, husband
Without exception
of bigamy;                          charge, reproach
All were it* good no woman for to touch            though it might be
(He meant as in his bed or in his couch),
For peril is both fire and tow t'assemble
Ye know what this example may resemble.
This is all and some, he held virginity
More profit than wedding in frailty:
(Frailty clepe I, but if that he and she           frailty I call it,
Would lead their lives all in chastity),                         unless

I grant it well, I have of none envy
Who maidenhead prefer to bigamy;
It liketh them t' be clean in body and ghost;                     *soul
Of mine estate
I will not make a boast.                      condition

For, well ye know, a lord in his household
Hath not every vessel all of gold; 7
Some are of tree, and do their lord service.
God calleth folk to him in sundry wise,
And each one hath of God a proper gift,
Some this, some that, as liketh him to shift.
      appoint, distribute
Virginity is great perfection,
And continence eke with devotion:
But Christ, that of perfection is the well,
                   fountain
Bade not every wight he should go sell
All that he had, and give it to the poor,
And in such wise follow him and his lore:
                     doctrine
He spake to them that would live perfectly, --
And, lordings, by your leave, that am not I;
I will bestow the flower of mine age
In th' acts and in the fruits of marriage.
Tell me also, to what conclusion
                          end, purpose
Were members made of generation,
And of so perfect wise a wight
y-wrought?                        being
Trust me right well, they were not made for nought.
Glose whoso will, and say both up and down,
That they were made for the purgatioun
Of *****, and of other thinges smale,
And eke to know a female from a male:
And for none other cause? say ye no?
Experience wot well it is not so.
So that the clerkes
be not with me wroth,                     scholars
I say this, that they were made for both,
That is to say, *for office, and for ease
                 for duty and
Of engendrure, there we God not displease.                 for pleasure

Why should men elles in their bookes set,
That man shall yield unto his wife her debt?
Now wherewith should he make his payement,
If he us'd not his silly instrument?
Then were they made upon a creature
To purge *****, and eke for engendrure.
But I say not that every wight is hold,                        obliged
That hath such harness* as I to you told,                     equipment
To go and use them in engendrure;
Then should men take of chastity no cure.
                         care
Christ was a maid, and shapen
as a man,                      fashioned
And many a saint, since that this world began,
Yet ever liv'd in perfect chastity.
I will not vie
with no virginity.                              contend
Let them with bread of pured
wheat be fed,                    purified
And let us wives eat our barley bread.
And yet with barley bread, Mark tell us can,8
Our Lord Jesus refreshed many a man.
In such estate as God hath *cleped us,
                    called us to
I'll persevere, I am not precious,
                         over-dainty
In wifehood I will use mine instrument
As freely as my Maker hath it sent.
If I be dangerous
God give me sorrow;            sparing of my favours
Mine husband shall it have, both eve and morrow,
When that him list come forth and pay his debt.
A husband will I have, I *will no let,
         will bear no hindrance
Which shall be both my debtor and my thrall,                     *slave
And have his tribulation withal
Upon his flesh, while that I am his wife.
I have the power during all my life
Upon his proper body, and not he;
Right thus th' apostle told it unto me,
And bade our husbands for to love us well;
All this sentence me liketh every deal.
                           whit

Up start the Pardoner, and that anon;
"Now, Dame," quoth he, "by God and by Saint John,
Ye are a noble preacher in this case.
I was about to wed a wife, alas!
What? should I bie
it on my flesh so dear?                  suffer for
Yet had I lever
wed no wife this year."                         rather
"Abide,"
quoth she; "my tale is not begun             wait in patience
Nay, thou shalt drinken of another tun
Ere that I go, shall savour worse than ale.
And when that I have told thee forth my tale
Of tribulation in marriage,
Of which I am expert in all mine age,
(This is to say, myself hath been the whip),
Then mayest thou choose whether thou wilt sip
Of *thilke tunne,
that I now shall broach.                   that tun
Beware of it, ere thou too nigh approach,
For I shall tell examples more than ten:
Whoso will not beware by other men,
By him shall other men corrected be:
These same wordes writeth Ptolemy;
Read in his Almagest, and take it there."
"Dame, I would pray you, if your will it were,"
Saide this Pardoner, "as ye began,
Tell forth your tale, and spare for no man,
And teach us younge men of your practique."
"Gladly," quoth she, "since that it may you like.
But that I pray to all this company,
If that I speak after my fantasy,
To take nought agrief* what I may say;                         to heart
For mine intent is only for to play.

Now, Sirs, then will I tell you forth my tale.
As ever may I drinke wine or ale
I shall say sooth; the husbands that I had
Three of them were good, and two were bad
The three were goode men, and rich, and old
Unnethes mighte they the statute hold      they could with difficulty
In which that they were bounden unto me.                   obey the law
Yet wot well what I mean of this, pardie.
                       *by God
As God me help, I laugh when tha
Paul d'Aubin Jan 2016
Fougères en Corse

Petits, elles nous faisaient peur par leurs frémissements,
sous la caresse du vent et par leur tournoiement,
de vert sombre et de senteurs acres de rivière.
Elles nous paraissaient animées d'une vie mystérieuse,
de landes, de lutins et d'enfants disparus ou dérobés,
Ces fougères nous les nommions : «Fizères».
Elles étaient pour nous source d'effroi et de maléfices,
Jamais nous n'aurions consentis à nous perdre dans l’ondulements de leurs vagues vertes, sous peine d'être aspirées par un magnétisme maléfique,
et devenir prisonniers de leurs immensités feuillues.
En automne, leurs couleurs se transformaient en dorées et en feux,
comme une chevelure rousse déployée ou la robe du renard roux, si vif.
Et quand le vent souffle, leurs feuilles font grand bruissement,
comme les tuyaux d'orgue d'une nature en remuement.
Alors les elfes et les esprits des défunts
Semblent s'en donner à cœur joie au-dessus la rivière «Catena»,
Et même les châtaigniers massifs semblent comme entraînés par le vent dans cette sarabande moins réglée que celle d'Haendel.

Paul Arrighi
Original French

Dictes moy ou, n'en quel pays,
Est Flora la belle Rommaine,
Archipiades ne Thaïs,
Qui fut sa cousine germaine,
Echo parlant quant bruyt on maine
Dessus riviere ou sus estan,
Qui beaulté ot trop plus q'humaine.
Mais ou sont les neiges d'antan?

Ou est la tres sage Helloïs,
Pour qui chastré fut et puis moyne
Pierre Esbaillart a Saint Denis?
Pour son amour ot ceste essoyne.
Semblablement, ou est la royne
Qui commanda que Buridan
Fust geté en ung sac en Saine?
Mais ou sont les neiges d'antan?

La royne Blanche comme lis
Qui chantoit a voix de seraine,
Berte au grand pié, Beatris, Alis,
Haremburgis qui tint le Maine,
Et Jehanne la bonne Lorraine
Qu'Englois brulerent a Rouan;
Ou sont ilz, ou, Vierge souvraine?
Mais ou sont les neiges d'antan?

Prince, n'enquerez de sepmaine
Ou elles sont, ne de cest an,
Qu'a ce reffrain ne vous remaine:
Mais ou sont les neiges d'antan?


English Translation

Ballad Of The Ladies Of Yore

Tell me where, in what country,
Is Flora the beautiful Roman,
Archipiada or Thais
Who was first cousin to her once,
Echo who speaks when there's a sound
On a pond or a river
Whose beauty was more than human?
But where are the snows of yesteryear?
Where is the leamed Heloise
For whom they castrated Pierre Abelard
And made him a monk at Saint-Denis,
For his love he took this pain,
Likewise where is the queen
Who commanded that Buridan
Be thrown in a sack into the Seine?
But where are the snows of yesteryear?

The queen white as a lily
Who sang with a siren's voice,
Big-footed Bertha, Beatrice, Alice,
Haremburgis who held Maine
And Jeanne the good maid of Lorraine
Whom the English bumt at Rouen, where,
Where are they, sovereign ******?
But where are the snows of yesteryear?

Prince, don't ask me in a week
or in a year what place they are;
I can only give you this refrain:
Where are the snows of yesteryear?
Heureux les cœurs, les cœurs de sang !
Leurs battements peuvent s'entendre ;
Et les bras ! Ils peuvent se tendre,
Se posséder en s'enlaçant.

Heureux aussi les doigts ! Ils touchent ;
Les yeux ! Ils voient. Heureux les corps !
Ils ont la paix quand ils se couchent,
Et le néant quand ils sont morts.

Mais, oh ! Bien à plaindre les âmes !
Elles ne se touchent jamais :
Elles ressemblent à des flammes
Ardentes sous un verre épais.

De leurs prisons mal transparentes
Ces flammes ont beau s'appeler,
Elles se sentent bien parentes,
Mais ne peuvent pas se mêler.

On dit qu'elles sont immortelles ;
Ah ! Mieux leur vaudrait vivre un jour,
Mais s'unir enfin !... dussent-elles
S'éteindre en épuisant l'amour !
THE PROLOGUE.

This worthy limitour, this noble Frere,
He made always a manner louring cheer                      countenance
Upon the Sompnour; but for honesty                            courtesy
No villain word as yet to him spake he:
But at the last he said unto the Wife:
"Dame," quoth he, "God give you right good life,
Ye have here touched, all so may I the,                         *thrive
In school matter a greate difficulty.
Ye have said muche thing right well, I say;
But, Dame, here as we ride by the way,
Us needeth not but for to speak of game,
And leave authorities, in Godde's name,
To preaching, and to school eke of clergy.
But if it like unto this company,
I will you of a Sompnour tell a game;
Pardie, ye may well knowe by the name,
That of a Sompnour may no good be said;
I pray that none of you be *evil paid;
                   dissatisfied
A Sompnour is a runner up and down
With mandements* for fornicatioun,                 mandates, summonses
And is y-beat at every towne's end."
Then spake our Host; "Ah, sir, ye should be hend         *civil, gentle
And courteous, as a man of your estate;
In company we will have no debate:
Tell us your tale, and let the Sompnour be."
"Nay," quoth the Sompnour, "let him say by me
What so him list; when it comes to my lot,
By God, I shall him quiten
every groat!                    pay him off
I shall him telle what a great honour
It is to be a flattering limitour
And his office I shall him tell y-wis".
Our Host answered, "Peace, no more of this."
And afterward he said unto the frere,
"Tell forth your tale, mine owen master dear."

Notes to the Prologue to the Friar's tale

1. On the Tale of the Friar, and that of the Sompnour which
follows, Tyrwhitt has remarked that they "are well engrafted
upon that of the Wife of Bath. The ill-humour which shows
itself between these two characters is quite natural, as no two
professions at that time were at more constant variance.  The
regular clergy, and particularly the mendicant friars, affected a
total exemption from all ecclesiastical jurisdiction,  except that
of the Pope, which made them exceedingly obnoxious to the
bishops and of course to all the inferior officers of the national
hierarchy." Both tales, whatever their origin, are bitter satires
on the greed and worldliness of the Romish clergy.


THE TALE.

Whilom
there was dwelling in my country                 once on a time
An archdeacon, a man of high degree,
That boldely did execution,
In punishing of fornication,
Of witchecraft, and eke of bawdery,
Of defamation, and adultery,
Of churche-reeves,
and of testaments,                    churchwardens
Of contracts, and of lack of sacraments,
And eke of many another manner
crime,                          sort of
Which needeth not rehearsen at this time,
Of usury, and simony also;
But, certes, lechours did he greatest woe;
They shoulde singen, if that they were hent;
                    caught
And smale tithers were foul y-shent,
         troubled, put to shame
If any person would on them complain;
There might astert them no pecunial pain.
For smalle tithes, and small offering,
He made the people piteously to sing;
For ere the bishop caught them with his crook,
They weren in the archedeacon's book;
Then had he, through his jurisdiction,
Power to do on them correction.

He had a Sompnour ready to his hand,
A slier boy was none in Engleland;
For subtlely he had his espiaille,
                           espionage
That taught him well where it might aught avail.
He coulde spare of lechours one or two,
To teache him to four and twenty mo'.
For, -- though this Sompnour wood
be as a hare, --        furious, mad
To tell his harlotry I will not spare,
For we be out of their correction,
They have of us no jurisdiction,
Ne never shall have, term of all their lives.

"Peter; so be the women of the stives,"
                          stews
Quoth this Sompnour, "y-put out of our cure."
                     care

"Peace, with mischance and with misaventure,"
Our Hoste said, "and let him tell his tale.
Now telle forth, and let the Sompnour gale,
              whistle; bawl
Nor spare not, mine owen master dear."

This false thief, the Sompnour (quoth the Frere),
Had always bawdes ready to his hand,
As any hawk to lure in Engleland,
That told him all the secrets that they knew, --
For their acquaintance was not come of new;
They were his approvers
privily.                             informers
He took himself at great profit thereby:
His master knew not always what he wan.
                            won
Withoute mandement, a lewed
man                               ignorant
He could summon, on pain of Christe's curse,
And they were inly glad to fill his purse,
And make him greate feastes at the nale.
                      alehouse
And right as Judas hadde purses smale,
                           small
And was a thief, right such a thief was he,
His master had but half *his duety.
                what was owing him
He was (if I shall give him his laud)
A thief, and eke a Sompnour, and a bawd.
And he had wenches at his retinue,
That whether that Sir Robert or Sir Hugh,
Or Jack, or Ralph, or whoso that it were
That lay by them, they told it in his ear.
Thus were the ***** and he of one assent;
And he would fetch a feigned mandement,
And to the chapter summon them both two,
And pill* the man, and let the wenche go.                plunder, pluck
Then would he say, "Friend, I shall for thy sake
Do strike thee out of oure letters blake;
                        black
Thee thar
no more as in this case travail;                        need
I am thy friend where I may thee avail."
Certain he knew of bribers many mo'
Than possible is to tell in yeare's two:
For in this world is no dog for the bow,
That can a hurt deer from a whole know,
Bet
than this Sompnour knew a sly lechour,                      better
Or an adult'rer, or a paramour:
And, for that was the fruit of all his rent,
Therefore on it he set all his intent.

And so befell, that once upon a day.
This Sompnour, waiting ever on his prey,
Rode forth to summon a widow, an old ribibe,
Feigning a cause, for he would have a bribe.
And happen'd that he saw before him ride
A gay yeoman under a forest side:
A bow he bare, and arrows bright and keen,
He had upon a courtepy
of green,                         short doublet
A hat upon his head with fringes blake.
                          black
"Sir," quoth this Sompnour, "hail, and well o'ertake."
"Welcome," quoth he, "and every good fellaw;
Whither ridest thou under this green shaw?"
                       shade
Saide this yeoman; "wilt thou far to-day?"
This Sompnour answer'd him, and saide, "Nay.
Here faste by," quoth he, "is mine intent
To ride, for to raisen up a rent,
That longeth to my lorde's duety."
"Ah! art thou then a bailiff?" "Yea," quoth he.
He durste not for very filth and shame
Say that he was a Sompnour, for the name.
"De par dieux,"  quoth this yeoman, "leve* brother,             dear
Thou art a bailiff, and I am another.
I am unknowen, as in this country.
Of thine acquaintance I will praye thee,
And eke of brotherhood, if that thee list.
                      please
I have gold and silver lying in my chest;
If that thee hap to come into our shire,
All shall be thine, right as thou wilt desire."
"Grand mercy,"
quoth this Sompnour, "by my faith."        great thanks
Each in the other's hand his trothe lay'th,
For to be sworne brethren till they dey.
                        die
In dalliance they ride forth and play.

This Sompnour, which that was as full of jangles,
           chattering
As full of venom be those wariangles,
               * butcher-birds
And ev'r inquiring upon every thing,
"Brother," quoth he, "where is now your dwelling,
Another day if that I should you seech?"                   *seek, visit
This yeoman him answered in soft speech;
Brother," quoth he, "far in the North country,
Where as I hope some time I shall thee see
Ere we depart I shall thee so well wiss,
                        inform
That of mine house shalt thou never miss."
Now, brother," quoth this Sompnour, "I you pray,
Teach me, while that we ride by the way,
(Since that ye be a bailiff as am I,)
Some subtilty, and tell me faithfully
For mine office how that I most may win.
And *spare not
for conscience or for sin,             conceal nothing
But, as my brother, tell me how do ye."
Now by my trothe, brother mine," said he,
As I shall tell to thee a faithful tale:
My wages be full strait and eke full smale;
My lord is hard to me and dangerous,                         *niggardly
And mine office is full laborious;
And therefore by extortion I live,
Forsooth I take all that men will me give.
Algate
by sleighte, or by violence,                            whether
From year to year I win all my dispence;
I can no better tell thee faithfully."
Now certes," quoth this Sompnour,  "so fare
I;                      do
I spare not to take, God it wot,
But if* it be too heavy or too hot.                            unless
What I may get in counsel privily,
No manner conscience of that have I.
N'ere* mine extortion, I might not live,                were it not for
For of such japes
will I not be shrive.           tricks *confessed
Stomach nor conscience know I none;
I shrew* these shrifte-fathers
every one.          curse *confessors
Well be we met, by God and by St Jame.
But, leve brother, tell me then thy name,"
Quoth this Sompnour.  Right in this meane while
This yeoman gan a little for to smile.

"Brother," quoth he, "wilt thou that I thee tell?
I am a fiend, my dwelling is in hell,
And here I ride about my purchasing,
To know where men will give me any thing.
My purchase is th' effect of all my rent        what I can gain is my
Look how thou ridest for the same intent                   sole revenue

To winne good, thou reckest never how,
Right so fare I, for ride will I now
Into the worlde's ende for a prey."

"Ah," quoth this Sompnour, "benedicite! what say y'?
I weened ye were a yeoman truly.                                thought
Ye have a manne's shape as well as I
Have ye then a figure determinate
In helle, where ye be in your estate?"
                         at home
"Nay, certainly," quoth he, there have we none,
But when us liketh we can take us one,
Or elles make you seem
that we be shape                        believe
Sometime like a man, or like an ape;
Or like an angel can I ride or go;
It is no wondrous thing though it be so,
A lousy juggler can deceive thee.
And pardie, yet can I more craft
than he."              skill, cunning
"Why," quoth the Sompnour, "ride ye then or gon
In sundry shapes and not always in one?"
"For we," quoth he, "will us in such form make.
As most is able our prey for to take."
"What maketh you to have all this labour?"
"Full many a cause, leve Sir Sompnour,"
Saide this fiend. "But all thing hath a time;
The day is short and it is passed prime,
And yet have I won nothing in this day;
I will intend
to winning, if I may,               &nbs
Ces passions qu'eux seuls nomment encore amours

Sont des amours aussi, tendres et furieuses,

Avec des particularités curieuses

Que n'ont pas les amours certes de tous les jours.


Même plus qu'elles et mieux qu'elles héroïques,

Elles se parent de splendeurs d'âme et de sang

Telles qu'au prix d'elles les amours dans le rang

Ne sont que Ris et Jeux ou besoins érotiques,


Que vains proverbes, que riens d'enfants trop gâtés,

- « Ah ! les pauvres amours banales, animales,

Normales ! Gros goûts lourds ou frugales fringales,

Sans compter la sottise et des fécondités ! »


- Peuvent dire ceux-là que sacre le haut Rite,

Ayant conquis la plénitude du plaisir,

Et l'insatiabilité de leur désir

Bénissant la fidélité de leur mérite.


La plénitude ! Ils l'ont superlativement :

Baisers repus, gorgés, mains privilégiées

Dans la richesse des caresses repayées,

Et ce divin final anéantissement !


Comme ce sont les forts et les forts, l'habitude

De la force les rend invaincus au déduit.

Plantureux, savoureux, débordant, le déduit !

Je le crois bien qu'ils ont la pleine plénitude !


Et pour combler leurs vœux, chacun d'eux tour à tour

Fait l'action suprême, a la parfaite extase,

- Tantôt la coupe ou la bouche et tantôt le vase -

Pâmé comme la nuit, fervent comme le jour.


Leurs beaux ébats sont grands et gais. Pas de ces crises :

Vapeurs, nerfs. Non, des jeux courageux, puis d'heureux

Bras las autour du cou, pour de moins langoureux

Qu'étroits sommeils à deux, tout coupés de reprises.


Dormez, les amoureux ! Tandis qu'autour de vous

Le monde inattentif aux choses délicates,

Bruit ou gît en somnolences scélérates,

Sans même, il est si bête ! être de vous jaloux.


Et ces réveils francs, clairs, riants, vers l'aventure

De fiers damnés d'un plus magnifique sabbat ?

Et salut, témoins purs de l'âme en ce combat

Pour l'affranchissement de la lourde nature !
Il y a des natures purement contemplatives et tout à fait impropres à l'action, qui cependant, sous une impulsion mystérieuse et inconnue, agissent quelquefois avec une rapidité dont elles se seraient crues elles-mêmes incapables.

Tel qui, craignant de trouver chez son concierge une nouvelle chagrinante, rôde lâchement une heure devant sa porte sans oser rentrer, tel qui garde quinze jours une lettre sans la décacheter, ou ne se résigne qu'au bout de six mois à opérer une démarche nécessaire depuis un an, se sentent quelquefois brusquement précipités vers l'action par une force irrésistible, comme la flèche d'un arc. Le moraliste et le médecin, qui prétendent tout savoir, ne peuvent pas expliquer d'où vient si subitement une si folle énergie à ces âmes paresseuses et voluptueuses, et comment, incapables d'accomplir les choses les plus simples et les plus nécessaires, elles trouvent à une certaine minute un courage de luxe pour exécuter les actes les plus absurdes et souvent même les plus dangereux.

Un de mes amis, le plus inoffensif rêveur qui ait existé, a mis une fois le feu à une forêt pour voir, disait-il, si le feu prenait avec autant de facilité qu'on l'affirme généralement. Dix fois de suite, l'expérience manqua ; mais, à la onzième, elle réussit beaucoup trop bien.

Un autre allumera un cigare à côté d'un tonneau de poudre, pour voir, pour savoir, pour tenter la destinée, pour se contraindre lui-même à faire preuve d'énergie, pour faire le joueur, pour connaître les plaisirs de l'anxiété, pour rien, par caprice, par désœuvrement.

C'est une espèce d'énergie qui jaillit de l'ennui et de la rêverie ; et ceux en qui elle se manifeste si opinément sont, en général, comme je l'ai dit, les plus indolents et les plus rêveurs des êtres.

Un autre, timide à ce point qu'il baisse les yeux même devant les regards des hommes, à ce point qu'il lui faut rassembler toute sa pauvre volonté pour entrer dans un café ou passer devant le bureau d'un théâtre, où les contrôleurs lui paraissent investis de la majesté de Minos, d'Éaque et de Rhadamanthe, sautera brusquement au cou d'un vieillard qui passe à côté de lui et l'embrassera avec enthousiasme devant la foule étonnée.

- Pourquoi ? Parce que... parce que cette physionomie lui était irrésistiblement sympathique ? Peut-être ; mais il est plus légitime de supposer que lui-même il ne sait pas pourquoi.

J'ai été plus d'une fois victime de ces crises et de ces élans, qui nous autorisent à croire que des Démons malicieux se glissent en nous et nous font accomplir, à notre insu, leurs plus absurdes volontés.

Un matin je m'étais levé maussade, triste, fatigué d'oisiveté, et poussé, me semblait-il, à faire quelque chose de grand, une action d'éclat ; et j'ouvris la fenêtre, hélas !

(Observez, je vous prie, que l'esprit de mystification qui, chez quelques personnes, n'est pas le résultat d'un travail ou d'une combinaison, mais d'une inspiration fortuite, participe beaucoup, ne fût-ce que par l'ardeur du désir, de cette humeur, hystérique selon les médecins, satanique selon ceux qui pensent un peu mieux que les médecins, qui nous pousse sans résistance vers une foule d'actions dangereuses ou inconvenantes.)

La première personne que j'aperçus dans la rue, ce fut un vitrier dont le cri perçant, discordant, monta jusqu'à moi à travers la lourde et sale atmosphère parisienne. Il me serait d'ailleurs impossible de dire pourquoi je fus pris à l'égard de ce pauvre homme d'une haine aussi soudaine que despotique.

« - Hé ! hé ! » et je lui criai de monter. Cependant je réfléchissais, non sans quelque gaieté, que, la chambre étant au sixième étage et l'escalier fort étroit, l'homme devait éprouver quelque peine à opérer son ascension et accrocher en maint endroit les angles de sa fragile marchandise.

Enfin il parut : j'examinai curieusement toutes ses vitres, et je lui dis : « - Comment ? vous n'avez pas de verres de couleur ? des verres roses, rouges, bleus, des vitres magiques, des vitres de paradis ? Impudent que vous êtes ! vous osez vous promener dans des quartiers pauvres, et vous n'avez pas même de vitres qui fassent voir la vie en beau ! » Et je le poussai vivement vers l'escalier, où il trébucha en grognant.

Je m'approchai du balcon et je me saisis d'un petit *** de fleurs, et quand l'homme reparut au débouché de la porte, je laissai tomber perpendiculairement mon engin de guerre sur le rebord postérieur de ses crochets ; et le choc le renversant, il acheva de briser sous son dos toute sa pauvre fortune ambulatoire qui rendit le bruit éclatant d'un palais de cristal crevé par la foudre.

Et, ivre de ma folie, je lui criai furieusement : « La vie en beau ! la vie en beau ! »

Ces plaisanteries nerveuses ne sont pas sans péril, et on peut souvent les payer cher. Mais qu'importe l'éternité de la damnation à qui a trouvé dans une seconde l'infini de la jouissance ?
À Armand Silvestre


Un cachot. Une femme à genoux, en prière.

Une tête de mort est gisante par terre,

Et parle, d'un ton aigre et douloureux aussi.

D'une lampe au plafond tombe un rayon transi.


« Dame Reine. - Encor toi, Satan ! - Madame Reine.

- « Ô Seigneur, faites mon oreille assez sereine

« Pour ouïr sans l'écouter ce que dit le Malin ! »

- « Ah ! ce fut un vaillant et galant châtelain

« Que votre époux ! Toujours en guerre ou bien en fête,

« (Hélas ! j'en puis parler puisque je suis sa tête.)

« Il vous aima, mais moins encore qu'il n'eût dû.

« Que de vertu gâtée et que de temps perdu

« En vains tournois, en cours d'amour **** de sa dame

Qui belle et jeune prit un amant, la pauvre âme ! » -

- « Ô Seigneur, écartez ce calice de moi ! » -

- « Comme ils s'aimèrent ! Ils s'étaient juré leur foi

De s'épouser sitôt que serait mort le maître,

Et le tuèrent dans son sommeil d'un coup traître. »

- « Seigneur, vous le savez, dès le crime accompli,

J'eus horreur, et prenant ce jeune homme en oubli,

Vins au roi, dévoilant l'attentat effroyable,

Et pour mieux déjouer la malice du diable,

J'obtins qu'on m'apportât en ma juste prison

La tête de l'époux occis en trahison :

Par ainsi le remords, devant ce triste reste,

Me met toujours aux yeux mon action funeste,

Et la ferveur de mon repentir s'en accroît,

Ô Jésus ! Mais voici : le Malin qui se voit

Dupe et qui voudrait bien ressaisir sa conquête

S'en vient-il pas loger dans cette pauvre tête

Et me tenir de faux propos insidieux ?

Ô Seigneur, tendez-moi vos secours précieux ! »

- « Ce n'est pas le démon, ma Reine, c'est moi-même,

Votre époux, qui vous parle en ce moment suprême,

Votre époux qui, damné (car j'étais en mourant

En état de péché mortel), vers vous se rend,

Ô Reine, et qui, pauvre âme errante, prend la tête

Qui fut la sienne aux jours vivants pour interprète

Effroyable de son amour épouvanté. »

- « Ô blasphème hideux, mensonge détesté !

Monsieur Jésus, mon maître adorable, exorcise

Ce chef horrible et le vide de la hantise

Diabolique qui n'en fait qu'un instrument

Où souffle Belzébuth fallacieusement

Comme dans une flûte on joue un air perfide ! »

- « Ô douleur, une erreur lamentable te guide,

Reine, je ne suis pas Satan, je suis Henry ! » -

- « Oyez, Seigneur, il prend la voix de mon mari !

À mon secours, les Saints, à l'aide, Notre Dame ! » -

- « Je suis Henry, du moins, Reine, je suis son âme

Qui, par sa volonté, plus forte que l'enfer,

Ayant su transgresser toute porte de fer

Et de flamme, et braver leur impure cohorte,

Hélas ! vient pour te dire avec cette voix morte

Qu'il est d'autres amours encor que ceux d'ici,

Tout immatériels et sans autre souci

Qu'eux-mêmes, des amours d'âmes et de pensées.

Ah, que leur fait le Ciel ou l'enfer. Enlacées,

Les âmes, elles n'ont qu'elles-mêmes pour but !

L'enfer pour elles c'est que leur amour mourût,

Et leur amour de son essence est immortelle !

Hélas ! moi, je ne puis te suivre aux cieux, cruelle

Et seule peine en ma damnation. Mais toi,

Damne-toi ! Nous serons heureux à deux, la loi

Des âmes, je te dis, c'est l'alme indifférence

Pour la félicité comme pour la souffrance

Si l'amour partagé leur fait d'intimes cieux.

Viens afin que l'enfer jaloux, voie, envieux,

Deux damnés ajouter, comme on double un délice,

Tous les feux de l'amour à tous ceux du supplice,

Et se sourire en un baiser perpétuel ! »

« - Âme de mon époux, tu sais qu'il est réel

Le repentir qui fait qu'en ce moment j'espère

En la miséricorde ineffable du Père

Et du Fils et du Saint-Esprit ! Depuis un mois

Que j'expie, attendant la mort que je te dois,

En ce cachot trop doux encor, nue et par terre,

Le crime monstrueux et l'infâme adultère

N'ai-je pas, repassant ma vie en sanglotant,

Ô mon Henry, pleuré des siècles cet instant

Où j'ai pu méconnaître en toi celui qu'on aime ?

Va, j'ai revu, superbe et doux, toujours le même,

Ton regard qui parlait délicieusement

Et j'entends, et c'est là mon plus dur châtiment,

Ta noble voix, et je me souviens des caresses !

Or si tu m'as absoute et si tu t'intéresses

À mon salut, du haut des cieux, ô cher souci,

Manifeste-toi, parle, et démens celui-ci

Qui blasphème et ***** d'affreuses hérésies ! » -

- « Je te dis que je suis damné ! Tu t'extasies

En terreurs vaines, ô ma Reine. Je te dis

Qu'il te faut rebrousser chemin du Paradis,

Vain séjour du bonheur banal et solitaire

Pour l'amour avec moi ! Les amours de la terre

Ont, tu le sais, de ces instants chastes et lents :

L'âme veille, les sens se taisent somnolents,

Le cœur qui se repose et le sang qui s'affaisse

Font dans tout l'être comme une douce faiblesse.

Plus de désirs fiévreux, plus d'élans énervants,

On est des frères et des sœurs et des enfants,

On pleure d'une intime et profonde allégresse,

On est les cieux, on est la terre, enfin on cesse

De vivre et de sentir pour s'aimer au delà,

Et c'est l'éternité que je t'offre, prends-la !

Au milieu des tourments nous serons dans la joie,

Et le Diable aura beau meurtrir sa double proie,

Nous rirons, et plaindrons ce Satan sans amour.

Non, les Anges n'auront dans leur morne séjour

Rien de pareil à ces délices inouïes ! » -


La Comtesse est debout, paumes épanouies.

Elle fait le grand cri des amours surhumains,

Puis se penche et saisit avec ses pâles mains

La tête qui, merveille ! a l'aspect de sourire.

Un fantôme de vie et de chair semble luire

Sur le hideux objet qui rayonne à présent

Dans un nimbe languissamment phosphorescent.

Un halo clair, semblable à des cheveux d'aurore

Tremble au sommet et semble au vent flotter encore

Parmi le chant des cors à travers la forêt.

Les noirs orbites ont des éclairs, on dirait

De grands regards de flamme et noirs. Le trou farouche

Au rire affreux, qui fut, Comte Henry, votre bouche

Se transfigure rouge aux deux arcs palpitants

De lèvres qu'auréole un duvet de vingt ans,

Et qui pour un baiser se tendent savoureuses...

Et la Comtesse à la façon des amoureuses

Tient la tête terrible amplement, une main

Derrière et l'autre sur le front, pâle, en chemin

D'aller vers le baiser spectral, l'âme tendue,

Hoquetant, dilatant sa prunelle perdue

Au fond de ce regard vague qu'elle a devant...

Soudain elle recule, et d'un geste rêvant

(Ô femmes, vous avez ces allures de faire !)

Elle laisse tomber la tête qui profère

Une plainte, et, roulant, sonne creux et longtemps :

- « Mon Dieu, mon Dieu, pitié ! Mes péchés pénitents

Lèvent leurs pauvres bras vers ta bénévolence,

Ô ne les souffre pas criant en vain ! Ô lance

L'éclair de ton pardon qui tuera ce corps vil !

Vois que mon âme est faible en ce dolent exil

Et ne la laisse pas au Mauvais qui la guette !

Ô que je meure ! »

Avec le bruit d'un corps qu'on jette,

La Comtesse à l'instant tombe morte, et voici :

Son âme en blanc linceul, par l'espace éclairci

D'une douce clarté d'or blond qui flue et vibre

Monte au plafond ouvert désormais à l'air libre

Et d'une ascension lente va vers les cieux.


. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .


La tête est là, dardant en l'air ses sombres yeux

Et sautèle dans des attitudes étranges :

Telle dans les Assomptions des têtes d'anges,

Et la bouche ***** un gémissement long,

Et des orbites vont coulant des pleurs de plomb.
France ! à l'heure où tu te prosternes,
Le pied d'un tyran sur ton front,
La voix sortira des cavernes
Les enchaînés tressailleront.

Le banni, debout sur la grève,
Contemplant l'étoile et le flot,
Comme ceux qu'on entend en rêve,
Parlera dans l'ombre tout haut ;

Et ses paroles qui menacent,
Ses paroles dont l'éclair luit,
Seront comme des mains qui passent
Tenant des glaives dans la nuit.

Elles feront frémir les marbres
Et les monts que brunit le soir,
Et les chevelures des arbres
Frissonneront sous le ciel noir ;

Elles seront l'airain qui sonne,
Le cri qui chasse les corbeaux,
Le souffle inconnu dont frissonne
Le brin d'herbe sur les tombeaux ;

Elles crieront : Honte aux infâmes,
Aux oppresseurs, aux meurtriers !
Elles appelleront les âmes
Comme on appelle des guerriers !

Sur les races qui se transforment,
Sombre orage, elles planeront ;
Et si ceux qui vivent s'endorment,
Ceux qui sont morts s'éveilleront.

Jersey, août 1853.
Aimez vos mains afin qu'un jour vos mains soient belles,
Il n'est pas de parfum trop précieux pour elles,
Soignez-les. Taillez bien les ongles douloureux,
Il n'est pas d'instruments trop délicats pour eux.

C'est Dieu qui fit les mains fécondes en merveilles ;
Elles ont pris leur neige au lys des Séraphins,
Au jardin de la chair ce sont deux fleurs pareilles,
Et le sang de la rose est sous leurs ongles fins.

Il circule un printemps mystique dans les veines
Où court la violette, où le bluet sourit ;
Aux lignes de la paume ont dormi les verveines ;
Les mains disent aux yeux les secrets de l'esprit.

Les peintres les plus grands furent amoureux d'elles,
Et les peintres des mains sont les peintres modèles.

Comme deux cygnes blancs l'un vers l'autre nageant,
Deux voiles sur la mer fondant leurs pâleurs mates,
Livrez vos mains à l'eau dans les bassins d'argent,
Préparez-leur le linge avec les aromates.

Les mains sont l'homme, ainsi que les ailes l'oiseau ;
Les mains chez les méchants sont des terres arides ;
Celles de l'humble vieille, où tourne un blond fuseau,
Font lire une sagesse écrite dans leurs rides.

Les mains des laboureurs, les mains des matelots
Montrent le hâle d'or des Cieux sous leur peau brune.
L'aile des goélands garde l'odeur des flots,
Et les mains de la Vierge un baiser de la lune.

Les plus belles parfois font le plus noir métier,
Les plus saintes étaient les mains d'un charpentier.

Les mains sont vos enfants et sont deux sœurs jumelles,
Les dix doigts sont leurs fils également bénis ;
Veillez bien sur leurs jeux, sur leurs moindres querelles,
Sur toute leur conduite aux détails infinis.

Les doigts font les filets et d'eux sortent les villes ;
Les doigts ont révélé la lyre aux temps anciens ;
Ils travaillent, pliés aux tâches les plus viles,
Ce sont des ouvriers et des musiciens.

Lâchés dans la forêt des orgues le dimanche,
Les doigts sont des oiseaux, et c'est au bout des doigts
Que, rappelant le vol des geais de branche en branche,
Rit l'essaim familier des Signes de la Croix.

Le pouce dur, avec sa taille courte et grasse,
A la force ; il a l'air d'Hercule triomphant ;
Le plus faible de tous, le plus doux a la grâce,
Et c'est le petit doigt qui sut rester enfant.

Servez vos mains, ce sont vos servantes fidèles ;
Donnez à leur repos un lit tout en dentelles.
Ce sont vos mains qui font la caresse ici-bas ;
Croyez qu'elles sont sœurs des lys et sœurs des ailes :
Ne les méprisez pas, ne les négligez pas,
Et laissez-les fleurir comme des asphodèles.

Portez à Dieu le doux trésor de vos parfums,
Le soir, à la prière éclose sur les lèvres,
Ô mains, et joignez-vous pour les pauvres défunts,
Pour que Dieu dans les mains rafraîchisse nos fièvres,

Pour que le mois des fruits vous charge de ses dons :
Mains, ouvrez-vous toujours sur un nid de pardons.

Et vous dites, - ô vous, qui, détestant les armes,
Mirez votre tristesse au fleuve de nos larmes,
Vieillard dont les cheveux vont tout blancs vers le jour,
Jeune homme aux yeux divins où se lève l'amour,
Douce femme mêlant ta rêverie aux anges,

Le cœur gonflé parfois au fond des soirs étranges,
Sans songer qu'en vos mains fleurit la volonté -
Tous, vous dites : « Où donc est-il, en vérité,
Le remède, ô Seigneur, car nos maux sont extrêmes ? »

- Mais il est dans vos mains, mais il est vos mains mêmes.
Alors le Seigneur fit descendre du ciel sur
Sodome et sur Gomorrhe une pluie de soufre et de feu.

25. Et il perdit ces villes avec tous leurs habitant,
Tout le pays à l'entour avec ceux qui l'habitaient,
Et tout ce qui avait quelque verdeur sur la terre.

Genèse.

I.

La voyez-vous passer, la nuée au flanc noir ?
Tantôt pâle, tantôt rouge et splendide à voir,
Morne comme un été stérile ?
On croit voir à la fois, sur le vent de la nuit,
Fuir toute la fumée ardente et tout le bruit
De l'embrasement d'une ville.

D'où vient-elle ? des cieux, de la mer ou des monts ?
Est-ce le char de feu qui porte les démons
À quelque planète prochaine ?
Ô terreur ! de son sein, chaos mystérieux,
D'où vient que par moments un éclair furieux
Comme un long serpent se déchaîne ?

II.

La mer ! partout la mer ! des flots, des flots encor.
L'oiseau fatigue en vain son inégal essor.
Ici les flots, là-bas les ondes ;
Toujours des flots sans fin par des flots repoussés ;
L'œil ne voit que des flots dans l'abîme entassés
Rouler sous les vagues profondes.

Parfois de grands poissons, à fleur d'eau voyageant,
Font reluire au soleil leurs nageoires d'argent,
Ou l'azur de leurs larges queues.
La mer semble un troupeau secouant sa toison :
Mais un cercle d'airain ferme au **** l'horizon ;
Le ciel bleu se mêle aux eaux bleues.

- Faut-il sécher ces mers ? dit le nuage en feu.
- Non ! - Il reprit son vol sous le souffle de Dieu.

III.

Un golfe aux vertes collines
Se mirant dans le flot clair ! -
Des buffles, des javelines,
Et des chants joyeux dans l'air ! -
C'était la tente et la crèche,
La tribu qui chasse et pêche,
Qui vit libre, et dont la flèche
Jouterait avec l'éclair.

Pour ces errantes familles
Jamais l'air ne se corrompt.
Les enfants, les jeunes filles,
Les guerriers dansaient en rond,
Autour d'un feu sur la grève,
Que le vent courbe et relève,
Pareils aux esprits qu'en rêve
On voit tourner sur son front.

Les vierges aux seins d'ébène,
Belles comme les beaux soirs,
Riaient de se voir à peine
Dans le cuivre des miroirs ;
D'autres, joyeuses comme elles,
Faisaient jaillir des mamelles
De leurs dociles chamelles
Un lait blanc sous leurs doigts noirs.

Les hommes, les femmes nues
Se baignaient au gouffre amer. -
Ces peuplades inconnues,
Où passaient-elles hier ? -
La voix grêle des cymbales,
Qui fait hennir les cavales,
Se mêlait par intervalles
Aux bruits de la grande mer.

La nuée un moment hésita dans l'espace.
- Est-ce là ? - Nul ne sait qui lui répondit : - Passe !

IV.

L'Égypte ! - Elle étalait, toute blonde d'épis,
Ses champs, bariolés comme un riche tapis,
Plaines que des plaines prolongent ;
L'eau vaste et froide au nord, au sud le sable ardent
Se dispute l'Égypte : elle rit cependant
Entre ces deux mers qui la rongent.

Trois monts bâtis par l'homme au **** perçaient les cieux
D'un triple angle de marbre, et dérobaient aux yeux
Leurs bases de cendre inondées ;
Et de leur faîte aigu jusqu'aux sables dorés,
Allaient s'élargissant leurs monstrueux degrés,
Faits pour des pas de six coudées.

Un sphinx de granit rose, un dieu de marbre vert,
Les gardaient, sans qu'il fût vent de flamme au désert
Qui leur fît baisser la paupière.
Des vaisseaux au flanc large entraient dans un grand port.
Une ville géante, assise sur le bord,
Baignait dans l'eau ses pieds de pierre.

On entendait mugir le semoun meurtrier,
Et sur les cailloux blancs les écailles crier
Sous le ventre des crocodiles.
Les obélisques gris s'élançaient d'un seul jet.
Comme une peau de tigre, au couchant s'allongeait
Le Nil jaune, tacheté d'îles.

L'astre-roi se couchait. Calme, à l'abri du vent,
La mer réfléchissait ce globe d'or vivant,
Ce monde, âme et flambeau du nôtre ;
Et dans le ciel rougeâtre et dans les flots vermeils,
Comme deux rois amis, on voyait deux soleils
Venir au-devant l'un de l'autre.

- Où faut-il s'arrêter ? dit la nuée encor.
- Cherche ! dit une voix dont trembla le Thabor.

V.

Du sable, puis du sable !
Le désert ! noir chaos
Toujours inépuisable
En monstres, en fléaux !
Ici rien ne s'arrête.
Ces monts à jaune crête,
Quand souffle la tempête,
Roulent comme des flots !

Parfois, de bruits profanes
Troublant ce lieu sacré,
Passent les caravanes
D'Ophir ou de Membré.
L'œil de **** suit leur foule,
Qui sur l'ardente houle
Ondule et se déroule
Comme un serpent marbré.

Ces solitudes mornes,
Ces déserts sont à Dieu :
Lui seul en sait les bornes,
En marque le milieu.
Toujours plane une brume
Sur cette mer qui fume,
Et jette pour écume
Une cendre de feu.

- Faut-il changer en lac ce désert ? dit la nue.
- Plus **** ! dit l'autre voix du fond des cieux venue.

VI.

Comme un énorme écueil sur les vagues dressé,
Comme un amas de tours, vaste et bouleversé,
Voici Babel, déserte et sombre.
Du néant des mortels prodigieux témoin,
Aux rayons de la lune, elle couvrait au ****
Quatre montagnes de son ombre.

L'édifice écroulé plongeait aux lieux profonds.
Les ouragans captifs sous ses larges plafonds
Jetaient une étrange harmonie.
Le genre humain jadis bourdonnait à l'entour,
Et sur le globe entier Babel devait un jour
Asseoir sa spirale infinie.

Ses escaliers devaient monter jusqu'au zénith.
Chacun des plus grands monts à ses flancs de granit
N'avait pu fournir qu'une dalle.
Et des sommets nouveaux d'autres sommets chargés
Sans cesse surgissaient aux yeux découragés
Sur sa tête pyramidale.

Les boas monstrueux, les crocodiles verts,
Moindres que des lézards sur ses murs entrouverts,
Glissaient parmi les blocs superbes ;
Et, colosses perdus dans ses larges contours,
Les palmiers chevelus, pendant au front des tours,
Semblaient d'en bas des touffes d'herbes.

Des éléphants passaient aux fentes de ses murs ;
Une forêt croissait sous ses piliers obscurs
Multipliés par la démence ;
Des essaims d'aigles roux et de vautours géants
Jour et nuit tournoyaient à ses porches béants,
Comme autour d'une ruche immense.

- Faut-il l'achever ? dit la nuée en courroux. -
Marche ! - Seigneur, dit-elle, où donc m'emportez-vous ?

VII.

Voilà que deux cités, étranges, inconnues,
Et d'étage en étage escaladant les nues,
Apparaissent, dormant dans la brume des nuits,
Avec leurs dieux, leur peuple, et leurs chars, et leurs bruits.
Dans le même vallon c'étaient deux sœurs couchées.
L'ombre baignait leurs tours par la lune ébauchées ;
Puis l'œil entrevoyait, dans le chaos confus,
Aqueducs, escaliers, piliers aux larges fûts,
Chapiteaux évasés ; puis un groupe difforme
D'éléphants de granit portant un dôme énorme ;
Des colosses debout, regardant autour d'eux
Ramper des monstres nés d'accouplements hideux ;
Des jardins suspendus, pleins de fleurs et d'arcades,
Où la lune jetait son écharpe aux cascades ;
Des temples où siégeaient sur de riches carreaux
Cent idoles de jaspe à têtes de taureaux ;
Des plafonds d'un seul bloc couvrant de vastes salles,
Où, sans jamais lever leurs têtes colossales,
Veillaient, assis en cercle, et se regardant tous,
Des dieux d'airain, posant leurs mains sur leurs genoux.
Ces rampes, ces palais, ces sombres avenues
Où partout surgissaient des formes inconnues,
Ces ponts, ces aqueducs, ces arcs, ces rondes tours,
Effrayaient l'œil perdu dans leurs profonds détours ;
On voyait dans les cieux, avec leurs larges ombres,
Monter comme des caps ces édifices sombres,
Immense entassement de ténèbres voilé !
Le ciel à l'horizon scintillait étoilé,
Et, sous les mille arceaux du vaste promontoire,
Brillait comme à travers une dentelle noire.

Ah ! villes de l'enfer, folles dans leurs désirs !
Là, chaque heure inventait de monstrueux plaisirs,
Chaque toit recelait quelque mystère immonde,
Et, comme un double ulcère, elles souillaient le monde.

Tout dormait cependant : au front des deux cités,
À peine encor glissaient quelques pâles clartés,
Lampes de la débauche, en naissant disparues,
Derniers feux des festins oubliés dans les rues,
De grands angles de murs, par la lune blanchis,
Coupaient l'ombre, ou tremblaient dans une eau réfléchis.
Peut-être on entendait vaguement dans les plaines
S'étouffer des baisers, se mêler des haleines,
Et les deux villes surs, lasses des feux du jour,
Murmurer mollement d'une étreinte d'amour !

Et le vent, soupirant sous le frais sycomore,
Allait tout parfumé de Sodome à Gomorrhe.
C'est alors que passa le nuage noirci,
Et que la voix d'en haut lui cria : - C'est ici !

VIII.

La nuée éclate !
La flamme écarlate
Déchire ses flancs,
L'ouvre comme un gouffre,
Tombe en flots de soufre
Aux palais croulants,
Et jette, tremblante,
Sa lueur sanglante
Sur leurs frontons blancs !

Gomorrhe ! Sodome !
De quel brûlant dôme
Vos murs sont couverts !
L'ardente nuée
Sur vous s'est ruée,
Ô peuples pervers !
Et ses larges gueules
Sur vos têtes seules
Soufflent leurs éclairs !

Ce peuple s'éveille,
Qui dormait la veille
Sans penser à Dieu.
Les grands palais croulent ;
Mille chars qui roulent
Heurtent leur essieu ;
Et la foule accrue,
Trouve en chaque rue
Un fleuve de feu.

Sur ces tours altières,
Colosses de pierres
Trop mal affermis,
Abondent dans l'ombre
Des mourants sans nombre
Encore endormis.
Sur des murs qui pendent
Ainsi se répandent
De noires fourmis !

Se peut-il qu'on fuie
Sous l'horrible pluie ?
Tout périt, hélas !
Le feu qui foudroie
Bat les ponts qu'il broie,
Crève les toits plats,
Roule, tombe, et brise
Sur la dalle grise
Ses rouges éclats !

Sous chaque étincelle
Grossit et ruisselle
Le feu souverain.
Vermeil et limpide,
Il court plus rapide
Qu'un cheval sans frein ;
Et l'idole infâme,
Croulant dans la flamme,
Tord ses bras d'airain !

Il gronde, il ondule,
Du peuple incrédule
Bat les tours d'argent ;
Son flot vert et rose,
Que le soufre arrose,
Fait, en les rongeant,
Luire les murailles
Comme les écailles
D'un lézard changeant.

Il fond comme cire
Agate, porphyre,
Pierres du tombeau,
Ploie, ainsi qu'un arbre,
Le géant de marbre
Qu'ils nommaient Nabo,
Et chaque colonne
Brûle et tourbillonne
Comme un grand flambeau.

En vain quelques mages
Portent les images
Des dieux du haut lieu ;
En vain leur roi penche
Sa tunique blanche
Sur le soufre bleu ;
Le flot qu'il contemple
Emporte leur temple
Dans ses plis de feu !

Plus **** il charrie
Un palais, où crie
Un peuple à l'étroit ;
L'onde incendiaire
Mord l'îlot de pierre
Qui fume et décroît,
Flotte à sa surface,
Puis fond et s'efface
Comme un glaçon froid !

Le grand-prêtre arrive
Sur l'ardente rive
D'où le reste a fui.
Soudain sa tiare
Prend feu comme un phare,
Et pâle, ébloui,
Sa main qui l'arrache
À son front s'attache,
Et brûle avec lui.

Le peuple, hommes, femmes,
Court... Partout les flammes
Aveuglent les yeux ;
Des deux villes mortes
Assiégeant les portes
À flots furieux,
La foule maudite
Croit voir, interdite,
L'enfer dans les cieux !

IX.

On dit qu'alors, ainsi que pour voir un supplice
Un vieux captif se dresse aux murs de sa prison,
On vit de **** Babel, leur fatale complice,
Regarder par-dessus les monts de l'horizon.

On entendit, durant cet étrange mystère,
Un grand bruit qui remplit le monde épouvanté,
Si profond qu'il troubla, dans leur morne cité,
Jusqu'à ces peuples sourds qui vivent sous la terre.

X.

Le feu fut sans pitié ! Pas un des condamnés
Ne put fuir de ces murs brûlant et calcinés.
Pourtant, ils levaient leurs mains viles,
Et ceux qui s'embrassaient dans un dernier adieu,
Terrassés, éblouis, se demandaient quel dieu
Versait un volcan sur leurs villes.

Contre le feu vivant, contre le feu divin,
De larges toits de marbre ils s'abritaient en vain.
Dieu sait atteindre qui le brave.
Ils invoquaient leurs dieux ; mais le feu qui punit
Frappait ces dieux muets dont les yeux de granit
Soudain fondaient en pleurs de lave !

Ainsi tout disparut sous le noir tourbillon,
L'homme avec la cité, l'herbe avec le sillon !
Dieu brûla ces mornes campagnes ;
Rien ne resta debout de ce peuple détruit,
Et le vent inconnu qui souffla cette nuit
Changea la forme des montagnes.

XI.

Aujourd'hui le palmier qui croît sur le rocher
Sent sa feuille jaunie et sa tige sécher
À cet air qui brûle et qui pèse.
Ces villes ne sont plus ; et, miroir du passé,
Sur leurs débris éteints s'étend un lac glacé,
Qui fume comme une fournaise !

Octobre 1828.
Une chambre qui ressemble à une rêverie, une chambre véritablement spirituelle, où l'atmosphère stagnante est légèrement teintée de rose et de bleu.

L'âme y prend un bain de paresse, aromatisé par le regret et le désir. - C'est quelque chose de crépusculaire, de bleuâtre et de rosâtre ; un rêve de volupté pendant une éclipse.

Les meubles ont des formes allongées, prostrées, alanguies. Les meubles ont l'air de rêver ; on les dirait doués d'une vie somnambulique, comme le végétal et le minéral. Les étoffes parlent une langue muette, comme les fleurs, comme les ciels, comme les soleils couchants.

Sur les murs nulle abomination artistique. Relativement au rêve pur, à l'impression non analysée, l'art défini, l'art positif est un blasphème. Ici, tout a la suffisante clarté et la délicieuse obscurité de l'harmonie.

Une senteur infinitésimale du choix le plus exquis, à laquelle se mêle une très-légère humidité, nage dans cette atmosphère, où l'esprit sommeillant est bercé par des sensations de serre-chaude.

La mousseline pleut abondamment devant les fenêtres et devant le lit ; elle s'épanche en cascades neigeuses. Sur ce lit est couchée l'Idole, la souveraine des rêves. Mais comment est-elle ici ? Qui l'a amenée ? quel pouvoir magique l'a installée sur ce trône de rêverie et de volupté ? Qu'importe ? la voilà ! je la reconnais.

Voilà bien ces yeux dont la flamme traverse le crépuscule ; ces subtiles et terribles mirettes, que je reconnais à leur effrayante malice ! Elles attirent, elles subjuguent, elles dévorent le regard de l'imprudent qui les contemple. Je les ai souvent étudiées, ces étoiles noires qui commandent la curiosité et l'admiration.

À quel démon bienveillant dois-je d'être ainsi entouré de mystère, de silence, de paix et de parfums ? Ô béatitude ! ce que nous nommons généralement la vie, même dans son expansion la plus heureuse, n'a rien de commun avec cette vie suprême dont j'ai maintenant connaissance et que je savoure minute par minute, seconde par seconde !

Non ! il n'est plus de minutes, il n'est plus de secondes ! Le temps a disparu ; c'est l'Éternité qui règne, une éternité de délices !

Mais un coup terrible, lourd, a retenti à la porte, et, comme dans les rêves infernaux, il m'a semblé que je recevais un coup de pioche dans l'estomac.

Et puis un Spectre est entré. C'est un huissier qui vient me torturer au nom de la loi ; une infâme concubine qui vient crier misère et ajouter les trivialités de sa vie aux douleurs de la mienne ; ou bien le saute-ruisseau d'un directeur de journal qui réclame la suite du manuscrit.La chambre paradisiaque, l'idole, la souveraine des rêves, la Sylphide, comme disait le grand René, toute cette magie a disparu au coup brutal frappé par le Spectre.

Horreur ! je me souviens ! je me souviens ! Oui ! ce taudis, ce séjour de l'éternel ennui, est bien le mien. Voici les meubles sots, poudreux, écornés ; la cheminée sans flamme et sans braise, souillée de crachats ; les tristes fenêtres où la pluie a tracé des sillons dans la poussière ; les manuscrits, raturés ou incomplets ; l'almanach où le crayon a marqué les dates sinistres !

Et ce parfum d'un autre monde, dont je m'enivrais avec une sensibilité perfectionnée, hélas ! il est remplacé par une fétide odeur de tabac mêlée à je ne sais quelle nauséabonde moisissure. On respire ici maintenant le ranci de la désolation.

Dans ce monde étroit, mais si plein de dégoût, un seul objet connu me sourit : la fiole de laudanum ; une vieille et terrible amie ; comme toutes les amies, hélas ! féconde en caresses et en traîtrises.

Oh ! oui ! Le Temps a reparu ; Le Temps règne en souverain maintenant ; et avec le hideux vieillard est revenu tout son démoniaque cortége de Souvenirs, de Regrets, de Spasmes, de Peurs, d'Angoisses, de Cauchemars, de Colères et de Névroses.

Je vous assure que les secondes maintenant sont fortement et solennellement accentuées, et chacune, en jaillissant de la pendule, dit : - « Je suis la Vie, l'insupportable, l'implacable Vie ! »

Il n'y a qu'une Seconde dans la vie humaine qui ait mission d'annoncer une bonne nouvelle, la bonne nouvelle qui cause à chacun une inexplicable peur.

Oui ! le Temps règne ; il a repris sa brutale dictature. Et il me pousse, comme si j'étais un bœuf, avec son double aiguillon. - « Et hue donc ! bourrique ! Sue donc, esclave ! Vis donc, damné ! »
Je suis orpailleur
Je vis d'or et d'eau bien fraîche
En attendant Godot.
Je plonge dans les entrailles de ma muse
Armé de piolet, pelle et battée.
Je sonde à belles dents le fil des eaux
Je me prélasse dans le lit de la rivière
Et jette dans la battée sable, eaux et graviers
A la recherche inlassable
Des paillettes couleur de colza et de tournesol
Sélectionnées et assaisonnées par ma Muse
Jusqu'à ce qu'elles se précipitent et fondent.
Je me nourris d'elles et elles de moi
Elles me mâchent et me mastiquent
Pour faire jaillir en moi des geysers d'huile philosophale
En attendant les lingots de Godot.

Et dans chaque mot que je dédie à ma muse
J'engloutis ses carats nature
Sans colorant artificiel
Sans huile de palme
Sans conservateur
Car je conserve en moi les pépites
À l'abri de la lumière jalouse de God-haut.
Incipit Liber Quintus.

Aprochen gan the fatal destinee
That Ioves hath in disposicioun,
And to yow, angry Parcas, sustren three,
Committeth, to don execucioun;
For which Criseyde moste out of the toun,  
And Troilus shal dwelle forth in pyne
Til Lachesis his threed no lenger twyne. --

The golden-tressed Phebus heighe on-lofte
Thryes hadde alle with his bemes shene
The snowes molte, and Zephirus as ofte  
Y-brought ayein the tendre leves grene,
Sin that the sone of Ecuba the quene
Bigan to love hir first, for whom his sorwe
Was al, that she departe sholde a-morwe.

Ful redy was at pryme Dyomede,  
Criseyde un-to the Grekes ost to lede,
For sorwe of which she felt hir herte blede,
As she that niste what was best to rede.
And trewely, as men in bokes rede,
Men wiste never womman han the care,  
Ne was so looth out of a toun to fare.

This Troilus, with-outen reed or lore,
As man that hath his Ioyes eek forlore,
Was waytinge on his lady ever-more
As she that was the soothfast crop and more  
Of al his lust, or Ioyes here-tofore.
But Troilus, now farewel al thy Ioye,
For shaltow never seen hir eft in Troye!

Soth is, that whyl he bood in this manere,
He gan his wo ful manly for to hyde.  
That wel unnethe it seen was in his chere;
But at the yate ther she sholde oute ryde
With certeyn folk, he hoved hir tabyde,
So wo bigoon, al wolde he nought him pleyne,
That on his hors unnethe he sat for peyne.  

For ire he quook, so gan his herte gnawe,
Whan Diomede on horse gan him dresse,
And seyde un-to him-self this ilke sawe,
'Allas,' quod he, 'thus foul a wrecchednesse
Why suffre ich it, why nil ich it redresse?  
Were it not bet at ones for to dye
Than ever-more in langour thus to drye?

'Why nil I make at ones riche and pore
To have y-nough to done, er that she go?
Why nil I bringe al Troye upon a rore?  
Why nil I sleen this Diomede also?
Why nil I rather with a man or two
Stele hir a-way? Why wol I this endure?
Why nil I helpen to myn owene cure?'

But why he nolde doon so fel a dede,  
That shal I seyn, and why him liste it spare;
He hadde in herte alweyes a maner drede,
Lest that Criseyde, in rumour of this fare,
Sholde han ben slayn; lo, this was al his care.
And ellis, certeyn, as I seyde yore,  
He hadde it doon, with-outen wordes more.

Criseyde, whan she redy was to ryde,
Ful sorwfully she sighte, and seyde 'Allas!'
But forth she moot, for ought that may bityde,
And forth she rit ful sorwfully a pas.  
Ther nis non other remedie in this cas.
What wonder is though that hir sore smerte,
Whan she forgoth hir owene swete herte?

This Troilus, in wyse of curteisye,
With hauke on hond, and with an huge route  
Of knightes, rood and dide hir companye,
Passinge al the valey fer with-oute,
And ferther wolde han riden, out of doute,
Ful fayn, and wo was him to goon so sone;
But torne he moste, and it was eek to done.  

And right with that was Antenor y-come
Out of the Grekes ost, and every wight
Was of it glad, and seyde he was wel-come.
And Troilus, al nere his herte light,
He peyned him with al his fulle might  
Him to with-holde of wepinge at the leste,
And Antenor he kiste, and made feste.

And ther-with-al he moste his leve take,
And caste his eye upon hir pitously,
And neer he rood, his cause for to make,  
To take hir by the honde al sobrely.
And lord! So she gan wepen tendrely!
And he ful softe and sleighly gan hir seye,
'Now hold your day, and dooth me not to deye.'

With that his courser torned he a-boute  
With face pale, and un-to Diomede
No word he spak, ne noon of al his route;
Of which the sone of Tydeus took hede,
As he that coude more than the crede
In swich a craft, and by the reyne hir hente;  
And Troilus to Troye homwarde he wente.

This Diomede, that ladde hir by the brydel,
Whan that he saw the folk of Troye aweye,
Thoughte, 'Al my labour shal not been on ydel,
If that I may, for somwhat shal I seye,  
For at the worste it may yet shorte our weye.
I have herd seyd, eek tymes twyes twelve,
"He is a fool that wol for-yete him-selve."'

But natheles this thoughte he wel ynough,
'That certaynly I am aboute nought,  
If that I speke of love, or make it tough;
For douteles, if she have in hir thought
Him that I gesse, he may not been y-brought
So sone awey; but I shal finde a mene,
That she not wite as yet shal what I mene.'  

This Diomede, as he that coude his good,
Whan this was doon, gan fallen forth in speche
Of this and that, and asked why she stood
In swich disese, and gan hir eek biseche,
That if that he encrese mighte or eche  
With any thing hir ese, that she sholde
Comaunde it him, and seyde he doon it wolde.

For trewely he swoor hir, as a knight,
That ther nas thing with whiche he mighte hir plese,
That he nolde doon his peyne and al his might  
To doon it, for to doon hir herte an ese.
And preyede hir, she wolde hir sorwe apese,
And seyde, 'Y-wis, we Grekes con have Ioye
To honouren yow, as wel as folk of Troye.'

He seyde eek thus, 'I woot, yow thinketh straunge,  
No wonder is, for it is to yow newe,
Thaqueintaunce of these Troianis to chaunge,
For folk of Grece, that ye never knewe.
But wolde never god but-if as trewe
A Greek ye shulde among us alle finde  
As any Troian is, and eek as kinde.

'And by the cause I swoor yow right, lo, now,
To been your freend, and helply, to my might,
And for that more aqueintaunce eek of yow
Have ich had than another straunger wight,  
So fro this forth, I pray yow, day and night,
Comaundeth me, how sore that me smerte,
To doon al that may lyke un-to your herte;

'And that ye me wolde as your brother trete,
And taketh not my frendship in despyt;  
And though your sorwes be for thinges grete,
Noot I not why, but out of more respyt,
Myn herte hath for to amende it greet delyt.
And if I may your harmes not redresse,
I am right sory for your hevinesse,  

'And though ye Troians with us Grekes wrothe
Han many a day be, alwey yet, pardee,
O god of love in sooth we serven bothe.
And, for the love of god, my lady free,
Whom so ye hate, as beth not wroth with me.  
For trewely, ther can no wight yow serve,
That half so looth your wraththe wolde deserve.

'And nere it that we been so neigh the tente
Of Calkas, which that seen us bothe may,
I wolde of this yow telle al myn entente;  
But this enseled til another day.
Yeve me your hond, I am, and shal ben ay,
God help me so, whyl that my lyf may dure,
Your owene aboven every creature.

'Thus seyde I never er now to womman born;  
For god myn herte as wisly glade so,
I lovede never womman here-biforn
As paramours, ne never shal no mo.
And, for the love of god, beth not my fo;
Al can I not to yow, my lady dere,  
Compleyne aright, for I am yet to lere.

'And wondreth not, myn owene lady bright,
Though that I speke of love to you thus blyve;
For I have herd or this of many a wight,
Hath loved thing he never saugh his lyve.  
Eek I am not of power for to stryve
Ayens the god of love, but him obeye
I wol alwey, and mercy I yow preye.

'Ther been so worthy knightes in this place,
And ye so fair, that everich of hem alle  
Wol peynen him to stonden in your grace.
But mighte me so fair a grace falle,
That ye me for your servaunt wolde calle,
So lowly ne so trewely you serve
Nil noon of hem, as I shal, til I sterve.'  

Criseide un-to that purpos lyte answerde,
As she that was with sorwe oppressed so
That, in effect, she nought his tales herde,
But here and there, now here a word or two.
Hir thoughte hir sorwful herte brast a-two.  
For whan she gan hir fader fer aspye,
Wel neigh doun of hir hors she gan to sye.

But natheles she thonked Diomede
Of al his travaile, and his goode chere,
And that him liste his friendship hir to bede;  
And she accepteth it in good manere,
And wolde do fayn that is him leef and dere;
And trusten him she wolde, and wel she mighte,
As seyde she, and from hir hors she alighte.

Hir fader hath hir in his armes nome,  
And tweynty tyme he kiste his doughter swete,
And seyde, 'O dere doughter myn, wel-come!'
She seyde eek, she was fayn with him to mete,
And stood forth mewet, milde, and mansuete.
But here I leve hir with hir fader dwelle,  
And forth I wol of Troilus yow telle.

To Troye is come this woful Troilus,
In sorwe aboven alle sorwes smerte,
With felon look, and face dispitous.
Tho sodeinly doun from his hors he sterte,  
And thorugh his paleys, with a swollen herte,
To chambre he wente; of no-thing took he hede,
Ne noon to him dar speke a word for drede.

And there his sorwes that he spared hadde
He yaf an issue large, and 'Deeth!' he cryde;  
And in his throwes frenetyk and madde
He cursed Iove, Appollo, and eek Cupyde,
He cursed Ceres, Bacus, and Cipryde,
His burthe, him-self, his fate, and eek nature,
And, save his lady, every creature.  

To bedde he goth, and weyleth there and torneth
In furie, as dooth he, Ixion in helle;
And in this wyse he neigh til day soiorneth.
But tho bigan his herte a lyte unswelle
Thorugh teres which that gonnen up to welle;  
And pitously he cryde up-on Criseyde,
And to him-self right thus he spak, and seyde: --

'Wher is myn owene lady lief and dere,
Wher is hir whyte brest, wher is it, where?
Wher ben hir armes and hir eyen clere,  
That yesternight this tyme with me were?
Now may I wepe allone many a tere,
And graspe aboute I may, but in this place,
Save a pilowe, I finde nought tenbrace.

'How shal I do? Whan shal she com ayeyn?  
I noot, allas! Why leet ich hir to go?
As wolde god, ich hadde as tho be sleyn!
O herte myn, Criseyde, O swete fo!
O lady myn, that I love and no mo!
To whom for ever-mo myn herte I dowe;  
See how I deye, ye nil me not rescowe!

'Who seeth yow now, my righte lode-sterre?
Who sit right now or stant in your presence?
Who can conforten now your hertes werre?
Now I am gon, whom yeve ye audience?  
Who speketh for me right now in myn absence?
Allas, no wight; and that is al my care;
For wel wot I, as yvel as I ye fare.

'How sholde I thus ten dayes ful endure,
Whan I the firste night have al this tene?  
How shal she doon eek, sorwful creature?
For tendernesse, how shal she this sustene,
Swich wo for me? O pitous, pale, and grene
Shal been your fresshe wommanliche face
For langour, er ye torne un-to this place.'  

And whan he fil in any slomeringes,
Anoon biginne he sholde for to grone,
And dremen of the dredfulleste thinges
That mighte been; as, mete he were allone
In place horrible, makinge ay his mone,  
Or meten that he was amonges alle
His enemys, and in hir hondes falle.

And ther-with-al his body sholde sterte,
And with the stert al sodeinliche awake,
And swich a tremour fele aboute his herte,  
That of the feer his body sholde quake;
And there-with-al he sholde a noyse make,
And seme as though he sholde falle depe
From heighe a-lofte; and than he wolde wepe,

And rewen on him-self so pitously,  
That wonder was to here his fantasye.
Another tyme he sholde mightily
Conforte him-self, and seyn it was folye,
So causeles swich drede for to drye,
And eft biginne his aspre sorwes newe,  
That every man mighte on his sorwes rewe.

Who coude telle aright or ful discryve
His wo, his pleynt, his langour, and his pyne?
Nought al the men that han or been on-lyve.
Thou, redere, mayst thy-self ful wel devyne  
That swich a wo my wit can not defyne.
On ydel for to wryte it sholde I swinke,
Whan that my wit is wery it to thinke.

On hevene yet the sterres were sene,
Al-though ful pale y-waxen was the mone;  
And whyten gan the orisonte shene
Al estward, as it woned is for to done.
And Phebus with his rosy carte sone
Gan after that to dresse him up to fare,
Whan Troilus hath sent after Pandare.  

This Pandare, that of al the day biforn
Ne mighte han comen Troilus to see,
Al-though he on his heed it hadde y-sworn,
For with the king Pryam alday was he,
So that it lay not in his libertee  
No-wher to gon, but on the morwe he wente
To Troilus, whan that he for him sente.

For in his herte he coude wel devyne,
That Troilus al night for sorwe wook;
And that he wolde telle him of his pyne,  
This knew he wel y-nough, with-oute book.
For which to chaumbre streight the wey he took,
And Troilus tho sobreliche he grette,
And on the bed ful sone he gan him sette.

'My Pandarus,' quod Troilus, 'the sorwe  
Which that I drye, I may not longe endure.
I trowe I shal not liven til to-morwe;
For whiche I wolde alwey, on aventure,
To thee devysen of my sepulture
The forme, and of my moeble thou dispone  
Right as thee semeth best is for to done.

'But of the fyr and flaumbe funeral
In whiche my body brenne shal to glede,
And of the feste and pleyes palestral
At my vigile, I prey thee tak good hede  
That be wel; and offre Mars my stede,
My swerd, myn helm, and, leve brother dere,
My sheld to Pallas yef, that shyneth clere.

'The poudre in which myn herte y-brend shal torne,
That preye I thee thou take and it conserve  
In a vessel, that men clepeth an urne,
Of gold, and to my lady that I serve,
For love of whom thus pitously I sterve,
So yeve it hir, and do me this plesaunce,
To preye hir kepe it for a remembraunce.  

'For wel I fele, by my maladye,
And by my dremes now and yore ago,
Al certeinly, that I mot nedes dye.
The owle eek, which that hight Ascaphilo,
Hath after me shright alle thise nightes two.  
And, god Mercurie! Of me now, woful wrecche,
The soule gyde, and, whan thee list, it fecche!'

Pandare answerde, and seyde, 'Troilus,
My dere freend, as I have told thee yore,
That it is folye for to sorwen thus,  
And causeles, for whiche I can no-more.
But who-so wol not trowen reed ne lore,
I can not seen in him no remedye,
But lete him worthen with his fantasye.

'But Troilus, I pray thee tel me now,  
If that thou trowe, er this, that any wight
Hath loved paramours as wel as thou?
Ye, god wot, and fro many a worthy knight
Hath his lady goon a fourtenight,
And he not yet made halvendel the fare.  
What nede is thee to maken al this care?

'Sin day by day thou mayst thy-selven see
That from his love, or elles from his wyf,
A man mot twinnen of necessitee,
Ye, though he love hir as his owene lyf;  
Yet nil he with him-self thus maken stryf.
For wel thow wost, my leve brother dere,
That alwey freendes may nought been y-fere.

'How doon this folk that seen hir loves wedded
By freendes might, as it bi-*** ful ofte,  
And seen hem in hir spouses bed y-bedded?
God woot, they take it wysly, faire and softe.
For-why good hope halt up hir herte on-lofte,
And for they can a tyme of sorwe endure;
As tyme hem hurt, a tyme doth hem cure.  

'So sholdestow endure, and late slyde
The tyme, and fonde to ben glad and light.
Ten dayes nis so longe not tabyde.
And sin she thee to comen hath bihight,
She nil hir hestes breken for no wight.  
For dred thee not that she nil finden weye
To come ayein, my lyf that dorste I leye.

'Thy swevenes eek and al swich fantasye
Dryf out, and lat hem faren to mischaunce;
For they procede of thy malencolye,  
That doth thee fele in sleep al this penaunce.
A straw for alle swevenes signifiaunce!
God helpe me so, I counte hem not a bene,
Ther woot no man aright what dremes mene.

'For prestes of the temple tellen this,  
That dremes been the revelaciouns
Of goddes, and as wel they telle, y-wis,
That they ben infernals illusiouns;
And leches seyn, that of complexiouns
Proceden they, or fast, or glotonye.  
Who woot in sooth thus what they signifye?

'Eek othere seyn that thorugh impressiouns,
As if a wight hath faste a thing in minde,
That ther-of cometh swiche avisiouns;
And othere seyn, as they in bokes finde,  
That, after tymes of the yeer by kinde,
Men dreme, and that theffect goth by the mone;
But leve no dreem, for it is nought to done.

'Wel worth o
Ces femmes, qu'on envoie aux lointaines bastilles,
Peuple, ce sont tes soeurs, tes mères et tes filles !
Ô peuple, leur forfait, c'est de t'avoir aimé !
Paris sanglant, courbé, sinistre, inanimé,
Voit ces horreurs et garde un silence farouche.

Celle-ci, qu'on amène un bâillon dans la bouche,
Cria - c'est là son crime - : à bas la trahison !
Ces femmes sont la foi, la vertu, la raison,
L'équité, la pudeur, la fierté, la justice.
Saint-Lazare - il faudra broyer cette bâtisse !
Il n'en restera pas pierre sur pierre un jour ! -
Les reçoit, les dévore, et, quand revient leur tour,
S'ouvre, et les revomit par son horrible porte,
Et les jette au fourgon hideux qui les emporte.
Où vont-elles ? L'oubli le sait, et le tombeau
Le raconte au cyprès et le dit au corbeau.

Une d'elles était une mère sacrée.
Le jour qu'on l'entraîna vers l'Afrique abhorrée,
Ses enfants étaient là qui voulaient l'embrasser ;
On les chassa. La mère en deuil les vit chasser
Et dit : partons ! Le peuple en larmes criait grâce.
La porte du fourgon étant étroite et basse,
Un argousin joyeux, raillant son embonpoint,
La fit entrer de force en la poussant du poing.

Elles s'en vont ainsi, malades, verrouillées,
Dans le noir chariot aux cellules souillées
Où le captif, sans air, sans jour, sans pleurs dans l'œil,
N'est plus qu'un mort vivant assis dans son cercueil.
Dans la route on entend leurs voix désespérées.
Le peuple hébété voit passer ces torturées.
À Toulon, le fourgon les quitte, le ponton
Les prend ; sans vêtements, sans pain, sous le bâton,
Elles passent la mer, veuves, seules au monde,
Mangeant avec les doigts dans la gamelle immonde.

Bruxelles, le 8 juillet 1852.
Michael R Burch Feb 2020
Le temps a laissé son manteau ("The season has cast its coat aside")
by Charles d'Orleans (c. 1394-1465)
loose translation/interpretation/modernization by Michael R. Burch

The season has cast its coat aside
of wind and cold and rain,
to dress in embroidered light again:
bright sunlight, fit for a bride!

There isn't a bird or beast astride
that fails to sing this sweet refrain:
"The season has cast its coat aside!"

Now rivers, fountains, springs and tides
dressed in their summer best
with silver beads impressed
in a fine display now glide:
the season has cast its coat aside!



The year lays down his mantle cold
by Charles d'Orleans (c. 1394-1465)
loose translation/interpretation/modernization by Michael R. Burch

The year lays down his mantle cold
of wind, chill rain and bitter air,
and now goes clad in clothes of gold
of smiling suns and seasons fair,
while birds and beasts of wood and fold
now with each cry and song declare:
“The year lays down his mantle cold!”
All brooks, springs, rivers, seaward rolled,
now pleasant summer livery wear
with silver beads embroidered where
the world puts off its raiment old.
The year lays down his mantle cold.



Winter has cast his cloak away
by Charles d'Orleans (c. 1394-1465)
loose translation/interpretation/modernization by Michael R. Burch

Winter has cast his cloak away
of wind and cold and chilling rain
to dress in embroidered light again:
the light of day—bright, festive, gay!
Each bird and beast, without delay,
in its own tongue, sings this refrain:
“Winter has cast his cloak away!”
Brooks, fountains, rivers, streams at play,
wear, with their summer livery,
bright beads of silver jewelry.
All the Earth has a new and fresh display:
Winter has cast his cloak away!

Note: This rondeau was set to music by Debussy in his “Trois chansons de France.”

The original French rondeau:

Le temps a laissé son manteau
De vent, de froidure et de pluie,
Et s’est vêtu de broderie,
De soleil luisant, clair et beau.

Il n’y a bête, ni oiseau
Qu’en son jargon ne chante ou crie :
"Le temps a laissé son manteau."

Rivière, fontaine et ruisseau
Portent en livrée jolie,
Gouttes d’argent d’orfèvrerie,
Chacun s’habille de nouveau :
Le temps a laissé son manteau.



Le Primtemps (“Spring” or “Springtime”)
by Charles d’Orleans (c. 1394-1465)
loose translation/interpretation/modernization by Michael R. Burch

Young lovers,
greeting the spring
fling themselves downhill,
making cobblestones ring
with their wild leaps and arcs,
like ecstatic sparks
drawn from coal.

What is their brazen goal?

They grab at whatever passes,
so we can only hazard guesses.
But they rear like prancing steeds
raked by brilliant spurs of need,
Young lovers.

The original French poem:

Jeunes amoureux nouveaulx
En la nouvelle saison,
Par les rues, sans raison,
Chevauchent, faisans les saulx.
Et font saillir des carreaulx
Le feu, comme de cherbon,
     Jeunes amoureux nouveaulx.
Je ne sçay se leurs travaulx
Ilz emploient bien ou non,
Mais piqués de l’esperon
Sont autant que leurs chevaulx
     Jeunes amoureux nouveaulx.



Ballade: Oft in My Thought
by Charles d'Orleans (c. 1394-1465)
loose translation/interpretation/modernization by Michael R. Burch

So often in my busy mind I sought,
    Around the advent of the fledgling year,
For something pretty that I really ought
    To give my lady dear;
    But that sweet thought's been wrested from me, clear,
        Since death, alas, has sealed her under clay
    And robbed the world of all that's precious here—
        God keep her soul, I can no better say.

For me to keep my manner and my thought
    Acceptable, as suits my age's hour?
While proving that I never once forgot
    Her worth? It tests my power!
    I serve her now with masses and with prayer;
        For it would be a shame for me to stray
    Far from my faith, when my time's drawing near—
        God keep her soul, I can no better say.

Now earthly profits fail, since all is lost
and the cost of everything became so dear;
Therefore, O Lord, who rules the higher host,
    Take my good deeds, as many as there are,
    And crown her, Lord, above in your bright sphere,
        As heaven's truest maid! And may I say:
    Most good, most fair, most likely to bring cheer—
        God keep her soul, I can no better say.

When I praise her, or hear her praises raised,
I recall how recently she brought me pleasure;
    Then my heart floods like an overflowing bay
And makes me wish to dress for my own bier—
    God keep her soul, I can no better say.



Rondel: Your Smiling Mouth
by Charles d'Orleans (c. 1394-1465)
loose translation/interpretation/modernization by Michael R. Burch

Your smiling mouth and laughing eyes, bright gray,
Your ample ******* and slender arms’ twin chains,
Your hands so smooth, each finger straight and plain,
Your little feet—please, what more can I say?

It is my fetish when you’re far away
To muse on these and thus to soothe my pain—
Your smiling mouth and laughing eyes, bright gray,
Your ample ******* and slender arms’ twin chains.

So would I beg you, if I only may,
To see such sights as I before have seen,
Because my fetish pleases me. Obscene?
I’ll be obsessed until my dying day
By your sweet smiling mouth and eyes, bright gray,
Your ample ******* and slender arms’ twin chains!

The original Middle English text:

Rondel: The Smiling Mouth

The smiling mouth and laughing eyen gray
The breastes round and long small armes twain,
The handes smooth, the sides straight and plain,
Your feetes lit —what should I further say?
It is my craft when ye are far away
To muse thereon in stinting of my pain— (stinting=soothing)
The smiling mouth and laughing eyen gray,
The breastes round and long small armes twain.
So would I pray you, if I durst or may,
The sight to see as I have seen,
For why that craft me is most fain, (For why=because/fain=pleasing)
And will be to the hour in which I day—(day=die)
The smiling mouth and laughing eyen gray,
The breastes round and long small armes twain.



Confession of a Stolen Kiss
by Charles d’Orleans (c. 1394-1465)
loose translation/interpretation by Michael R. Burch

My ghostly father, I confess,
First to God and then to you,
That at a window (you know how)
I stole a kiss of great sweetness,
Which was done out of avidness—
But it is done, not undone, now.

My ghostly father, I confess,
First to God and then to you.

But I shall restore it, doubtless,
Again, if it may be that I know how;
And thus to God I make a vow,
And always I ask forgiveness.

My ghostly father, I confess,
First to God and then to you.

Translator note: By "ghostly father" I take Charles d’Orleans to be confessing to a priest. If so, it's ironic that the kiss was "stolen" at a window and the confession is being made at the window of a confession booth. But it also seems possible that Charles could be confessing to his human father, murdered in his youth and now a ghost. There is wicked humor in the poem, as Charles is apparently vowing to keep asking for forgiveness because he intends to keep stealing kisses at every opportunity!

Original Middle English text:

My ghostly fader, I me confess,
First to God and then to you,
That at a window, wot ye how,
I stale a kosse of gret swetness,
Which don was out avisiness
But it is doon, not undoon, now.

My ghostly fader, I me confess,
First to God and then to you.

But I restore it shall, doutless,
Agein, if so be that I mow;
And that to God I make a vow,
And elles I axe foryefness.

My ghostly fader, I me confesse,
First to God and then to you.



Charles d’Orleans has been credited with writing the first Valentine card, in the form of a poem for his wife. He wrote the poem in 1415 at age 21, in the first year of his captivity while being held prisoner in the Tower of London after having been captured by the British at the Battle of Agincourt. The Battle of Agincourt was the centerpiece of William Shakespeare’s historical play Henry V, in which Charles appears as a character.

At age 16, Charles had married the 11-year-old Bonne of Armagnac in a political alliance, which explains the age difference he mentions in his poem. (Coincidentally, I share his wife’s birthday, the 19th of February.) Unfortunately, Charles would be held prisoner for a quarter century and would never see his wife again, as she died before he was released.

Why did Charles call his wife “Valentine”? Well, his mother’s name was Valentina Visconti ...

My Very Gentle Valentine
by Charles d’Orleans (c. 1394-1465)
loose translation/interpretation by Michael R. Burch

My very gentle Valentine,
Alas, for me you were born too soon,
As I was born too late for you!
May God forgive my jailer
Who has kept me from you this entire year.
I am sick without your love, my dear,
My very gentle Valentine.



In My Imagined Book
by Charles d’Orleans (c. 1394-1465)
loose translation/interpretation by Michael R. Burch

In my imagined Book
my heart endeavored to explain
its history of grief, and pain,
illuminated by the tears
that welled to blur those well-loved years
of former happiness's gains,
in my imagined Book.

Alas, where should the reader look
beyond these drops of sweat, their stains,
all the effort & pain it took
& which I recorded night and day
in my imagined Book?

The original French poem:

Dedens mon Livre de Pensee,
J'ay trouvé escripvant mon cueur
La vraye histoire de douleur
De larmes toute enluminee,
En deffassant la tresamée
Ymage de plaisant doulceur,
Dedens mon Livre de Pensee.

Hélas! ou l'a mon cueur trouvee?
Les grosses gouttes de sueur
Lui saillent, de peinne et labeur
Qu'il y prent, et nuit et journee,
Dedens mon Livre de Pensee.



Charles d’Orleans (1394-1465) was a French royal born into an aristocratic family: his grandfather was Charles V of France and his uncle was Charles VI. His father, Louis I, Duke of Orleans, was a patron of poets and artists. The poet Christine de Pizan dedicated poems to his mother, Valentina Visconti. He became the Duke of Orleans at age 13 after his father was murdered by John the Fearless, Duke of Burgundy. He was captured at age 21 in the battle of Agincourt and taken to England, where he remained a prisoner for the next quarter century. While imprisoned there he learned English and wrote poetry of a high order in his second language. A master of poetic forms, he wrote primarily ballades, chansons, complaints and rondeaux. He has been called the “father of French lyric poetry” and has also been credited with writing the first Valentine’s Day poem.

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Paul d'Aubin Dec 2013
Ulysse, la Méditerranée et ses rapports avec les  Femmes.

Parti à contre cœur, ayant même contrefait le fou, pour se soustraire à la guerre et élever ton fils Télémaque, tu dus partir à Troie, et sus t'y montrer brave, mais surtout fin stratège.
La guerre fut bien longue, pas du tout comme celle que chantait les Aèdes. L'ennemi ressemblait tant à nos guerriers Achéens, courageux et aussi sûrs de leur droit que nous l'étions du notre. Que de sang, que de peine ! Tu vis périr Patrocle, ne pus sauver Achille ; et les morts aux corps déchiquetés par les épées se substituèrent aux coupes de ce vin si enivrant qu'est la rhétorique guerrière et à la funeste illusion d'une victoire facile. Ulysse tu eus l'idée de bâtir ce grand vaisseau dont la proue figurait une tête de cheval. Ainsi les Achéens purent entrer dans le port forteresse si bien gardé. Mais quand la nuit noire et le vin mêlés ôtèrent aux courageux Troyens leur vigilance et leur garde, vous sortirent alors des flancs du bateau et vous précipitèrent pour ouvrir grands les portes aux guerriers Achéens. La suite fut un grand carnage de guerriers Troyens mais aussi de non combattants et même de femmes. Et Troie, la fière, la courageuse ne fut plus ville libre et les survivants de son Peuple connurent l'esclavage. Aussi quand Troie fut conquise et que ses rue coulèrent rouges du sang vermeil de ses défenseur, mais aussi de nombreux civils, tu songeas à retourner chez toi, car tu étais roi, et ton fils Télémaque aurait besoin de toi et Pénélope t'aimait. Les souvenirs d'émois et de tendres caresses faisaient encore frissonner la harpe de ton corps de souvenirs très doux. C'est alors que tu dus affronter la Déesse Athéna et ton double, tous deux vigilants, à tester ta sincérité et ta constance. Oh, toi Homme volage et point encore rassasié de voyages et de conquêtes. L'étendue de la mer te fut donnée comme le théâtre même de ta vérité profonde. Après bien des voyages et avoir perdu nombre de tes compagnons, tu fus poussé dans l'île de la nymphe Calypso. Cette immortelle à la chevelure, si joliment bouclée se trouvait dans son île d'arbustes odoriférants. Aussi fit-elle tout pour te garder. Toi-même, tu lui trouvas de l'ardeur et des charmes même si durant le jour tu te laissais aller à la nostalgie d'Ithaque. La belle immortelle te proposas, pour te garder, de te donner cet attribut si recherché qui empêche à jamais de sombrer dans le sommeil perpétuel. Mais toi, Ulysse, tu préféras garder ton destin d'homme mortel et ton inguérissable blessure pour Ithaque. Après sept années d’une prison si douce, l'intervention d'Athéna te rendit aux aventures de la Mer. Tu accostas, avec tes compagnons sur la côte d’une île malfaisante. C'était la demeure des Cyclopes. Parmi ce Peuple de géants, le cyclope Polyphème habitait une grotte profonde d'où il faisait rentrer chaque soir son troupeau. Ulysse quelle folie traversa ton esprit et celui de tes compagnons que de vouloir pénétrer dans cette antre maudite, mû à la fois par la curiosité et la volonté de faire quelques larcins de chèvres ? Vous payèrent bien cher cette offense par la cruelle dévoration que fit l'infâme Polyphème de plusieurs de tes compagnons dont vous entendîtes craquer les os sous la mâchoire du sauvage. Aussi votre courage fut renforcé par votre haine lorsque vous lui plantèrent l'épieu dans son œil unique alors que sa vigilance venait d'être endormie par le vin. Les barques ayant mouillés dans l'île d'Aiaé, tes compagnons imprudents furent transformés en pourceaux par la belle et cruelle Magicienne Circée. Doté d'un contre poison à ses filtres, tu ne restas cependant pas insensible aux charmes de la belle Magicienne mais tu lui fis prononcer le grand serment avant de répondre à tes avances. Elle accepta pour faire de toi son amant de redonner leur forme humaine à tes compagnons, Et vos nuits furent tendres, sensuelles et magiques car la Magicienne excellait dans les arts de l'amour et il en naquit un fils. Toi le rusé et courageux Ulysse, tu espérais enfin voguer avec délice sur une mer d'huile parcourue par les reflets d'argent des poissons volants et te réjouir des facéties des dauphins, Mais c'était oublier et compter pour peu la rancune de Poséidon, le maître des eaux, rendu furieux par le traitement subi par son fils Polyphème. C'est pour cela qu'une masse d'eau compacte, haute comme une haute tour avançant au grand galop ébranla et engloutit ton solide radeau. Seul ton réflexe prompt de t'accrocher au plus grand des troncs te permis de plonger longuement au fonds des eaux en retenant longtemps ton souffle avant d’émerger à nouveaux. La troisième des belles que ton voyage tumultueux te fit rencontrer fut la jeune Nausicaa, fille du roi des Phéaciens, Alcinoos. Celle-ci, dans la floraison de sa jeunesse, ardente et vive, ne cédait en rien à l'éclat des plus belles et subtiles fleurs. Guidée par la déesse Athéna, elle vint auprès du fleuve ou tu dormais laver les habits royaux avec ses suivantes. Les voix des jeunes filles t'éveillèrent. Dans ta détresse et ta nudité, tu jetas l'effroi parmi les jeunes filles. Seule Nausicaa eut le courage de ne pas fuir et d'écouter ta demande d'aide. Elle rappela ses suivantes et te fit vêtir après que ton corps ait été lavé par l'eau du fleuve et enduit d'huile fine. Tu retrouvas ta force et ta beauté. Aussi Nausicaa vit en toi l'époux qu'elle désirait. Mais, ta nostalgie d'Ithaque fut encore plus forte. Alors Nausicaa te pria seulement, en ravalant ses larmes, de ne point oublier qu'elle t'avait sauvé des flots. Amené tout ensommeillé dans le vaisseau mené par les rameurs Phéaciens si bien aguerris à leur tâche, tu étais comme bercé par le bruit régulier des rames et le mouvement profond d'une mer douce mais étincelante. C'était comme dans ces rêves très rares qui vous mènent sur l'Olympe. Jamais tu ne te sentis si bien avec ce goût d’embrun salé sur tes lèvres et ce bruit régulier et sec du claquement des rames sur les flots. Tu éprouvas la sensation de voguer vers un nouveau Monde. Ce fut, Ulysse, l'un des rares moments de félicité absolue dans une vie de combats, de feu et du malheur d'avoir vu périr tous tes valeureux compagnons. Ulysse revenu dans ton palais, déguisé en mendiants pour châtier les prétendants, tu triomphas au tir à l'arc. Mais l'heure de la vindicte avait sonné. La première de tes flèches perça la gorge d'Antinoos, buvant sa coupe. Nul ne put te fléchir Ulysse, pas même, l'éloquent Eurymaque qui t'offrait de t'apporter réparations pour tes provisions goulument mangés et tes biens dilapidés. Le pardon s'effaça en toi car l'offense faite à ta femme et à ton fils et à ton honneur était trop forte. Aussi tu n'eus pas la magnanimité de choisir la clémence et le sang coula dans ton palais comme le vin des outres. Pas un des prétendants ne fut épargné à l'exception du chanteur de Lyre, Phénios et du héraut Médon qui avait protégé Télémaque.
Mais Ulysse, tu ne fus pas grand en laissant condamner à la pendaison hideuse, douze servantes qui avaient outragé Pénélope et partagé leur couche avec les prétendants. Ulysse tu fus tant aimé des déesses, des nymphes et des femmes et souvent sauvé du pire par celles qui te donnèrent plaisir et descendance. Mais obsédé par tes roches d'Ithaque ne sus pas leur rendre l'amour qu'elles te portèrent. Tu ne fus pas non plus à la hauteur de la constance et de la fidélité de Pénélope. Mais Ulysse poursuivi par la fatalité de l'exil et de l'errance et la rancune de Poséidon, tu fus aussi le préféré de la déesse Athéna qui fit tant et plus pour te sauver maintes fois de ta perte. Cette déesse fut la vraie sauvegarde de ta vie aventureuse et les femmes qui te chérirent t'apportèrent maintes douceurs et consolations dans ta vie tumultueuse.

Paul Arrighi, Toulouse, (France) 2013.
Place de la Gare, à Charleville.

Sur la place taillée en mesquines pelouses,
Square où tout est correct, les arbres et les fleurs,
Tous les bourgeois poussifs qu'étranglent les chaleurs
Portent, les jeudis soirs, leurs bêtises jalouses.

- L'orchestre militaire, au milieu du jardin,
Balance ses schakos dans la Valse des fifres :
Autour, aux premiers rangs, parade le gandin ;
Le notaire pend à ses breloques à chiffres.

Des rentiers à lorgnons soulignent tous les couacs :
Les gros bureaux bouffis traînant leurs grosses dames
Auprès desquelles vont, officieux cornacs,
Celles dont les volants ont des airs de réclames ;

Sur les bancs verts, des clubs d'épiciers retraités
Qui tisonnent le sable avec leur canne à pomme,
Fort sérieusement discutent les traités,
Puis prisent en argent, et reprennent : " En somme !..."

Épatant sur son banc les rondeurs de ses reins,
Un bourgeois à boutons clairs, bedaine flamande,
Savoure son onnaing d'où le tabac par brins
Déborde - vous savez, c'est de la contrebande ; -

Le long des gazons verts ricanent les voyous ;
Et, rendus amoureux par le chant des trombones,
Très naïfs, et fumant des roses, les pioupious
Caressent les bébés pour enjôler les bonnes...

- Moi, je suis, débraillé comme un étudiant,
Sous les marronniers verts les alertes fillettes :
Elles le savent bien ; et tournent en riant,
Vers moi, leurs yeux tout pleins de choses indiscrètes.

Je ne dis pas un mot : je regarde toujours
La chair de leurs cous blancs brodés de mèches folles :
Je suis, sous le corsage et les frêles atours,
Le dos divin après la courbe des épaules.

J'ai bientôt déniché la bottine, le bas...
- Je reconstruis les corps, brûlé de belles fièvres.
Elles me trouvent drôle et se parlent tout bas...
- Et je sens les baisers qui me viennent aux lèvres.
Chanson d'automne.

Déjà plus d'une feuille sèche
Parsème les gazons jaunis ;
Soir et matin, la brise est fraîche,
Hélas ! les beaux jours sont finis !

On voit s'ouvrir les fleurs que garde
Le jardin, pour dernier trésor :
Le dahlia met sa cocarde
Et le souci sa toque d'or.

La pluie au bassin fait des bulles ;
Les hirondelles sur le toit
Tiennent des conciliabules :
Voici l'hiver, voici le froid !

Elles s'assemblent par centaines,
Se concertant pour le départ.
L'une dit : " Oh ! que dans Athènes
Il fait bon sur le vieux rempart !

" Tous les ans j'y vais et je niche
Aux métopes du Parthénon.
Mon nid bouche dans la corniche
Le trou d'un boulet de canon. "

L'autre : " J'ai ma petite chambre
A Smyrne, au plafond d'un café.
Les Hadjis comptent leurs grains d'ambre
Sur le seuil d'un rayon chauffé.

" J'entre et je sors, accoutumée
Aux blondes vapeurs des chibouchs,
Et parmi les flots de fumée,
Je rase turbans et tarbouchs. "

Celle-ci : " J'habite un triglyphe
Au fronton d'un temple, à Balbeck.
Je m'y suspends avec ma griffe
Sur mes petits au large bec. "

Celle-là : " Voici mon adresse :
Rhodes, palais des chevaliers ;
Chaque hiver, ma tente s'y dresse
Au chapiteau des noirs piliers. "

La cinquième : " Je ferai halte,
Car l'âge m'alourdit un peu,
Aux blanches terrasses de Malte,
Entre l'eau bleue et le ciel bleu. "

La sixième : " Qu'on est à l'aise
Au Caire, en haut des minarets !
J'empâte un ornement de glaise,
Et mes quartiers d'hiver sont prêts. "

" A la seconde cataracte,
Fait la dernière, j'ai mon nid ;
J'en ai noté la place exacte,
Dans le pschent d'un roi de granit. "

Toutes : " Demain combien de lieues
Auront filé sous notre essaim,
Plaines brunes, pics blancs, mers bleues
Brodant d'écume leur bassin ! "

Avec cris et battements d'ailes,
Sur la moulure aux bords étroits,
Ainsi jasent les hirondelles,
Voyant venir la rouille aux bois.

Je comprends tout ce qu'elles disent,
Car le poète est un oiseau ;
Mais, captif ses élans se brisent
Contre un invisible réseau !

Des ailes ! des ailes ! des ailes !
Comme dans le chant de Ruckert,
Pour voler, là-bas avec elles
Au soleil d'or, au printemps vert !
NGANGO HONORÉ May 2021
La beauté est éphémère
Et passagère est ce qu'on voit
Ce n'est pas ça qu'on recherche chez une femme, ce n'est pas ça

Il est question de Grâce
Ma sœur appelle sa "Woman  of tomorrow "
Been a Queen
Tout femme naît princesse, mais elle doit se transformer en reine

C'est ça qu'on recherche chez une femme Cette royauté est acquise avec la maturité
Et une double couronne est en jeu
Puisqu'on dit :
Une femme en talon est certes élégante, belle ou ...
Mais une femme à genou est plus Puissante
Tous les Combat se gagnent dans la prière
Elle devient une reine pour Jesus

Je dédie ce poème à ma MÉMÉ, car en l'écrivant j'ai reconnu la vérité dans ces paroles de Malala Yousafzai 
Je cite : il y a deux Puissances celle de l'épée et celle du bic, mais il y a une 3e plus Puissante que les premières, la Puissance d'une femme

Une femme est forte
Courageuse et Brave 
Elles incarnent la Bravoure des plus Valeureux Chevaliers de l'histoire
Elles inspirent l'humanité

On rend hommage au Reines de notre histoire pas aux princesses
Elles marquent notre Histoire et la parsèment d'une saveur agréable qu'on ne serait pas décrire

Ces reines
Descente d'esprit d'âme et de corps
Sans complexe de supériorité étouffant ni d'infériorité agaçante
C'est d'elles que je parle la 

On dit que personne n'est parfait.
Mais je me dis que si les défauts d'une personne n'égalent pas son bon côté
Et qu'elle est toujours prête à s'améliorer
Pourquoi ne pas dire qu'elle est parfaite

Ma mère, la mienne est une Reine-Parfaite
Love you mum 
La mienne
Je rends Hommage par la Présente a Tout les Mamans du monde.
On les aimes toutes nos Mammans 🥰👌
Je vous envoye un bouquet que ma main
Vient de trier de ces fleurs épanies,
Qui ne les eust à ce vespre cuillies,
Cheutes à terre elles fussent demain.


Cela vous soit un exemple certain
Que vos beautés, bien qu'elles soient fleuries,
En peu de tems cherront toutes flétries,
Et comme fleurs, periront tout soudain.


Le tems s'en va, le tems s'en va, ma Dame,
Las ! le tems non, mais nous nous en allons,
Et tost serons estendus sous la lame :


Et des amours desquelles nous parlons,
Quand serons morts, n'en sera plus nouvelle :
Pour-ce aimés moy, ce-pendant qu'estes belle.
À Max Jacob.

Vers le palais de Rosemonde au fond du Rêve
Mes rêveuses pensées pieds nus vont en soirée
Le palais don du roi comme un roi nu s'élève
Des chairs fouettées des roses de la roseraie

On voit venir au fond du jardin mes pensées
Qui sourient du concert joué par les grenouilles
Elles ont envie des cyprès grandes quenouilles
Et le soleil miroir des roses s'est brisé

Le stigmate sanglant des mains contre les vitres
Quel archer mal blessé du couchant le troua
La résine qui rend amer le vin de Chypre
Ma bouche aux agapes d'agneau blanc l'éprouva

Sur les genoux pointus du monarque adultère
Sur le mai de son âge et sur son trente et un
Madame Rosemonde roule avec mystère
Ses petits yeux tout ronds pareils aux yeux des Huns

Dame de mes pensées au cul de perle fine
Dont ni perle ni cul n'égale l'orient
Qui donc attendez-vous
De rêveuses pensées en marche à l'Orient
Mes plus belles voisines

Toc toc Entrez dans l'antichambre le jour baisse
La veilleuse dans l'ombre est un bijou d'or cuit
Pendez vos têtes aux patères par les tresses
Le ciel presque nocturne a des lueurs d'aiguilles

On entra dans la salle à manger les narines
Reniflaient une odeur de graisse et de graillon
On eut vingt potages dont trois couleurs d'*****
Et le roi prit deux œufs pochés dans du bouillon

Puis les marmitons apportèrent les viandes
Des rôtis de pensées mortes dans mon cerveau
Mes beaux rêves mort-nés en tranches bien saignantes
Et mes souvenirs faisandés en godiveaux

Or ces pensées mortes depuis des millénaires
Avaient le fade goût des grands mammouths gelés
Les os ou songe-creux venaient des ossuaires
En danse macabre aux plis de mon cervelet

Et tous ces mets criaient des choses nonpareilles
Mais nom de Dieu !
Ventre affamé n'a pas d'oreilles
Et les convives mastiquaient à qui mieux mieux

Ah ! nom de Dieu ! qu'ont donc crié ces entrecôtes
Ces grands pâtés ces os à moelle et mirotons
Langues de feu où sont-elles mes pentecôtes
Pour mes pensées de tous pays de tous les temps.
Paul d'Aubin Mar 2017
« Des Hommes prophétiques en face de leurs époques face à la souffrance causée par les périodes de réaction et de reflux »

(Relation d’une conférence donnée le 13 janvier 1940 à Toulouse par Silvio Trentin sur le principal Poète romantique Italien Giacomo Leopardi)

Prélude à une commémoration

C'est à la bibliothèque interuniversitaire de l’Université de Toulouse-Capitole alors que je me plongeais avec ferveur dans la lecture des ouvrages sur les « fuorusciti » (appellation donnée aux exilés politiques Italiens) que je découvris un opuscule de 118 pages, issue d'une conférence prononcée à Toulouse, le 13 janvier 1940 devant le « Cercle des intellectuels Républicains espagnols » par Silvio Trentin. Cette conférence fut prononcée avec la gorge nouée, devant un public d'intellectuels espagnols et catalans, la plupart exilés depuis 1939, et quelques-uns de leurs amis toulousains non mobilisés.
L'intense gravité du moment ne les empêchait pas de partager une ferveur commune ce haut moment de culture la culture Européenne intitulée par Silvio Trentin : « D’un poète qui nous permettra de retrouver l'Italie Giacomo Leopardi »
L'émotion fut grande pour moi car cet ouvrage me parut comme le frêle esquif rescapé d'un temps de défaites, de souffrances, rendu perceptible par le crépitement des balles de mitrailleuses, des explosions d’obus s'abattant sur des soldats républicains écrasés par la supériorité des armes et condamnés à la défaite par le mol et lâche abandon des diplomaties. Silvio Trentin avait gravé dans sa mémoire des images récentes qui n'avaient rien à envier aux tableaux grimaçants de nouveaux Goya. Il avait tant vu d'images d'avions larguant leurs bombes sur les populations terrifiées et embraser les charniers de Guernica. Il venait de voir passer les longues files de civils, toujours harassés, souvent blessés, emportant leurs rares biens ainsi que les soldats vaincus mais fiers de «la Retirada ». Il venait de visiter ces soldats dont parmi eux bon nombre de ses amis de combat, parqués sommairement dans des camps d'infortune.
Ces Catalans et Espagnols, qui s'étaient battus jusqu'au bout des privations et des souffrances endurées, étaient comme écrasés par le sentiment d'avoir été laissés presque seuls à lutter contre les fascismes, unis et comme pétrifiés par un destin d'injustice et d'amertume.
Mais ces premiers déchainements impunis d'injustices et de violences avaient comme ouverts la porte aux «trois furies» de la mythologie grecque et une semaine exactement après la conclusion du pacte de non-agression germano-soviétique, signé le 23 août 1939, par Molotov et Ribbentrop, les troupes allemandes se jetaient, dès le 1er septembre, sur la Pologne qu'elles écrasaient sous le nombre des stukas et des chars, en raison ce que le Général de Gaulle nomma ultérieurement « une force mécanique supérieure».
Une armée héroïque, mais bien moins puissante, était défaite. Et il ne nous en reste en guise de témoignage dérisoire que les images du cinéaste Andrei Wajda, nous montrant de jeunes cavaliers munis de lances se rendant au combat, à cheval, à la fin de cet été 1939, images d'une fallacieuse et vénéneuse beauté. Staline rendu avide par ce festin de peuples attaqua la Finlande, un mois après, le 30 septembre 1940, après s'être partagé, avec l'Allemagne hitlérienne, une partie de la Pologne. Depuis lors la « drôle de guerre » semblait en suspension, attendant pétrifiée dans rien faire les actes suivants de la tragédie européenne.

- Qu'est ce qui pouvait amener Silvio Trentin en ces jours de tragédie, à sacrifier à l'exercice d'une conférence donnée sur un poète italien né en 1798, plus d'un siècle avant ce nouvel embrasement de l'Europe qui mourut, si jeune, à trente-neuf ans ?
- Comment se fait-il que le juriste antifasciste exilé et le libraire militant devenu toulousain d'adoption, plus habitué à porter son éloquence reconnue dans les meetings organisés à Toulouse en soutien au Front à s'exprimer devant un cercle prestigieux de lettrés, comme pour magnifier la poésie même parmi ses sœurs et frères d'armes et de malheurs partagés ?
I °) L’opposition de tempéraments de Silvio Trentin et Giacomo Leopardi
L'intérêt porté par Silvio Trentin aux textes de Percy Shelley et au geste héroïco-romantique du poète Lauro de Bosis qui dépeignit dans son dernier texte le choix de sa mort héroïque pourrait nous laisser penser que le choix, en 1940, de Giacomo Leopardi comme sujet de médiation, s'inscrivait aussi dans une filiation romantique. Certes il y a bien entre ces deux personnalités si différentes que sont Giacomo Leopardi et Silvio Trentin une même imprégnation romantique. Le critique littéraire hors pair que fut Sainte-Beuve ne s'y est pourtant pas trompé. Dans l'un des premiers portraits faits en France de Leopardi, en 1844, dans la ***** des deux Mondes, Sainte-Beuve considère comme Leopardi comme un « Ancien » : (...) Brutus comme le dernier des anciens, mais c'est bien lui qui l'est. Il est triste comme un Ancien venu trop **** (...) Leopardi était né pour être positivement un Ancien, un homme de la Grèce héroïque ou de la Rome libre. »
Giacomo Leopardi vit au moment du plein essor du romantisme qui apparaît comme une réaction contre le formalisme de la pâle copie de l'Antique, de la sécheresse de la seule raison et de l'occultation de la sensibilité frémissante de la nature et des êtres. Mais s'il partage pleinement les obsessions des écrivains et poètes contemporains romantiques pour les héros solitaires, les lieux déserts, les femmes inaccessibles et la mort, Leopardi, rejette l'idée du salut par la religion et tout ce qui lui apparaît comme lié à l'esprit de réaction en se plaignant amèrement du caractère étroitement provincial et borné de ce qu'il nomme « l’aborrito e inabitabile Recanati ». En fait, la synthèse de Giacomo Leopardi est bien différente des conceptions d'un moyen âge idéalisé des romantiques. Elle s'efforce de dépasser le simple rationalisme à l'optimisme naïf, mais ne renie jamais l'aspiration aux « Lumières » qui correspond pour lui à sa passion tumultueuse pour les sciences. Il s'efforce, toutefois, comme par deux ponts dressés au travers de l'abime qui séparent les cultures et les passions de siècles si différents, de relier les idéaux des Antiques que sont le courage civique et la vertu avec les feux de la connaissance que viennent d'attiser les encyclopédistes. A cet effort de confluence des vertus des langues antiques et des sciences nouvelles se mêle une recherche constante de la lucidité qui le tient toujours comme oscillant sur les chemins escarpés de désillusions et aussi du rejet des espoirs fallacieux dans de nouvelles espérances d'un salut terrestre.
De même Silvio Trentin, de par sa haute formation juridique et son engagement constant dans les tragédies et péripéties quotidienne du militantisme, est **** du secours de la religion et de toute forme d'idéalisation du passé. Silvio Trentin reste pleinement un homme de progrès et d'idéal socialiste fortement teinté d'esprit libertaire pris à revers par la barbarie d'un siècle qui s'ouvre par la première guerre mondiale et la lutte inexpiable engagée entre la réaction des fascismes contre l'esprit des Lumières.
Mais, au-delà d'un parcours de vie très éloigné et d'un pessimisme historique premier et presque fondateur chez Leopardi qui l'oppose à l'obstination civique et démocratique de Silvio Trentin qui va jusqu'à prôner une utopie sociétale fondée sur l'autonomie, deux sentiments forts et des aspirations communes les font se rejoindre.

II °) Le même partage des désillusions et de la douleur :
Ce qui relie les existences si différentes de Giacomo Leopardi et de Silvio Trentin c'est une même expérience existentielle de la désillusion et de la douleur. Elle plonge ses racines chez Giacomo Leopardi dans une vie tronquée et comme recroquevillée par la maladie et un sentiment d'enfermement. Chez Silvio Trentin, c'est l'expérience historique même de la première moitié du vingtième siècle dont il est un des acteurs engagés qui provoque, non pas la désillusion, mais le constat lucide d'un terrible reflux historique qui culmine jusqu'à la chute de Mussolini et d'Hilter. A partir de retour dans sa patrie, le 4 septembre 1943, Silvio Trentin débute une période de cinq jours de vie intense et fiévreuse emplie de liberté et de bonheur, avant de devoir replonger dans la clandestinité, en raison de la prise de contrôle du Nord et du centre de l'Italie par l'armée allemande et ses alliés fascistes. Bien entendu il n'y a rien de comparable en horreur entre le sentiment d'un reflux des illusions causé par l'échec historique de la Révolution française et de son héritier infidèle l'Empire et le climat de réaction qui suit le congrès de Vienne et la violence implacable qui se déchaine en Europe en réaction à la tragédie de la première mondiale et à la Révolution bolchevique.


III °) Le partage de la souffrance par deux Esprits dissemblables :
Silvio Trentin retrace bien le climat commun des deux périodes : « Son œuvre se situe bien (...) dans cette Europe de la deuxième décade du XIXe siècle qui voit s'éteindre les dernières flammèches de la Grand Révolution et s'écrouler, dans un fracas de ruines, la folle aventure tentée par Bonaparte et se dresser impitoyablement sur son corps, à l'aide des baïonnettes et des potences, les solides piliers que la Sainte Alliance vient d'établir à Vienne. »
C'est donc durant deux périodes de reflux qu'ont vécu Giacomo Leopardi et Silvio Trentin avec pour effet d'entrainer la diffusion d'un grand pessimisme historique surtout parmi celles et ceux dont le tempérament et le métier est de penser et de décrire leur époque. Silvio Trentin a vu démocratie être progressivement étouffée, de 1922 à 1924, puis à partir de 1926, être brutalement écrasée en Italie. En 1933, il assisté à l'accession au gouvernement d'****** et à l'installation rapide d'un pouvoir impitoyable ouvrant des camps de concentration pour ses opposants et mettant en œuvre un antisémitisme d'Etat qui va basculer dans l'horreur. Il a personnellement observé, puis secouru, les républicains espagnols et catalans si peu aidés qu'ils ont fini par ployer sous les armes des dictatures fascistes, lesquelles ne ménagèrent jamais leurs appuis, argent, et armes et à leur allié Franco et à la « vieille Espagne ». Il a dû assurer personnellement la pénible tâche d'honorer ses amis tués, comme l'avocat républicain, Mario Angeloni, le socialiste Fernando de Rosa, son camarade de « Giustizia e Libertà », Libero Battistelli. Il a assisté à l'assassinat en France même de l'économiste Carlo Rosselli qui était son ami et qu'il estimait entre tous.

IV °) Sur le caractère de refuge ultime de la Poésie :
Silvio Trentin laisse percer la sensibilité et l'esprit d'un être sensible face aux inévitables limites des arts et techniques mises au service de l'émancipation humaine. A chaque époque pèsent sur les êtres humains les plus généreux les limites inévitables de toute création bridée par les préjugés, les égoïsmes et les peurs. Alors la poésie vient offrir à celles et ceux qui en souffrent le plus, une consolation et leur offre un univers largement ouvert à la magie créatrice des mots ou il n'est d'autres bornes que celles de la liberté et la créativité. C'est ce qui nous permet de comprendre qu'au temps où l'Espagne brulait et ou l'Europe se préparait à vivre l'une des époques les plus sombres de l'humanité, la fragile cohorte des poètes, tels Rafael Alberti, Juan Ramon Jiménez, Federico Garcia Lorca et Antonio Machado s'engagea comme les ruisseaux vont à la mer, aux côtés des peuples et des classes opprimées. Parmi les plus nobles et les plus valeureux des politiques, ceux qui ne se satisfont pas des effets de tribune ou des honneurs précaires, la poésie leur devient parfois indispensable ainsi que formule Silvio Trentin :
« [...] si la poésie est utile aux peuples libres, [...] elle est, en quelque sorte, indispensable — ainsi que l'oxygène aux êtres que menace l'asphyxie — aux peuples pour qui la liberté est encore un bien à conquérir] « [...] La poésie s'adresse aussi "à ceux parmi les hommes [...] qui ont fait l'expérience cruelle de la déception et de la douleur».
Le 16 03 2017 écrit par Paul Arrighi
Paul d'Aubin Jul 2014
Ulysse adoré par les Femmes, les  Nymphes , protégé par Athéna et traqué par Poséidon.


Parti à contrecœur, ayant même contrefait le fou, pour se soustraire à la guerre et élever ton fils Télémaque, tu dus partir à Troie, et sus t'y montrer brave mais surtout fin stratège.
La guerre fut bien longue, pas du tout comme celle que chantaient les Aèdes. L'ennemi ressemblait tant à nos guerriers Achéens, courageux et aussi sûrs de leur droit que nous l'étions du notre.
Que de sang, que de peine ! Tu vis périr Patrocle, ne pus sauver Achille; et les morts aux corps déchiquetés par les épées se substituèrent aux coupes de ce vin si enivrant qu'est la rhétorique guerrière et à la funeste illusion d'une victoire facile.

Ulysse tu eus l'idée de bâtir ce grand vaisseau dont la proue figurait une tête de cheval. Ainsi les Achéens purent entrer dans le port forteresse si bien gardé. Mais quand la nuit noire et le vin mêlés ôtèrent aux courageux Troyens leur vigilance et leur garde, vous sortirent alors des flancs du bateau et vous précipitèrent pour ouvrir grands les portes aux guerriers Achéens.
La suite fut un grand carnage de guerriers Troyens mais aussi de non combattants et même de femmes. Et Troie, la fière, la courageuse ne fut plus ville libre et les survivants de son Peuple connurent l'esclavage.

Aussi quand Troie fut conquise et que ses rue coulèrent rouges du sang vermeil de ses défenseur, mais aussi de nombreux civils, tu songeas à retourner chez toi, car tu étais roi, et ton fils Télémaque aurait besoin de toi et Pénélope t'aimait. Les souvenirs d'émois et de tendres caresses faisaient encore frissonner la harpe de ton corps de souvenirs très doux.
C'est alors que tu dus affronter la Déesse Athéna et ton double, tous deux vigilants, a tester ta sincérité et ta constance. Oh, toi Homme volage et point encore rassasié de voyages et de conquêtes. L'étendue de la mer te fut donnée comme le théâtre même de ta vérité profonde.


Après bien des voyages et avoir perdu nombre de tes compagnons, tu fus poussé dans l'île de la nymphe Calypso.
Cette immortelle à la chevelure, si joliment bouclée se trouvait dans son île d'arbustes odoriférants. Aussi fit-elle tout pour te garder. Toi-même, tu lui trouvas de l'ardeur et des charmes même si durant le jour tu te laissais aller à la nostalgie d'Ithaque.
La belle immortelle te proposas, pour te garder, de te donner cet attribut si recherché qui empêche à jamais de sombrer dans le sommeil perpétuel.
Mais toi, Ulysse, tu préféras garder ton destin d'homme mortel et ton inguérissable blessure pour Ithaque.

Après sept années d’une prison si douce, l'intervention d'Athéna te rendit aux aventures de la Mer. Tu accostas, avec tes compagnons sur la côte d’une île malfaisante. C’était la demeure des Cyclopes. Parmi ce Peuple de géants, le cyclope Polyphème habitait une grotte profonde d'où il faisait rentrer chaque soir son troupeau.
Ulysse quelle folie traversa ton esprit et celui de tes compagnons que de vouloir pénétrer dans cette antre maudite, mû à la fois par la curiosité et la volonté de faire quelques larcins de chèvres ? Vous payèrent bien cher cette offense par la cruelle dévoration que fit l'infâme Polyphème de plusieurs de tes compagnons dont vous entendîtes craquer les os sous la mâchoire du sauvage. Aussi votre courage fut renforcé par votre haine lorsque vous lui plantèrent l'épieu dans son œil unique alors que sa vigilance venait d'être endormie par le vin.

Les barques ayant mouillés dans l'île d'Aiaé, tes compagnons imprudents furent transformés en pourceaux par la belle et cruelle Magicienne Circée.
Doté d'un contre poison à ses filtres, tu ne restas cependant pas insensible aux charmes de la belle Magicienne mais tu lui fis prononcer le grand serment avant de répondre à tes avances.
Elle accepta pour faire de toi son amant de redonner leur forme humaine à tes compagnons,
Et vos nuits furent tendres, sensuelles et magiques car la Magicienne excellait dans les arts de l'amour et il en naquit un fils.

Toi le rusé et courageux Ulysse, tu espérais enfin voguer avec délice sur une mer d'huile parcourue par les reflets d'argent des poissons volants et te réjouir des facéties des dauphins,
Mais c'était oublier et compter pour peu la rancune de Poséidon, le maître des eaux, rendu furieux par le traitement subi par son fils Polyphème.
C'est pour cela qu'une masse d'eau compacte, haute comme une haute tour avançant au grand galop ébranla et engloutit ton solide radeau.
Seul ton réflexe prompt de t'accrocher au plus grand des troncs te permis de plonger longuement au fonds des eaux en retenant longtemps ton souffle avant d’émerger à nouveaux.

La troisième des belles que ton voyage tumultueux te fit rencontrer fut la jeune Nausicaa, fille du roi des Phéaciens, Alcinoos.
Celle-ci, dans la floraison de sa jeunesse, ardente et vive, ne cédait en rien à l'éclat des plus belles et subtiles fleurs. Guidée par la déesse Athéna, elle vint auprès du fleuve ou tu dormais laver les habits royaux avec ses suivantes. Les voix des jeunes filles t'éveillèrent. Dans ta détresse et ta nudité, tu jetas l'effroi parmi les jeunes filles. Seule Nausicaa eut le courage de ne pas fuir et d'écouter ta demande d'aide. Elle rappela ses suivantes et te fit vêtir après que ton corps ait été lavé par l'eau du fleuve et enduit d'huile fine. Tu retrouvas ta force et ta beauté. Aussi Nausicaa vit en toi l'époux qu'elle désirait. Mais, ta nostalgie d'Ithaque fut encore plus forte. Alors Nausicaa te pria seulement, en ravalant ses larmes, de ne point oublier qu'elle t'avait sauvé des flots.

Amené tout ensommeillé dans le vaisseau mené par les rameurs Phéaciens si bien aguerris à leur tâche, tu étais comme bercé par le bruit régulier des rames et le mouvement profond d'une mer douce mais étincelante. C'était comme dans ces rêves très rares qui vous mènent sur l'Olympe. Jamais tu ne te sentis si bien avec ce goût d’embrun salé sur tes lèvres et ce bruit régulier et sec du claquement des rames sur les flots. Tu éprouvas la sensation de voguer vers un nouveau Monde. Ce fut, Ulysse, l'un des rares moments de félicité absolue dans une vie de combats, de feu et du malheur d'avoir vu périr tous tes valeureux compagnons.

Ulysse revenu dans ton palais, déguisé en mendiants pour châtier les prétendants, tu triomphas au tir à l'arc. Mais l'heure de la vindicte avait sonné. La première de tes flèches perça la gorge d'Antinoüs, buvant sa coupe. Nul ne put te fléchir Ulysse, pas même, l'éloquent Eurymaque qui t'offrait de t'apporter réparations pour tes provisions goulument mangés et tes biens dilapidés. Le pardon s'effaça en toi car l'offense faite à ta femme et à ton fils et à ton honneur était trop forte. Aussi tu n'eus pas la magnanimité de choisir la clémence et le sang coula dans ton palais comme le vin des outres. Pas un des prétendants ne fut épargné à l'exception du chanteur de Lyre, Phénios et du héraut Médon qui avait protégé Télémaque. Mais Ulysse, tu ne fus pas grand en laissant condamner à la pendaison hideuse, douze servantes qui avaient outragé Pénélope et partagé leur couche avec les prétendants.

Ulysse tu fus tant aimé des déesses, des nymphes et des femmes et souvent sauvé du pire par celles qui te donnèrent plaisir et descendance. Mais obsédé par tes roches d'Ithaque ne sus pas leur rendre l'amour qu'elles te portèrent. Tu ne fus pas non plus à la hauteur de la constance et de la fidélité de Pénélope.
Mais Ulysse poursuivi par la fatalité de l'exil et de l'errance et la rancune de Poséidon, tu fus aussi le préféré de la déesse Athéna qui fit tant et plus pour te sauver maintes fois de ta perte. Cette déesse fut la vraie sauvegarde de ta vie aventureuse et les femmes qui te chérirent t'apportèrent maintes douceurs et consolations dans ta vie tumultueuse.

Paul Arrighi
The adventures of Ulysses in the Odyssey as beloved by Women and Nymphs protected by Athena and pursue by Poseidon
Je suis l'astre des nuits. Je brille, pâle et blanche,
Sur la feuille qui tremble au sommet d'une branche,
Sur le ruisseau qui dort, sur les lacs, bien plus beaux
Quand mes voiles d'argent s'étendent sur leurs eaux.
Mes rayons vont chercher les fleurs que je préfère,
Et font monter au ciel les parfums de la terre ;
Je donne la rosée au rameau desséché,
Que l'ardeur du soleil a, sur le sol, penché.
Sitôt que je parais, tout se tait et repose,
L'homme quitte les champs, et l'abeille la rose :
Plus de bruit dans les airs, plus de chant dans les bois ;
Devant mon doux regard nul n'élève sa voix,
De la terre ou du ciel aucun son ne s'élance,
J'arrive avec la nuit, et je règne en silence !
Je cache mes rayons quand le cri des hiboux
Vient troubler mon repos et mon calme si doux.

Je suis l'astre des nuits ; je brille, pâle et blanche,
Sur le cœur attristé, sur le front qui se penche,
Sur tout ce qui gémit, sur tout ce qui se plaint,
Sur tous les yeux en pleurs qu'aucun sommeil n'atteint.

Quelques heureux, parfois, me donnent un sourire,
S'aiment, et devant moi trouvent doux de le dire ;
J'écoute avec bonheur leurs longs serments d'amour,
Je leur promets tout bas de n'en rien dire au jour.
Mais les plus beaux rayons de mon blanc diadème
Sont pour vous qui souffrez !... C'est vous surtout que j'aime
Donnez-moi vos soupirs et donnez-moi vos pleurs ;
Laissez-moi deviner vos secrètes douleurs,
Le rêve inachevé qui n'a point de parole,
Que nul ne sut jamais et que nul ne console !
J'ai pour les cœurs brisés, ainsi que pour les fleurs,
Une fraîche rosée endormant les douleurs.
Écoutez-moi ce soir, vous saurez un mystère
Ignoré jusqu'ici du reste de la terre,
Secret que je révèle à ceux de mes élus,
Qui m'ont le plus aimée et qui rêvent le plus.

Je vous dirai pourquoi je brille, pâle et blanche,
Sur le cœur attristé, sur le front qui se penche,
Sur tout ce qui gémit, sur tout ce qui se plaint,
Sur tous les yeux en pleurs qu'aucun sommeil n'atteint.

Votre vie, ici-bas, est un triste voyage,
Dont le ciel, où je suis, est le port, le rivage ;
Elle a bien des écueils, la route où vous passez...
Et vous n'arrivez pas sans vous être blessés !
Vous n'abordez pas tous sur la céleste plage,
Ceux qui se sont souillés demeurent à l'écart ;
Coupables et souffrants, dans une morne attente,
Ils s'arrêtent au seuil du séjour où l'on chante.
Un ange, dont les pleurs voilent le doux regard,
Leur barre le chemin et murmure : « Plus **** ! »
- Parmi ces exilés traînant au **** leur chaîne,
Parmi les longs sanglots de ces âmes en peine,
Errantes **** de Dieu, du soleil et du jour,
Moi, je prends en pitié les coupables d'amour.
J'appelle auprès de moi ces Âmes de la terre,
Qu'un Dieu juste éloigna du séjour de lumière,
Parce qu'en sa présence elles gardaient encor
Un souvenir d'amour, au delà de leur mort.
Je leur donne ma nuit, mes rayons, mes étoiles,
Je donne à leur exil l'abri de mes longs voiles,
Et les larmes, le soir, qui coulent de leurs yeux,
Semblent à vos regards des étoiles des cieux ;
Ce ne sont que des pleurs... des pleurs d'âmes souffrantes,
Qui, la nuit, dans l'espace avec moi sont errantes.

Vous, encor sur la terre où s'agitent vos cœurs,
Levez les yeux vers moi ! j'ai près de moi vos sœurs.
Oh ! veillez bien sur vous... et priez bien pour elles !
Entendez-vous leurs pleurs ? car si mes nuits sont belles,
Pourtant Dieu n'est pas là ! le seul repos, c'est Lui...
Il fait jour près de Dieu, - je ne suis que la nuit !

Je vous ai dit pourquoi je brille pâle et blanche
Sur le cœur attristé, sur le front qui se penche,
Sur tout ce qui gémit, sur tout ce qui se plaint,
Sur tous les yeux en pleurs qu'aucun sommeil n'atteint.
Michael R Burch Feb 2020
Rondel: Your Smiling Mouth
by Charles d'Orleans (c. 1394-1465)
loose translation/interpretation/modernization by Michael R. Burch

Your smiling mouth and laughing eyes, bright gray,
Your ample ******* and slender arms’ twin chains,
Your hands so smooth, each finger straight and plain,
Your little feet—please, what more can I say?

It is my fetish when you’re far away
To muse on these and thus to soothe my pain—
Your smiling mouth and laughing eyes, bright gray,
Your ample ******* and slender arms’ twin chains.

So would I beg you, if I only may,
To see such sights as I before have seen,
Because my fetish pleases me. Obscene?
I’ll be obsessed until my dying day
By your sweet smiling mouth and eyes, bright gray,
Your ample ******* and slender arms’ twin chains!



The First Valentine Poem

Charles d’Orleans (1394-1465), a French royal, the grandchild of Charles V, and the Duke of Orleans, has been credited with writing the first Valentine card, in the form of a poem for his wife. Charles wrote the poem in 1415 at age 21, in the first year of his captivity while being held prisoner in the Tower of London after having been captured by the British at the Battle of Agincourt.

My Very Gentle Valentine
by Charles d’Orleans (c. 1394-1465)
loose translation/interpretation by Michael R. Burch

My very gentle Valentine,
Alas, for me you were born too soon,
As I was born too late for you!
May God forgive my jailer
Who has kept me from you this entire year.
I am sick without your love, my dear,
My very gentle Valentine.



Le Primtemps (“Spring” or “Springtime”)
by Charles d’Orleans (c. 1394-1465)
loose translation/interpretation/modernization by Michael R. Burch

Young lovers,
greeting the spring
fling themselves downhill,
making cobblestones ring
with their wild leaps and arcs,
like ecstatic sparks
drawn from coal.

What is their brazen goal?

They grab at whatever passes,
so we can only hazard guesses.
But they rear like prancing steeds
raked by brilliant spurs of need,
Young lovers.

The original French poem:

Jeunes amoureux nouveaulx
En la nouvelle saison,
Par les rues, sans raison,
Chevauchent, faisans les saulx.
Et font saillir des carreaulx
Le feu, comme de cherbon,
     Jeunes amoureux nouveaulx.
Je ne sçay se leurs travaulx
Ilz emploient bien ou non,
Mais piqués de l’esperon
Sont autant que leurs chevaulx
     Jeunes amoureux nouveaulx.



Ballade: Oft in My Thought
by Charles d'Orleans (c. 1394-1465)
loose translation/interpretation/modernization by Michael R. Burch

So often in my busy mind I sought,
    Around the advent of the fledgling year,
For something pretty that I really ought
    To give my lady dear;
    But that sweet thought's been wrested from me, clear,
        Since death, alas, has sealed her under clay
    And robbed the world of all that's precious here—
        God keep her soul, I can no better say.

For me to keep my manner and my thought
    Acceptable, as suits my age's hour?
While proving that I never once forgot
    Her worth? It tests my power!
    I serve her now with masses and with prayer;
        For it would be a shame for me to stray
    Far from my faith, when my time's drawing near—
        God keep her soul, I can no better say.

Now earthly profits fail, since all is lost
and the cost of everything became so dear;
Therefore, O Lord, who rules the higher host,
    Take my good deeds, as many as there are,
    And crown her, Lord, above in your bright sphere,
        As heaven's truest maid! And may I say:
    Most good, most fair, most likely to bring cheer—
        God keep her soul, I can no better say.

When I praise her, or hear her praises raised,
I recall how recently she brought me pleasure;
    Then my heart floods like an overflowing bay
And makes me wish to dress for my own bier—
    God keep her soul, I can no better say.



Confession of a Stolen Kiss
by Charles d’Orleans (c. 1394-1465)
loose translation/interpretation by Michael R. Burch

My ghostly father, I confess,
First to God and then to you,
That at a window (you know how)
I stole a kiss of great sweetness,
Which was done out of avidness—
But it is done, not undone, now.

My ghostly father, I confess,
First to God and then to you.

But I shall restore it, doubtless,
Again, if it may be that I know how;
And thus to God I make a vow,
And always I ask forgiveness.

My ghostly father, I confess,
First to God and then to you.

Translator note: By "ghostly father" I take Charles d’Orleans to be confessing to a priest. If so, it's ironic that the kiss was "stolen" at a window and the confession is being made at the window of a confession booth. But it also seems possible that Charles could be confessing to his human father, murdered in his youth and now a ghost. There is wicked humor in the poem, as Charles is apparently vowing to keep asking for forgiveness because he intends to keep stealing kisses at every opportunity!

Original Middle English text:

My ghostly fader, I me confess,
First to God and then to you,
That at a window, wot ye how,
I stale a kosse of gret swetness,
Which don was out avisiness
But it is doon, not undoon, now.

My ghostly fader, I me confess,
First to God and then to you.

But I restore it shall, doutless,
Agein, if so be that I mow;
And that to God I make a vow,
And elles I axe foryefness.

My ghostly fader, I me confesse,
First to God and then to you.



In My Imagined Book
by Charles d’Orleans (c. 1394-1465)
loose translation/interpretation by Michael R. Burch

In my imagined Book
my heart endeavored to explain
its history of grief, and pain,
illuminated by the tears
that welled to blur those well-loved years
of former happiness's gains,
in my imagined Book.

Alas, where should the reader look
beyond these drops of sweat, their stains,
all the effort & pain it took
& which I recorded night and day
in my imagined Book?

The original French poem:

Dedens mon Livre de Pensee,
J'ay trouvé escripvant mon cueur
La vraye histoire de douleur
De larmes toute enluminee,
En deffassant la tresamée
Ymage de plaisant doulceur,
Dedens mon Livre de Pensee.

Hélas! ou l'a mon cueur trouvee?
Les grosses gouttes de sueur
Lui saillent, de peinne et labeur
Qu'il y prent, et nuit et journee,
Dedens mon Livre de Pensee.



Charles d’Orleans (1394-1465) was a French royal born into an aristocratic family: his grandfather was Charles V of France and his uncle was Charles VI. His father, Louis I, Duke of Orleans, was a patron of poets and artists. The poet Christine de Pizan dedicated poems to his mother, Valentina Visconti. He became the Duke of Orleans at age 13 after his father was murdered by John the Fearless, Duke of Burgundy. He was captured at age 21 in the battle of Agincourt and taken to England, where he remained a prisoner for the next quarter century. While imprisoned there he learned English and wrote poetry of a high order in his second language. A master of poetic forms, he wrote primarily ballades, chansons, complaints and rondeaux. He has been called the “father of French lyric poetry” and has also been credited with writing the first Valentine’s Day poem.

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Puisque de Sisteron à Nantes,
Au cabaret, tout français chante,
Puisque je suis ton échanson,
Je veux, ô Française charmante,
Te fredonner une chanson ;
Une chanson de ma manière,
Pour toi d'abord, et mes amis,
En buvant gaiement dans mon verre
À la santé de ton pays.

Amis, buvons à la Fortune
De la France, Mère commune,
Entre Shakespeare et Murillo :
On y voit la blonde et la brune,
On y boit la bière... et non l'eau.
Doux pays, le plus doux du monde,
Entre Washington... et Chauvin,
Tu baises la brune et la blonde,
Tu fais de la bière et du vin.

Ton cœur est franc, ton âme est fière ;
Les soldats de la Terre entière
T'attaqueront toujours en vain.
Tu baises la blonde et la bière
Comme on boit la brune et le vin.
La brune a le con de la lune,
La blonde a les poils... du mâtin...
Garde bien ta bière et ta brune,
Garde bien ta blonde et ton vin !

On tire la bière de l'orge,
La baïonnette de la forge,
Avec la vigne on fait du vin.
Ta blonde a deux fleurs sur la gorge,
Ta brune a deux grains de raisin.
L'une accroche sa jupe aux branches,
L'autre sourit sous les houblons :
Garde bien leurs garces de hanches,
Garde bien leurs bougres de cons.

Pays vaillant comme un archange,
Pays plus *** que la vendange
Et que l'étoile du matin,
Ta blonde est une douce orange,
Mais ta brune ah !... sacré mâtin !
Ta brune a la griffe profonde ;
Ta rousse a le teint du jasmin ;
Garde-les bien ! Garde ta blonde
Garde-la, le sabre à la main.

Que tes canons n'aient pas de rouilles,
Que tes fileuses de quenouilles
Puissent en paix rire et dormir,
Et se repose sur tes couilles
Du présent et de l'avenir.
C'est sur elles que tu travailles
Sous les toisons d'ombre ou d'or fin :
Garde-les des regards canailles,
Garde-les du coup d'œil hautain !

Pays galant, la langue est claire
Comme le soleil dans ton verre,
Plus que le grec et le latin ;
Autant que ta blonde et ta bière
Garde-la bien, comme ton vin.
Pays plus beau que le Soleil, Lune,
Étoile, aube, aurore et matins.
Aime bien ta blonde et ta brune,
Et fais-leur... beaucoup de catins !
Paul d'Aubin Jan 2017
La semaine mémorable

Nous étions à Létia en Corse
Aux sources de mon enfance
Pas riche mais si riante.
Et le temps était beau
Avec ces teints de ce pastel
Méditerranéen, entre turquoise
Et bleu outre-mer.
Notre grande fille Célia
Était venue avec une amie, Souen.
Mais si leur jeunesse
Enjolivait tous et tout,
Elles restaient aussi fugaces
Que le libecciu tournoyant
Sur les montagnes dans l'île,
faisant penser aux truites,
Des torrents si frais,
Mais leur appétit de vivre
Se révélait communicatif
Et jetait comme une empreinte
De bonheur vif et contagieux.
Pour ne rien gâcher
A ce pur bonheur
Nous regardions jouer et mordiller
notre jeune chienne cocker,
Blackine, d’à peine une année,
Au pelage anthracite, si doux
Se muant en vraie chienne de village.
Il ne lui manquait qu'un
Bon maître chasseur pour
L'initier aux la chasse dans le maquis
Et dans les vertes fougères.
L'été avait comme étendu,
Ses longues ailes d'aigle royal, nous apportant
Joie de vivre et cette délicieuse
Sensation de plénitude.
Nous écoutions et regardions
Tout, sauf, les infos saturées
des malheurs des êtres et du Monde,
auxquelles nous avions une furieuse envie
De dire «ciao», «ciao»,
A tous ces malheurs répétitifs,
Qui nous semblaient inconvenants
Outranciers et superflus.
Dont seuls profitaient certains esprits de pois chiches
Nés ou devenus des porteurs de malheur
D’eux-mêmes et des autres.
Et ces horribles corbeaux de malheur qui
Qui font métier d'épouvante pour être élus.
Au lieu de remédier aux vraies causes,
Des déséquilibres et souffrances du Monde.
Les meubles anciens de châtaignier
Semblaient rajouter à la temporalité
De ce retour irrésistible du bonheur
Que nous avions connu
il y a si longtemps.
Comme une trêve bienfaisante.
Où ces trêves vécues par les soldats
que les soldats du front
ne voudraient jamais qu'elles
finissent, contrairement à ceux
Qui prospèrent de la guerre.
Nous étions au mitan de l'été
Et à l'automne de notre vie
Saison mordorée, sinon
La plus belle, du moins
La plus propice à goûter
La quintessence des bienfaits
De la nature et de notre vie si brève.
Ce fut aussi une explosion de parfums
De soleils et de «croque vivre»
La jeunesse avait fait retour
Dans nos vies, trop assagies
Par les ans et la force des choses.
Ce fut une semaine de sensations rares.
De celles qui vous rappellent
que nous sommes encore vivants,
En dépit des années écoulées.
Et de toutes les illusions
Abandonnées bien trop facilement.

Paul Arrighi
En vertu des pouvoirs qui leur sont conférés
Les muses réunies en conclave extraordinaire
Sous le très haut patronage de la révérende muse
Dérébénale
M'ont défait chevalier de la Calypso
Baron du Tiers-Ordre de l'Impénétrable
Avec pour mission expresse la Jouissance plénière
De l'Obéissance et de la Chasteté.
Ainsi investi de Toute Puissance
J'ai usé abusé de mes prérogatives
Pour adouber de mes oxymores
La virginité froissée des muses désabusées.
Or de même que ce n'est pas le bonheur
Mais la quête du bonheur qui nous vivifie
C'est non pas l'orgasme mais la quête de l'orgasme qui sanctifie les muses.
Les muses ne connaissent ni frustration
Ni dégoût ni appétence particulière.
Les muses ont toujours envie
Et offrent tous leurs orifices avides à l'exploration,
Au boire et au manger
Des poètes maudits.
C'est sans peur et sans reproches
Qu'elles cèdent et rient aux éclats
Sous les coups de boutoir des mots
Qui giclent au fond de leur labyrinthe
Et qui les fertilisent et les parfument
De leur piment infiniment précieux.
Les muses sont des hydres gourmandes 
À la fois clitoridiennes, anales
Buccales, vaginales, lustrales,
Visuelles, olfactives, auditives
Et zygomatiques
Et c'est en cela qu'elles sont en même temps inverties
Tendres et cruelles
En dedans et en dehors d'elles mêmes
Fatalement soumises à la passion
Et hystériquement libérées
Par effraction symbolique.
Que les fins de journées d'automne sont pénétrantes ! Ah ! pénétrantes jusqu'à la douleur ! car il est de certaines sensations délicieuses dont le vague n'exclut pas l'intensité ; et il n'est pas de pointe plus acérée que celle de l'Infini.

Grand délice que celui de noyer son regard dans l'immensité du ciel et de la mer ! Solitude, silence, incomparable chasteté de l'azur ! une petite voile frissonnante à l'horizon, et qui par sa petitesse et son isolement imite mon irrémédiable existence, mélodie monotone de la houle, toutes ces choses pensent par moi, ou je pense par elles (car dans la grandeur de la rêverie, le moi se perd vite !) ; elles pensent, dis-je, mais musicalement et pittoresquement, sans arguties, sans syllogismes, sans déductions.

Toutefois, ces pensées, qu'elles sortent de moi ou s'élancent des choses, deviennent bientôt trop intenses. L'énergie dans la volupté crée un malaise et une souffrance positive. Mes nerfs trop tendus ne donnent plus que des vibrations criardes et douloureuses.

Et maintenant la profondeur du ciel me consterne ; sa limpidité m'exaspère. L'insensibilité de la mer, l'immuabilité du spectacle, me révoltent... Ah ! faut-il éternellement souffrir, ou fuir éternellement le beau ? Nature, enchanteresse sans pitié, rivale toujours victorieuse, laisse-moi ! Cesse de tenter mes désirs et mon orgueil ! L'étude du beau est un duel où l'artiste crie de frayeur avant d'être vaincu.
Elle ne connaissait ni l'orgueil ni la haine ;
Elle aimait ; elle était pauvre, simple et sereine ;
Souvent le pain qui manque abrégeait son repas.
Elle avait trois enfants, ce qui n'empêchait pas
Qu'elle ne se sentît mère de ceux qui souffrent.
Les noirs événements qui dans la nuit s'engouffrent,
Les flux et les reflux, les abîmes béants,
Les nains, sapant sans bruit l'ouvrage des géants,
Et tous nos malfaiteurs inconnus ou célèbres,
Ne l'épouvantaient point ; derrière ces ténèbres,
Elle apercevait Dieu construisant l'avenir.
Elle sentait sa foi sans cesse rajeunir
De la liberté sainte elle attisait les flammes
Elle s'inquiétait des enfants et des femmes ;
Elle disait, tendant la main aux travailleurs :
La vie est dure ici, mais sera bonne ailleurs.
Avançons ! - Elle allait, portant de l'un à l'autre
L'espérance ; c'était une espèce d'apôtre
Que Dieu, sur cette terre où nous gémissons tous,
Avait fait mère et femme afin qu'il fût plus doux ;
L'esprit le plus farouche aimait sa voix sincère.
Tendre, elle visitait, sous leur toit de misère,
Tous ceux que la famine ou la douleur abat,
Les malades pensifs, gisant sur leur grabat,
La mansarde où languit l'indigence morose ;
Quand, par hasard moins pauvre, elle avait quelque chose,
Elle le partageait à tous comme une sœur ;
Quand elle n'avait rien, elle donnait son cœur.
Calme et grande, elle aimait comme le soleil brille.
Le genre humain pour elle était une famille
Comme ses trois enfants étaient l'humanité.
Elle criait : progrès ! amour ! fraternité !
Elle ouvrait aux souffrants des horizons sublimes.

Quand Pauline Roland eut commis tous ces crimes,
Le sauveur de l'église et de l'ordre la prit
Et la mit en prison. Tranquille, elle sourit,
Car l'éponge de fiel plaît à ces lèvres pures.
Cinq mois, elle subit le contact des souillures,
L'oubli, le rire affreux du vice, les bourreaux,
Et le pain noir qu'on jette à travers les barreaux,
Edifiant la geôle au mal habituée,
Enseignant la voleuse et la prostituée.
Ces cinq mois écoulés, un soldat, un bandit,
Dont le nom souillerait ces vers, vint et lui dit
- Soumettez-vous sur l'heure au règne qui commence,
Reniez votre foi ; sinon, pas de clémence,
Lambessa ! choisissez. - Elle dit : Lambessa.
Le lendemain la grille en frémissant grinça,
Et l'on vit arriver un fourgon cellulaire.
- Ah ! voici Lambessa, dit-elle sans colère.
Elles étaient plusieurs qui souffraient pour le droit
Dans la même prison. Le fourgon trop étroit
Ne put les recevoir dans ses cloisons infâmes
Et l'on fit traverser tout Paris à ces femmes
Bras dessus bras dessous avec les argousins.
Ainsi que des voleurs et que des assassins,
Les sbires les frappaient de paroles bourrues.
S'il arrivait parfois que les passants des rues,
Surpris de voir mener ces femmes en troupeau,
S'approchaient et mettaient la main à leur chapeau,
L'argousin leur jetait des sourires obliques,
Et les passants fuyaient, disant : filles publiques !
Et Pauline Roland disait : courage, sœurs !
L'océan au bruit rauque, aux sombres épaisseurs,
Les emporta. Durant la rude traversée,
L'horizon était noir, la bise était glacée,
Sans l'ami qui soutient, sans la voix qui répond,
Elles tremblaient. La nuit, il pleuvait sur le pont
Pas de lit pour dormir, pas d'abri sous l'orage,
Et Pauline Roland criait : mes soeurs, courage !
Et les durs matelots pleuraient en les voyant.
On atteignit l'Afrique au rivage effrayant,
Les sables, les déserts qu'un ciel d'airain calcine,
Les rocs sans une source et sans une racine ;
L'Afrique, lieu d'horreur pour les plus résolus,
Terre au visage étrange où l'on ne se sent plus
Regardé par les yeux de la douce patrie.
Et Pauline Roland, souriante et meurtrie,
Dit aux femmes en pleurs : courage, c'est ici.
Et quand elle était seule, elle pleurait aussi.
Ses trois enfants ! **** d'elle ! Oh ! quelle angoisse amère !
Un jour, un des geôliers dit à la pauvre mère
Dans la casbah de Bône aux cachots étouffants :
Voulez-vous être libre et revoir vos enfants ?
Demandez grâce au prince. - Et cette femme forte
Dit : - J'irai les revoir lorsque je serai morte.
Alors sur la martyre, humble cœur indompté,
On épuisa la haine et la férocité.
Bagnes d'Afrique ! enfers qu'a sondés Ribeyrolles !
Oh ! la pitié sanglote et manque de paroles.
Une femme, une mère, un esprit ! ce fut là
Que malade, accablée et seule, on l'exila.
Le lit de camp, le froid et le chaud, la famine,
Le jour l'affreux soleil et la nuit la vermine,
Les verrous, le travail sans repos, les affronts,
Rien ne plia son âme ; elle disait : - Souffrons.
Souffrons comme Jésus, souffrons comme Socrate. -
Captive, on la traîna sur cette terre ingrate ;
Et, lasse, et quoiqu'un ciel torride l'écrasât,
On la faisait marcher à pied comme un forçat.
La fièvre la rongeait ; sombre, pâle, amaigrie,
Le soir elle tombait sur la paille pourrie,
Et de la France aux fers murmurait le doux nom.
On jeta cette femme au fond d'un cabanon.
Le mal brisait sa vie et grandissait son âme.
Grave, elle répétait : « Il est bon qu'une femme,
Dans cette servitude et cette lâcheté,
Meure pour la justice et pour la liberté. »
Voyant qu'elle râlait, sachant qu'ils rendront compte,
Les bourreaux eurent peur, ne pouvant avoir honte
Et l'homme de décembre abrégea son exil.
« Puisque c'est pour mourir, qu'elle rentre ! » dit-il.
Elle ne savait plus ce que l'on faisait d'elle.
L'agonie à Lyon la saisit. Sa prunelle,
Comme la nuit se fait quand baisse le flambeau,
Devint obscure et vague, et l'ombre du tombeau
Se leva lentement sur son visage blême.
Son fils, pour recueillir à cette heure suprême
Du moins son dernier souffle et son dernier regard,
Accourut. Pauvre mère ! Il arriva trop ****.
Elle était morte ; morte à force de souffrance,
Morte sans avoir su qu'elle voyait la France
Et le doux ciel natal aux rayons réchauffants
Morte dans le délire en criant : mes enfants !
On n'a pas même osé pleurer à ses obsèques ;
Elle dort sous la terre. - Et maintenant, évêques,
Debout, la mitre au front, dans l'ombre du saint lieu,
Crachez vos Te Deum à la face de Dieu !

Jersey, le 12 mars 1853.
Il est un bosquet sombre où se cache la rose,

Et le doux rossignol y va souvent gémir ;

Il est un fleuve pur dont le cristal l'arrose :

Ce fleuve, on l'a nommé le calme Bendemir.


Dans ma rêveuse enfance, où mon cœur se replonge,

Lorsque je ressemblais au mobile roseau,

En glissant sous les fleurs comme au travers d'un songe

J'écoutais l'eau fuyante et les chants de l'oiseau.


Je n'ai pas oublié cette musique tendre,

Qui remplissait les airs d'un murmure enchanté ;

Dans ma chaîne souvent il m'a semblé l'entendre :

J'ai dit : Le rossignol là-bas a-t-il chanté ?


Penchent-elles encor leurs têtes couronnées,

Ces belles fleurs, dans l'eau que j'écoutais gémir ?

Non, elles étaient fleurs ; le temps les a fanées,

Et leur chute a troublé le calme Bendemir.


Mais lorsqu'elles brillaient dans l'éclat de leurs charmes,

Avant de s'effeuiller sur l'humide tombeau,

On puisa dans leur sein ces odorantes larmes

Qui rappellent l'été dont le règne est si beau !


Ainsi le souvenir rend à mes rêveries

Les chants du rossignol que j'écoutais gémir ;

Et ma chaîne s'étend jusqu'aux rives fleuries

Où je crois voir couler le calme Bendemir.

— The End —