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Paul d'Aubin Dec 2013
Ulysse, la Méditerranée et ses rapports avec les  Femmes.

Parti à contre cœur, ayant même contrefait le fou, pour se soustraire à la guerre et élever ton fils Télémaque, tu dus partir à Troie, et sus t'y montrer brave, mais surtout fin stratège.
La guerre fut bien longue, pas du tout comme celle que chantait les Aèdes. L'ennemi ressemblait tant à nos guerriers Achéens, courageux et aussi sûrs de leur droit que nous l'étions du notre. Que de sang, que de peine ! Tu vis périr Patrocle, ne pus sauver Achille ; et les morts aux corps déchiquetés par les épées se substituèrent aux coupes de ce vin si enivrant qu'est la rhétorique guerrière et à la funeste illusion d'une victoire facile. Ulysse tu eus l'idée de bâtir ce grand vaisseau dont la proue figurait une tête de cheval. Ainsi les Achéens purent entrer dans le port forteresse si bien gardé. Mais quand la nuit noire et le vin mêlés ôtèrent aux courageux Troyens leur vigilance et leur garde, vous sortirent alors des flancs du bateau et vous précipitèrent pour ouvrir grands les portes aux guerriers Achéens. La suite fut un grand carnage de guerriers Troyens mais aussi de non combattants et même de femmes. Et Troie, la fière, la courageuse ne fut plus ville libre et les survivants de son Peuple connurent l'esclavage. Aussi quand Troie fut conquise et que ses rue coulèrent rouges du sang vermeil de ses défenseur, mais aussi de nombreux civils, tu songeas à retourner chez toi, car tu étais roi, et ton fils Télémaque aurait besoin de toi et Pénélope t'aimait. Les souvenirs d'émois et de tendres caresses faisaient encore frissonner la harpe de ton corps de souvenirs très doux. C'est alors que tu dus affronter la Déesse Athéna et ton double, tous deux vigilants, à tester ta sincérité et ta constance. Oh, toi Homme volage et point encore rassasié de voyages et de conquêtes. L'étendue de la mer te fut donnée comme le théâtre même de ta vérité profonde. Après bien des voyages et avoir perdu nombre de tes compagnons, tu fus poussé dans l'île de la nymphe Calypso. Cette immortelle à la chevelure, si joliment bouclée se trouvait dans son île d'arbustes odoriférants. Aussi fit-elle tout pour te garder. Toi-même, tu lui trouvas de l'ardeur et des charmes même si durant le jour tu te laissais aller à la nostalgie d'Ithaque. La belle immortelle te proposas, pour te garder, de te donner cet attribut si recherché qui empêche à jamais de sombrer dans le sommeil perpétuel. Mais toi, Ulysse, tu préféras garder ton destin d'homme mortel et ton inguérissable blessure pour Ithaque. Après sept années d’une prison si douce, l'intervention d'Athéna te rendit aux aventures de la Mer. Tu accostas, avec tes compagnons sur la côte d’une île malfaisante. C'était la demeure des Cyclopes. Parmi ce Peuple de géants, le cyclope Polyphème habitait une grotte profonde d'où il faisait rentrer chaque soir son troupeau. Ulysse quelle folie traversa ton esprit et celui de tes compagnons que de vouloir pénétrer dans cette antre maudite, mû à la fois par la curiosité et la volonté de faire quelques larcins de chèvres ? Vous payèrent bien cher cette offense par la cruelle dévoration que fit l'infâme Polyphème de plusieurs de tes compagnons dont vous entendîtes craquer les os sous la mâchoire du sauvage. Aussi votre courage fut renforcé par votre haine lorsque vous lui plantèrent l'épieu dans son œil unique alors que sa vigilance venait d'être endormie par le vin. Les barques ayant mouillés dans l'île d'Aiaé, tes compagnons imprudents furent transformés en pourceaux par la belle et cruelle Magicienne Circée. Doté d'un contre poison à ses filtres, tu ne restas cependant pas insensible aux charmes de la belle Magicienne mais tu lui fis prononcer le grand serment avant de répondre à tes avances. Elle accepta pour faire de toi son amant de redonner leur forme humaine à tes compagnons, Et vos nuits furent tendres, sensuelles et magiques car la Magicienne excellait dans les arts de l'amour et il en naquit un fils. Toi le rusé et courageux Ulysse, tu espérais enfin voguer avec délice sur une mer d'huile parcourue par les reflets d'argent des poissons volants et te réjouir des facéties des dauphins, Mais c'était oublier et compter pour peu la rancune de Poséidon, le maître des eaux, rendu furieux par le traitement subi par son fils Polyphème. C'est pour cela qu'une masse d'eau compacte, haute comme une haute tour avançant au grand galop ébranla et engloutit ton solide radeau. Seul ton réflexe prompt de t'accrocher au plus grand des troncs te permis de plonger longuement au fonds des eaux en retenant longtemps ton souffle avant d’émerger à nouveaux. La troisième des belles que ton voyage tumultueux te fit rencontrer fut la jeune Nausicaa, fille du roi des Phéaciens, Alcinoos. Celle-ci, dans la floraison de sa jeunesse, ardente et vive, ne cédait en rien à l'éclat des plus belles et subtiles fleurs. Guidée par la déesse Athéna, elle vint auprès du fleuve ou tu dormais laver les habits royaux avec ses suivantes. Les voix des jeunes filles t'éveillèrent. Dans ta détresse et ta nudité, tu jetas l'effroi parmi les jeunes filles. Seule Nausicaa eut le courage de ne pas fuir et d'écouter ta demande d'aide. Elle rappela ses suivantes et te fit vêtir après que ton corps ait été lavé par l'eau du fleuve et enduit d'huile fine. Tu retrouvas ta force et ta beauté. Aussi Nausicaa vit en toi l'époux qu'elle désirait. Mais, ta nostalgie d'Ithaque fut encore plus forte. Alors Nausicaa te pria seulement, en ravalant ses larmes, de ne point oublier qu'elle t'avait sauvé des flots. Amené tout ensommeillé dans le vaisseau mené par les rameurs Phéaciens si bien aguerris à leur tâche, tu étais comme bercé par le bruit régulier des rames et le mouvement profond d'une mer douce mais étincelante. C'était comme dans ces rêves très rares qui vous mènent sur l'Olympe. Jamais tu ne te sentis si bien avec ce goût d’embrun salé sur tes lèvres et ce bruit régulier et sec du claquement des rames sur les flots. Tu éprouvas la sensation de voguer vers un nouveau Monde. Ce fut, Ulysse, l'un des rares moments de félicité absolue dans une vie de combats, de feu et du malheur d'avoir vu périr tous tes valeureux compagnons. Ulysse revenu dans ton palais, déguisé en mendiants pour châtier les prétendants, tu triomphas au tir à l'arc. Mais l'heure de la vindicte avait sonné. La première de tes flèches perça la gorge d'Antinoos, buvant sa coupe. Nul ne put te fléchir Ulysse, pas même, l'éloquent Eurymaque qui t'offrait de t'apporter réparations pour tes provisions goulument mangés et tes biens dilapidés. Le pardon s'effaça en toi car l'offense faite à ta femme et à ton fils et à ton honneur était trop forte. Aussi tu n'eus pas la magnanimité de choisir la clémence et le sang coula dans ton palais comme le vin des outres. Pas un des prétendants ne fut épargné à l'exception du chanteur de Lyre, Phénios et du héraut Médon qui avait protégé Télémaque.
Mais Ulysse, tu ne fus pas grand en laissant condamner à la pendaison hideuse, douze servantes qui avaient outragé Pénélope et partagé leur couche avec les prétendants. Ulysse tu fus tant aimé des déesses, des nymphes et des femmes et souvent sauvé du pire par celles qui te donnèrent plaisir et descendance. Mais obsédé par tes roches d'Ithaque ne sus pas leur rendre l'amour qu'elles te portèrent. Tu ne fus pas non plus à la hauteur de la constance et de la fidélité de Pénélope. Mais Ulysse poursuivi par la fatalité de l'exil et de l'errance et la rancune de Poséidon, tu fus aussi le préféré de la déesse Athéna qui fit tant et plus pour te sauver maintes fois de ta perte. Cette déesse fut la vraie sauvegarde de ta vie aventureuse et les femmes qui te chérirent t'apportèrent maintes douceurs et consolations dans ta vie tumultueuse.

Paul Arrighi, Toulouse, (France) 2013.
Paul d'Aubin Jul 2014
Ulysse adoré par les Femmes, les  Nymphes , protégé par Athéna et traqué par Poséidon.


Parti à contrecœur, ayant même contrefait le fou, pour se soustraire à la guerre et élever ton fils Télémaque, tu dus partir à Troie, et sus t'y montrer brave mais surtout fin stratège.
La guerre fut bien longue, pas du tout comme celle que chantaient les Aèdes. L'ennemi ressemblait tant à nos guerriers Achéens, courageux et aussi sûrs de leur droit que nous l'étions du notre.
Que de sang, que de peine ! Tu vis périr Patrocle, ne pus sauver Achille; et les morts aux corps déchiquetés par les épées se substituèrent aux coupes de ce vin si enivrant qu'est la rhétorique guerrière et à la funeste illusion d'une victoire facile.

Ulysse tu eus l'idée de bâtir ce grand vaisseau dont la proue figurait une tête de cheval. Ainsi les Achéens purent entrer dans le port forteresse si bien gardé. Mais quand la nuit noire et le vin mêlés ôtèrent aux courageux Troyens leur vigilance et leur garde, vous sortirent alors des flancs du bateau et vous précipitèrent pour ouvrir grands les portes aux guerriers Achéens.
La suite fut un grand carnage de guerriers Troyens mais aussi de non combattants et même de femmes. Et Troie, la fière, la courageuse ne fut plus ville libre et les survivants de son Peuple connurent l'esclavage.

Aussi quand Troie fut conquise et que ses rue coulèrent rouges du sang vermeil de ses défenseur, mais aussi de nombreux civils, tu songeas à retourner chez toi, car tu étais roi, et ton fils Télémaque aurait besoin de toi et Pénélope t'aimait. Les souvenirs d'émois et de tendres caresses faisaient encore frissonner la harpe de ton corps de souvenirs très doux.
C'est alors que tu dus affronter la Déesse Athéna et ton double, tous deux vigilants, a tester ta sincérité et ta constance. Oh, toi Homme volage et point encore rassasié de voyages et de conquêtes. L'étendue de la mer te fut donnée comme le théâtre même de ta vérité profonde.


Après bien des voyages et avoir perdu nombre de tes compagnons, tu fus poussé dans l'île de la nymphe Calypso.
Cette immortelle à la chevelure, si joliment bouclée se trouvait dans son île d'arbustes odoriférants. Aussi fit-elle tout pour te garder. Toi-même, tu lui trouvas de l'ardeur et des charmes même si durant le jour tu te laissais aller à la nostalgie d'Ithaque.
La belle immortelle te proposas, pour te garder, de te donner cet attribut si recherché qui empêche à jamais de sombrer dans le sommeil perpétuel.
Mais toi, Ulysse, tu préféras garder ton destin d'homme mortel et ton inguérissable blessure pour Ithaque.

Après sept années d’une prison si douce, l'intervention d'Athéna te rendit aux aventures de la Mer. Tu accostas, avec tes compagnons sur la côte d’une île malfaisante. C’était la demeure des Cyclopes. Parmi ce Peuple de géants, le cyclope Polyphème habitait une grotte profonde d'où il faisait rentrer chaque soir son troupeau.
Ulysse quelle folie traversa ton esprit et celui de tes compagnons que de vouloir pénétrer dans cette antre maudite, mû à la fois par la curiosité et la volonté de faire quelques larcins de chèvres ? Vous payèrent bien cher cette offense par la cruelle dévoration que fit l'infâme Polyphème de plusieurs de tes compagnons dont vous entendîtes craquer les os sous la mâchoire du sauvage. Aussi votre courage fut renforcé par votre haine lorsque vous lui plantèrent l'épieu dans son œil unique alors que sa vigilance venait d'être endormie par le vin.

Les barques ayant mouillés dans l'île d'Aiaé, tes compagnons imprudents furent transformés en pourceaux par la belle et cruelle Magicienne Circée.
Doté d'un contre poison à ses filtres, tu ne restas cependant pas insensible aux charmes de la belle Magicienne mais tu lui fis prononcer le grand serment avant de répondre à tes avances.
Elle accepta pour faire de toi son amant de redonner leur forme humaine à tes compagnons,
Et vos nuits furent tendres, sensuelles et magiques car la Magicienne excellait dans les arts de l'amour et il en naquit un fils.

Toi le rusé et courageux Ulysse, tu espérais enfin voguer avec délice sur une mer d'huile parcourue par les reflets d'argent des poissons volants et te réjouir des facéties des dauphins,
Mais c'était oublier et compter pour peu la rancune de Poséidon, le maître des eaux, rendu furieux par le traitement subi par son fils Polyphème.
C'est pour cela qu'une masse d'eau compacte, haute comme une haute tour avançant au grand galop ébranla et engloutit ton solide radeau.
Seul ton réflexe prompt de t'accrocher au plus grand des troncs te permis de plonger longuement au fonds des eaux en retenant longtemps ton souffle avant d’émerger à nouveaux.

La troisième des belles que ton voyage tumultueux te fit rencontrer fut la jeune Nausicaa, fille du roi des Phéaciens, Alcinoos.
Celle-ci, dans la floraison de sa jeunesse, ardente et vive, ne cédait en rien à l'éclat des plus belles et subtiles fleurs. Guidée par la déesse Athéna, elle vint auprès du fleuve ou tu dormais laver les habits royaux avec ses suivantes. Les voix des jeunes filles t'éveillèrent. Dans ta détresse et ta nudité, tu jetas l'effroi parmi les jeunes filles. Seule Nausicaa eut le courage de ne pas fuir et d'écouter ta demande d'aide. Elle rappela ses suivantes et te fit vêtir après que ton corps ait été lavé par l'eau du fleuve et enduit d'huile fine. Tu retrouvas ta force et ta beauté. Aussi Nausicaa vit en toi l'époux qu'elle désirait. Mais, ta nostalgie d'Ithaque fut encore plus forte. Alors Nausicaa te pria seulement, en ravalant ses larmes, de ne point oublier qu'elle t'avait sauvé des flots.

Amené tout ensommeillé dans le vaisseau mené par les rameurs Phéaciens si bien aguerris à leur tâche, tu étais comme bercé par le bruit régulier des rames et le mouvement profond d'une mer douce mais étincelante. C'était comme dans ces rêves très rares qui vous mènent sur l'Olympe. Jamais tu ne te sentis si bien avec ce goût d’embrun salé sur tes lèvres et ce bruit régulier et sec du claquement des rames sur les flots. Tu éprouvas la sensation de voguer vers un nouveau Monde. Ce fut, Ulysse, l'un des rares moments de félicité absolue dans une vie de combats, de feu et du malheur d'avoir vu périr tous tes valeureux compagnons.

Ulysse revenu dans ton palais, déguisé en mendiants pour châtier les prétendants, tu triomphas au tir à l'arc. Mais l'heure de la vindicte avait sonné. La première de tes flèches perça la gorge d'Antinoüs, buvant sa coupe. Nul ne put te fléchir Ulysse, pas même, l'éloquent Eurymaque qui t'offrait de t'apporter réparations pour tes provisions goulument mangés et tes biens dilapidés. Le pardon s'effaça en toi car l'offense faite à ta femme et à ton fils et à ton honneur était trop forte. Aussi tu n'eus pas la magnanimité de choisir la clémence et le sang coula dans ton palais comme le vin des outres. Pas un des prétendants ne fut épargné à l'exception du chanteur de Lyre, Phénios et du héraut Médon qui avait protégé Télémaque. Mais Ulysse, tu ne fus pas grand en laissant condamner à la pendaison hideuse, douze servantes qui avaient outragé Pénélope et partagé leur couche avec les prétendants.

Ulysse tu fus tant aimé des déesses, des nymphes et des femmes et souvent sauvé du pire par celles qui te donnèrent plaisir et descendance. Mais obsédé par tes roches d'Ithaque ne sus pas leur rendre l'amour qu'elles te portèrent. Tu ne fus pas non plus à la hauteur de la constance et de la fidélité de Pénélope.
Mais Ulysse poursuivi par la fatalité de l'exil et de l'errance et la rancune de Poséidon, tu fus aussi le préféré de la déesse Athéna qui fit tant et plus pour te sauver maintes fois de ta perte. Cette déesse fut la vraie sauvegarde de ta vie aventureuse et les femmes qui te chérirent t'apportèrent maintes douceurs et consolations dans ta vie tumultueuse.

Paul Arrighi
The adventures of Ulysses in the Odyssey as beloved by Women and Nymphs protected by Athena and pursue by Poseidon
Julian Aug 2022
A bisel: A little
A biseleh: A very little
A breyre hob ich: I have no alternative
A breyte deye hob'n: To do all the talking (To have the greatest say or authority)
A broch!: Oh hell! **** it!! A curse!!!
A broch tzu dir!: A curse on you!
A broch tzu Columbus: A curse on Columbus
A brocheh: A blessing
A chazer bleibt a chazer: A pig remains a pig
A chorbn: Oh, what a disaster (Oh ****! an expletive)
A choleryeh ahf dir!: A plague on you! (Lit., wishing someone to get Cholera.)
A deigeh hob ich: I don't care. I should worry.
A farshlepteh krenk: A chronic ailment
A feier zol im trefen: He should burn up! (Lit., A fire should meet him.)
A finstere cholem auf dein kopf und auf dein hent und fiss: (a horrible wish on someone) A dark dream (nightmare) on your head, hands and feet!
A foiler tut in tsveyen: A lazy person has to do a task twice
A gesheft hob nicht: I don't care
A gezunt ahf dein kop!: Good health to you (lit., Good health on your head)
A glick ahf dir!: Good luck to you (Sometimes used sarcastically about minor good fortunes) Big thing!
A glick hot dich getrofen!: Big deal! Sarcastic; lit., A piece of luck happened to you.
A groyser tzuleyger: A big shot (sarcastically.)
A grubber yung: A coarse young man
A kappore: A catastrophe.
A khasuren die kalleh is tsu shayn: A fault that the bride is too beautiful
A klog iz mir!: Woe is me!
A klog tzu meineh sonim!: A curse on my enemies!
A langer lucksh: A tall person (a long noodle)
A leben ahf dein kepele: A life on your head (A grandparent might say to a grandchild meaning "you are SO smart!")
A leben ahf dir!: You should live! And be well!
A lung un leber oyf der noz: Stop talking yourself into illness! (Lit., Don't imagine a lung and a liver upon the nose)
A maidel mit a vayndel: A pony-tailed nymphet.
A maidel mit a klaidel: A cutie-pie showing off her (new) dress.
A mentsh on glik is a toyter mensh: An unlucky person is a dead person.
A mentsh tracht und Gott lacht: A person plans and God laughs.
A metsieh far a ganef: It's a steal (Lit., A bargain for a thief.)
A nahr bleibt a nahr: A fool remains a fool
A nechtiker tog!: Forget it! (Lit., "A day that's a night.")
A nishtikeit!: A nobody!
A piste kayleh: A shallow person (an empty barrel)
A ritch in kop: Crazy (in the head.)
A schwartz yor: Bad luck. (LIT., A black year)
A schwartzen sof: A bad end.
A shandeh un a charpeh: A shame and a disgrace
A shittern mogn: Loose bowel movement
A shtik fleish mit tzvei eigen: A piece of meat with two eyes (insult)
A shtik naches: A great joy
A shtyfer mogn: Constipated
A sof! A sof!: Let's end it ! End it!
A tuches un a halb: A person with a very large backside. (Lit., A backside and a half.)
A volf farlirt zayne hor, ober nit zayn natur: A wolf loses his hair but hot his nature. "A leopard cannot change his spots."
Abi gezunt!: As long as you're healthy!
Achrahyes: Responsibility
Afn gonif brennt das hittel: "He thinks everyone knows he committed a crime." (a thief's hat burns)
Ahf mir gezogt!: I wish it could be said about me!
Ahf tsores: In trouble
Afh yenems tukhes is gut sepatchen: Someone else's *** is easy to smack.
Ahf zu lochis: Spitefully (Lit: Just to get (someone) angry.)
Ahntoisht: Disappointed
Ahzes ponim: Impudent fellow
Aidel: Cultured or finicky
Aidel gepotchket: Delicately brought up
Aidim: Son-in-law
Ainikle: Grandchild
Aitzeh: Advice
Aiver butelt: Absent minded; mixed up
Alaichem sholom: To you be peace. Used in response to the the greeting Shalom aleichem.
Ale:bais - Alphabet; the first two letters of the Jewish alphabet
Alevei!: It should happen to me (to you)!
Alle ziben glicken: Not what it's cracked up to be (all 7 lucky things)
Alles in einem is nisht do bei keine: All in one (person) is to be found in no one.
Alrightnik: One who has succeeded
Alrightnikeh: Feminine form of "alrightnik."
Alteh moid: Spinster, old maid
Alter bocher: Bachelor
Alter bok: Old goat
Alter Kocker: An old man or old woman.
An alteh machashaifeh: An old witch
An alter bakahnter: An old acquaintance
An alter trombenick: An old ***
An emmisse meisse: An (absolutely) true tale
Apikoros: An unbeliever, a skeptic, an athiest
Arbit: Work
Arein: Come in!
Aroisgevorfen: Thrown out, wasted, (wasted opportunities)
Aroisgevorfene gelt: Thrown out money (Wasted money)
Arumgeflickt!: Plucked! Milked!
Arumloifer: Street urchin; person who runs around
Aydem: Son-in-law
Ayn klaynigkeit: Ya, sure!! (very derogatory)
Az a yor ahf mir.: I should have such good luck.
Az di bobe volt gehat beytsim volt zi geven mayn zeyde!: If my grandmother had testicles she would be my grandfather.
Az mir vill schlugen a hunt, gifintmin a schtecken: If one wants to beat a dog, one finds a stick.
Az och un vai!: Tough luck! Too bad! Misfortune!
Az tzvei zuggen shiker, leigst zich der driter shloffen: If two people say you're drunk, the third one goes to sleep. If two people confirm something, it's true.
Azoy?: Really?
Azoy gait es!: That's how it goes!
Azoy gich?: So soon?
Azoy vert dos kichel tzekrochen!: That's how the cookie crumbles!
B
Babka: Coffee cake style pastry
Badchan: Jester, merry maker or master of ceremonies at a wedding; at the end of the meal he announces the presents, lifting them up and praising the giver and the gift in a humorous manner
Bagroben: To bury
Baitsim: Testicles
Balebatim: Persons of high standing
Balbatish: Quiet, respectable, well mannered
Balebatisheh yiden: Respectable Jews, people of substance and good standing in the community
Baleboosteh: Mistress of the house. A compliment to someone who is a terrific housekeeper. "She is some baleboosteh!"
Balegoola: Truckdriver or sloppy person of low standing.
Balmalocha: An expert (sometimes used sarcastically- Oy, is he an expert!)
Balnes: Miracle-worker
Bal Toyreh: Learned man, scholar
Bal: Sure
Bandit: Menace, outlaw, pain-in-the-neck
Bareden yenem: To gossip
Baren (taboo): Fornicate: bother, annoy
Barimer: Braggart, show-off
Bashert: Fated or predestined
Ba:yekhide - A female only child
Bashert zein: To be destined
Batampte: Tasty , delicious
Batlan: Someone without a trade or a regular means of livelihood
Baysn zikh di finger vos: Regret strongly that........
Becher: Wine goblet
Behaimeh: Animal, cow (when referring to a human being, means dull-witted)
Bei mir hust du gepoylt: You've gotten your way with me.
Be:yokhid - A male only child
Benken: "To yearn for" or "to long for."
Benkshaft: Homesickness, nostalgia
Bentsh: To bless, to recite a blessing
Bentshen lecht: Recite prayer over lit candles on Sabbath eve or Holy Day candles
Beryeh: Efficient, competent housewife
Bes medresh: Synagogue
Bialy: Named for the Polish city of Bialystock, the bialy is of Jewish origin. A Bialy is a fairly large (about 6 inches) chewy round yeast roll. Somewhat similar to a bagel, it has a depression rather than a hole in the centre, and is sprinkled with chopped sauteed onion before baking.
Bikur cholem: Visiting the sick
Billik: Cheap, inexpensive
Bist meshugeh?: Are you crazy?
Biteh: Please
Blondjen: To wander, be lost
Boarderkeh: A female boarder
Boch: A punch
Bohmer: *** (masc.)
Bohmerkeh: *** (fem.)
Boorvisser fiss: Barefoot
Boreke borsht: Beet borsht which the wealthy could afford.
Borekes: Pastries with cheese inside
Borsht: Beet soup
Borsht circuit: Hotels in the Catskill Mountains of New York State, with an almost entirely Jewish clientele, who are fond of borsht; term is used by entertainers
Borviss: Barefoot
Botvenye borsht: Borsht made from beet leaves for the poor.
Boychik: Young boy (term of endearment)
Boykh: Stomach, abdomen
Boykhvehtig: Stomachache
Breeye: Creature, animal
Breire: choice
Bris: Circumcision
Bristen: *******
Broitgeber: Head of family (Lit., Bread giver)
Bronfen: Whiskey
Broygis: Not on speaking terms
B'suleh: ******
Bubbeh: Grandmother
Bubbe maisse: Grandmother's tale.
Bubbee: Friendly term for anybody you like
Bubeleh: Endearing term for anyone you like regardless of age
Bulvan: Man built like an ox; boorish, coarse, rude person
Bupkis: Nothing. Something totally worthless (Lit., Beans)
Butchke: chat, tete-a-tete, telling tales
C
Chai: Hebrew word for LIFE, comprised of the two Hebrew letters, Chet and Yod. There is a sect of Jewish mysticism that assigns a numeric value to each letter in the Hebrew alphabet and is devoted to finding hidden meanings in the numeric values of words. The letter "Chet" has the numeric value of 8, and the letter "Yod", has the value of 10, for a total of 18.
Chaider: Religious School
Chaim Yonkel: any Tom, **** or Harry
Chaimyankel kooternooz: The perennial cuckold
Chaleria: Evil woman. Probably derived from cholera.
Chaleshen: Faint
Challa: Ceremonial "egg" bread. Either round or shaped long. Used on Shabbat and most religious observances with the exception of Pesach (Passover)
Chaloshes: Nausea, faintness, unconsciousness
Chamoole: Donkey, *******, numbskull, fool
Chamoyer du ainer!: You blockhead! You dope, You ***!
Chanukah: Also known as the "Festival of Lights", commemorates the rebuilding of the temple in Jerusalem. Chanukah is celebrated for 8 days during which one additional candle is added to the menorah on each night of the holiday.
Chap a gang!: Beat it! (Lit., Catch a way, catch a road)
Chap ein a meesa meshina!: "May you suffer an ugly fate!"
Chap nit!: Take it easy! Not so fast! (Lit., Don't grab)
Chaptsem: Catch him!
Chassene: Wedding
Chassene machen: To plan and execute a wedding.
Chas v'cholileh!: G-d forbid!
Chavver: Friend
Chaye: Animal
Chazen: Cantor
Chazenteh: Wife of chazen (cantor)
Chazzer: A pig (one who eats like a pig)
Chazzerei: Swill; pig's feed; anything bad, unpalatable, rotten. In other words, "junk food." This word can also be used to describe a lot of house hold or other kinds of junk.
Chazzershtal: Pigpen; slovenly kept room or house.
Chei kuck (taboo): Nothing, infinitesimal, worthless, unimportant (Lit., human dung)
Chev 'r' mann: Buddy
Chmalyeh!: Bang, punch; Slam! Wallop!
Chochem : A wise man (Slang: A wise guy)
Chochmeh: Wisdom, bright saying, witticism
Choleryeh: Cholera; a curse, plague
Choshever mentsh: Man of worth and dignity; elite person; respected person
Chosid: Rabid fan
Chossen: Bridegroom
Chosse:kalleh - Bride and groom; engaged couple
Choyzik machen: Make fun of, ridicule
Chrain: Horseradish
Chropen: Snore
Chub Rachmones: "Have pity"
Chug: Activity group
Chupah: Canopy under which a bride and groom stand during marriage ceremony.
Chutzpeh: Brazenness, gall, baitzim
Chutzpenik: Impudent fellow
Chvalye: Ocean wave
Columbus's medina: It's not what it's cracked up to be. (Columbus's country.
D
Danken Got!: Thank G-d!
Darf min gehn in kolledj?: For this I went to college? Usually said when describing a menial task.
Davenen: Pray
Deigeh nisht!: Don't worry!
Der mensch trakht un Gott lahkht: Man thinks (plans) and God laughs
Der oyg: Eye
Der tate oysn oyg: Just like his father
Der universitet: University
Der zokn: Old man
Derech erets: Respect
Derlebn: To live to see (I should only live to see him get married, already!)
Der oysdruk: Expression
Dershtikt zolstu veren!: You should choke on it!
Di khemye: Chemistry
Di skeyne: Old woman
Di Skeynes: Old women
Di skeynim: Old men
Die goldene medina: the golden country
Die untershte sheereh: the bottom line
Dine Essen teg: Yeshiva students would arrange to be fed by various householders on a daily basis in different houses. (Lit., Eat days)
Dingen: Bargain, hire, engage, lease, rent
Dis fayntin shneg: It's starting to snow
Dis fayntin zoraiganin: It's starting to rain
Dos gefelt mir: This pleases me
Dos hartz hot mir gezogt: My heart told me. I predicted it.
Dos iz alts: That's all.
Dos zelbeh: The same
Drai mir nit kain kop!: Don't bother me! (Lit., Don't twist my head)
Drai zich!: Keep moving!
Draikop: Scatterbrain
Dreidal: Spinning top used in a game that is associated with the holiday of Chanukah.
Drek: Human dung, feces, manure or excrement; inferior merchandise or work; insincere talk or excessive flattery
Drek auf dem teller: Mean spirited, valueless Lit.crap on a plate.
Drek mit Leber: Absolutely nothing; it's not worth anything.
Druchus: The sticks (way out in the wild)
Du fangst shoyn on?: Are you starting up again?
Du kannst nicht auf meinem rucken pishen unt mir sagen class es regen ist.: You can't *** on my back and tell me that it's rain!
Dumkop: Dumbbell, dunce (Lit., Dumb head)
Durkhfall: A flop or failure
Dybbuk: Soul condemned to wander for a time in this world because of its sins. (To escape the perpetual torments inflicted upon it by evil spirits, the dybbuk seeks refuge in the body of some pious man or woman over whom the demons have no power. The dybbuk is a Cabalistic conception)
E
Ech: A groan, a disparaging exclamation
Ech mir (eppes): Humorous, disparaging remark about anything. e.g. "American Pie ech mir a movie?"
Efsher: Maybe, could be
Ei! Ei!: Yiddish exclamation equivalent to the English "Oh!"
Eingeshpahrt: Stubborn
Eingetunken: Dipped, dunked
Einhoreh: The evil eye
Eizel: Fool, dope
Ek velt: End of the world
Emes: The truth
Emitzer: Someone
Enschultig meir: "Well excuuuuuuse ME!" (Can also bu used in a non-sarcastic manner depending on the tone of voice and situation.)
Entoisht: Disappointed
Eppes: Something
Er bolbet narishkeiten: He talks nonsense
Er drayt sich arum vie a fortz in russell: He wanders around like a **** in a barrel (aimless)
Er est vi noch a krenk.: He eats as if he just recovered from a sickness.
Er frest vi a ferd.: He eats like a horse.
Er hot a makeh.: He has nothing at all (Lit., He has a boil or a minor hurt.)
Er hot nit zorg.: He hasn't got a worry.
Er iz a niderrechtiker kerl!: He's a low down good-for-nothing.
Er iz shoyn du, der nudnik!: The nuisance is here already!
Er macht a tel fun dem.: He ruins it.
Er macht zack nisht visindicht: He pretends he doesn't know he is doing something wrong. Example: Sneaking into a movie theatre, or sneaking to the front of a line.
Er toig (****) nit: He's no good, worthless
Er varved zakh: Lit: He's throwing himself. Example: He's getting angry, agitated, ******-off.
Er zitst oyf shpilkes.: He's restless. (Lit., He sits on pins and needles.)
Er zol vaksen vi a tsibeleh, mit dem kop in drerd!: He should grow like an onion, with his head in the ground!
Eretz Yisroel: Land of Israel
Es brent mir ahfen hartz.: I have a heartburn.
Es gait nit!: It doesn't work! It isn't running smoothly!
Es gefelt mir.: I like it. (Lit., It pleases, me.)
Es hot zich oysgelohzen a boydem!: Nothing came of it! (Lit., There's nothing up there but a small attic.)
Es iz a shandeh far di kinder!: It's a shame for the children!
Es iz (tsu) shpet.: It is (too) late.
Es ken gemolt zein.: It is conceivable. It is imaginable.
Es macht mir nit oys.: It doesn't matter to me.
Es iz nit dayn gesheft: It's none of your business.
Es past nit.: It is not becoming. It is not fitting.
Es tut mir a groisseh hanoeh!: It gives me great pleasure!(often said sarcastically)
Es tut mir bahng.: I'm sorry. (Lit., It sorrows me)
Es tut mir vai: It hurts me.
Es vert mir finster in di oygen.: This is a response to receiving extremely upsetting information or news. (Lit., It's getting dark in my eyes.)
Es vet gornit helfen!: Nothing will help!!
Es vet helfen vi a toiten bahnkes!: It won't help (any)! (Lit., It will help like blood-cupping on a dead body.)
Ess vie ein foygl sheise vie ein feirt!: Eat like a bird, **** like a horse!
Ess, bench, sei a mensch: Eat, pray, don't act like a ****!
Ess gezunterhait: Eat in good health
Essen: To eat
Essen mitik: Eating midday or having dinner.
F
Fahrshvindn: Disappeared
Faigelah: Bird (also used as a derogatory reference to a gay person).
Fantazyor: Man who builds castles in the air
Farbissener: Embittered; bitter person
Farblondzhet: Lost, bewildered, confused
Farblujet: Bending your ear
Farbrecher: Crook, conman
Fardeiget: Distressed, worried, full of care, anxiety
Fardinen a mitzveh: Earn a blessing or a merit (by doing a good deed)
Fardrai zich dem kop!: Go drive yourself crazy!
Fardross: Resentment, disappointment, sorrow
Farfolen: Lost
Farfoylt: Mildewed, rotten, decayed
Farfroyren: Frozen
Fargessen: Forgot
Farklempt: Too emotional to talk. Ready to cry. (See "Verklempt)
Farklempt fis: Not being able to walk right, clumsy as in "clumsy feet."
Far Knaft: Engaged
Farkakte (taboo): Dungy, ******
Farmach dos moyl!: Shut up! Quiet. (Lit., Shut your mouth.)
Farmatert: Tired
Farmisht: Befuddled
Farmutshet: Worn out, fatigued, exhausted
Farpitzed: To get all dressed up to the "nines."
Farschimmelt: Moldy or rotten. An analogous meaning could be that a person's mind has become senile.
Farshlepteh krenk: Fruitless, endless matter (Lit., A sickness that hangs on)
Farshlugginer: Refers to a mixed-up or shaken item. Generally indicates something of little or dubious value.
Farshmeieter: Highly excitable person; always on the go
Farshnickert: Drunk, high as a kite
Farshnoshket: Loaded, drunk
Farshtaist?: You understand?
Farshtopt: Stuffed
Farshtunken: Smells bad, stinks
Farshvitst: sweaty
Fartik: finished, ready, complete
Fa:tshadikt - Confused, bewildered, befuddled, as if by fumes, gas
Feh!: Fooey, It stinks, It's no good
Feinkoche: Omelet, scrambled eggs
Feinshmeker: Hi falutin'
Fendel: pan
Ferd: Horse, (slang) a fool
Ferkrimpter ponim: Twisted-up, scowling face
Ferprishte punim: pimple-face
Fet: Fat, obese
Fetter: Uncle (also onkel)
Finster un glitshik: Miserable (Lit., Dark and slippery)
Fisfinger: Toes
Fisslach: (chickens'/duck's) feet, often in ptsha
Fliegel: Fowl's wing
Focha: Fan
Foigel: Smart guy (Lit: bird)
Foiler: Lazy man
Foilishtik: Foolishness
Folg mikh!: Obey me!
Folg mikh a gang!: Quite a distance! Why should I do it? It's hardly worth the trouble!
Fonfen: Speak through the nose
For gezunterhait!: Bon voyage! Travel in good health!
Forshpeiz: Appetizer
Fortz: ****
Fortz n' zovver: A foul, soul-smelling ****.
Frageh: Question
Frailech: Happy
Frassk in pis: Slap in the face
Freint: Friend,
Mr. Fremder: Stranger
Fress: Eat....pig out.
Fressen: Eat like a pig, devour
Fressing: Gourmandizing (By adding the English suffix "ing" to the Yiddish word "fress", a new English word in the vocabulary of American Jews has been created.)
Froy: Woman,
Mrs. Frum, (frimer): Pious, religious, devout
Funfeh: Speaker's fluff, error
G
*** avek!: Go away
*** feifen ahfen yam!: Go peddle your fish elsewhere!
*** gezunterhait!: Go in good health
*** in drerd arein!: Go to hell!
*** kaken oifen yam!: Get lost (Lit: Go **** in the ocean!)
*** mit dein kop in drerd: "Go with your head in the ground." "Stick your head in the mud"
*** platz!: Go split your guts!
*** shlog dein kup en vant!: Go bang your head against the wall
*** shoyn, ***.: Scram! also, Don't be silly!
*** strasheh di vantzen: You don't frighten me! (Lit., Go threaten the bed bugs)
*** tren zich. (taboo): Go **** yourself
Gait, gait!: Come now!
Gait es nit!: It doesn't work!
Galitsianer: Jewish native of Galicia
Gants gut: Very good
Gantseh K'nacker!: "Big Shot"
Gantseh Macher: "Big shot."
Gantseh megilleh: Big deal! (derisive)
Gantseh mentsh: Manly, a whole man, a complete man; an adult; a fellow who assumes airs
Gatkes: Long winter underwear
Geben shoychad: To bribe
Gebentsht mit kinder: Blessed with children
Gebentshte boych: Literally-blesses stomach (womb) (Said of a lady with a fabulous child or children,
Gebrenteh tsores: Utter misery
Gebrochener english: Fractured English
Gedainkst?: Remember?
Gedempte flaysh: Mystery meat
Gedicht: Thick, full, ample
Geferlech: Dangerous
Geharget zolstu veren!: Drop dead! (Lit., You should get killed.)
Gelaimter: Person who drops whatever he touches
Gelibteh: Beloved
Gelt: Money
Gelt gait tzu gelt.: Money goes to money.
Gelt is nisht kayn dayge: Money is not a problem.
Gembeh!: Big mouth!
Gemitlich: Slowly, unhurried, gently
Genaivisheh shtiklech: Tricky, sharp, crooked actions or doings
Genevishe oigen: Shifty eyes
Genug iz genug.: Enough is enough!
Gesheft: Business
Geshmak: Tasty, delicious
Geshtorben: The state of being dead.
Geshtroft: Cursed, accursed; punished
Geshvollen: Swollen, puffed up (Also applied to person with haughty pride)
Get: Divorce
Getchke: Statue
Gevaldikeh Zach!: A terrible thing! (often ironically)
Gevalt!: Heaven Forbid! (Exclamatory in the extreme.)
Gevalt geshreeyeh: good grief ("help" screamed)
Gezunde tzores: Healthy troubles. Troubles one should not take too seriously.
Gezunt vi a ferd: Strong as a horse
Gezunteh moid!: Brunhilde, a big healthy dame
Gezunterhait: In good health
Gib mir nit kain einorah!: Don't give me a canary! (Americanism, Lit., Don't give me an evil eye)
Gib zich a traisel: Get a move on
Gib zich a shukl: Hurry up! (Give yourself a shake)
Gitte neshomah: good soul
Gleichvertel: Wisecrack, pun, saying, proverb, bon mot, witticism
Glezel tai: Glass of tea
Glezel varms: comforting or soothing (Lit: Glass of warmth)
Glick: Luck, piece of luck
Gloib mir!: Believe me!
Glustiyah: Enema
G'nossen tsum emess!: The sneeze confirmed the truth!
Goldeneh chasseneh: Fiftieth wedding anniversary
Goniff: Crook, thief, burglar, swindler, racketeer
Gopel: Fork
Gornisht: Nothing
Got in himmel!: G-d in heaven! (said in anguish, despair, fear or frustration)
Got tsu danken: Thank G-d
Got zol ophiten!: G-d forbid!
Got:Vorte - A good piece of information or short concise Torahy commentary.
Gotteniu!: Oh G-d! (anguished cry)
Goy: Any person who is not Jewish
Goyeh: Gentile woman
Goyim: Group of non-Jewish persons
Goyishe kop: Opposite of Yiddishe kop. Generally used to indicate someone who is not particularly smart or shrewd. (Definitely offensive.)
Greps: Blech; a burp if it's a mild one
Grob: Coarse, crude, profane, rough, rude
Grober: Coarse, uncouth, crude person
Grober finger: Thumb
Groi:halter - Show-off, conceited person
Groisseh gedilleh!: Big deal! (said sarcastically)
Groisser gornisht: Big good-for-nothing
Groisser potz! (taboo): Big *****! Big *****! (derogatory or sarcastic)
Grooten: To take after, to favour.
Groyser finger: *******
Guggle muggle: A concoction made of warm milk and honey for sore throats
Gunsel: A young goose. Also used to describe a young man who accompanies a ***** or a young *****.
Gut far him!: Serves him right!
Gut gezugt: Well said
Gut Shabbos: Good Sabbath
Gut Yontif: Happy Holiday
G'vir: Rich man
H
Haimish ponem: A friendly face
Haiseh vanneh: Hot bath
Haissen: To hate
Haken a chainik: Boring, long-winded and annoying conversation; talking for the sake of talking (Lit., To bang on the tea-kettle)
Hak flaish: Chopped meat
Hak mir nit in kop!: Stop bending my ear (Lit.; Stop banging on my head)
Hak mir nit kayn chainik (arain): Don't get on my nerves; Stop nagging me. (Lit., Don't bang my teapot.)
Halevei!: If only...
Hamoyn: Common people
Handlen: To bargain; to do business
Hanoe hobn: to enjoy
Harte mogen: constipation
Hartsvaitik: Heart ache.
Hecher: Louder
Hefker: A mess
Heizel: *******
Hekdish: Decrepit place, a slumhouse, poorhouse; a mess
Heldish: Brave
Heldzel: Stuffed neck flesh; sort of a neck-kishke
Hendl: Chicken
Hert zich ein!: Listen here!
Hetsken zich: Shake and dance with joy
Hikevater: Stammerer Hinten - Rear, rear parts, backside, buttocks; in the rear
Hit zich!: Look out!
Hitsik: Hothead
Hitskop: Excitable person
Hob derech erets: Have respect
Hob dir in arbel: Lit., I've got you by the elbow (Used as a response to a derogatory remark as you would use "sticks and stones"
Hob nit kain deiges: Don't worry
Hoben tsu zingen un tsu zogen: Have no end of trouble (Lit.,To sing and to talk)
Hobn groyse oygn: To be greedy
Hock mir nisht en chinik: Don't hit me in the head. or Dont' give me a headache.
Hoizer gaier: Beggar
Hoizirer: Peddler (from house to house)
Holishkes: Stuffed Cabbage
Host du bie mir an avleh!: So I made a mistake. So what!
Hulyen: A hellraiser
I
Ich bin ahntoisht: I am disappointed
Ich bin dich nit mekaneh: I don't envy you
Ich darf es ahf kapores: It's good for nothing! I have no use for it. (Lit., I need it for a [useless] fowl sacrifice)
Ich darf es vi a loch in kop!: I need it like a hole in the head!
Ich hob dir lieb: I love you!
Ich eil zich (nit): I am (not) in a hurry
Ich feif oif dir!: I despise you! Go to the devil! (Lit., I whistle on you!)
Ich *** chaleshen bald avek: I'm about to faint (from sheer exhaustion)
Ich hob dich in ***!: To hell with you! (Lit., I have you in the bath house!)
Ich hob dir!: Drop dead! Go flap you ears! (Lit., I have you....!) (Americanism!)
Ich hob es in drerd!: To hell with it.
Ich hob im feint: I hate him.
Ich hob im in ***!: To hell with him.
Ich hob mir fer pacht: I have you in my pocket. (I know you for what you are.)
Ich hob nicht kain anung: I have no idea.
Ich ken dir nisht farfeeren: I can't lead you astray
Ich loif: I'm running
Ich vais: I know
Ich vais nit.: I don't know.
Ich vel dir geben a khamalye: I'll give you such a smack
Ich vel dir geben kadoches!: I'll give you nothing! (Lit., I'll give you malaria or a fever.)
Ich yog zich nit.: I'm not in a hurry.
Ich zol azoy vissen fun tsores.: I should know as little about trouble (as I know about what you are asking me)
Iker: Substance; people of substance
In a noveneh: For a change; once in a blue moon
In di alteh guteh tseiten!: In the good old days!
In di oygn: To one's face
In drerd mein gelt!: My money went down the drain! (Lit., My money went to burial in the earth, to hell.)
In miten drinen: In the middle of; suddenly
Ipish: Bad odor, stink
Ir gefelt mir zaier.: You please me a great deal.
Iz brent mir ahfen hartz.: I have a heartburn.
K
Kaas (in kaas oyf): Angry (with)
Kabaret forshtelung: Floorshow
Kabtzen, kaptsen: Pauper
Kaddish: A mourner's prayer
Kaddishel: Baby son; endearing term for a boy or man
Kadoches: Fever
Kadoches mit koshereh fodem!: Absolutely nothing! (Lit., fever with a kosher thread)
Kaftan: Long coat worn by religious Jews
Kakapitshi: Conglomeration
Kalamutneh: Dreary, gloomy, troubled
Kalleh: Bride
Kalleh moid: A girl of marriageable age
Kallehniu: Little bride
Kalta neshomeh: A cold soul
Kalekeh: A new bride who cannot even boil an egg.
Kalyeh: Bad, wrong, spoiled
Kam derlebt: Narrowly achieved (Lit., hardly lived to see)
Kam mit tsores!: Barely made it! (Lit., with some troubles) The word "Kam," also is pronounced "Kom" or "Koim" depending on the region people come from.
Kam vos er kricht: Barley able to creep; Mr. Slowpoke
Kam vos er lebt: He's hardly (barely) alive.
Kamtsoness: To be miserly
Kaneh: An enema
Kaporeh, (kapores): Atonement sacrifice; forgiveness; (slang) good for nothing
Karabeinik: Country peddler
Karger: Miser, tightwad
Kaseer: enema
Kasheh: Groats, mush cereal, buckwheat, porridge; a mess, mix-up, confusion
Kasheh varnishkes: Cooked groats and broad (or bowtie) noodles
Kashress: Kosher condition; Jewish religious dietary law
Kasnik, (keisenik): Angry person; excitable person, hot head
Kasokeh: Cross-eyed
Katchka: Duck (quack, quack)
Katshkedik (Americanism): Ducky, swell, pleasant
Katzisher kop: Forgetful (Lit., Cat head)
Kaynahorah: Lit: the evil eye. Pronounced in order to ward of the evil eye, especially when speaking of one's good fortune. "Everyone in the family is happy and healthy kaynahorah."
Kazatskeh: Lively Russian dance
Kein briere iz oich a breire: Not to have any choice available is also a choice.
Kemfer: Fighter (usually for a cause)
Ken zein: Maybe, could be
Kenen oyf di finger: Have facts at one's fingertips
Ketzele: Kitten
(To) Kibbitz: To offer unsolicited advice as a spectator
Kibbitzer: Meddlesome spectator
Kiddish (Borai pri hagofen): Blessing over wine on the eve of Sabbath or Festivals
Kimpe:tzettel - Childbirth amulet or charm (from the German "kind-bet-tzettel" meaning childbirth label containing Psalm 121, names of angels, patriarchs
Kimpetoren: Woman in labour or immediately after the delivery
Kind un kait: Young and old
Kinderlech: Diminutive, affectionate term for children
Kish mir en toches: Kiss my backside (slang)
Kishef macher: Magic-worker
Kishkeh: Stuffed derma (Sausage shaped, stuffed with a mixture of flour, onions, salt, pepper and fat to keep it together, it is boiled, roasted and sliced) Also used to describe a person's innards. "You sweat your kishkehs out to give your children an good education, and what thanks do you get?"
(A) Kitsel: Tickle
Klainer gornisht: Little **** (Lit., A little nothing)
Klemt beim hartz: Clutches at my heartstrings
Klaperkeh: Talkative woman
Klipeh: Gabby woman, shrew, a female demon
Klo: Plague
Klogmuter: Complainer, chronic complainer
(A) Klog iz mir!: Woe is me!
Kloolye: A curse
Klop: Bang, a real hard punch or wallop
Klotz (klutz): Ungraceful, awkward, clumsy person; bungler
Klotz kasheh: Foolish question; fruitless question
Kloymersht: Not in reality, pretended (Lit., as if it were)
Knacker: A big shot
Knackerke: The distaff k'nacker, but a real cutie-pie.
Knaidel (pl., k'naidlech): Dumplings usually made of matzoh meal, cooked in soup
Knippel: Button, knot; *****, virginity; money tied in a knot in a handkerchief. Also, a little money (cash, usually) set aside for special needs or a rainy day. (Additional meaning thanks to Carl Proper.)
Knish (taboo): ****** [this translation is disputed by at least one reader]
Knishes: Baked dumplings filled with potato, meat, liver or barley
Kochalain: Summer boarding house with cooking privileges (Lit., cook by yourself)
Kochedik: Petulant, excitable
Kochleffel: One who stirs up trouble; gadabout, busy-body (Lit., a cooking ladle)
Kolboynik: Rascally know-it-all
(A) Kop oif di plaitses!: Good, common sense! (Lit., A head on the shoulders!)
Komisch: Funny
Kopvaitik: Headache
Kosher: Jewish dietary laws based on "cleanliness". Also referring to the legitimacy of a situation. "This plan doesn't seem kosher".
Koved: Respect, honour, reverence, esteem
Krank: Sick
Kran:heit - Sickness
Krassavitseh: Beauty, a doll, beautiful woman
Krechts: Groan, moan
Krechtser: Blues singer, a moaner
Kreplach: Small pockets of dough filled with chopped meat which look like ravioli, or won ton, and are eaten in soup; (slang) nothing, valueless
Kroivim: Relatives
Krolik: Rabbit
Kuch leffel: A person who mixes into other people's business (cooking spoon)
Kuck im on (taboo): Defecate on him! The hell with him!
Kuck zich oys! (taboo): Go take a **** for yourself!
Kugel: Pudding
Kukn durkh di finger oyf: Shut one's eyes to....., connive at......, wink at.....
*** ich nisht heint, *** ich morgen: If I don't come today, I'll come tomorrow (procrastinator's slogan)
Kumen tsu gast: To visit
Kuntzen: Tricks
Kuni leml: A nerd
Kunyehlemel: Naive, clumsy, awkward person; nincompoop; Casper Milquetoast
Kuppe dre: A piece of ***** matter (s--t)
Kurveh: *****, *******
Kush in toches arein! (taboo): Kiss my behind! (said to somebody who is annoying you)
Kushinyerkeh: Cheapskate; woman who comes to a store and asks for a five cents' worth of vinegar in her own bottle
K'vatsh: Boneless person, one lacking character; a whiner, weakling
K'velen: Glow with pride and happiness, beam; be delighted
K'vetsh: Whine, complain; whiner, a complainer
K'vitsh: Shriek, scream, screech
L
Lachen mit yas:tsherkes - Forced or false laugh; laugh with anguish
Laidi:gaier - Idler, loafer
Lakeh: A funnel
Lamden: Scholar, erudite person, learned man
Lamed Vovnik: Refers to the Hebrew number "36" and traditionally each generation produces 36 wise and righteous persons who gain the approbation of "lamed vovnik."
Lang leben zolt ir!: Long may you live!
Lange loksch: A very tall thin person , A long tall drink of water.
Lantslaite: Plural of lantsman
Lantsman: Countryman, neighbour, fellow townsman from "old country".
Lapeh: Big hand
Layseh mogen: Diarrhea
(A) Lebedikeh velt!: A lively world!
(A) Lebediker: Lively person
(A) Leben ahf dein kop!: Words of praise like; Well said! Well done! (Lit., A long life upon your head.)
Lebst a chazerishen tog!: Living high off the hog!
Leck, shmeck: Done superficially (lick, smell)
L'che:im, le'chayim! - To life! (the traditional Jewish toast); To your health, skol
Leffel: Spoon
Leibtzudekel: Sleeveless shirt (like bib) with fringes, worn by orthodox Jews
Leiden: To suffer
Lemechel: Milquetoast, quiet person
Lemeshkeh: Milquetoast, bungler
Leshem shomaim: Idealistically, "for the sake of heaven."
Leveiyeh: Funeral
Lezem gayne: leave them be
Lig in drerd!: Get lost! Drop dead! (Lit., Bury yourself!)
Ligner: Liar
Litvak: Lithuanian; Often used to connote shrewdness and skepticism, because the Lithuanian Jews are inclined to doubt the magic powers of the Hasidic leaders; Also, a person who speaks with the Northeastern Yiddish accent.
Lobbus: Little monster
Loch: Hole Loch in kop - Hole in the head.
Loksch: An Italian gentleman.
Lokshen: Noodles
Lokshen strop: a "cat- o- nine tails"
Lominer gaylen: Clumsy fool (a golem-Frankenstein monster -- created by the Lominer rebbe)
Loz mich tzu ru!: Leave me alone! (Lit., Let me be in peace!)
Luftmentsh: Person who has no business, trade, calling, nor income.
Luch in kup: A hole in the head ( " I need this like a luch in kup").
M
Machareikeh: Gimmick, contraption
Macher: big shot, person with access to authorities, man with contacts.
Machshaifeh: Witch
Maidel: Unmarried girl, teenager
Maideleh: Little girl (affectionate term)
Maiven: Expert, connoisseur, authority
Maisse: A story
Maisse mit a deitch: A story with a (moral) twist
Makeh: Plague, wound, boil, curse
Mameleh: Mother dear
Mamoshes: Substance, people of substance.
Mamzer: *******, disliked person, untrustworthy
Mamzerook: A naughty little boy
Mashgiach: Inspector, overseer or supervisor of Kashruth in restaurants & hotels.
Mashugga: Crazy
Matkes: Underpants
Maynster: Mechanic, repairman, workshop proprietor
Mayster: Master craftsman, champion,
Mazel Tov: Good Luck (lit) Generally used to convey "congratulations".
Me ken brechen!: You can ***** from this!
Me ken lecken di finger!: It's delicious!
Me krechts, me geht veyter: I complain and I keep going.
Me lost nit leben!: They don't let you live!
Me redt zich oys dos hartz!: Talk your heart out!
Mechuten: In-Law
Mechutonim: In-Laws (The parents of your child's spouse)
Mechutainista: Mother-In-Law
Megillah: A long story
Mein bobbeh's ta'am: Bad taste! Old fashioned taste!
Mein cheies gait oys!: I'm dying for it!
Mekheye: An extreme pleasure, *******, out of this world wonderful!
Mekler: Go-between
Menner vash tsimmer: Men's room
Mentsh: A special man or person. One who can be respected.
Menuvel: A person who is always causing grief, can get nothing right, and is always in the way.
Meshpokha: Extended family
Meshugass: Madness, insanity, craze
Meshugeh: Crazy
Meshugeh ahf toit!: Crazy as a loon. Really crazy!
Meshugeneh: Mad, crazy, insane female.
Meshugener: Mad, crazy, insane man
Meshugoyim: Crazy people
Messer: Knife
Me zogt: They say; it is said.
Mezinka: A special dance for parents whose last child is getting married
Mezuzah: Tiny box affixed to the right side of the doorway of Jewish homes containing a small portion of Deuteronomy, handwritten on parchment.
Mies: Ugly
Mieskeit: Ugly thing or person.
Mikveh: Ritual bath used by women just prior to marriage as well as after each monthly cycle. This represents a "spiritual cleansing after a potential to create a new life was not actualized. There are some religious men who also use mikvehs prior to festivals and the Sabbath. Some Chassidim immerse every morning before praying.
Min tor nit: One (or you) mustn't
Minyan: Quorum of ten men necessary for holding public worship (must be over 13 years of age)
Mirtsishem: G-d willing
Mitn derinnen: All of a sudden, suddenly
Mitn grobn finger: Quibbling, stretching a point
Mitzvah: Good deed
Mizinik: The youngest child in an immediate family
Mogen Dovid: Star of David
Moisheh kapoyer: Mr. Upside-Down! A person who does everything backwards. Not knowing what one wants.
Mosser: Squealer
Mossik: Mischief maker, prankster, naughty little boy, imp
Moyel: Person (usually a rabbi) who performs circumcisions.
Mutek: Brave
Mutshen zich: To sweat out a job
Muttelmessig: Meddlesome person, kibbitzer
N
N'vayle: Shroud; inept person
Na!: Here! Take it. There you have it.
Naches: Joy: Gratification, especially from children.
Nacht falt tsu.: Night is falling; twilight
Nadan: Dowry
Nafkeh: *******
Nafkeh ba:is - *******
Naidlechech: Rare thing
Nar: Fool
Nar ainer!: You fool, you!
Narish: Foolish
Narishkeit: Foolishness
Narvez: Nervous
Nebach: It's a pity. Unlucky, pitiable person.
Nebbish: A nobody, simpleton, weakling, awkward person
Nebechel: Nothing, a pitiful person; or playing role of being one
(A) Nechtiker tog!: He's (it's) gone! Forget it! Nonsense! (Lit., a yesterday's day)
Nechuma: Consolation
Nechvenin: To *******
Nem zich a vaneh!: Go take a bath! Go jump in the lake!
Neshomeh: Soul, spirit
Neshomeleh: Sweetheart, sweet soul
Nisht geshtoygen, nisht gefloygen: neither here nor there
Nifte:shmifter, a leben macht er? - What difference does it make as long as he makes a living? (Lit., nifter means deceased.)
Nishkosheh: Not so bad, satisfactory. (This has nothing to do with the word "kosher", but comes from the Hebrew and means "hard, heavy," thus "not bad."
Nisht araynton keyn finger in kalt vaser: Loaf, not do a thing, be completely inactive
Nisht fur dich gedacht!: It shouldn't happen! G-d forbid! (Lit., May we be saved from it! [sad event] )
Nishtgedeiget: Don't worry; doesn't worry
Nisht geferlech: Not so bad, not too shabby (Lit. not dangerous.)
Nishtkefelecht: No big deal!
Nisht gefloygen, nisht getoygen: It doesn't matter
Nisht gefonfit!: Don't hedge. Don't fool around. Don't double-talk.
Nisht getoygen, nisht gefloygen: It doesn't fly, it doesn't fit
Nisht getrofen!: So I guessed wrong!
Nisht gut: Not good, lousy
Nisht naitik: Not necessary
Nishtgutnick: No-good person
Nishtikeit!: A nobody!
Nishtu gedacht!: It shouldn't happen! G-d forbid!
Nit kain farshloffener: A lively person
Nit ahin, nit aher: Neither here nor there
Nit gidacht!: It shouldn't happen! (Same as nishtu gedacht)
Nit gidacht gevorn.: It shouldn't come to pass.
Nit kosher: Impure food. Also, slang, anything not good
Nit heint, nit morgen!: Not today, not tomorrow!
Nito farvos!: You're welcome!
Nitsn: To use
Noch a mool: One more time
Noch nisht: Not yet
Nochshlepper: Hanger-on, unwanted follower
Nor Got vaist: Only G-d knows.
Nosh: Snack
Nosherie: Snack food
Nu?: So? Well?
Nu, dahf men huben kinder?: Does one have children? (When a child does something bad)
Nu, shoyn!: Move, already! Hurry up! Let's go! Aren't you finished?
Nudnik: Pesty nagger, nuisance, a bore, obnoxious person
Nudje: Annoying person, badgerer (Americanism)
Nudjen: Badger, annoy persistently
O
Ober yetzt?: So now? (Yetzt is also spelled itzt)
Obtshepen: Get rid of
Och un vai!: Alas and alack: woe be to it!
Oder a klop, oder a fortz (taboo): Either too much or not enough (Lit., either a wallop or a ****)
Oder gor oder gornisht: All or nothing
Ohmain: Amen
Oi!!: Yiddish exclamation to denote disgust, pain, astonishment or rapture
Oi, a shkandal!: Oh, what a scandal!
Oi, gevald: Cry of anguish, suffering, frustration or for help
Oi, Vai!: Dear me! Expression of dismay or hurt
Oi vai iz mir!: Woe is me!
Oif tsalooches: For spite
Oisgeshtrobelt!: Overdressed woman.
Oisgeshtrozelt: Decorated (beautiful)
Oisgevapt: Flat (as in "the fizz has gone out of it.)
Oi:shteler - Braggart
Oiver botel: Absentminded: getting senile
Okurat: That's right! Ok! Absolutely! (Sarcastically: Ya' sure!) Okuratner mentsh - Orderly person
Olreitnik!: Nouveau riche!
On langeh hakdomes!: Cut it short! (Lit., without long introductions.)
Ongeblozzen: Conceited: peevish, sulky, pouting
Ongeblozzener: Stuffed shirt
Ongematert: Tired out
Ongepatshket: Cluttered, disordered, scribbled, sloppy, muddled, overly-done
Ongeshtopt: Very wealthy
Ongeshtopt mit gelt: Very wealthy; (Lit., stuffed with money)
Ongetrunken: Drunk
Ongetshepter: Bothersome hanger-on
Ongevarfen: Cluttered, disordered
Onshikenish: Hanger-on
Onshikenish: Pesty nagger
Onzaltsen: Giving you the business; bribe; soft-soap; sweet-talk (Lit., to salt)
Opgeflickt!: Done in! Suckered! Milked!
Opgehitener: Pious person
Opgekrochen: Shoddy
Opgekrocheneh schoireh: Shoddy merchandise
Opgelozen(er): Careless dresser
Opgenart: Cheated, fooled
Opnarer: Trickster, shady operator
Opnarerei: Deception
Orehman: Poor man, without means
Oremkeit: Poverty
Ot azaih: That's how, just like that
Ot kimm ich: Here I come!
Ot gaist du: There you go (again)
Oy mi nisht gut gevorn: "Oh my, I'm growing weary."
Oy vey tsu meina baina: Woe is me (down to my toes)
Oybershter in himmel: G-d in heaven
Oych a bashefenish: Also a V.I.P.! A big person! (said derogatorily, sarcastically, or in pity)
Oych mir a leben!: This too is a living! This you call a living?
Oyfen himmel a yarid!: Much ado about nothing! Impossible! (Lit., In heaven there's a big fair!)
Oyfgekumener: Come upper, upstart
Oyfn oyg: Roughly, approximately
Oyg oyf oyg: In private, face-to-face
Oys shiddech: The marriage is off!
Oysznoygn fun finger: Concoct, invent (a story)
Oysergeveynlekh: Unusual (sometimes used as "great.")
Oysgedart: Skinny, emaciated
Oysgehorevet: Exhausted
Oysgematert: Tired out, worn out
Oysgemutshet: Worked to death, tired out
Oysgeposhet: "Well grazed," in the sense of being fat.
Oysgeputst: Dressed up, overdressed; over decorated
Oysgeshprait: Spread out
Oysvurf: Outcast, bad person
P
Paigeren: To die (animal)
Paigeren zol er!: He should drop dead!
Pamelech: Slow, slowly
Parech: Low-life, a bad man
Parnosseh: Livelihood
Parshiveh: Mean, cheap
Parshoin: He-man
Partatshnek: Inferior merchandise or work
Parveh: Neutral food, neither milchidik (dairy) nor flaishidik (meat)
Paskidnye: Rotten, terrible
Paskudnik, paskudnyak: Ugly, revolting, evil person; nasty fellow
Past nit.: It isn't proper.
Patsh: Slap, smack on the cheek
Patsh zich in tuchis und schrei "hooray": Said to a child who complains he/she has nothing to do (slap your backside and yell "hooray")
Patshkies around: Anglicized characterization of one who wastes time.
Patteren tseit: To lounge around; waste time
Payess: Long side-curls worn by Hasidic and other ultra-Orthodox Jewish men.
Petseleh: Little *****
Phooey! fooey, pfui: Designates disbelief, distaste, contempt
Pinkt kahpoyer: Upside down; just the opposite
Pipek: Navel, belly button
Pishechtz: *****
Pisher: Male infant, a little squirt, a nobody
Pisk: Slang, for mouth; insultingly, it means a big mouth, loudmouth
Pis:Malocheh - Big talker-little doer! (man who talks a good line but does nothing)
Pitseler: Toddler, small child
Pitshetsh: Chronic complainer
Pitsel: Wee, tiny
Pitsvinik: Little nothing
Plagen: Work hard, sweat out a job, suffer
Plagen zich: To suffer
Plaplen: Chatter Plats! - Burst! Bust your guts out! Split your guts!!
Platsin zuls du: May you explode
Plimenik: Nephew
Plimenitse: Niece
Plotz: To burst
Pluchet: Heavy rain (from Polish "Plucha")
Plyoot: Bull-*******; Loudmouth
Plyotkenitzeh: A gossip
Ponem: Face
Poo, poo, poo: Simulate spitting three times to avoid the evil eye
Pooter veren: Getting rid of (Lit: making butter)
Pooter veren fon emitzer: Getting rid of someone; eg: "ich geh' veren pooter fon ihr" - "I'm going to be getting rid of her!"
Poseyakh: Rolling out dough
Potchke: Fool around or "mess" with
Potzevateh: ******, someone who is "out of it."
Praven: Celebrate
Preplen: To mutter, mumble
Prezhinitse: Scrambled eggs with milk added.
Prietzteh: Princess; finicky girl; (having airs, giving airs; being snooty) prima donna!
Pripitchok: Long, narrow wood-burning stove
Prost: Coarse, common, ******
Prostaches: Low class people
Prostak: Ignorant boor, coarse person, ****** man
Proster chamoole: Low-class *******
Prosteh leit: Simple people, common people; ******, ignorant, "low class" people
Proster mentsh: ****** man, common man
Ptsha: Cows feet in jelly
Pulke: The upper thigh
Pupik: Navel, belly button, gizzard, chicken stomachs
Pupiklech: Dish of chicken gizzards
Pushkeh: Little box for coins
Pustunpasnik: Loafer, idler
Putz: Slang word for "*****." Also used when describing someone someone as being "a ****."
Pyesseh: A play, drama
R
Rachmones: Compassions, mercy, pity
Rav: Rabbi, religious leader of the community
Reb: Mr., Rabbi; title given to a learned and respected man
Rebbe fon Stutz: A phrase used to explain the unexplainable. Similar to blaming something on the fairies or a mystical being.
Rebiniu: "Rabbi dear!" Term of endearment for a rabbi
Rebitsin: Literally, the rabbi's wife (often sarcastically applied to a woman who gives herself airs, or acts excessively pious) ; pompous woman
Rechielesnitseh: Dowdy, gossipy woman
Reden on a moss: To chatter without end
Redn tzu der vant: Talk in vain or to talk and receive no answer (Lit. , talk to the wall for all the good it will do you)
Redlshtul: Wheelchair
Redt zich ayn a kreynk!: Imaginary sickness
Redt zich ayn a kind in boich: Imaginary pregnancy (Imaginary anything)
*****: Rich, wealthy
Reisen di hoit: Skin someone alive (Lit., to tear the skin)
Reissen: To tear
Retsiche: ******
Rib:fish, gelt oyfen tish! - Don't ask for credit! Pay in cash in advance! Cash on the barrel-head!
Riboyno:shel-oylom! (Hebrew) God in heaven, Master of the Universe
Richtiker chaifetz: The real article! The real McCoy!
Rirevdiker: A lively person
Rolleh: Role in a play
Rooshisher: Definitely NOT a Litvak; coming from Ukraine, White Russia; the Crimea, Russia itself.
Roseh: Mean, evil person
Rossel flaysh: Yiddish refritos
(A) Ruach in dein taten's taten arein!: Go to the devil! (Lit., A devil (curse) should enter your father's father!)
Ruf mich k'na:nissel! - I did wrong? So call me a nut!
Ruktish: Portable table
S
S'vet helfen azoy vie a toytn baynkes: Lit: It will help as much as applying cups to a dead person.
S'art eich?: What does it matter to you? Does it matter to you?
Saykhel: Common sense
Schochet: A ritual slaughterer of animals and fowl.
Se brent nit!: Don't get excited! (Lit., It's not on fire!)
Se shtinkt!: It stinks!
Se zol dir grihmen in boych!: You should get a stomach cramp!
Sh' gootzim: Plural of shaigetz
Sha! (gently said): Please keep quiet.
Shabbes goy: Someone doing the ***** work for others (Lit;, gentile doing work for a Jew on Sabbath)
Shabbes klopper: A resident of a neighbourhood who's job it was to "klop" or bang on the shutters of Jewish homes to announce the hour of sundown on Friday
Shadchen: Matchmaker or marriage broker. There is the professional type who derives his or her living from it, but many Jewish people engage in matchmaking without compensation.
Shaigitz: Non-Jewish boy; wild Jewish boy
Shaigetz ainer!: Berating term for irreligious Jewish boy, one who flouts Jewish law
Shaile: A question
Shain vi der lavoone: As pretty as the moon
Shain vi di zibben velten: Beautiful as the seven worlds
Shaineh maidel: pretty girl
Shaineh raaineh keporah: Beautiful, clean sacrifice. Nothing to regret.
Shainer gelechter: Hearty laugh (sarcastically, Some laughter!)
Shainkeit: Beauty
Shaitel, (sheitel): Wig (Ultra-orthodox married women cover their hair. Some use a shaitel)
Shalach mohnes: Customary gifts exchanges on Purim, usually goodies Shalom - Peace (a watchword and a greeting)
Shamus: Sexton, beadle of the synagogue, also, the lighter taper used to light other candles on a menorah, a policeman (slang)
Shandeh: Shame or disgrace
Shandhoiz: Brothel, *******
Shpatzir: A walk without a particular destination
Shat, shat! Hust!: Quiet! Don't get excited
Shatnes: Proscription against wearing clothes that are mixed of wool and linen
Shav: Cold spinach soup, sorrel grass soup, sour leaves soup
Shayneh kepeleh: Pretty head (lit) Good looking, good thoughts
Shemevdik: Bashful, shy
Shepen naches: Enjoy; gather pleasure, draw pleasure, especially from children
Shidech (pl., shiduchim): Match, marriage, betrothal
Shih:pihi - Mere nothings
****:yingel - Messenger
Shikker: Drunkard
Shikseh: Non-Jewish girl
Shlissel: A key
Shissel: A basin or bowl
*******: Sparse, lean, meager
Shiva: Mourning period of seven days observed by family and friends of deceased
Shkapeh: A hag, a mare; worthless
Shkotz: Berating term for mischievous Jewish boy
Shlak: Apoplexy; a wretch, a miserable person; shoddy; shoddy merchandise
Shlang: Snake, serpent; a troublesome wife; ***** (taboo)
Shlatten shammes: Communal busybody, tale bearer; messenger
Shlecht: Bad
Shlecht veib: Shrew (Lit., a bad wife)
Shlemiel: Clumsy bungler, an inept person, butter-fingered; ***** person
Shlep: Drag, carry or haul, particularly unnecessary things, parcels or baggage; to go somewhere unwillingly or where you may be unwanted
Shleppen: To drag, pull, carry, haul
Shlepper: Sponger, panhandler, hanger-on; dowdy, gossipy woman, free-loader
Shlimazel: Luckless person. Unlucky person; one with perpetual bad luck (it is said that the shlemiel spills the soup on the shlimazel!)
Shlog zich kop in vant.: Break your own head! (Lit., bang your head on the wall)
Shlog zich mit Got arum!: Go fight City Hall! (Lit., Go fight with God.)
Shlogen: To beat up
Shlok: A curse; apoplexy
Shlooche: ****
Shloof: Sleep, nap
Shlosser: Mechanic
Shlub: A ****; a foolish, stupid or unknowing person, second rate, inferior.
Shlump: Careless dresser, untidy person; as a verb, to idle or lounge around
Shlumperdik: Unkempt, sloppy
Shmaltz: Grease or fat; (slang) flattery; to sweet talk, overly praise, dramatic
Shmaltzy: Sentimental, corny
Shmatteh: Rag, anything worthless
Shmeis: Bang, wallop
Shmek tabik: Nothing of value (Lit., a pinch of *****)
Shmeer: The business; the whole works; to bribe, to coat like butter
Shmegegi: Buffoon, idiot, fool
Shmeichel: To butter up
Schmeikel: To swindle, con, fast-talk.
Shmendrik: nincompoop; an inept or indifferent person; same as shlemiel
Shmo(e): Naive person, easy to deceive; a goof (Americanism)
Shmontses:Trifles, folly
Shmooz; (shmuess): Chat, talk
Shmuck (tabboo): Self-made fool; obscene for *****: derisive term for a man
Shmulky!: A sad sack!
Shmuts: Dirt, slime
Shmutzik: *****, soiled
Shnapps: Whiskey, same as bronfen
Shnecken: Little fruit and nut coffee rolls
Shneider: Tailor; in gin rummy card game, to win game without opponent scoring
Shnell: Quick, quickly
Shnook: A patsy, a sucker, a sap, easy-going, person easy to impose upon, gullible
Shnorrer: A beggar who makes pretensions to respectability; sponger, a parasite
Shnur: Daughter-in-law
Shokklen: To shake
Shoymer: Watchman; historically refers also to the armed Jewish watchman in the early agricultural settlements in the Holy Land
Shoymer mitzves: Pious person
Shoyn ainmol a' metse:eh! - Really a bargain
Shoyn fargessen?: You have already forgotten?
Shoyn genug!: That's enough!
Shpiel: Play
Shpilkes: Pins and needles
Shpits: end, the heel of the bread
Shpitsfinger: Toes
Shpitzik: Pointed sense of humour, witty, sarcastic, caustic
Shpogel nei: Brand-new
Shreklecheh zach: A terrible thing
Shtarben: To die
Shtark, shtarker: Strong, brave
Shtark gehert: Smelled bad (used only in reference to food; Lit., strongly heard)
Shtark vi a ferd: Strong as a horse
Shteln zikh oyg oyf oyg mit....: To confront
Shtetl: Village or small town (in the "old country")
Shtik: Piece, bit: a special bit of acting
Shtik drek (taboo): *******; ****-head
Shtik goy: Idiomatic expression for one inclined to heretical views, or ignorance of Jewish religious values
Shtik naches: Grandchild, child, or relative who gives you pleasure; a great joy
Shtikel: Small bit or piece; a morsel
Shtiklech: Tricks; small pieces
Shtilinkerait: Quietly
Shtimm zic: Shut up!
Shtoltz: Pride; unreasonably and stubbornly proud, excessive self-esteem
Shtrafeeren: To threaten
Shtrudel: Sweet cake made of paper-thin dough rolled up with various fillings
Shtuk: Trouble
Shtum: Quiet
(A) Shtunk: A guy who doesn't smell too good; a stink (bad odor) a lousy human
Shtup: Push, shove; vulgarism for ****** *******
Shtup es in toches! (taboo): Shove (or stick) it up your ****** (***)!
Shtuss: A minor annoyance that arises from nonsense
Shudden: A big mess
Shul: Colloquial Yiddish for synagogue
Shule: School
Shushkeh: A whisper; an aside
Shutfim: Associates
Shvach: Weak, pale
Shvachkeit: Weakness
Shvantz: tail, *****
Shvartz: Black
Shvegerin: Sister-in-law
Shvengern: Be pregnant
Shver: Father-in-law; heavy, hard, difficult
Shvertz azayan ***: It's hard to be a Jew
Shviger: Mother-in-law
Shvindel: Fraud, deception, swindle
Shvindeldik: Dizzy, unsteady
Shvitz: Sweat, sweating
Shvitz ***: Steam bath
Shvoger: Brother-in-law
Sidder: Jewish prayer book for weekdays and Saturday
Simantov: A good sign (lit) Often used with mazel tov to wish someone good luck or to express congratulations
Simcheh: Joy; also refers to a joyous occasion
Sitzfleish: Patience that can endure sitting (Lit., sitting flesh)
Smetteneh: Sour cream; Cream
Sobaka killev: Very doggy dog
Sof kol sof: Finally
Sonem: Enemy, or someone who thwarts your success.
S'teitsh!: Listen! Hold on! How is that? How is that possible? How come?
Strasheh mich nit!: Don't threaten me!
Strashen net de genz: Lit., Do not disturb the geese. (You are full of yourself and making too much noise)
T
Ta'am: Taste, flavor; good taste
Ta'am gan eyden: Fabulous (Lit: A taste of the Garden of Eden)
Tachlis: Practical purpose, result
Tahkeh: Really! Is that so? Certainly!
Tahkeh a metsieh: Really a bargain! (usually said with sarcasm)
Taiglech: Small pieces of baked dough or little cakes dipped in honey
Tallis: Rectangular prayer-shawl to whose four corners, fringes are attached
Talmud: The complete treasury of Jewish law interpreting the Torah into livable law
Talmud Torah: The commandment to study the Law; an educational institution for orphans and poor children, supported by the community; in the United States, a Hebrew school for children
Tamavate: Feebleminded
Tamaveter: Feebleminded person
Tandaitneh: Inferior
Tararam: Big noise, big deal
Tashlich: Ceremony of the casting off of sins on the Jewish New Year (crumbs of bread symbolizing one's sins are cast away into a stream of water in the afternoon of the Jewish New Year, Rosh Hashoneh)
Tateh, tatteh, tatteh, tatteleh, tatinka, tatteniu: Father, papa, daddy, pop
Tate:mameh, papa-mama - Parents
Tatenui: Father dear (The suffix "niu" in Yiddish is added for endearing intimacy; also, G-d is addressed this way by the pious; Tateniu-Foter means G-d, our Father
Tchotchkes: Little playthings, ornaments, bric-a-brac, toys
Teier: Dear, costly, expensive
Te:yerinkeh! - Sweetheart, dearest
Temp: Dolt
Temper kop: Dullard
Ti mir nit kayn toyves: "Don't do me any favours" (sarcastic)
Tinef: Junk, poorly made
T'noim: Betrothal, engagement
Toches: Buttocks, behind, ***** (***)
Toches ahfen tish!: Put up or shut up! Let's conclude this! (Lit., ***** on the table!)
Toches in droissen: Bare behind
Toche:lecker - Brown-noser, apple-polisher, ***-kisser
Togshul: Day school
Toig ahf kapores!: Good for nothing! It's worth nothing!
Traif: Forbidden food, impure, contrary to the Jewish dietary laws, non-kosher
Traifener bain: Jew who does not abide by Jewish law (derisive, scornful expression
Traifeneh bicher: Forbidden literature
Traifnyak: Despicable person; one who eats non-kosher food
Trefn oyfn oyg: To make a guess
Trenen: To tear, rip
Trepsverter: Lit. step words. The zinger one thinks of in retreat. The perfect retort one summons after mulling over the insult.
Trogedik: Pregnant
Trog gezunterhait!: Wear it in good health!
Trombenik: A ***, no-good person, ne'er-do-well; a faker
Tsaddik: Pious, righteous person
Tsalooches: Spite
Tsaloochesnik: Spiteful person
Tsatskeh: Doll, plaything; something cute; an overdressed woman; a **** girl
Tsatskeleh der mamehs!: Mother's favorite! Mother's pet!
Tsebrech a fus!: Break a leg!
Tsedrait: Nutty, crazy, screwy
Tsedraiter kop: Bungler
Tseereh: Face (usually used as put-down)
Tseeshvimmen: Blurred
Tsegait zich in moyl: It melts in the mouth, delicious, yummy-yummy
Tsemishnich: Confusion
Tsemisht: Confused, befuddled, mixed-up
Tsevishe:shtotisheh telefonistkeh - Long distance operator
Tshatshki: Toy, doo-dad
Tshepen: To annoy, irk, plague, bother, attack
Tsigeloisen: Compassionate, rather nice
Tsiklen zich: The cantor's ecstatic repetition of a musical phrase
Tsimmes: Sweet carrot compote; (slang) a major issue made out of a minor event
Tsitskeh: Breast, ****, udder
Tsivildivit: Crazy, wild, overwhelmed with too many choices
Tsnueh: Chaste
Tsores: Troubles, misery
Tsu undzer tsukunft tzuzamen: To our future together.
Tsutsheppenish: Hanger-on; unwanted companion; pest; nuisance
Tsum glik, tsum shlimazel: For better, for worse
Tsumakhn an oyg: To fall asleep
Tsvilling: Twins
Tu mir a toiveh.: Do me a favor.
Tu mir nit kain toives.: Don't do me any favors.
Tumel: Confusion, noise, uproar
Tumler: A noise-maker (person); an agitator
Tut vai dos harts: Heartbroken
Tzadrait: Scattered
Tzedakeh: Spirit of philanthropy; charity, benevolence
Tziginner bobkes: Jocular, truly valueless. Also used to describe black olives. Lit: goat droppings
Tziter: To tremble
Tziterdik: Tremulous or trembling
Tzitzis: Fringes attached to the four corners of the tallis
Tzufil!: Too much! Too costly!
U
U:be-rufen - Unqualified, uncalled for; God forbid; (A deprecation to ward off the evil eye)
U:be-shrien - God forbid! It shouldn't happen!
Umgeduldik: Petulant
Ummeglich!: Impossible!
Umglick: A misfortune; (masc) A born loser; an unlucky one
Umshteller: Braggart
Umzist: For nothing
Umzitztiger fresser: free loader, especially one who shows up only to eat (and EAT!)
Unger bluzen: Bad mood. Swollen with anger.
Ungerissen beheiman: A totally stupid person. Lit., an untamed animal. Not wild, just dumb.
Un langeh hakdomes!: Cut it short! (lit., Without a long introduction)
Unter fir oygn: Privately
Unterkoifen: To bribe
Untershmeichlen: To butter up
Untervelt mentsh: Racketeer
Untn: Below
Utz: To goad, to needle
V
Vahksin zuls du vi a tsibeleh, mitten kup in drerd: May you grow like an onion, with your head in the ground!
Vahksin zuls du, tsu gezunt, tsu leben, tsu langeh yor: May you grow to health, to life, to long years. (Each may me said when someone sneezes)
Vai!: Woe, pain; usually appears as "oy vai!"
Vai is mir!: Woe is me!
Vai vind iz meine yoren: "Woe is me!"
Vais ich vos: Stuff and nonsense! Says you! (Lit., Know from what)
Vaitik: An ache
Valgeren zich: Wander around aimlessly
Valgerer: Homeless wanderer
Vaneh: Bath, bathtub
Vannit: Where (from) "Fon vannit kimmt ihr?" (Where do you come from?)
Vantz: Bedbug; (slang) a nobody
Varenikehs: Round shaped noodle dough stuffed with meat, potato, etc. and fried
Varfen an oyg: To look out for; to guard; to mind (Lit., To throw an eye at)
Varnishkes: Kasha and noodles
Vart!: Wait! Hold on!
Vas:tsimmer - Bathroom, washroom
Vas:tsimmer far froyen - Ladie's room
Vas:tsimmer far menner - Men's room
Vayt fun di oygn,vayt fun hartsn: Far from the eyes, far from the heart. Equivalent to "Out of sight, out of mind."
Vechter: Watchman
Veibernik: Debauchee
Veibershe shtiklach: Female tricks
Veis vi kalech!: Pale as a sheet!
Ve:zaiger - Alarm clock
Vemen barestu?: (taboo) Whom are you kidding? (Lit., Whom are you *******?)
Vemen narstu?: Whom are you fooling?
Ver derharget!: Get killed! Drop dead! (Also "ver geharget)
Ver dershtikt!: Choke yourself!
Ver farblondjet!: Get lost! Go away!
Verklempt: Extremely emotional. On the verge of tears. (See "Farklempt")
Ver tsuzetst: "Go to hell" (or its equivalent)
Ver vaist?: Who knows?
Ver volt dos gegleybt?: Who would have believed it?
Veren a tel: To be ruined
Veren ferherret: To get married
Vi a barg: Large as a mountain
Vi der ruach zogt gut morgen: Where the devil says good morning! (has many meanings; usually appended to another phrase)
Vi gait dos gesheft?: How's business?
Vi gait es eich?: How goes it with you? How are you? How are you doing?
Vi gaits?: How goes it? How are things? How's tricks?
Vi haistu?: What's your name?
Vi ruft men...?: What is the name of...?
Vi ruft men eich?: What is your name?
Viazoy?: How come?
Vie Chavele tsu der geht: Literally: Like Chavele on her way to her divorce; meaning "all spruced up."
Vifil?: How much?
Vilder mentsh: A wild one; a wild person
Vilder chaiah: Wild animal or out of control child or adult
Vilstu: Do you want...
Vo den?: What else?
Voglen: To wander around aimlessly
Voiler yung!: Roughneck (sarcastic expression)
Voncin: Bed bug
Vortshpiel: Pun, witticism
Vos art es (mich)?: What does it matter (to me)? What do I care?
Vos barist du?: (taboo) What are you ******* around for? What are you fooling around for?
Vos bei a nichteren oyfen lung, is bei a shikkeren oyfen tsung.: What a sober man has on his lung (mind), a drunk has on his tongue.
Vos draistu mir a kop?: What are you bothering me for? (Lit., Why are you twisting my head?)
Vos failt zai?: What are they lacking?
Vos gicher, alts besser: The faster, the better
Vos hakst du mir in kop?: What are you talking my head off for?
Vos hert zich?: What do you hear around? What's up?
Vos hert zich epes ne:es? - What's new?
Vos heyst: what does it mean?
Vos hob ich dos gedarft?: What did I need it for?
Vo:in-der-kort - Capable of doing anything bad (applied to bad person; Lit., everything in the cards)
Vos iz?: What's the matter?
Vos iz ahfen kop, iz ahfen tsung!: What's on his mind is on his tongue!
Vos iz der chil'lek?: What difference does it make?
Vos iz der tachlis?: What's the purpose? Where does it lead to?
Vos iz di chochmeh?: What is the trick?
Vos iz di untershteh shureh?: What's the point? What's the outcome? (Lit., What on the bottom line?)
Vos iz mit dir?: What's wrong with you?
Vos kocht zich in teppel?: What's cooking?
Vos macht a ***?: How's it going?
Vos macht vos oys?: What difference does it make?
Vos macht es mir oys?: What difference does it make to me?
Vos macht ir?: How are you? (pl.); How do you do?
Vos Machstu?: How are you? (singular)
Vos maint es?: What does it mean?
Vos noch?: What else? What then?
Vos ret ir epes?: What are you talking about?
Vos tut zich?: What's going on? What's cooking?
Vos vet zein: What will be
Vos vet zein, vet zein!: What will be, will be!
Vos zogt ir?: What are you saying?
Vu tut dir vai?: Where does it hurt?
Vus du vinsht mir, vinsh ikh dir.: What you wish me, I wish you.
Vuhin gaitsu?: Where are you going?
Vund: Wound
Vursht: Bologna
Vyzoso: Idiot (named after youngest son of Haman, archenemy of Jews in Book of esther); also, *****
W
Wen der tati/fater gibt men tsu zun, lachen baiden. Wen der zun gibt men tsu tati/fater, vainen baiden.: When the father gives to his son, both laugh. When the son gives to the father, both cry.
Wen ich ess, ch'ob ich alles in dread.: (Lit. When I am eating, I have everything in the ground.) When I am eating, everybody can go to hell!
Y
Yachneh: A coarse, loud-mouthed woman; a gossip; a slattern
Yachsen: Man of distinguished lineage, highly connected person, privileged character
Yarmelkeh: Traditional Jewish skull cap, usually worn during prayers; worn at all times by observant Orthodox Jews.
Yahrtzeit: Anniversary of the day of death of a loved-one.
Yashir koyech: May your strength continue
Yatebedam: A man who threatens; one who thinks he's a "big shot"; a blusterer
Yedies: News; cablegrams; announcements
Yefayfiyeh: Beauty; woman of great beauty
Yenems: Someone else's; (the brand of cigarettes moochers smoke!)
Yeneh velt: The other world; the world to come
Yenteh: Gabby, talkative woman; female blabbermouth
Yente telebente: Mrs. National Enquirer
Yentzen (taboo): To fornicate, to *****
Yeshiveh: Jewish traditional higher school, talmudical academy
Yeshiveh bocher: Student of talmudic academy
Yeshuvnik: Farmer, rustic
Yichus: Pedigree, ancestry, family background, nobility
Yiddisher kop: Jewish head
Yiddishkeit: Having to do with all things relating to Jewish culture.
Yingeh tsat:keh! - A young doll! A living doll!
Yiskor: Prayer in commemoration of the dead (Lit., May God remember.)
Yom Kippur: Day of Atonement (the most holy of holy days of the Jewish calendar)
Yontefdik: Festive, holiday-ish; sharp (referring to clothes)
Yortseit: Anniversary of the day of death of parents or relatives; yearly remembrance
Yoysher: Justice, fairness, integrity
Yukel: Buffoon
(A) Yung mit bainer!: A powerhouse! Strongly built person
Yung un alt: Young and old
Yungatsh: Street-urchin, scamp, young rogue
Yungermantshik: A young, vigorous lad; A newlywed
Yusoimeh: Orphan
Z
Zaft: Juice
Zaftik: Pleasantly plump and pretty. Sensuous looking (Lit., juicy)
Zaftikeh moid!: Sexually attractive girl
Zaideh: Grandfather
Zaier gut: O.K. (Lit., very good)
Zaier shain gezogt!: Well said! (Lit., Very beautifully said!)
Zee est vee a feigele: She eats like a bird
Zeh nor, zeh nor!: Look here, look here!
Zei (t) gezunt: Be well! Goodbye! Farewell
Zei mir frailich!: Be Happy!
Zei mir gezunt!: Be well!
Zei mir matriach: Be at pains to... Please; make an effort.
Zei nit a nar!: Don't be a fool!
Zei nit kain vyzoso!: Don't be an idiot! Don't be a **** fool!
Zeit azoy gut: Please (Lit., Be so good)
Zeit ir doch ahfen ferd!: You're all set! (Lit., You're on the horse!)
Zeit (mir) moychel: Excuse me! Be so good as...Forgive me!
Zelig: Blessed (used mostly among German Jews in recalling a beloved deceased ----- mama zelig)
Zeltenkeit: Rare thing
Zetz: Shove, push, bang! Also slang for a ****** experience (taboo)
Zhaleven: To be sparing, miserly
Zhlob: A ****; slob, uncouth
Zhu met (mir) in kop: A buzzing in one's (mind) head
Zhulik: Faker
Zi farmacht nit dos moyl: She doesn't stop talking (Lit., She doesn't close her mouth)
Zindik nit: Don't complain. Don't tempt the Gods.
Zingen: To sing
Ziseh neshomeh: Sweet soul
Ziseh raidelech: Sweet talk
Ziskeit: Sweetness, sweetheart, (Also endearing term for a child)
Zitsen ahf shpilkes: Sitting on pins and needles; to fidget
Zitsen shiveh: Sit in mourning (Shiveh means 7 which is the number of days in the period of mourning
Zitsflaish: Patience (Lit., Sitting meat)
Zog a por verter: Say a few words!
Zogen a ligen: Tell a lie
Zogerkeh: Woman who leads the prayers in the women's section in the synagogue
Zoineh: *******
Zok nit kin vey: Don't worry about it (Lit: Do not say woe)
Zol dich chapen beim boych.: You should get a stomach cramp!
Zol dir klappen in kop!: It should bang in your head (the way it is bothering me!)
Zol er tsebrechen a fus!: May he break a leg! He should break a leg!
Zol es brennen!: The hell with it! (Lit., Let it burn!)
Zol Got mir helfen: May God help me!
Zol Got ophiten!: May God prevent!
Zol ich azoy vissen fun tsores!: I haven't got the faintest idea! (Lit., I should so know from trouble as I know about this!)
Zol makekhs voxen offen tsung!: Pimples should grow on your tongue!
Zol vaksen tzibbelis fun pipek!: Onions should grow from your bellybutton!
Zol ze vaksen ze ve a tsibble mit de kopin dreid: You should grow like an onion with your head in the ground.
Zol zein!: Let it be! That's all!
Zol zein azoy!: O.K.! Let it be so!
Zol zein gezunt!: Be well!
Zol zein mit glik!: Good luck!
Zol zein shah!: Be quiet. Shut up!!
Zol zein shtil!: Silence! Let's have some quiet!
Zolst geshvollen veren vi a barg!: You should swell up like a mountain!
Zolst helfen vi a toyten bankes: It helps like like cupping helps a dead person.
Zolst hobn tzen haizer, yeder hoiz zol hobn tzen tzimern, in yeder tzimer zoln zain tzen betn un zolst zij kaiklen fun ein bet in der tzweiter mit cadojes!: I wish you to have ten houses, each house with ten rooms, each room with ten beds and you should roll from one bed to the other with cholera. (not a very nice thing to say.)
Zolst leben un zein gezunt!: You should live and be well!
Zolst ligen in drerd!: Drop dead! (Lit., You should lie in the earth!)
Zolst nit vissen fun kain shlechts.: You shouldn't know from evil.
Zolst es shtipin in toches!: (taboo) Shove it up your ******!
Zolst zein vi a lom:am tug sollst di hangen, in der nacht sollst di brennen - You should be like a lamp, you should hang during the day and burn during the night!
Zolstu azoy laiben!: You should live so!
Zorg zich nit!: Don't worry!
Zuninkeh!: Dear son! Darling son!
Paul d'Aubin Apr 2016
Éloge de Monsieur de Montaigne

(Dédié à Jean-Pierre)

Toi seigneur de Montaigne, au si beau nom d'Eyquem
que nul amateur de Bordeaux ne saurait négliger.
Tu fus l'ami de La Boétie et un sage joyeux,
Tu vécus en ton château, dont l'une des tours rondes,
contenait une bibliothèque fournie.
Toi, qui faisait cultiver ce vin de Bordeaux,
qui sied au palais et plait tant aux anglais.
Cher Montaigne ayant étudié à Bordeaux,
au collège de Guyenne,
Tu vécus en un temps empoisonné
par les guerres de religion et ses sombres fureurs.
Temps affreux ou l'homme égorgeait l'homme,
qui ne partageait pas sa même lecture de la  Bible.
Et dire que nous avions cru, ces temps-là, révolus !
C'est peut-être ce qui te poussa à choisir l'école stoïcienne,
Bien que par ton tempérament et ta vie.
Tu fus beaucoup plus proche des bonheurs de Lucrèce.
Tu fus, un long temps, magistrat au Parlement de Bordeaux,
bien que les chicaneries du Droit t'eussent vite lassées,
et plus encore, la cruauté de ses modes de preuve.
et cet acharnement infini des plaideurs,
à n'en jamais finir, à faire rebondir les procès
que tant d’énergie vaine te semblait pure perte.
Mais tu voulais être utile et l'égoïsme étroit de l' «otium»,
choquait ta conscience.
Tu eus un ami cher, Prince de Liberté et de distinction,
Etienne de la Boétie, qui réfléchit avec profondeur,
sur les racines de la tyrannie en nos propres faiblesses.
Et de cette amitié, en recherchant les causes,
Tu conclus et répondit ainsi :
«Parce que c’était lui, parce que c’était moi»
Révélant ainsi que la quintessence du bonheur de  vivre
luit au cœur  de cette amitié dont nous sommes,
à la fois, le réceptacle et l’offrande.
Cher Michel de Montaigne, je voulais,
te saluer ici et te faire savoir en quelle estime
Je te tiens avec  tes «Essais» d’une bienveillante sagesse
Qui font songer aux meilleurs vins mûris en barriques de chêne
Et à ces cognacs qui éveillent l’Esprit et les sens,
Même lorsque l’hiver nous pèse et nous engourdit
Je voulais aussi te dire que de ton surnom
J’ai nommé Jean-Pierre qui te ressemble si fort
Et apporte une douce ironie à mes passions tumultueuses.
Paul Arrighi
Le poète

Le mal dont j'ai souffert s'est enfui comme un rêve.
Je n'en puis comparer le lointain souvenir
Qu'à ces brouillards légers que l'aurore soulève,
Et qu'avec la rosée on voit s'évanouir.

La muse

Qu'aviez-vous donc, ô mon poète !
Et quelle est la peine secrète
Qui de moi vous a séparé ?
Hélas ! je m'en ressens encore.
Quel est donc ce mal que j'ignore
Et dont j'ai si longtemps pleuré ?

Le poète

C'était un mal vulgaire et bien connu des hommes ;
Mais, lorsque nous avons quelque ennui dans le coeur,
Nous nous imaginons, pauvres fous que nous sommes,
Que personne avant nous n'a senti la douleur.

La muse

Il n'est de vulgaire chagrin
Que celui d'une âme vulgaire.
Ami, que ce triste mystère
S'échappe aujourd'hui de ton sein.
Crois-moi, parle avec confiance ;
Le sévère dieu du silence
Est un des frères de la Mort ;
En se plaignant on se console,
Et quelquefois une parole
Nous a délivrés d'un remord.

Le poète

S'il fallait maintenant parler de ma souffrance,
Je ne sais trop quel nom elle devrait porter,
Si c'est amour, folie, orgueil, expérience,
Ni si personne au monde en pourrait profiter.
Je veux bien toutefois t'en raconter l'histoire,
Puisque nous voilà seuls, assis près du foyer.
Prends cette lyre, approche, et laisse ma mémoire
Au son de tes accords doucement s'éveiller.

La muse

Avant de me dire ta peine,
Ô poète ! en es-tu guéri ?
Songe qu'il t'en faut aujourd'hui
Parler sans amour et sans haine.
S'il te souvient que j'ai reçu
Le doux nom de consolatrice,
Ne fais pas de moi la complice
Des passions qui t'ont perdu,

Le poète

Je suis si bien guéri de cette maladie,
Que j'en doute parfois lorsque j'y veux songer ;
Et quand je pense aux lieux où j'ai risqué ma vie,
J'y crois voir à ma place un visage étranger.
Muse, sois donc sans crainte ; au souffle qui t'inspire
Nous pouvons sans péril tous deux nous confier.
Il est doux de pleurer, il est doux de sourire
Au souvenir des maux qu'on pourrait oublier.

La muse

Comme une mère vigilante
Au berceau d'un fils bien-aimé,
Ainsi je me penche tremblante
Sur ce coeur qui m'était fermé.
Parle, ami, - ma lyre attentive
D'une note faible et plaintive
Suit déjà l'accent de ta voix,
Et dans un rayon de lumière,
Comme une vision légère,
Passent les ombres d'autrefois.

Le poète

Jours de travail ! seuls jours où j'ai vécu !
Ô trois fois chère solitude !
Dieu soit loué, j'y suis donc revenu,
À ce vieux cabinet d'étude !
Pauvre réduit, murs tant de fois déserts,
Fauteuils poudreux, lampe fidèle,
Ô mon palais, mon petit univers,
Et toi, Muse, ô jeune immortelle,
Dieu soit loué, nous allons donc chanter !
Oui, je veux vous ouvrir mon âme,
Vous saurez tout, et je vais vous conter
Le mal que peut faire une femme ;
Car c'en est une, ô mes pauvres amis
(Hélas ! vous le saviez peut-être),
C'est une femme à qui je fus soumis,
Comme le serf l'est à son maître.
Joug détesté ! c'est par là que mon coeur
Perdit sa force et sa jeunesse ;
Et cependant, auprès de ma maîtresse,
J'avais entrevu le bonheur.
Près du ruisseau, quand nous marchions ensemble,
Le soir, sur le sable argentin,
Quand devant nous le blanc spectre du tremble
De **** nous montrait le chemin ;
Je vois encore, aux rayons de la lune,
Ce beau corps plier dans mes bras...
N'en parlons plus... - je ne prévoyais pas
Où me conduirait la Fortune.
Sans doute alors la colère des dieux
Avait besoin d'une victime ;
Car elle m'a puni comme d'un crime
D'avoir essayé d'être heureux.

La muse

L'image d'un doux souvenir
Vient de s'offrir à ta pensée.
Sur la trace qu'il a laissée
Pourquoi crains-tu de revenir ?
Est-ce faire un récit fidèle
Que de renier ses beaux jours ?
Si ta fortune fut cruelle,
Jeune homme, fais du moins comme elle,
Souris à tes premiers amours.

Le poète

Non, - c'est à mes malheurs que je prétends sourire.  
Muse, je te l'ai dit : je veux, sans passion,
Te conter mes ennuis, mes rêves, mon délire,
Et t'en dire le temps, l'heure et l'occasion.
C'était, il m'en souvient, par une nuit d'automne,
Triste et froide, à peu près semblable à celle-ci ;
Le murmure du vent, de son bruit monotone,
Dans mon cerveau lassé berçait mon noir souci.
J'étais à la fenêtre, attendant ma maîtresse ;
Et, tout en écoutant dans cette obscurité,
Je me sentais dans l'âme une telle détresse
Qu'il me vint le soupçon d'une infidélité.
La rue où je logeais était sombre et déserte ;
Quelques ombres passaient, un falot à la main ;
Quand la bise sifflait dans la porte entr'ouverte,
On entendait de **** comme un soupir humain.
Je ne sais, à vrai dire, à quel fâcheux présage
Mon esprit inquiet alors s'abandonna.
Je rappelais en vain un reste de courage,
Et me sentis frémir lorsque l'heure sonna.
Elle ne venait pas. Seul, la tête baissée,
Je regardai longtemps les murs et le chemin,
Et je ne t'ai pas dit quelle ardeur insensée
Cette inconstante femme allumait en mon sein ;
Je n'aimais qu'elle au monde, et vivre un jour sans elle
Me semblait un destin plus affreux que la mort.
Je me souviens pourtant qu'en cette nuit cruelle
Pour briser mon lien je fis un long effort.
Je la nommai cent fois perfide et déloyale,
Je comptai tous les maux qu'elle m'avait causés.
Hélas ! au souvenir de sa beauté fatale,
Quels maux et quels chagrins n'étaient pas apaisés !
Le jour parut enfin. - Las d'une vaine attente,
Sur le bord du balcon je m'étais assoupi ;
Je rouvris la paupière à l'aurore naissante,
Et je laissai flotter mon regard ébloui.
Tout à coup, au détour de l'étroite ruelle,
J'entends sur le gravier marcher à petit bruit...
Grand Dieu ! préservez-moi ! je l'aperçois, c'est elle ;
Elle entre. - D'où viens-tu ? Qu'as-tu fait cette nuit ?
Réponds, que me veux-tu ? qui t'amène à cette heure ?
Ce beau corps, jusqu'au jour, où s'est-il étendu ?
Tandis qu'à ce balcon, seul, je veille et je pleure,
En quel lieu, dans quel lit, à qui souriais-tu ?
Perfide ! audacieuse ! est-il encor possible
Que tu viennes offrir ta bouche à mes baisers ?
Que demandes-tu donc ? par quelle soif horrible
Oses-tu m'attirer dans tes bras épuisés ?
Va-t'en, retire-toi, spectre de ma maîtresse !
Rentre dans ton tombeau, si tu t'en es levé ;
Laisse-moi pour toujours oublier ma jeunesse,
Et, quand je pense à toi, croire que j'ai rêvé !

La muse

Apaise-toi, je t'en conjure ;
Tes paroles m'ont fait frémir.
Ô mon bien-aimé ! ta blessure
Est encor prête à se rouvrir.
Hélas ! elle est donc bien profonde ?
Et les misères de ce monde
Sont si lentes à s'effacer !
Oublie, enfant, et de ton âme
Chasse le nom de cette femme,
Que je ne veux pas prononcer.

Le poète

Honte à toi qui la première
M'as appris la trahison,
Et d'horreur et de colère
M'as fait perdre la raison !
Honte à toi, femme à l'oeil sombre,
Dont les funestes amours
Ont enseveli dans l'ombre
Mon printemps et mes beaux jours !
C'est ta voix, c'est ton sourire,
C'est ton regard corrupteur,
Qui m'ont appris à maudire
Jusqu'au semblant du bonheur ;
C'est ta jeunesse et tes charmes
Qui m'ont fait désespérer,
Et si je doute des larmes,
C'est que je t'ai vu pleurer.
Honte à toi, j'étais encore
Aussi simple qu'un enfant ;
Comme une fleur à l'aurore,
Mon coeur s'ouvrait en t'aimant.
Certes, ce coeur sans défense
Put sans peine être abusé ;
Mais lui laisser l'innocence
Était encor plus aisé.
Honte à toi ! tu fus la mère
De mes premières douleurs,
Et tu fis de ma paupière
Jaillir la source des pleurs !
Elle coule, sois-en sûre,
Et rien ne la tarira ;
Elle sort d'une blessure
Qui jamais ne guérira ;
Mais dans cette source amère
Du moins je me laverai,
Et j'y laisserai, j'espère,
Ton souvenir abhorré !

La muse

Poète, c'est assez. Auprès d'une infidèle,
Quand ton illusion n'aurait duré qu'un jour,
N'outrage pas ce jour lorsque tu parles d'elle ;
Si tu veux être aimé, respecte ton amour.
Si l'effort est trop grand pour la faiblesse humaine
De pardonner les maux qui nous viennent d'autrui,
Épargne-toi du moins le tourment de la haine ;
À défaut du pardon, laisse venir l'oubli.
Les morts dorment en paix dans le sein de la terre :
Ainsi doivent dormir nos sentiments éteints.
Ces reliques du coeur ont aussi leur poussière ;
Sur leurs restes sacrés ne portons pas les mains.
Pourquoi, dans ce récit d'une vive souffrance,
Ne veux-tu voir qu'un rêve et qu'un amour trompé ?
Est-ce donc sans motif qu'agit la Providence
Et crois-tu donc distrait le Dieu qui t'a frappé ?
Le coup dont tu te plains t'a préservé peut-être,
Enfant ; car c'est par là que ton coeur s'est ouvert.
L'homme est un apprenti, la douleur est son maître,
Et nul ne se connaît tant qu'il n'a pas souffert.
C'est une dure loi, mais une loi suprême,
Vieille comme le monde et la fatalité,
Qu'il nous faut du malheur recevoir le baptême,
Et qu'à ce triste prix tout doit être acheté.
Les moissons pour mûrir ont besoin de rosée ;
Pour vivre et pour sentir l'homme a besoin des pleurs ;
La joie a pour symbole une plante brisée,
Humide encor de pluie et couverte de fleurs.
Ne te disais-tu pas guéri de ta folie ?
N'es-tu pas jeune, heureux, partout le bienvenu ?
Et ces plaisirs légers qui font aimer la vie,
Si tu n'avais pleuré, quel cas en ferais-tu ?
Lorsqu'au déclin du jour, assis sur la bruyère,
Avec un vieil ami tu bois en liberté,
Dis-moi, d'aussi bon coeur lèverais-tu ton verre,
Si tu n'avais senti le prix de la gaîté ?
Aimerais-tu les fleurs, les prés et la verdure,
Les sonnets de Pétrarque et le chant des oiseaux,
Michel-Ange et les arts, Shakspeare et la nature,
Si tu n'y retrouvais quelques anciens sanglots ?
Comprendrais-tu des cieux l'ineffable harmonie,
Le silence des nuits, le murmure des flots,
Si quelque part là-bas la fièvre et l'insomnie
Ne t'avaient fait songer à l'éternel repos ?
N'as-tu pas maintenant une belle maîtresse ?
Et, lorsqu'en t'endormant tu lui serres la main,
Le lointain souvenir des maux de ta jeunesse
Ne rend-il pas plus doux son sourire divin ?
N'allez-vous pas aussi vous promener ensemble
Au fond des bois fleuris, sur le sable argentin ?
Et, dans ce vert palais, le blanc spectre du tremble
Ne sait-il plus, le soir, vous montrer le chemin ?
Ne vois-tu pas alors, aux rayons de la lune,
Plier comme autrefois un beau corps dans tes bras,
Et si dans le sentier tu trouvais la Fortune,
Derrière elle, en chantant, ne marcherais-tu pas ?
De quoi te plains-tu donc ? L'immortelle espérance
S'est retrempée en toi sous la main du malheur.
Pourquoi veux-tu haïr ta jeune expérience,
Et détester un mal qui t'a rendu meilleur ?
Ô mon enfant ! plains-la, cette belle infidèle,
Qui fit couler jadis les larmes de tes yeux ;
Plains-la ! c'est une femme, et Dieu t'a fait, près d'elle,
Deviner, en souffrant, le secret des heureux.
Sa tâche fut pénible ; elle t'aimait peut-être ;
Mais le destin voulait qu'elle brisât ton coeur.
Elle savait la vie, et te l'a fait connaître ;
Une autre a recueilli le fruit de ta douleur.
Plains-la ! son triste amour a passé comme un songe ;
Elle a vu ta blessure et n'a pu la fermer.
Dans ses larmes, crois-moi, tout n'était pas mensonge.
Quand tout l'aurait été, plains-la ! tu sais aimer.

Le poète

Tu dis vrai : la haine est impie,
Et c'est un frisson plein d'horreur
Quand cette vipère assoupie
Se déroule dans notre coeur.
Écoute-moi donc, ô déesse !
Et sois témoin de mon serment :
Par les yeux bleus de ma maîtresse,
Et par l'azur du firmament ;
Par cette étincelle brillante
Qui de Vénus porte le nom,
Et, comme une perle tremblante,
Scintille au **** sur l'horizon ;
Par la grandeur de la nature,
Par la bonté du Créateur,
Par la clarté tranquille et pure
De l'astre cher au voyageur.
Par les herbes de la prairie,
Par les forêts, par les prés verts,
Par la puissance de la vie,
Par la sève de l'univers,
Je te bannis de ma mémoire,
Reste d'un amour insensé,
Mystérieuse et sombre histoire
Qui dormiras dans le passé !
Et toi qui, jadis, d'une amie
Portas la forme et le doux nom,
L'instant suprême où je t'oublie
Doit être celui du pardon.
Pardonnons-nous ; - je romps le charme
Qui nous unissait devant Dieu.
Avec une dernière larme
Reçois un éternel adieu.
- Et maintenant, blonde rêveuse,
Maintenant, Muse, à nos amours !
Dis-moi quelque chanson joyeuse,
Comme au premier temps des beaux jours.
Déjà la pelouse embaumée
Sent les approches du matin ;
Viens éveiller ma bien-aimée,
Et cueillir les fleurs du jardin.
Viens voir la nature immortelle
Sortir des voiles du sommeil ;
Nous allons renaître avec elle
Au premier rayon du soleil !
Tu fus une grande amoureuse

À ta façon, la seule bonne

Puisqu'elle est tienne et que personne

Plus que toi ne fut malheureuse,

Après la crise de bonheur

Que tu portas avec honneur.


Oui, tu fus comme une héroïne,

Et maintenant tu vis, statue

Toujours belle sur la ruine

D'un espoir qui se perpétue

En dépit du Sort évident,

Mais tu persistes cependant !


Pour cela, je t'aime et t'admire

Encore mieux que je ne t'aime

Peut-être, et ce m'est un suprême

Orgueil d'être meilleur ou pire

Que celui qui fit tout le mal,

D'être à tes pieds tremblant, féal !


Use de moi, je suis ta chose ;

Mon amour va, ton humble esclave,

Prêt à tout ce que lui propose

Ta volonté dure et suave,

Prompt à jouir, prompt à souffrir,

Prompt vers tout, hormis pour mourir !


Mourir dans mon corps et mon âme,

Je le veux si c'est ton caprice.

Quand il faudra que je périsse

Tout entier, fais un signe, femme,

Mais que mon amour dût cesser ?

Il ne peut que s'éterniser.


Jette un regard de complaisance,

Ô femme forte, ô sainte, ô reine,

Sur ma fatale insuffisance

Sans doute à te faire sereine :

Toujours triste du temps fané,

Du moins, souris au vieux damné.
K May 2013
Dovahkiin,
Dovahkiin,
Greybeards have summoned thee
High Hrothgar, where they stay,
Their Thu'ums at play...

Fus Ro Dah,
Fus Ro Dah,
Your spirit is unleashed,
In a whirlwind
Untamed.

Dovahkiin,
Dovahkiin,
Learn the deadly Dragonrend..
Shout it in glee,
Bring Alduin to his knees...

Travel north,
Travel south,
Travel all through Tamriel
In search for a scroll...
Untold.

Dovahkiin,
Dovahkiin,
Call upon your dragon...
Clearing foggy skies
In Sovngarde, where we lie...

Bring him down,
Down to the ground
Relinquishing his power...
Here lies the slain
Alduin...

Dovahkiin
Dovahkiin,
In all of your glory
You brought him to his knees,
A dragon, obscene...

It will be told
Forevermore
This story of a dragonborn
Who slay Alduin...
Dovahkiin...
To the tune of song of storms from Legend of Zelda
Mes chers amis, quand je mourrai,
Plantez un saule au cimetière.
J'aime son feuillage éploré ;
La pâleur m'en est douce et chère,
Et son ombre sera légère
À la terre où je dormirai.

Un soir, nous étions seuls, j'étais assis près d'elle ;
Elle penchait la tête, et sur son clavecin
Laissait, tout en rêvant, flotter sa blanche main.
Ce n'était qu'un murmure : on eût dit les coups d'aile
D'un zéphyr éloigné glissant sur des roseaux,
Et craignant en passant d'éveiller les oiseaux.
Les tièdes voluptés des nuits mélancoliques
Sortaient autour de nous du calice des fleurs.
Les marronniers du parc et les chênes antiques
Se berçaient doucement sous leurs rameaux en pleurs.
Nous écoutions la nuit ; la croisée entr'ouverte
Laissait venir à nous les parfums du printemps ;
Les vents étaient muets, la plaine était déserte ;
Nous étions seuls, pensifs, et nous avions quinze ans.
Je regardais Lucie. Elle était pâle et blonde.
Jamais deux yeux plus doux n'ont du ciel le plus pur
Sondé la profondeur et réfléchi l'azur.
Sa beauté m'enivrait ; je n'aimais qu'elle au monde.
Mais je croyais l'aimer comme on aime une soeur,
Tant ce qui venait d'elle était plein de pudeur !
Nous nous tûmes longtemps ; ma main touchait la sienne.
Je regardais rêver son front triste et charmant,
Et je sentais dans l'âme, à chaque mouvement,
Combien peuvent sur nous, pour guérir toute peine,
Ces deux signes jumeaux de paix et de bonheur,
Jeunesse de visage et jeunesse de coeur.
La lune, se levant dans un ciel sans nuage,
D'un long réseau d'argent tout à coup l'inonda.
Elle vit dans mes yeux resplendir son image ;
Son sourire semblait d'un ange : elle chanta.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Fille de la douleur, harmonie ! harmonie !
Langue que pour l'amour inventa le génie !
Qui nous vins d'Italie, et qui lui vins des cieux !
Douce langue du coeur, la seule où la pensée,
Cette vierge craintive et d'une ombre offensée,
Passe en gardant son voile et sans craindre les yeux !
Qui sait ce qu'un enfant peut entendre et peut dire
Dans tes soupirs divins, nés de l'air qu'il respire,
Tristes comme son coeur et doux comme sa voix ?
On surprend un regard, une larme qui coule ;
Le reste est un mystère ignoré de la foule,
Comme celui des flots, de la nuit et des bois !

- Nous étions seuls, pensifs ; je regardais Lucie.
L'écho de sa romance en nous semblait frémir.
Elle appuya sur moi sa tête appesantie.
Sentais-tu dans ton coeur Desdemona gémir,
Pauvre enfant ? Tu pleurais ; sur ta bouche adorée
Tu laissas tristement mes lèvres se poser,
Et ce fut ta douleur qui reçut mon baiser.
Telle je t'embrassai, froide et décolorée,
Telle, deux mois après, tu fus mise au tombeau ;
Telle, ô ma chaste fleur ! tu t'es évanouie.
Ta mort fut un sourire aussi doux que ta vie,
Et tu fus rapportée à Dieu dans ton berceau.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Doux mystère du toit que l'innocence habite,
Chansons, rêves d'amour, rires, propos d'enfant,
Et toi, charme inconnu dont rien ne se défend,
Qui fis hésiter Faust au seuil de Marguerite,
Candeur des premiers jours, qu'êtes-vous devenus ?

Paix profonde à ton âme, enfant ! à ta mémoire !
Adieu ! ta blanche main sur le clavier d'ivoire,
Durant les nuits d'été, ne voltigera plus...

Mes chers amis, quand je mourrai,
Plantez un saule au cimetière.
J'aime son feuillage éploré ;
La pâleur m'en est douce et chère,
Et son ombre sera légère
À la terre où je dormirai.
Écoutez. Une femme au profil décharné,
Maigre, blême, portant un enfant étonné,
Est là qui se lamente au milieu de la rue.
La foule, pour l'entendre, autour d'elle se rue.
Elle accuse quelqu'un, une autre femme, ou bien
Son mari. Ses enfants ont faim. Elle n'a rien ;
Pas d'argent ; pas de pain ; à peine un lit de paille.
L'homme est au cabaret pendant qu'elle travaille.
Elle pleure, et s'en va. Quand ce spectre a passé,
Ô penseurs, au milieu de ce groupe amassé,
Qui vient de voir le fond d'un cœur qui se déchire,
Qu'entendez-vous toujours ? Un long éclat de rire.

Cette fille au doux front a cru peut-être, un jour,
Avoir droit au bonheur, à la joie, à l'amour.
Mais elle est seule, elle est sans parents, pauvre fille !
Seule ! - n'importe ! elle a du courage, une aiguille,
Elle travaille, et peut gagner dans son réduit,
En travaillant le jour, en travaillant la nuit,
Un peu de pain, un gîte, une jupe de toile.
Le soir, elle regarde en rêvant quelque étoile,
Et chante au bord du toit tant que dure l'été.
Mais l'hiver vient. Il fait bien froid, en vérité,
Dans ce logis mal clos tout en haut de la rampe ;
Les jours sont courts, il faut allumer une lampe ;
L'huile est chère, le bois est cher, le pain est cher.
Ô jeunesse ! printemps ! aube ! en proie à l'hiver !
La faim passe bientôt sa griffe sous la porte,
Décroche un vieux manteau, saisit la montre, emporte
Les meubles, prend enfin quelque humble bague d'or ;
Tout est vendu ! L'enfant travaille et lutte encor ;
Elle est honnête ; mais elle a, quand elle veille,
La misère, démon, qui lui parle à l'oreille.
L'ouvrage manque, hélas ! cela se voit souvent.
Que devenir ! Un jour, ô jour sombre ! elle vend
La pauvre croix d'honneur de son vieux père, et pleure ;
Elle tousse, elle a froid. Il faut donc qu'elle meure !
A dix-sept ans ! grand Dieu ! mais que faire ?... - Voilà
Ce qui fait qu'un matin la douce fille alla
Droit au gouffre, et qu'enfin, à présent, ce qui monte
À son front, ce n'est plus la pudeur, c'est la honte.
Hélas, et maintenant, deuil et pleurs éternels !
C'est fini. Les enfants, ces innocents cruels,
La suivent dans la rue avec des cris de joie.
Malheureuse ! elle traîne une robe de soie,
Elle chante, elle rit... ah ! pauvre âme aux abois !
Et le peuple sévère, avec sa grande voix,
Souffle qui courbe un homme et qui brise une femme,
Lui dit quand elle vient : « C'est toi ? Va-t-en, infâme ! »

Un homme s'est fait riche en vendant à faux poids ;
La loi le fait juré. L'hiver, dans les temps froids ;
Un pauvre a pris un pain pour nourrir sa famille.
Regardez cette salle où le peuple fourmille ;
Ce riche y vient juger ce pauvre. Écoutez bien.
C'est juste, puisque l'un a tout et l'autre rien.
Ce juge, - ce marchand, - fâché de perdre une heure,
Jette un regard distrait sur cet homme qui pleure,
L'envoie au bagne, et part pour sa maison des champs.
Tous s'en vont en disant : « C'est bien ! » bons et méchants ;
Et rien ne reste là qu'un Christ pensif et pâle,
Levant les bras au ciel dans le fond de la salle.

Un homme de génie apparaît. Il est doux,
Il est fort, il est grand ; il est utile à tous ;
Comme l'aube au-dessus de l'océan qui roule,
Il dore d'un rayon tous les fronts de la foule ;
Il luit ; le jour qu'il jette est un jour éclatant ;
Il apporte une idée au siècle qui l'attend ;
Il fait son œuvre ; il veut des choses nécessaires,
Agrandir les esprits, amoindrir les misères ;
Heureux, dans ses travaux dont les cieux sont témoins,
Si l'on pense un peu plus, si l'on souffre un peu moins !
Il vient. - Certe, on le va couronner ! - On le hue !
Scribes, savants, rhéteurs, les salons, la cohue,
Ceux qui n'ignorent rien, ceux qui doutent de tout,
Ceux qui flattent le roi, ceux qui flattent l'égout,
Tous hurlent à la fois et font un bruit sinistre.
Si c'est un orateur ou si c'est un ministre,
On le siffle. Si c'est un poète, il entend
Ce chœur : « Absurde ! faux ! monstrueux ! révoltant ! »
Lui, cependant, tandis qu'on bave sur sa palme,
Debout, les bras croisés, le front levé, l'œil calme,
Il contemple, serein, l'idéal et le beau ;
Il rêve ; et, par moments, il secoue un flambeau
Qui, sous ses pieds, dans l'ombre, éblouissant la haine,
Éclaire tout à coup le fond de l'âme humaine ;
Ou, ministre, il prodigue et ses nuits et ses jours ;
Orateur, il entasse efforts, travaux, discours ;
Il marche, il lutte ! Hélas ! l'injure ardente et triste,
À chaque pas qu'il fait, se transforme et persiste.
Nul abri. Ce serait un ennemi public,
Un monstre fabuleux, dragon ou basilic,
Qu'il serait moins traqué de toutes les manières,
Moins entouré de gens armés de grosses pierres,
Moins haï ! -- Pour eux tous et pour ceux qui viendront,
Il va semant la gloire, il recueille l'affront.
Le progrès est son but, le bien est sa boussole ;
Pilote, sur l'avant du navire il s'isole ;
Tout marin, pour dompter les vents et les courants,
Met tour à tour le cap sur des points différents,
Et, pour mieux arriver, dévie en apparence ;
Il fait de même ; aussi blâme et cris ; l'ignorance
Sait tout, dénonce tout ; il allait vers le nord,
Il avait tort ; il va vers le sud, il a tort ;
Si le temps devient noir, que de rage et de joie !
Cependant, sous le faix sa tête à la fin ploie,
L'âge vient, il couvait un mal profond et lent,
Il meurt. L'envie alors, ce démon vigilant,
Accourt, le reconnaît, lui ferme la paupière,
Prend soin de la clouer de ses mains dans la bière,
Se penche, écoute, épie en cette sombre nuit
S'il est vraiment bien mort, s'il ne fait pas de bruit,
S'il ne peut plus savoir de quel nom on le nomme,
Et, s'essuyant les yeux, dit : « C'était un grand homme ! »

Où vont tous ces enfants dont pas un seul ne rit ?
Ces doux êtres pensifs, que la fièvre maigrit ?
Ces filles de huit ans qu'on voit cheminer seules ?
Ils s'en vont travailler quinze heures sous des meules ;
Ils vont, de l'aube au soir, faire éternellement
Dans la même prison le même mouvement.
Accroupis sous les dents d'une machine sombre,
Monstre hideux qui mâche on ne sait quoi dans l'ombre,
Innocents dans un bagne, anges dans un enfer,
Ils travaillent. Tout est d'airain, tout est de fer.
Jamais on ne s'arrête et jamais on ne joue.
Aussi quelle pâleur ! la cendre est sur leur joue.
Il fait à peine jour, ils sont déjà bien las.
Ils ne comprennent rien à leur destin, hélas !
Ils semblent dire à Dieu : « Petits comme nous sommes,
« Notre père, voyez ce que nous font les hommes ! »
Ô servitude infâme imposée à l'enfant !
Rachitisme ! travail dont le souffle étouffant
Défait ce qu'a fait Dieu ; qui tue, œuvre insensée,
La beauté sur les fronts, dans les cœurs la pensée,
Et qui ferait - c'est là son fruit le plus certain -
D'Apollon un bossu, de Voltaire un crétin !
Travail mauvais qui prend l'âge tendre en sa serre,
Qui produit la richesse en créant la misère,
Qui se sert d'un enfant ainsi que d'un outil !
Progrès dont on demande : « Où va-t-il ? Que veut-il ? »
Qui brise la jeunesse en fleur ! qui donne, en somme,
Une âme à la machine et la retire à l'homme !
Que ce travail, haï des mères, soit maudit !
Maudit comme le vice où l'on s'abâtardit,
Maudit comme l'opprobre et comme le blasphème !
Ô Dieu ! qu'il soit maudit au nom du travail même,
Au nom du vrai travail, saint, fécond, généreux,
Qui fait le peuple libre et qui rend l'homme heureux !

Le pesant chariot porte une énorme pierre ;
Le limonier, suant du mors à la croupière,
Tire, et le roulier fouette, et le pavé glissant
Monte, et le cheval triste à le poitrail en sang.
Il tire, traîne, geint, tire encore et s'arrête ;
Le fouet noir tourbillonne au-dessus de sa tête ;
C'est lundi ; l'homme hier buvait aux Porcherons
Un vin plein de fureur, de cris et de jurons ;
Oh ! quelle est donc la loi formidable qui livre
L'être à l'être, et la bête effarée à l'homme ivre !
L'animal éperdu ne peut plus faire un pas ;
Il sent l'ombre sur lui peser ; il ne sait pas,
Sous le bloc qui l'écrase et le fouet qui l'assomme,
Ce que lui veut la pierre et ce que lui veut l'homme.
Et le roulier n'est plus qu'un orage de coups
Tombant sur ce forçat qui traîne des licous,
Qui souffre et ne connaît ni repos ni dimanche.
Si la corde se casse, il frappe avec le pié ;
Et le cheval, tremblant, hagard, estropié,
Baisse son cou lugubre et sa tête égarée ;
On entend, sous les coups de la botte ferrée,
Sonner le ventre nu du pauvre être muet !
Il râle ; tout à l'heure encore il remuait ;
Mais il ne bouge plus, et sa force est finie ;
Et les coups furieux pleuvent ; son agonie
Tente un dernier effort ; son pied fait un écart,
Il tombe, et le voilà brisé sous le brancard ;
Et, dans l'ombre, pendant que son bourreau redouble,
Il regarde quelqu'un de sa prunelle trouble ;
Et l'on voit lentement s'éteindre, humble et terni,
Son œil plein des stupeurs sombres de l'infini,
Où luit vaguement l'âme effrayante des choses.
Hélas !

Cet avocat plaide toutes les causes ;
Il rit des généreux qui désirent savoir
Si blanc n'a pas raison, avant de dire noir ;
Calme, en sa conscience il met ce qu'il rencontre,
Ou le sac d'argent Pour, ou le sac d'argent Contre ;
Le sac pèse pour lui ce que la cause vaut.
Embusqué, plume au poing, dans un journal dévot,
Comme un bandit tuerait, cet écrivain diffame.
La foule hait cet homme et proscrit cette femme ;
Ils sont maudits. Quel est leur crime ? Ils ont aimé.
L'opinion rampante accable l'opprimé,
Et, chatte aux pieds des forts, pour le faible est tigresse.
De l'inventeur mourant le parasite engraisse.
Le monde parle, assure, affirme, jure, ment,
Triche, et rit d'escroquer la dupe Dévouement.
Le puissant resplendit et du destin se joue ;
Derrière lui, tandis qu'il marche et fait la roue,
Sa fiente épanouie engendre son flatteur.
Les nains sont dédaigneux de toute leur hauteur.
Ô hideux coins de rue où le chiffonnier morne
Va, tenant à la main sa lanterne de corne,
Vos tas d'ordures sont moins noirs que les vivants !
Qui, des vents ou des cœurs, est le plus sûr ? Les vents.
Cet homme ne croit rien et fait semblant de croire ;
Il a l'œil clair, le front gracieux, l'âme noire ;
Il se courbe ; il sera votre maître demain.

Tu casses des cailloux, vieillard, sur le chemin ;
Ton feutre humble et troué s'ouvre à l'air qui le mouille ;
Sous la pluie et le temps ton crâne nu se rouille ;
Le chaud est ton tyran, le froid est ton bourreau ;
Ton vieux corps grelottant tremble sous ton sarrau ;
Ta cahute, au niveau du fossé de la route,
Offre son toit de mousse à la chèvre qui broute ;
Tu gagnes dans ton jour juste assez de pain noir
Pour manger le matin et pour jeûner le soir ;
Et, fantôme suspect devant qui l'on recule,
Regardé de travers quand vient le crépuscule,
Pauvre au point d'alarmer les allants et venants,
Frère sombre et pensif des arbres frissonnants,
Tu laisses choir tes ans ainsi qu'eux leur feuillage ;
Autrefois, homme alors dans la force de l'âge,
Quand tu vis que l'Europe implacable venait,
Et menaçait Paris et notre aube qui naît,
Et, mer d'hommes, roulait vers la France effarée,
Et le Russe et le *** sur la terre sacrée
Se ruer, et le nord revomir Attila,
Tu te levas, tu pris ta fourche ; en ces temps-là,
Tu fus, devant les rois qui tenaient la campagne,
Un des grands paysans de la grande Champagne.
C'est bien. Mais, vois, là-bas, le long du vert sillon,
Une calèche arrive, et, comme un tourbillon,
Dans la poudre du soir qu'à ton front tu secoues,
Mêle l'éclair du fouet au tonnerre des roues.
Un homme y dort. Vieillard, chapeau bas ! Ce passant
Fit sa fortune à l'heure où tu versais ton sang ;
Il jouait à la baisse, et montait à mesure
Que notre chute était plus profonde et plus sûre ;
Il fallait un vautour à nos morts ; il le fut ;
Il fit, travailleur âpre et toujours à l'affût,
Suer à nos malheurs des châteaux et des rentes ;
Moscou remplit ses prés de meules odorantes ;
Pour lui, Leipsick payait des chiens et des valets,
Et la Bérésina charriait un palais ;
Pour lui, pour que cet homme ait des fleurs, des charmilles,
Des parcs dans Paris même ouvrant leurs larges grilles,
Des jardins où l'on voit le cygne errer sur l'eau,
Un million joyeux sortit de Waterloo ;
Si bien que du désastre il a fait sa victoire,
Et que, pour la manger, et la tordre, et la boire,
Ce Shaylock, avec le sabre de Blucher,
A coupé sur la France une livre de chair.
Or, de vous deux, c'est toi qu'on hait, lui qu'on vénère ;
Vieillard, tu n'es qu'un gueux, et ce millionnaire,
C'est l'honnête homme. Allons, debout, et chapeau bas !

Les carrefours sont pleins de chocs et de combats.
Les multitudes vont et viennent dans les rues.
Foules ! sillons creusés par ces mornes charrues :
Nuit, douleur, deuil ! champ triste où souvent a germé
Un épi qui fait peur à ceux qui l'ont semé !
Vie et mort ! onde où l'hydre à l'infini s'enlace !
Peuple océan jetant l'écume populace !
Là sont tous les chaos et toutes les grandeurs ;
Là, fauve, avec ses maux, ses horreurs, ses laideurs,
Ses larves, désespoirs, haines, désirs, souffrances,
Qu'on distingue à travers de vagues transparences,
Ses rudes appétits, redoutables aimants,
Ses prostitutions, ses avilissements,
Et la fatalité des mœurs imperdables,
La misère épaissit ses couches formidables.
Les malheureux sont là, dans le malheur reclus.
L'indigence, flux noir, l'ignorance, reflux,
Montent, marée affreuse, et parmi les décombres,
Roulent l'obscur filet des pénalités sombres.
Le besoin fuit le mal qui le tente et le suit,
Et l'homme cherche l'homme à tâtons ; il fait nuit ;
Les petits enfants nus tendent leurs mains funèbres ;
Le crime, antre béant, s'ouvre dans ces ténèbres ;
Le vent secoue et pousse, en ses froids tourbillons,
Les âmes en lambeaux dans les corps en haillons :
Pas de cœur où ne croisse une aveugle chimère.
Qui grince des dents ? L'homme. Et qui pleure ? La mère.
Qui sanglote ? La vierge aux yeux hagards et doux.
Qui dit : « J'ai froid ? » L'aïeule. Et qui dit : « J'ai faim ? » Tous !
Et le fond est horreur, et la surface est joie.
Au-dessus de la faim, le festin qui flamboie,
Et sur le pâle amas des cris et des douleurs,
Les chansons et le rire et les chapeaux de fleurs !
Ceux-là sont les heureux. Ils n'ont qu'une pensée :
A quel néant jeter la journée insensée ?
Chiens, voitures, chevaux ! cendre au reflet vermeil !
Poussière dont les grains semblent d'or au soleil !
Leur vie est aux plaisirs sans fin, sans but, sans trêve,
Et se passe à tâcher d'oublier dans un rêve
L'enfer au-dessous d'eux et le ciel au-dessus.
Quand on voile Lazare, on efface Jésus.
Ils ne regardent pas dans les ombres moroses.
Ils n'admettent que l'air tout parfumé de roses,
La volupté, l'orgueil, l'ivresse et le laquais
Ce spectre galonné du pauvre, à leurs banquets.
Les fleurs couvrent les seins et débordent des vases.
Le bal, tout frissonnant de souffles et d'extases,
Rayonne, étourdissant ce qui s'évanouit ;
Éden étrange fait de lumière et de nuit.
Les lustres aux plafonds laissent pendre leurs flammes,
Et semblent la racine ardente et pleine d'âmes
De quelque arbre céleste épanoui plus haut.
Noir paradis dansant sur l'immense cachot !
Ils savourent, ravis, l'éblouissement sombre
Des beautés, des splendeurs, des quadrilles sans nombre,
Des couples, des amours, des yeux bleus, des yeux noirs.
Les valses, visions, passent dans les miroirs.
Parfois, comme aux forêts la fuite des cavales,
Les galops effrénés courent ; par intervalles,
Le bal reprend haleine ; on s'interrompt, on fuit,
On erre, deux à deux, sous les arbres sans bruit ;
Puis, folle, et rappelant les ombres éloignées,
La musique, jetant les notes à poignées,
Revient, et les regards s'allument, et l'archet,
Bondissant, ressaisit la foule qui marchait.
Ô délire ! et d'encens et de bruit enivrées,
L'heure emporte en riant les rapides soirées,
Et les nuits et les jours, feuilles mortes des cieux.
D'autres, toute la nuit, roulent les dés joyeux,
Ou bien, âpre, et mêlant les cartes qu'ils caressent,
Où des spectres riants ou sanglants apparaissent,
Leur soif de l'or, penchée autour d'un tapis vert,
Jusqu'à ce qu'au volet le jour bâille entr'ouvert,
Poursuit le pharaon, le lansquenet ou l'hombre ;
Et, pendant qu'on gémit et qu'on frémit dans l'ombre,
Pendant que le
Paul d'Aubin Oct 2013
Hommage élégiaque au poète indicible du Genêt, Giacomo Leopardi


Oh toi, Leopardi né à Recanati,
Tu portas sur la vie, le regard des «antiques»
Et même, les «lumières» semblaient pâles pour toi,
Du haut du belvédère de la pensée antique ;
Tu vivais en ton siècle comme un exilé,
Qui a connu l’âge d’or et se languit d’ennui.
Recanati, pour toi, était comme un caveau
Dont tu ne t’échappais qu’au travers de tes livres.
Ivre de grec et féru de latin,
Seule la bibliothèque était ta vraie amie.
Latiniste à huit ans, Helléniste à quatorze,
Si ton corps t’enfermait, ton esprit t’élevait ;
Bien haut, dans les hauteurs où dominent les aigles.
Très tôt dans la palette de tes talents immenses,
Tu sus choisir la muse comme cime des arts ;
Et devint son Mozart, ciselant de ses mots,
Que tu allais cueillir dans les champs de diamant,
Dans la Grecque éternelle qui irrigue l'Esprit,
Tu souffrais en silence ton époque mesquine.

Par ton hommage à Dante tu commenças d'écrire
Et souffrait tellement pour ta patrie meurtrie.
Ainsi tu ravivas la mémoire, des légions enfouies
Sous les neiges et les glaces de la Russie glaciale,
Là où, Napoléon, conduisit tes enfants
Où dans de vains combats ils moururent, si ****.
Admirant la nature tu en perçus la grandeur,
Mais en compris aussi les minéralités froides
Dont l'éternel retour se rit de nos soucis,
Alors que nous goûtons des lieux apprivoisées
Son chaos naît et renaît en "Bige Bang" convulsifs,
Et moins que des fourmis, elle se soucie de nous.
Gravissant les volcans tu pouvais contempler
Le peu de cas fait, de cités, jadis si glorieuses.
Tu pouvais mesurer l'immense solitude
Qui pétrifia Pascal et rend tout orgueil dérisoire,
Comme pure chimère dans les champs du Cosmos
Ou le temps ne suit pas, nos piètres horloges.
Et, pourtant gravissant les pentes du Vésuve
Du Genêt si chétif, tu saisis la grandeur ;
Celle même, des humains face à l'inexorable.
Mieux encore tu en appelas à la fraternité humaine,
Et face aux cataclysmes toujours renouvelés
Tu conseillas de ne pas y rajouter nos propres maux.
Toi que l'on désigna : "prince du pessimisme" ;
"Sombre amant de la Mort, pauvre Leopardi",
Tu fus plus bien plus que d'autres, un sceptique attentif,
Aux peines de tes frères, et à leurs vains combats,
Toi le savant chétif qui mourut à trente-neuf ans,
Tu goûtas la passion de cruelles qui repoussaient ta bosse.

Paul Arrighi ( Toulouse/France)
E-Mail : paul20.arrighi@numericable.fr
IAUSHYJ Jan 2014
This poem is translate from http://hellopoetry.com/poem/warrior-of-tamriel-warrior-of-realitys-breath/

Zu'u faas nid nuz koraav pah,
Dii dovah meyz fod Zu'u for.
Zu'u imaar verin voknau dii hadrim,
Ol nust swirl tuum tiid.

Zu'u kriist firm ahrk faar,
Waving dii zahkrii ko ven.
Dii lein los nunon kein,
Ol Zu'u krif wah juh.

Nid uth vis gesaag zey fos wah dreh,
Zu'u los Kinbokein do Keizaal.

Dii bodein los do krilaan praan,
ol dii noot everyday,
los raal wah gor.

Hi krif fah fos hi korah,
Hi dir voth dignity.
Zin yoz ko hin sostrah,
Ol hi unt wah krif stin.

Stinun prenlon fod Kendov kriist veyl,
Rok uv rek fent kos,
saviik wah lein.

Tuum Lein do Taazokaan,
Zu'u los Lokolteiren Rahzun,
Ahrk Punah.

Naangein vis kos kendov voknau strife,
Orin tuum daar kein,
Hi vis kos ges.

Aav reid,
Unad hin zen.

Hi fent kos krongrahkei,
Ahrk fen deserve Kendov Dinok.

Jur thy dragonkin nu.
Nust fen saraan hin arosend.
Voknau hin dovah,
Fent meyz thy untak.

Kest riin tuum lok do Taazokaan,
Ol Dovahkiin meyz,
Wah Lein do Keizaal.

Fus Ro Dah !
Tu fus souvent cruelle,

Même injuste parfois,

Mais que fait, ô ma belle,

Puisqu'en toi seule crois


Et puisque suis ta chose.


Que tu me trompes avec Pierre,

Louis, et cœtera punctum,

Je sais, mais, là ! n'en ai que faire :

Ne suis que l'humble factotum


De ton humeur gaie ou morose.


S'il arrive que tu me battes,

Soufflettes, égratignes, tu

Es le maître dans nos pénates,

Et moi le cocu, le battu,


Suis content et vois tout en rose.


Et puis dame j'opine

Qu'à me voir ainsi si

Tien, finiras, divine

Par m'aimoter ainsi


Qu'on s'attache à sa chose.
I


Mon Dieu m'a dit : Mon fils, il faut m'aimer. Tu vois

Mon flanc percé, mon cœur qui rayonne et qui saigne,

Et mes pieds offensés que Madeleine baigne

De larmes, et mes bras douloureux sous le poids


De tes péchés, et mes mains ! Et tu vois la croix,

Tu vois les clous, le fiel, l'éponge et tout t'enseigne

À n'aimer, en ce monde où la chair règne.

Que ma Chair et mon Sang, ma parole et ma voix.


Ne t'ai-je pas aimé jusqu'à la mort moi-même,

Mon frère en mon Père, ô mon fils en l'Esprit,

Et n'ai-je pas souffert, comme c'était écrit ?


N'ai-je pas sangloté ton angoisse suprême

Et n'ai-je pas sué la sueur de tes nuits,

Lamentable ami qui me cherches où je suis ? »


II


J'ai répondu : Seigneur, vous avez dit mon âme.

C'est vrai que je vous cherche et ne vous trouve pas.

Mais vous aimer ! Voyez comme je suis en bas,

Vous dont l'amour toujours monte comme la flamme.


Vous, la source de paix que toute soif réclame,

Hélas ! Voyez un peu mes tristes combats !

Oserai-je adorer la trace de vos pas,

Sur ces genoux saignants d'un rampement infâme ?


Et pourtant je vous cherche en longs tâtonnements,

Je voudrais que votre ombre au moins vêtît ma houle,

Mais vous n'avez pas d'ombre, ô vous dont l'amour monte,


Ô vous, fontaine calme, amère aux seuls amants

De leur damnation, ô vous toute lumière

Sauf aux yeux dont un lourd baiser tient la paupière !


III


- Il faut m'aimer ! Je suis l'universel Baiser,

Je suis cette paupière et je suis cette lèvre

Dont tu parles, ô cher malade, et cette fièvre

Qui t'agite, c'est moi toujours ! il faut oser


M'aimer ! Oui, mon amour monte sans biaiser

Jusqu'où ne grimpe pas ton pauvre amour de chèvre,

Et t'emportera, comme un aigle vole un lièvre,

Vers des serpolets qu'un ciel cher vient arroser.


Ô ma nuit claire ! Ô tes yeux dans mon clair de lune !

Ô ce lit de lumière et d'eau parmi la brune !

Toute celle innocence et tout ce reposoir !


Aime-moi ! Ces deux mots sont mes verbes suprêmes,

Car étant ton Dieu tout-puissant, Je peux vouloir,

Mais je ne veux d'abord que pouvoir que tu m'aimes.


IV


- Seigneur, c'est trop ? Vraiment je n'ose. Aimer qui ? Vous ?

Oh ! non ! Je tremble et n'ose. Oh ! vous aimer je n'ose,

Je ne veux pas ! Je suis indigne. Vous, la Rose

Immense des purs vents de l'Amour, ô Vous, tous


Les cœurs des saints, ô vous qui fûtes le Jaloux

D'Israël, Vous, la chaste abeille qui se pose

Sur la seule fleur d'une innocence mi-close.

Quoi, moi, moi, pouvoir Vous aimer. Êtes-vous fous


Père, Fils, Esprit ? Moi, ce pécheur-ci, ce lâche,

Ce superbe, qui fait le mal comme sa tâche

Et n'a dans tous ses sens, odorat, toucher, goût.


Vue, ouïe, et dans tout son être - hélas ! dans tout

Son espoir et dans tout son remords que l'extase

D'une caresse où le seul vieil Adam s'embrase ?


V


- Il faut m'aimer. Je suis ces Fous que tu nommais,

Je suis l'Adam nouveau qui mange le vieil homme,

Ta Rome, ton Paris, ta Sparte et ta Sodome,

Comme un pauvre rué parmi d'horribles mets.


Mon amour est le feu qui dévore à jamais

Toute chair insensée, et l'évaporé comme

Un parfum, - et c'est le déluge qui consomme

En son Ilot tout mauvais germe que je semais.


Afin qu'un jour la Croix où je meurs fût dressée

Et que par un miracle effrayant de bonté

Je t'eusse un jour à moi, frémissant et dompté.


Aime. Sors de ta nuit. Aime. C'est ma pensée

De toute éternité, pauvre âme délaissée,

Que tu dusses m'aimer, moi seul qui suis resté !


VI


- Seigneur, j'ai peur. Mon âme en moi tressaille toute.

Je vois, je sens qu'il faut vous aimer. Mais comment

Moi, ceci, me ferais-je, ô mon Dieu, votre amant,

Ô Justice que la vertu des bons redoute ?


Oui, comment ? Car voici que s'ébranle la voûte

Où mon cœur creusait son ensevelissement

Et que je sens fluer à moi le firmament,

Et je vous dis : de vous à moi quelle est la route ?


Tendez-moi votre main, que je puisse lever

Cette chair accroupie et cet esprit malade.

Mais recevoir jamais la céleste accolade.


Est-ce possible ? Un jour, pouvoir la retrouver

Dans votre sein, sur votre cœur qui fut le nôtre,

La place où reposa la tête de l'apôtre ?


VII


- Certes, si tu le veux mériter, mon fils, oui,

Et voici. Laisse aller l'ignorance indécise

De ton cœur vers les bras ouverts de mon Église,

Comme la guêpe vole au lis épanoui.


Approche-toi de mon oreille. Épanches-y

L'humiliation d'une brave franchise.

Dis-moi tout sans un mot d'orgueil ou de reprise

Et m'offre le bouquet d'un repentir choisi.


Puis franchement et simplement viens à ma table.

Et je t'y bénirai d'un repas délectable

Auquel l'ange n'aura lui-même qu'assisté,


Et tu boiras le Vin de la vigne immuable,

Dont la force, dont la douceur, dont la bonté

Feront germer ton sang à l'immortalité.


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Puis, va ! Garde une foi modeste en ce mystère

D'amour par quoi je suis ta chair et ta raison,

Et surtout reviens très souvent dans ma maison,

Pour y participer au Vin qui désaltère.


Au Pain sans qui la vie est une trahison,

Pour y prier mon Père et supplier ma Mère

Qu'il te soit accordé, dans l'exil de la terre,

D'être l'agneau sans cris qui donne sa toison.


D'être l'enfant vêtu de lin et d'innocence,

D'oublier ton pauvre amour-propre et ton essence,

Enfin, de devenir un peu semblable à moi


Qui fus, durant les jours d'Hérode et de Pilate

Et de Judas et de Pierre, pareil à toi

Pour souffrir et mourir d'une mort scélérate !


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Et pour récompenser ton zèle en ces devoirs

Si doux qu'ils sont encore d'ineffables délices,

Je te ferai goûter sur terre mes prémices,

La paix du cœur, l'amour d'être pauvre, et mes soirs -


Mystiques, quand l'esprit s'ouvre aux calmes espoirs

Et croit boire, suivant ma promesse, au Calice

Éternel, et qu'au ciel pieux la lune glisse,

Et que sonnent les angélus roses et noirs,


En attendant l'assomption dans ma lumière,

L'éveil sans fin dans ma charité coutumière,

La musique de mes louanges à jamais,


Et l'extase perpétuelle et la science.

Et d'être en moi parmi l'aimable irradiance

De tes souffrances, enfin miennes, que j'aimais !


VIII


- Ah ! Seigneur, qu'ai-je ? Hélas ! me voici tout en larmes

D'une joie extraordinaire : votre voix

Me fait comme du bien et du mal à la fois,

Et le mal et le bien, tout a les mêmes charmes.


Je ris, je pleure, et c'est comme un appel aux armes

D'un clairon pour des champs de bataille où je vois

Des anges bleus et blancs portés sur des pavois,

Et ce clairon m'enlève en de fières alarmes.


J'ai l'extase et j'ai la terreur d'être choisi.

Je suis indigne, mais je sais votre clémence.

Ah ! quel effort, mais quelle ardeur ! Et me voici


Plein d'une humble prière, encore qu'un trouble immense

Brouille l'espoir que votre voix me révéla,

Et j'aspire en tremblant.


IX


- Pauvre âme, c'est cela !
I

Mets-toi sur ton séant, lève tes yeux, dérange
Ce drap glacé qui fait des plis sur ton front d'ange,
Ouvre tes mains, et prends ce livre : il est à toi.

Ce livre où vit mon âme, espoir, deuil, rêve, effroi,
Ce livre qui contient le spectre de ma vie,
Mes angoisses, mon aube, hélas ! de pleurs suivie,
L'ombre et son ouragan, la rose et son pistil,
Ce livre azuré, triste, orageux, d'où sort-il ?
D'où sort le blême éclair qui déchire la brume ?
Depuis quatre ans, j'habite un tourbillon d'écume ;
Ce livre en a jailli. Dieu dictait, j'écrivais ;
Car je suis paille au vent. Va ! dit l'esprit. Je vais.
Et, quand j'eus terminé ces pages, quand ce livre
Se mit à palpiter, à respirer, à vivre,
Une église des champs, que le lierre verdit,
Dont la tour sonne l'heure à mon néant, m'a dit :
Ton cantique est fini ; donne-le-moi, poëte.
- Je le réclame, a dit la forêt inquiète ;
Et le doux pré fleuri m'a dit : - Donne-le-moi.
La mer, en le voyant frémir, m'a dit : - Pourquoi
Ne pas me le jeter, puisque c'est une voile !
- C'est à moi qu'appartient cet hymne, a dit l'étoile.
- Donne-le-nous, songeur, ont crié les grands vents.
Et les oiseaux m'ont dit : - Vas-tu pas aux vivants
Offrir ce livre, éclos si **** de leurs querelles ?
Laisse-nous l'emporter dans nos nids sur nos ailes ! -
Mais le vent n'aura point mon livre, ô cieux profonds !
Ni la sauvage mer, livrée aux noirs typhons,
Ouvrant et refermant ses flots, âpres embûches ;
Ni la verte forêt qu'emplit un bruit de ruches ;
Ni l'église où le temps fait tourner son compas ;
Le pré ne l'aura pas, l'astre ne l'aura pas,
L'oiseau ne l'aura pas, qu'il soit aigle ou colombe,
Les nids ne l'auront pas ; je le donne à la tombe.

II

Autrefois, quand septembre en larmes revenait,
Je partais, je quittais tout ce qui me connaît,
Je m'évadais ; Paris s'effaçait ; rien, personne !
J'allais, je n'étais plus qu'une ombre qui frissonne,
Je fuyais, seul, sans voir, sans penser, sans parler,
Sachant bien que j'irais où je devais aller ;
Hélas ! je n'aurais pu même dire : Je souffre !
Et, comme subissant l'attraction d'un gouffre,
Que le chemin fût beau, pluvieux, froid, mauvais,
J'ignorais, je marchais devant moi, j'arrivais.
Ô souvenirs ! ô forme horrible des collines !
Et, pendant que la mère et la soeur, orphelines,
Pleuraient dans la maison, je cherchais le lieu noir
Avec l'avidité morne du désespoir ;
Puis j'allais au champ triste à côté de l'église ;
Tête nue, à pas lents, les cheveux dans la bise,
L'oeil aux cieux, j'approchais ; l'accablement soutient ;
Les arbres murmuraient : C'est le père qui vient !
Les ronces écartaient leurs branches desséchées ;
Je marchais à travers les humbles croix penchées,
Disant je ne sais quels doux et funèbres mots ;
Et je m'agenouillais au milieu des rameaux
Sur la pierre qu'on voit blanche dans la verdure.
Pourquoi donc dormais-tu d'une façon si dure
Que tu n'entendais pas lorsque je t'appelais ?

Et les pêcheurs passaient en traînant leurs filets,
Et disaient : Qu'est-ce donc que cet homme qui songe ?
Et le jour, et le soir, et l'ombre qui s'allonge,
Et Vénus, qui pour moi jadis étincela,
Tout avait disparu que j'étais encor là.
J'étais là, suppliant celui qui nous exauce ;
J'adorais, je laissais tomber sur cette fosse,
Hélas ! où j'avais vu s'évanouir mes cieux,
Tout mon coeur goutte à goutte en pleurs silencieux ;
J'effeuillais de la sauge et de la clématite ;
Je me la rappelais quand elle était petite,
Quand elle m'apportait des lys et des jasmins,
Ou quand elle prenait ma plume dans ses mains,
Gaie, et riant d'avoir de l'encre à ses doigts roses ;
Je respirais les fleurs sur cette cendre écloses,
Je fixais mon regard sur ces froids gazons verts,
Et par moments, ô Dieu, je voyais, à travers
La pierre du tombeau, comme une lueur d'âme !

Oui, jadis, quand cette heure en deuil qui me réclame
Tintait dans le ciel triste et dans mon coeur saignant,
Rien ne me retenait, et j'allais ; maintenant,
Hélas !... - Ô fleuve ! ô bois ! vallons dont je fus l'hôte,
Elle sait, n'est-ce pas ? que ce n'est pas ma faute
Si, depuis ces quatre ans, pauvre coeur sans flambeau,
Je ne suis pas allé prier sur son tombeau !

III

Ainsi, ce noir chemin que je faisais, ce marbre
Que je contemplais, pâle, adossé contre un arbre,
Ce tombeau sur lequel mes pieds pouvaient marcher,
La nuit, que je voyais lentement approcher,
Ces ifs, ce crépuscule avec ce cimetière,
Ces sanglots, qui du moins tombaient sur cette pierre,
Ô mon Dieu, tout cela, c'était donc du bonheur !

Dis, qu'as-tu fait pendant tout ce temps-là ? - Seigneur,
Qu'a-t-elle fait ? - Vois-tu la vie en vos demeures ?
A quelle horloge d'ombre as-tu compté les heures ?
As-tu sans bruit parfois poussé l'autre endormi ?
Et t'es-tu, m'attendant, réveillée à demi ?
T'es-tu, pâle, accoudée à l'obscure fenêtre
De l'infini, cherchant dans l'ombre à reconnaître
Un passant, à travers le noir cercueil mal joint,
Attentive, écoutant si tu n'entendais point
Quelqu'un marcher vers toi dans l'éternité sombre ?
Et t'es-tu recouchée ainsi qu'un mât qui sombre,
En disant : Qu'est-ce donc ? mon père ne vient pas !
Avez-vous tous les deux parlé de moi tout bas ?

Que de fois j'ai choisi, tout mouillés de rosée,
Des lys dans mon jardin, des lys dans ma pensée !
Que de fois j'ai cueilli de l'aubépine en fleur !
Que de fois j'ai, là-bas, cherché la tour d'Harfleur,
Murmurant : C'est demain que je pars ! et, stupide,
Je calculais le vent et la voile rapide,
Puis ma main s'ouvrait triste, et je disais : Tout fuit !
Et le bouquet tombait, sinistre, dans la nuit !
Oh ! que de fois, sentant qu'elle devait m'attendre,
J'ai pris ce que j'avais dans le coeur de plus tendre
Pour en charger quelqu'un qui passerait par là !

Lazare ouvrit les yeux quand Jésus l'appela ;
Quand je lui parle, hélas ! pourquoi les ferme-t-elle ?
Où serait donc le mal quand de l'ombre mortelle
L'amour violerait deux fois le noir secret,
Et quand, ce qu'un dieu fit, un père le ferait ?

IV

Que ce livre, du moins, obscur message, arrive,
Murmure, à ce silence, et, flot, à cette rive !
Qu'il y tombe, sanglot, soupir, larme d'amour !
Qu'il entre en ce sépulcre où sont entrés un jour
Le baiser, la jeunesse, et l'aube, et la rosée,
Et le rire adoré de la fraîche épousée,
Et la joie, et mon coeur, qui n'est pas ressorti !
Qu'il soit le cri d'espoir qui n'a jamais menti,
Le chant du deuil, la voix du pâle adieu qui pleure,
Le rêve dont on sent l'aile qui nous effleure !
Qu'elle dise : Quelqu'un est là ; j'entends du bruit !
Qu'il soit comme le pas de mon âme en sa nuit !

Ce livre, légion tournoyante et sans nombre
D'oiseaux blancs dans l'aurore et d'oiseaux noirs dans l'ombre,
Ce vol de souvenirs fuyant à l'horizon,
Cet essaim que je lâche au seuil de ma prison,
Je vous le confie, air, souffles, nuée, espace !
Que ce fauve océan qui me parle à voix basse,
Lui soit clément, l'épargne et le laisse passer !
Et que le vent ait soin de n'en rien disperser,
Et jusqu'au froid caveau fidèlement apporte
Ce don mystérieux de l'absent à la morte !

Ô Dieu ! puisqu'en effet, dans ces sombres feuillets,
Dans ces strophes qu'au fond de vos cieux je cueillais,
Dans ces chants murmurés comme un épithalame
Pendant que vous tourniez les pages de mon âme,
Puisque j'ai, dans ce livre, enregistré mes jours,
Mes maux, mes deuils, mes cris dans les problèmes sourds,
Mes amours, mes travaux, ma vie heure par heure ;
Puisque vous ne voulez pas encor que je meure,
Et qu'il faut bien pourtant que j'aille lui parler ;
Puisque je sens le vent de l'infini souffler
Sur ce livre qu'emplit l'orage et le mystère ;
Puisque j'ai versé là toutes vos ombres, terre,
Humanité, douleur, dont je suis le passant ;
Puisque de mon esprit, de mon coeur, de mon sang,
J'ai fait l'âcre parfum de ces versets funèbres,
Va-t'en, livre, à l'azur, à travers les ténèbres !
Fuis vers la brume où tout à pas lents est conduit !
Oui, qu'il vole à la fosse, à la tombe, à la nuit,
Comme une feuille d'arbre ou comme une âme d'homme !
Qu'il roule au gouffre où va tout ce que la voix nomme !
Qu'il tombe au plus profond du sépulcre hagard,
A côté d'elle, ô mort ! et que là, le regard,
Près de l'ange qui dort, lumineux et sublime,
Le voie épanoui, sombre fleur de l'abîme !

V

Ô doux commencements d'azur qui me trompiez,
Ô bonheurs ! je vous ai durement expiés !
J'ai le droit aujourd'hui d'être, quand la nuit tombe,
Un de ceux qui se font écouter de la tombe,
Et qui font, en parlant aux morts blêmes et seuls,
Remuer lentement les plis noirs des linceuls,
Et dont la parole, âpre ou tendre, émeut les pierres,
Les grains dans les sillons, les ombres dans les bières,
La vague et la nuée, et devient une voix
De la nature, ainsi que la rumeur des bois.
Car voilà, n'est-ce pas, tombeaux ? bien des années,
Que je marche au milieu des croix infortunées,
Échevelé parmi les ifs et les cyprès,
L'âme au bord de la nuit, et m'approchant tout près,
Et que je vais, courbé sur le cercueil austère,
Questionnant le plomb, les clous, le ver de terre
Qui pour moi sort des yeux de la tête de mort,
Le squelette qui rit, le squelette qui mord,
Les mains aux doigts noueux, les crânes, les poussières,
Et les os des genoux qui savent des prières !

Hélas ! j'ai fouillé tout. J'ai voulu voir le fond.
Pourquoi le mal en nous avec le bien se fond,
J'ai voulu le savoir. J'ai dit : Que faut-il croire ?
J'ai creusé la lumière, et l'aurore, et la gloire,
L'enfant joyeux, la vierge et sa chaste frayeur,
Et l'amour, et la vie, et l'âme, - fossoyeur.

Qu'ai-je appris ? J'ai, pensif , tout saisi sans rien prendre ;
J'ai vu beaucoup de nuit et fait beaucoup de cendre.
Qui sommes-nous ? que veut dire ce mot : Toujours ?
J'ai tout enseveli, songes, espoirs, amours,
Dans la fosse que j'ai creusée en ma poitrine.
Qui donc a la science ? où donc est la doctrine ?
Oh ! que ne suis-je encor le rêveur d'autrefois,
Qui s'égarait dans l'herbe, et les prés, et les bois,
Qui marchait souriant, le soir, quand le ciel brille,
Tenant la main petite et blanche de sa fille,
Et qui, joyeux, laissant luire le firmament,
Laissant l'enfant parler, se sentait lentement
Emplir de cet azur et de cette innocence !

Entre Dieu qui flamboie et l'ange qui l'encense,
J'ai vécu, j'ai lutté, sans crainte, sans remord.
Puis ma porte soudain s'ouvrit devant la mort,
Cette visite brusque et terrible de l'ombre.
Tu passes en laissant le vide et le décombre,
Ô spectre ! tu saisis mon ange et tu frappas.
Un tombeau fut dès lors le but de tous mes pas.

VI

Je ne puis plus reprendre aujourd'hui dans la plaine
Mon sentier d'autrefois qui descend vers la Seine ;
Je ne puis plus aller où j'allais ; je ne puis,
Pareil à la laveuse assise au bord du puits,
Que m'accouder au mur de l'éternel abîme ;
Paris m'est éclipsé par l'énorme Solime ;
La hauteNotre-Dame à présent, qui me luit,
C'est l'ombre ayant deux tours, le silence et la nuit,
Et laissant des clartés trouer ses fatals voiles ;
Et je vois sur mon front un panthéon d'étoiles ;
Si j'appelle Rouen, Villequier, Caudebec,
Toute l'ombre me crie : Horeb, Cédron, Balbeck !
Et, si je pars, m'arrête à la première lieue,
Et me dit: Tourne-toi vers l'immensité bleue !
Et me dit : Les chemins où tu marchais sont clos.
Penche-toi sur les nuits, sur les vents, sur les flots !
A quoi penses-tu donc ? que fais-tu, solitaire ?
Crois-tu donc sous tes pieds avoir encor la terre ?
Où vas-tu de la sorte et machinalement ?
Ô songeur ! penche-toi sur l'être et l'élément !
Écoute la rumeur des âmes dans les ondes !
Contemple, s'il te faut de la cendre, les mondes ;
Cherche au moins la poussière immense, si tu veux
Mêler de la poussière à tes sombres cheveux,
Et regarde, en dehors de ton propre martyre,
Le grand néant, si c'est le néant qui t'attire !
Sois tout à ces soleils où tu remonteras !
Laisse là ton vil coin de terre. Tends les bras,
Ô proscrit de l'azur, vers les astres patries !
Revois-y refleurir tes aurores flétries ;
Deviens le grand oeil fixe ouvert sur le grand tout.
Penche-toi sur l'énigme où l'être se dissout,
Sur tout ce qui naît, vit, marche, s'éteint, succombe,
Sur tout le genre humain et sur toute la tombe !

Mais mon coeur toujours saigne et du même côté.
C'est en vain que les cieux, les nuits, l'éternité,
Veulent distraire une âme et calmer un atome.
Tout l'éblouissement des lumières du dôme
M'ôte-t-il une larme ? Ah ! l'étendue a beau
Me parler, me montrer l'universel tombeau,
Les soirs sereins, les bois rêveurs, la lune amie ;
J'écoute, et je reviens à la douce endormie.

VII

Des fleurs ! oh ! si j'avais des fleurs ! si je pouvais
Aller semer des lys sur ces deux froids chevets !
Si je pouvais couvrir de fleurs mon ange pâle !
Les fleurs sont l'or, l'azur, l'émeraude, l'opale !
Le cercueil au milieu des fleurs veut se coucher ;
Les fleurs aiment la mort, et Dieu les fait toucher
Par leur racine aux os, par leur parfum aux âmes !
Puisque je ne le puis, aux lieux que nous aimâmes,
Puisque Dieu ne veut pas nous laisser revenir,
Puisqu'il nous fait lâcher ce qu'on croyait tenir,
Puisque le froid destin, dans ma geôle profonde,
Sur la première porte en scelle une seconde,
Et, sur le père triste et sur l'enfant qui dort,
Ferme l'exil après avoir fermé la mort,
Puisqu'il est impossible à présent que je jette
Même un brin de bruyère à sa fosse muette,
C'est bien le moins qu'elle ait mon âme, n'est-ce pas ?
Ô vent noir dont j'entends sur mon plafond le pas !
Tempête, hiver, qui bats ma vitre de ta grêle !
Mers, nuits ! et je l'ai mise en ce livre pour elle !

Prends ce livre ; et dis-toi : Ceci vient du vivant
Que nous avons laissé derrière nous, rêvant.
Prends. Et, quoique de ****, reconnais ma voix, âme !
Oh ! ta cendre est le lit de mon reste de flamme ;
Ta tombe est mon espoir, ma charité, ma foi ;
Ton linceul toujours flotte entre la vie et moi.
Prends ce livre, et fais-en sortir un divin psaume !
Qu'entre tes vagues mains il devienne fantôme !
Qu'il blanchisse, pareil à l'aube qui pâlit,
A mesure que l'oeil de mon ange le lit,
Et qu'il s'évanouisse, et flotte, et disparaisse,
Ainsi qu'un âtre obscur qu'un souffle errant caresse,
Ainsi qu'une lueur qu'on voit passer le soir,
Ainsi qu'un tourbillon de feu de l'encensoir,
Et que, sous ton regard éblouissant et sombre,
Chaque page s'en aille en étoiles dans l'ombre !

VIII

Oh ! quoi que nous fassions et quoi que nous disions,
Soit que notre âme plane au vent des visions,
Soit qu'elle se cramponne à l'argile natale,
Toujours nous arrivons à ta grotte fatale,
Gethsémani ! qu'éclaire une vague lueur !
Ô rocher de l'étrange et funèbre sueur !
Cave où l'esprit combat le destin ! ouverture
Sur les profonds effrois de la sombre nature !
Antre d'où le lion sort rêveur, en voyant
Quelqu'un de plus sinistre et de plus effrayant,
La douleur, entrer, pâle, amère, échevelée !
Ô chute ! asile ! ô seuil de la trouble vallée
D'où nous apercevons nos ans fuyants et courts,
Nos propres pas marqués dans la fange des jours,
L'échelle où le mal pèse et monte, spectre louche,
L'âpre frémissement de la palme farouche,
Les degrés noirs tirant en bas les blancs degrés,
Et les frissons aux fronts des anges effarés !

Toujours nous arrivons à cette solitude,
Et, là, nous nous taisons, sentant la plénitude !

Paix à l'ombre ! Dormez ! dormez ! dormez ! dormez !
Êtres, groupes confus lentement transformés !
Dormez, les champs ! dormez, les fleurs ! dormez, les tombes !
Toits, murs, seuils des maisons, pierres des catacombes,
Feuilles au fond des bois, plumes au fond des nids,
Dormez ! dormez, brins d'herbe, et dormez, infinis !
Calmez-vous, forêt, chêne, érable, frêne, yeuse !
Silence sur la grande horreur religieuse,
Sur l'océan qui lutte et qui ronge son mors,
Et sur l'apaisement insondable des morts !
Paix à l'obscurité muette et redoutée,
Paix au doute effrayant, à l'immense ombre athée,
A toi, nature, cercle et centre, âme et milieu,
Fourmillement de tout, solitude de Dieu !
Ô générations aux brumeuses haleines,
Reposez-vous ! pas noirs qui marchez dans les plaines !
Dormez, vous qui saignez ; dormez, vous qui pleurez !
Douleurs, douleurs, douleurs, fermez vos yeux sacrés !
Tout est religio
Adieu, belle Cassandre, et vous, belle Marie,
Pour qui je fus trois ans en servage à Bourgueil,
L'une vit, l'autre est morte, et ores, de son œil
Le Ciel se réjouit, dont la terre est marrie.

Sur mon premier Avril, d'une amoureuse envie
J'adorais vos beautés, mais votre fier orgueil
Ne s'amollit jamais pour larmes ni pour deuil,
Tant d'une gauche main la Parque ourdit ma vie.

Maintenant en Automne, encore malheureux,
Je vis comme au Printemps, de nature amoureux,
Afin que tout mon âge aille au gré de la peine.

Et or que je deusse être affranchi du harnois,
Mon Colonel m'envoie, à grand coups de carquois,
Rassiéger Ilion pour conquérir Hélène.
Belgrade et Semlin sont en guerre.
Dans son lit, paisible naguère,
Le vieillard Danube leur père
S'éveille au bruit de leur canon.
Il doute s'il rêve, il trésaille,
Puis entend gronder la bataille,
Et frappe dans ses mains d'écaille,
Et les appelle par leur nom.

« Allons, la turque et la chrétienne !
Semlin ! Belgrade ! qu'avez-vous ?
On ne peut, le ciel me soutienne !
Dormir un siècle, sans que vienne
Vous éveiller d'un bruit jaloux
Belgrade ou Semlin en courroux !

« Hiver, été, printemps, automne,
Toujours votre canon qui tonne !
Bercé du courant monotone,
Je sommeillais dans mes roseaux ;
Et, comme des louves marines
Jettent l'onde de leurs narines,
Voilà vos longues couleuvrines
Qui soufflent du feu sur mes eaux !

« Ce sont des sorcières oisives
Qui vous mirent, pour rire un jour,
Face à face sur mes deux rives,
Comme au même plat deux convives,
Comme au front de la même tour
Une aire d'aigle, un nid d'autour.

« Quoi ! ne pouvez-vous vivre ensemble,
Mes filles ? Faut-il que je tremble
Du destin qui ne vous rassemble
Que pour vous haïr de plus près,
Quand vous pourriez, sœurs pacifiques,
Mirer dans mes eaux magnifiques,
Semlin, tes noirs clochers gothiques,
Belgrade, tes blancs minarets ?

« Mon flot, qui dans l'océan tombe,
Vous sépare en vain, large et clair ;
Du haut du château qui surplombe
Vous vous unissez, et la bombe,
Entre vous courbant son éclair,
Vous trace un pont de feu dans l'air.

« Trêve ! taisez-vous, les deux villes !
Je m'ennuie aux guerres civiles.
Nous sommes vieux, soyons tranquilles.
Dormons à l'ombre des bouleaux.
Trêve à ces débats de familles !
Hé ! sans le bruit de vos bastilles,
N'ai-je donc point assez, mes filles,
De l'assourdissement des flots ?

« Une croix, un croissant fragile,
Changent en enfer ce beau lieu.
Vous échangez la bombe agile
Pour le Coran et l'évangile ?
C'est perdre le bruit et le feu :
Je le sais, moi qui fus un dieu !

« Vos dieux m'ont chassé de leur sphère
Et dégradé, c'est leur affaire :
L'ombre est le bien que je préfère,
Pourvu qu'ils gardent leurs palais,
Et ne viennent pas sur mes plages
Déraciner mes verts feuillages,
Et m'écraser mes coquillages
Sous leurs bombes et leurs boulets !

« De leurs abominables cultes
Ces interventions sont le fruit.
De mon temps point de ces tumultes.
Si la pierre des catapultes
Battait les cités jour et nuit,
C'était sans fumée et sans bruit.

« Voyez Ulm, votre sœur jumelle :
Tenez-vous en repos comme elle.
Que le fil des rois se démêle,
Tournez vos fuseaux, et riez.
Voyez Bude, votre voisine ;
Voyez Dristra la sarrasine !
Que dirait l'Etna, si Messine
Faisait tout ce bruit à ses pieds ?

« Semlin est la plus querelleuse :
Elle a toujours les premiers torts.
Croyez-vous que mon eau houleuse,
Suivant sa pente rocailleuse,
N'ait rien à faire entre ses bords
Qu'à porter à l'Euxin vos morts ?

« Vos mortiers ont tant de fumée
Qu'il fait nuit dans ma grotte aimée,
D'éclats d'obus toujours semée !
Du jour j'ai perdu le tableau ;
Le soir, la vapeur de leur bouche
Me couvre d'une ombre farouche,
Quand je cherche à voir de ma couche
Les étoiles à travers l'eau.

« Sœurs, à vous cribler de blessures
Espérez-vous un grand renom ?
Vos palais deviendront masures.
Ah ! qu'en vos noires embrasures
La guerre se taise, ou sinon
J'éteindrai, moi, votre canon.

« Car je suis le Danube immense.
Malheur à vous, si je commence !
Je vous souffre ici par clémence,
Si je voulais, de leur prison,
Mes flots lâchés dans les campagnes,
Emportant vous et vos compagnes,
Comme une chaîne de montagnes
Se lèveraient à l'horizon ! »

Certes, on peut parler de la sorte
Quand c'est au canon qu'on répond,
Quand des rois on baigne la porte,
Lorsqu'on est Danube, et qu'on porte,
Comme l'Euxin et l'Hellespont,
De grands vaisseaux au triple pont ;

Lorsqu'on ronge cent ponts de pierre,
Qu'on traverse les huit Bavières,
Qu'on reçoit soixante rivières
Et qu'on les dévore en fuyant ;
Qu'on a, comme une mer, sa houle ;
Quand sur le globe on se déroule
Comme un serpent, et quand on coule
De l'occident à l'orient !

Juin 1828.
I.

L'ÉGLISE est vaste et haute. À ses clochers superbes
L'ogive en fleur suspend ses trèfles et ses gerbes ;
Son portail resplendit, de sa rose pourvu ;
Le soir fait fourmiller sous la voussure énorme
Anges, vierges, le ciel, l'enfer sombre et difforme,
Tout un monde effrayant comme un rêve entrevu.

Mais ce n'est pas l'église, et ses voûtes, sublimes,
Ses porches, ses vitraux, ses lueurs, ses abîmes,
Sa façade et ses tours, qui fascinent mes yeux ;
Non ; c'est, tout près, dans l'ombre où l'âme aime à descendre
Cette chambre d'où sort un chant sonore et tendre,
Posée au bord d'un toit comme un oiseau joyeux.

Oui, l'édifice est beau, mais cette chambre est douce.
J'aime le chêne altier moins que le nid de mousse ;
J'aime le vent des prés plus que l'âpre ouragan ;
Mon cœur, quand il se perd vers les vagues béantes,
Préfère l'algue obscure aux falaises géantes.
Et l'heureuse hirondelle au splendide océan.

II.

Frais réduit ! à travers une claire feuillée
Sa fenêtre petite et comme émerveillée
S'épanouit auprès du gothique portail.
Sa verte jalousie à trois clous accrochée,
Par un bout s'échappant, par l'autre rattachée,
S'ouvre coquettement comme un grand éventail.

Au-dehors un beau lys, qu'un prestige environne,
Emplit de sa racine et de sa fleur couronne
- Tout près de la gouttière où dort un chat sournois -
Un vase à forme étrange en porcelaine bleue
Où brille, avec des paons ouvrant leur large queue,
Ce beau pays d'azur que rêvent les Chinois.

Et dans l'intérieur par moments luit et passe
Une ombre, une figure, une fée, une grâce,
Jeune fille du peuple au chant plein de bonheur,
Orpheline, dit-on, et seule en cet asile,
Mais qui parfois a l'air, tant son front est tranquille,
De voir distinctement la face du Seigneur.

On sent, rien qu'à la voir, sa dignité profonde.
De ce cœur sans limon nul vent n'a troublé l'onde.
Ce tendre oiseau qui jase ignore l'oiseleur.
L'aile du papillon a toute sa poussière.
L'âme de l'humble vierge a toute sa lumière.
La perle de l'aurore est encor dans la fleur.

À l'obscure mansarde il semble que l'œil voie
Aboutir doucement tout un monde de joie,
La place, les passants, les enfants, leurs ébats,
Les femmes sous l'église à pas lents disparues,
Des fronts épanouis par la chanson des rues,
Mille rayons d'en haut, mille reflets d'en bas.

Fille heureuse ! autour d'elle ainsi qu'autour d'un temple,
Tout est modeste et doux, tout donne un bon exemple.
L'abeille fait son miel, la fleur rit au ciel bleu,
La tour répand de l'ombre, et, devant la fenêtre,
Sans faute, chaque soir, pour obéir au maître,
L'astre allume humblement sa couronne de feu.

Sur son beau col, empreint de virginité pure,
Point d'altière dentelle ou de riche guipure ;
Mais un simple mouchoir noué pudiquement.
Pas de perle à son front, mais aussi pas de ride,
Mais un œil chaste et vif, mais un regard limpide.
Où brille le regard que sert le diamant ?

III.

L'angle de la cellule abrite un lit paisible.
Sur la table est ce livre où Dieu se fait visible,
La légende des saints, seul et vrai panthéon.
Et dans un coin obscur, près de la cheminée,
Entre la bonne Vierge et le buis de l'année,
Quatre épingles au mur fixent Napoléon.

Cet aigle en cette cage ! - et pourquoi non ? dans l'ombre
De cette chambre étroite et calme, où rien n'est sombre,
Où dort la belle enfant, douce comme son lys,
Où tant de paix, de grâce et de joie est versée,
Je ne hais pas d'entendre au fond de ma pensée
Le bruit des lourds canons roulant vers Austerlitz.

Et près de l'empereur devant qui tout s'incline,
- Ô légitime orgueil de la pauvre orpheline ! -
Brille une croix d'honneur, signe humble et triomphant,
Croix d'un soldat, tombé comme tout héros tombe,
Et qui, père endormi, fait du fond de sa tombe
Veiller un peu de gloire auprès de son enfant.

IV.

Croix de Napoléon ! joyau guerrier ! pensée !
Couronne de laurier de rayons traversée !
Quand il menait ses preux aux combats acharnés,
Il la laissait, afin de conquérir la terre,
Pendre sur tous les fronts durant toute la guerre ;
Puis, la grande œuvre faite, il leur disait : Venez !

Puis il donnait sa croix à ces hommes stoïques,
Et des larmes coulaient de leurs yeux héroïques ;
Muets, ils admiraient leur demi-dieu vainqueur ;
On eût dit qu'allumant leur âme avec son âme,
En touchant leur poitrine avec son doigt de flamme,
Il leur faisait jaillir cette étoile du cœur !

V.

Le matin elle chante et puis elle travaille,
Sérieuse, les pieds sur sa chaise de paille,
Cousant, taillant, brodant quelques dessins choisis ;
Et, tandis que, songeant à Dieu, simple et sans crainte,
Cette vierge accomplit sa tâche auguste et sainte,
Le silence rêveur à sa porte est assis.

Ainsi, Seigneur, vos mains couvrent cette demeure.
Dans cet asile obscur, qu'aucun souci n'effleure,
Rien qui ne soit sacré, rien qui ne soit charmant !
Cette âme, en vous priant pour ceux dont la nef sombre,
Peut monter chaque soir vers vous sans faire d'ombre
Dans la sérénité de votre firmament !

Nul danger ! nul écueil ! - Si ! l'aspic est dans l'herbe !
Hélas ! hélas ! le ver est dans le fruit superbe !
Pour troubler une vie il suffit d'un regard.
Le mal peut se montrer même aux clartés d'un cierge.
La curiosité qu'a l'esprit de la vierge
Fait une plaie au cœur de la femme plus ****.

Plein de ces chants honteux, dégoût de la mémoire,
Un vieux livre est là-haut sur une vieille armoire,
Par quelque vil passant dans cette ombre oublié ;
Roman du dernier siècle ! œuvre d'ignominie !
Voltaire alors régnait, ce singe de génie
Chez l'homme en mission par le diable envoyé.

VI.

Epoque qui gardas, de vin, de sang rougie,
Même en agonisant, l'allure de l'orgie !
Ô dix-huitième siècle, impie et châtié !
Société sans dieu, par qui Dieu fus frappée !
Qui, brisant sous la hache et le sceptre et l'épée,
Jeune offensas l'amour, et vieille la pitié !

Table d'un long festin qu'un échafaud termine !
Monde, aveugle pour Christ, que Satan illumine !
Honte à tes écrivains devant les nations !
L'ombre de tes forfaits est dans leur renommée
Comme d'une chaudière il sort une fumée,
Leur sombre gloire sort des révolutions !

VII.

Frêle barque assoupie à quelques pas d'un gouffre !
Prends garde, enfant ! cœur tendre où rien encor ne souffre !
Ô pauvre fille d'Ève ! ô pauvre jeune esprit !
Voltaire, le serpent, le doute, l'ironie,
Voltaire est dans un coin de ta chambre bénie !
Avec son œil de flamme il t'espionne, et rit.

Oh ! tremble ! ce sophiste a sondé bien des fanges !
Oh ! tremble ! ce faux sage a perdu bien des anges !
Ce démon, noir milan, fond sur les cœurs pieux,
Et les brise, et souvent, sous ses griffes cruelles,
Plume à plume j'ai vu tomber ces blanches ailles
Qui font qu'une âme vole et s'enfuit dans les cieux !

Il compte de ton sein les battements sans nombre.
Le moindre mouvement de ton esprit dans l'ombre,
S'il penche un peu vers lui, fait resplendir son œil.
Et, comme un loup rôdant, comme un tigre qui guette,
Par moments, de Satan, visible au seul poète,
La tête monstrueuse apparaît à ton seuil !

VIII.

Hélas ! si ta main chaste ouvrait ce livre infâme,
Tu sentirais soudain Dieu mourir dans ton âme.
Ce soir tu pencherais ton front triste et boudeur
Pour voir passer au **** dans quelque verte allée
Les chars étincelants à la roue étoilée,
Et demain tu rirais de la sainte pudeur !

Ton lit, troublé la nuit de visions étranges,
Ferait fuir le sommeil, le plus craintif des anges !
Tu ne dormirais plus, tu ne chanterais plus,
Et ton esprit, tombé dans l'océan des rêves,
Irait, déraciné comme l'herbe des grèves,
Du plaisir à l'opprobre et du flux au reflux !

IX.

Oh ! la croix de ton père est là qui te regarde !
La croix du vieux soldat mort dans la vieille garde !
Laisse-toi conseiller par elle, ange tenté !
Laisse-toi conseiller, guider, sauver peut-être
Par ce lys fraternel penché sur ta fenêtre,
Qui mêle son parfum à ta virginité !

Par toute ombre qui passe en baissant la paupière !
Par les vieux saints rangés sous le portail de pierre !
Par la blanche colombe aux rapides adieux !
Par l'orgue ardent dont l'hymne en longs sanglots se brise !
Laisse-toi conseiller par la pensive église !
Laisse-toi conseiller par le ciel radieux !

Laisse-toi conseiller par l'aiguille ouvrière,
Présente à ton labeur, présente à ta prière,
Qui dit tout bas : Travaille ! - Oh ! crois-la ! - Dieu, vois-tu,
Fit naître du travail, que l'insensé repousse,
Deux filles, la vertu, qui fait la gaîté douce,
Et la gaîté, qui rend charmante la vertu !

Entends ces mille voix, d'amour accentuées,
Qui passent dans le vent, qui tombent des nuées,
Qui montent vaguement des seuils silencieux,
Que la rosée apporte avec ses chastes gouttes,
Que le chant des oiseaux te répète, et qui toutes
Te disent à la fois : Sois pure sous les cieux !

Sois pure sous les cieux ! comme l'onde et l'aurore,
Comme le joyeux nid, comme la tour sonore,
Comme la gerbe blonde, amour du moissonneur,
Comme l'astre incliné, comme la fleur penchante,
Comme tout ce qui rit, comme tout ce qui chante,
Comme tout ce qui dort dans la paix du Seigneur !

Sois calme. Le repos va du cœur au visage ;
La tranquillité fait la majesté du sage.
Sois joyeuse. La foi vit sans l'austérité ;
Un des reflets du ciel, c'est le rire des femmes ;
La joie est la chaleur que jette dans les âmes
Cette clarté d'en haut qu'on nomme Vérité.

La joie est pour l'esprit une riche ceinture.
La joie adoucit tout dans l'immense nature.
Dieu sur les vieilles tours pose le nid charmant
Et la broussaille en fleur qui luit dans l'herbe épaisse ;
Car la ruine même autour de sa tristesse
A besoin de jeunesse et de rayonnement !

Sois bonne. La bonté contient les autres choses.
Le Seigneur indulgent sur qui tu te reposes
Compose de bonté le penseur fraternel.
La bonté, c'est le fond des natures augustes.
D'une seule vertu Dieu fait le cœur des justes,
Comme d'un seul saphir la coupole du ciel.

Ainsi, tu resteras, comme un lys, comme un cygne,
Blanche entre les fronts purs marqués d'un divin signe
Et tu seras de ceux qui, sans peur, sans ennuis,
Des saintes actions amassant la richesse,
Rangent leur barque au port, leur vie à la sagesse
Et, priant tous les soirs, dorment toutes les nuits !

Le poète à lui-même.

Tandis que sur les bois, les prés et les charmilles,
S'épanchent la lumière et la splendeur des cieux,
Toi, poète serein, répands sur les familles,
Répands sur les enfants et sur les jeunes filles,
Répands sur les vieillards ton chant religieux !

Montre du doigt la rive à tous ceux qu'une voile
Traîne sur le flot noir par les vents agité ;
Aux vierges, l'innocence, heureuse et noble étoile ;
À la foule, l'autel que l'impiété voile ;
Aux jeunes, l'avenir ; aux vieux, l'éternité !

Fais filtrer ta raison dans l'homme et dans la femme.
Montre à chacun le vrai du côté saisissant.
Que tout penseur en toi trouve ce qu'il réclame.
Plonge Dieu dans les cœurs, et jette dans chaque âme
Un mot révélateur, propre à ce qu'elle sent.

Ainsi, sans bruit, dans l'ombre, ô songeur solitaire,
Ton esprit, d'où jaillit ton vers que Dieu bénit,
Du peuple sous tes pieds perce le crâne austère ; -
Comme un coin lent et sûr, dans les flancs de la terre
La racine du chêne entr'ouvre le granit.

Du 24 au 29 juin 1839.
L'aurore se levait, la mer battait la plage ;
Ainsi parla Sapho debout sur le rivage,
Et près d'elle, à genoux, les filles de ******
Se penchaient sur l'abîme et contemplaient les flots :

Fatal rocher, profond abîme !
Je vous aborde sans effroi !
Vous allez à Vénus dérober sa victime :
J'ai méconnu l'amour, l'amour punit mon crime.
Ô Neptune ! tes flots seront plus doux pour moi !
Vois-tu de quelles fleurs j'ai couronné ma tête ?
Vois : ce front, si longtemps chargé de mon ennui,
Orné pour mon trépas comme pour une fête,
Du bandeau solennel étincelle aujourd'hui !

On dit que dans ton sein... mais je ne puis le croire !
On échappe au courroux de l'implacable Amour ;
On dit que, par tes soins, si l'on renaît au jour,
D'une flamme insensée on y perd la mémoire !
Mais de l'abîme, ô dieu ! quel que soit le secours,
Garde-toi, garde-toi de préserver mes jours !
Je ne viens pas chercher dans tes ondes propices
Un oubli passager, vain remède à mes maux !
J'y viens, j'y viens trouver le calme des tombeaux !
Reçois, ô roi des mers, mes joyeux sacrifices !
Et vous, pourquoi ces pleurs ? pourquoi ces vains sanglots ?
Chantez, chantez un hymne, ô vierges de ****** !

Importuns souvenirs, me suivrez-vous sans cesse ?
C'était sous les bosquets du temple de Vénus ;
Moi-même, de Vénus insensible prêtresse,
Je chantais sur la lyre un hymne à la déesse :
Aux pieds de ses autels, soudain je t'aperçus !
Dieux ! quels transports nouveaux ! ô dieux ! comment décrire
Tous les feux dont mon sein se remplit à la fois ?
Ma langue se glaça, je demeurais sans voix,
Et ma tremblante main laissa tomber ma lyre !
Non : jamais aux regards de l'ingrate Daphné
Tu ne parus plus beau, divin fils de Latone ;
Jamais le thyrse en main, de pampres couronné,
Le jeune dieu de l'Inde, en triomphe traîné,
N'apparut plus brillant aux regards d'Erigone.
Tout sortit... de lui seul je me souvins, hélas !
Sans rougir de ma flamme, en tout temps, à toute heure,
J'errais seule et pensive autour de sa demeure.
Un pouvoir plus qu'humain m'enchaînait sur ses pas !
Que j'aimais à le voir, de la foule enivrée,
Au gymnase, au théâtre, attirer tous les yeux,
Lancer le disque au ****, d'une main assurée,
Et sur tous ses rivaux l'emporter dans nos jeux !
Que j'aimais à le voir, penché sur la crinière
D'un coursier de I'EIide aussi prompt que les vents,
S'élancer le premier au bout de la carrière,
Et, le front couronné, revenir à pas lents !
Ah ! de tous ses succès, que mon âme était fière !
Et si de ce beau front de sueur humecté
J'avais pu seulement essuyer la poussière...
Ô dieux ! j'aurais donné tout, jusqu'à ma beauté,
Pour être un seul instant ou sa soeur ou sa mère !
Vous, qui n'avez jamais rien pu pour mon bonheur !
Vaines divinités des rives du Permesse,
Moi-même, dans vos arts, j'instruisis sa jeunesse ;
Je composai pour lui ces chants pleins de douceur,
Ces chants qui m'ont valu les transports de la Grèce :
Ces chants, qui des Enfers fléchiraient la rigueur,
Malheureuse Sapho ! n'ont pu fléchir son coeur,
Et son ingratitude a payé ta tendresse !

Redoublez vos soupirs ! redoublez vos sanglots !
Pleurez ! pleurez ma honte, ô filles de ****** !

Si l'ingrat cependant s'était laissé toucher !
Si mes soins, si mes chants, si mes trop faibles charmes
A son indifférence avaient pu l'arracher !
S'il eût été du moins attendri par mes larmes !
Jamais pour un mortel, jamais la main des dieux
N'aurait filé des jours plus doux, plus glorieux !
Que d'éclat cet amour eût jeté sur sa vie !
Ses jours à ces dieux même auraient pu faire envie !
Et l'amant de Sapho, fameux dans l'univers,
Aurait été, comme eux, immortel dans mes vers !
C'est pour lui que j'aurais, sur tes autels propices,
Fait fumer en tout temps l'encens des sacrifices,
Ô Vénus ! c'est pour lui que j'aurais nuit et jour
Suspendu quelque offrande aux autels de l'Amour !
C'est pour lui que j'aurais, durant les nuits entières
Aux trois fatales soeurs adressé mes prières !
Ou bien que, reprenant mon luth mélodieux,
J'aurais redit les airs qui lui plaisaient le mieux !
Pour lui j'aurais voulu dans les jeux d'Ionie
Disputer aux vainqueurs les palmes du génie !
Que ces lauriers brillants à mon orgueil offerts
En les cueillant pour lui m'auraient été plus chers !
J'aurais mis à ses pieds le prix de ma victoire,
Et couronné son front des rayons de ma gloire.

Souvent à la prière abaissant mon orgueil,
De ta porte, ô Phaon ! j'allais baiser le seuil.
Au moins, disais-je, au moins, si ta rigueur jalouse
Me refuse à jamais ce doux titre d'épouse,
Souffre, ô trop cher enfant, que Sapho, près de toi,
Esclave si tu veux, vive au moins sous ta loi !
Que m'importe ce nom et cette ignominie !
Pourvu qu'à tes côtés je consume ma vie !
Pourvu que je te voie, et qu'à mon dernier jour
D'un regard de pitié tu plaignes tant d'amour !
Ne crains pas mes périls, ne crains pas ma faiblesse ;
Vénus égalera ma force à ma tendresse.
Sur les flots, sur la terre, attachée à tes pas,
Tu me verras te suivre au milieu des combats ;
Tu me verras, de Mars affrontant la furie,
Détourner tous les traits qui menacent ta vie,
Entre la mort et toi toujours prompte à courir...
Trop heureuse pour lui si j'avais pu mourir !

Lorsque enfin, fatigué des travaux de Bellone,
Sous la tente au sommeil ton âme s'abandonne,
Ce sommeil, ô Phaon ! qui n'est plus fait pour moi,
Seule me laissera veillant autour de toi !
Et si quelque souci vient rouvrir ta paupière,
Assise à tes côtés durant la nuit entière,
Mon luth sur mes genoux soupirant mon amour,
Je charmerai ta peine en attendant le jour !

Je disais; et les vents emportaient ma prière !
L'écho répétait seul ma plainte solitaire ;
Et l'écho seul encor répond à mes sanglots !
Pleurez ! pleurez ma honte, ô filles de ****** !
Toi qui fus une fois mon bonheur et ma gloire !
Ô lyre ! que ma main fit résonner pour lui,
Ton aspect que j'aimais m'importune aujourd'hui,
Et chacun de tes airs rappelle à ma mémoire
Et mes feux, et ma honte, et l'ingrat qui m'a fui !
Brise-toi dans mes mains, lyre à jamais funeste !
Aux autels de Vénus, dans ses sacrés parvis
Je ne te suspends pas ! que le courroux céleste
Sur ces flots orageux disperse tes débris !
Et que de mes tourments nul vestige ne reste !
Que ne puis-je de même engloutir dans ces mers
Et ma fatale gloire, et mes chants, et mes vers !
Que ne puis-je effacer mes traces sur la terre !
Que ne puis-je aux Enfers descendre tout entière !
Et, brûlant ces écrits où doit vivre Phaon,
Emporter avec moi l'opprobre de mon nom !

Cependant si les dieux que sa rigueur outrage
Poussaient en cet instant ses pas vers le rivage ?
Si de ce lieu suprême il pouvait s'approcher ?
S'il venait contempler sur le fatal rocher
Sapho, les yeux en pleurs, errante, échevelée,
Frappant de vains sanglots la rive désolée,
Brûlant encor pour lui, lui pardonnant son sort,
Et dressant lentement les apprêts de sa mort ?
Sans doute, à cet aspect, touché de mon supplice,
Il se repentirait de sa longue injustice ?
Sans doute par mes pleurs se laissant désarmer
Il dirait à Sapho : Vis encor pour aimer !
Qu'ai-je dit ? **** de moi quelque remords peut-être,
A défaut de l'amour, dans son coeur a pu naître :
Peut-être dans sa fuite, averti par les dieux,
Il frissonne, il s'arrête, il revient vers ces lieux ?
Il revient m'arrêter sur les bords de l'abîme ;
Il revient !... il m'appelle... il sauve sa victime !...
Oh ! qu'entends-je ?... écoutez... du côté de ******
Une clameur lointaine a frappé les échos !
J'ai reconnu l'accent de cette voix si chère,
J'ai vu sur le chemin s'élever la poussière !
Ô vierges ! regardez ! ne le voyez-vous pas
Descendre la colline et me tendre les bras ?...
Mais non ! tout est muet dans la nature entière,
Un silence de mort règne au **** sur la terre :
Le chemin est désert !... je n'entends que les flots...
Pleurez ! pleurez ma honte, ô filles de ****** !

Mais déjà s'élançant vers les cieux qu'il colore
Le soleil de son char précipite le cours.
Toi qui viens commencer le dernier de mes jours,
Adieu dernier soleil ! adieu suprême aurore !
Demain du sein des flots vous jaillirez encore,
Et moi je meurs ! et moi je m'éteins pour toujours !
Adieu champs paternels ! adieu douce contrée !
Adieu chère ****** à Vénus consacrée !
Rivage où j'ai reçu la lumière des cieux !
Temple auguste où ma mère, aux jours de ma naissance
D'une tremblante main me consacrant aux dieux,
Au culte de Vénus dévoua mon enfance !
Et toi, forêt sacrée, où les filles du Ciel,
Entourant mon berceau, m'ont nourri de leur miel,
Adieu ! Leurs vains présents que le vulgaire envie,
Ni des traits de l'Amour, ni des coups du destin,
Misérable Sapho ! n'ont pu sauver ta vie !
Tu vécus dans les Pleurs, et tu meurs au matin !
Ainsi tombe une fleur avant le temps fanée !
Ainsi, cruel Amour, sous le couteau mortel.
Une jeune victime à ton temple amenée,
Qu'à ton culte en naissant le pâtre a destinée,
Vient tomber avant l'âge au pied de ton autel !

Et vous qui reverrez le cruel que j'adore
Quand l'ombre du trépas aura couvert mes yeux,
Compagnes de Sapho, portez-lui ces adieux !
Dites-lui... qu'en mourant je le nommais encore !

Elle dit, et le soir, quittant le bord des flots,
Vous revîntes sans elle, ô vierges de ****** !
Je fus mystique et je ne le suis plus

(La femme m'aura repris tout entier),

Non sans garder des respects absolus

Pour l'idéal qu'il fallut renier.


Mais la femme m'a repris tout entier !


J'allais priant le Dieu de mon enfance

(Aujourd'hui c'est toi qui m'as à genoux),

J'étais plein de foi, de blanche espérance.

De charité sainte aux purs feux si doux.


Mais aujourd'hui tu m'as à tes genoux !


La femme, par toi, redevient le maître,

Un maître tout-puissant et tyrannique,

Mais qu'insidieux ! feignant de tout permettre

Pour en arriver à tel but satanique...


Ô le temps béni quand j'étais ce mystique !
Paul d'Aubin May 2014
Liberté Egalité Fraternité,  
le vrai Triptyque Républicain

En hommage à nos ancêtres qui surent être ambitieux et fonder un triptyque toujours primordial, jamais accompli ni vraiment réalisé.

LIBERTE !

Frêle comme doigts d’enfants,
Plus précieuse qu’un diamant,
Ton seul parfum nous enivre
Et comme, un bon vin, nous grise.
Tu es hymne à la vie
Qui fait lever des envies.
Tu suscite des passions,
Libère des émotions.
Tu fus conquise de haute lutte
Par nos ancêtres en tumulte.
Ils nous donnèrent pour mission

D’en multiplier les brandons.
A trop de Peuples, elle fait défaut.
Elle ne supporte aucun bâillon
Car si l’être vit bien de pain,
Il veut aussi choisir son chemin.
Si tous les pouvoirs la craignent,
Ma, si belle, tu charmes et envoute,
Mets les tyrans en déroute,
Sœur de Marianne la belle.

*
EGALITE !

Elle fut la devise d’Athènes,
Et révérée par les Romains.
Elle naquit en 89, avec la liberté du Peuple,
Est fille de Révolution.
Elle abolit les distinctions
Séparant les êtres sans raison.
Ouvre la voie à tous talents
Sans s’encombrer de parchemins.
C’est un alcool enivrant
Que l’égalité des droits.
C’est aussi une promesse
De secourir celui qui choit.
Si l’égalité fait tant peur,
C’est que son regard de lynx

Perce les supercheries
Et voit les hommes tels qu’ils sont.

FRATERNITE !

Elle coule, coule comme le miel,
Nectar de la ruche humaine.
Elle sait embellir nos vies,
Et faire reculer la grisaille,
Du calcul, froid et égoïste.
Dans la devise Républicaine
Elle tient la baguette de l’orchestre.
Comme un peintre inspiré, elle met,
Sur la toile, vive et vermillon.
Elle nous incite à l’humanisme.
Elle est petite fille de 89, fille de quarante –huit
Mais sut renaître en 68.
Elle est crainte par les puissants,
Qui n’ont jamais connu qu’argent,
C’est pourtant une essence rare.
Dans les temps durs, elle se cache,
Mais vient ouvrir la porte
Au Résistant pourchassé. Elle n’hésite pas aujourd’hui
À secourir un «sans papier»
Sa sœur est générosité.
Elle est la valeur suprême,
Qui rend possible le «vivre ensemble»
Et permet même au solitaire
De faire battre un cœur solidaire.
La fraternité reste la vraie conquête de l’humain.

Paul d’Aubin (Paul Arrighi) à Toulouse; France.
I


Que ces vallons déserts, que ces vastes prairies

Où j'allais promener mes tristes rêveries,

Que ces rivages frais, que ces bois, que ces champs,

Que tout prenne une voix et retrouve des chants

Et porte jusqu'au sein de Ta Toute Puissance

Un hymne de bonheur et de reconnaissance !

Celle, qui dans un chaste et pur embrassement,

A reçu mon amour et mon premier serment,

Celle à qui j'ai juré de consacrer ma vie

Par d'injustes parents m'avait été ravie ;

Ils avaient repoussé mes pleurs, et les ingrats

Avaient osé venir l'arracher de mes bras ;

Et jaloux de m'ôter la dernière espérance

Qui pût me soutenir et calmer ma souffrance,

Un message trompeur nous avait informés

Que sur un bord lointain ses yeux s'étaient fermés.

Celui qui fut aimé, celui qui put connaître

Ce bonheur enivrant de confondre son être,

De vivre dans un autre, et de ne plus avoir

Que son cœur pour sentir, et que ses yeux pour voir,

Celui-là pourra seul deviner et comprendre

Ce qu'une voix humaine est impuissante à rendre ;

Celui-là saura seul tout ce que peut souffrir

Un homme, et supporter de tourments sans mourir.

Mais la main qui sur moi s'était appesantie

Semble de mes malheurs s'être enfin repentie.

Leur cœur s'est attendri, soit qu'un pouvoir caché,

Que sais-je ? Ou que la voix du remords l'ait touché.

Celle que je pleurais, que je croyais perdue,

Elle vit ! elle vient ! et va m'être rendue !

Ne demandez donc plus, amis, pourquoi je veux

Qu'on mêle ces boutons de fleurs dans mes cheveux.

Non ! Je n'ai point souffert et mes douleurs passées

En cet heureux instant sont toutes effacées ;

Que sont tous mes malheurs, que sont tous mes ennuis.

Et ces rêves de deuil qui tourmentaient mes nuits ?

Et moi ! J'osais du ciel accuser la colère !

Je reconnais enfin sa bonté tutélaire.

Et je bénis ces maux d'un jour qui m'ont appris

Que mes yeux ne devaient la revoir qu'à ce prix !


II


Quel bonheur est le mien ! Pourtant - ces deux années

Changent bien des projets et bien des destinées ;

- Je ne puis me celer, à parler franchement,

Que ce retour me gêne un peu, dans ce moment.

Certes, le souvenir de notre amour passé

N'est pas un seul instant sorti de ma pensée ;

Mais enfin je ne sais comment cela s'est fait :

Invité cet hiver aux bals chez le préfet.

J'ai vu sa fille aînée, et par étourderie

Risqué de temps en temps quelque galanterie :

Je convins aux parents, et fus bientôt admis

Dans cette intimité qu'on réserve aux amis.

J'y venais tous les soirs, je faisais la lecture,

Je présentais la main pour monter en voiture ;

Dans nos réunions en petit comité,

Toujours près de la fille, assis à son côté.

Je me rendais utile à tout, j'étais son page.

Et quand elle chantait, je lui tournais la page.

Enfin, accoutumé chaque jour à la voir.

60 Que sais-je ? J'ai rendu, sans m'en apercevoir,

Et bien innocemment, des soins, que je soupçonne

N'être pas dédaignés de la jeune personne :

Si bien que je ne sais trop comment m'arranger :

On jase, et les parents pourront bien exiger

Que j'ôte ce prétexte à la rumeur publique,

Et, quelque beau matin, vouloir que je m'explique.

C'est ma faute, après tout, je me suis trop pressé,

Et, comme un débutant, je me suis avancé.

Mais, d'un autre côté, comment prévoir… ? N'importe,

Mes serments sont sacrés, et mon amour l'emporte,

J'irai demain trouver le père, et s'il vous plaît,-

Je lui raconterai la chose comme elle est.

- C'est bien ! - Mais que va-t-on penser, que va-t-on dire ?

Le monde est si méchant, et si prompt à médire !

- Je le brave ! et s'il faut, je verserai mon sang...

Oui : mais toujours est-il que c'est embarrassant.


III


Comme tout ici-bas se flétrit et s'altère,

Et comme les malheurs changent un caractère !

J'ai cherché vainement, et n'ai point retrouvé

Cette aimable candeur qui m'avait captivé.

Celle que j'avais vue autrefois si craintive.

Dont la voix résonnait si douce et si plaintive,

Hautaine, au parler bref, et parfois emporté,

A rejeté bien **** cette timidité.

A moi, qui n'ai vécu, n'ai souffert que pour elle.

Est-ce qu'elle n'a pas déjà cherché querelle ?

Jetant sur le passé des regards curieux,

Elle m'a demandé d'un air impérieux

Si, pendant tout ce temps que j'ai passé **** d'elle.

Mon cœur à sa mémoire était resté fidèle :

Et de quel droit, bon Dieu ? Nous n'étions point liés.

Et nous aurions très bien pu nous être oubliés !

J'avais juré, promis ! - Qu'est-ce que cela prouve ?

Tous les jours, en amour, on jure ; et lorsqu'on trouve

Quelque distraction, on laisse rarement

Perdre l'occasion de trahir son serment :

Il n'est pas défendu d'avoir un cœur sensible,

Et ce n'est point du "tout un crime irrémissible.

Et puis d'ailleurs, après ce que j'ai découvert.

Entre nous, soyons franc, parlons à cœur ouvert :

J'en avais fait mon deuil, et la pauvre exilée

S'est bien de son côté quelque peu consolée ;

Et si je persistais à demander sa main.

C'était par conscience, et par respect humain ;

Je m'étais étourdi. Mais elle a, la première.

Fait ouvrir, par bonheur, mes yeux à la lumière,

Et certes, j'aime mieux encore, à beaucoup près,

Qu'elle se soit ainsi montrée avant qu'après.

Car enfin, rien n'est fait, au moins, et le notaire

N'a point à nos serments prêté son ministère.

- Mais quels emportements ! quels pleurs ! car elle croit

Exiger une dette et réclamer un droit.

Or il faut en finir : quoi qu'elle dise ou fasse,

J'en ai pris mon parti ; j'irai lui dire en face,

- Quoi ? - Que son caractère est à n'y pas tenir.

- Elle avait bien besoin aussi de revenir !

Nous étions si bien tous, quand son humeur altière

Vint troubler le repos d'une famille entière !

On nous la disait morte ; et je croirais aussi

Qu'il vaudrait beaucoup mieux que cela fût ainsi.
Paul d'Aubin Dec 2014
Elégie poue notre ami Roland

Oh, mon ami, Roland Tu n’es plus désormais, Et il nous manque tant Ton regard colère Ta gouaille malicieuse Le feu de te propos De « pionnier » écolos
Que tu fus bien avant Que la mode s’en mêle. Cher Roland nous parlions Nous refaisions le Monde A torts et à travers. Mais puissants et fâcheux Etaient parmi les cibles Préférés de nos traits insolents De nos hardis propos. Roland, tu n’es plus là Et, ils ont prospéré, Les moutons, les dociles Qui suivent les bergers par trop intéressés. Cher Roland, reviens nous ! Pour les piquer encore, Ces satisfaits de peu, Ces traitres à leurs rêves. Reviens, Roland, Reviens ! Car nous avons besoin De l’esprit ironique De ta verve d’antan Et de tes polémiques Qui nous élèvent un peu De la médiocrité.

Paul Arrighi  – Toulouse
An elegy for my best friend Roland, on cooledge
Il y a des natures purement contemplatives et tout à fait impropres à l'action, qui cependant, sous une impulsion mystérieuse et inconnue, agissent quelquefois avec une rapidité dont elles se seraient crues elles-mêmes incapables.

Tel qui, craignant de trouver chez son concierge une nouvelle chagrinante, rôde lâchement une heure devant sa porte sans oser rentrer, tel qui garde quinze jours une lettre sans la décacheter, ou ne se résigne qu'au bout de six mois à opérer une démarche nécessaire depuis un an, se sentent quelquefois brusquement précipités vers l'action par une force irrésistible, comme la flèche d'un arc. Le moraliste et le médecin, qui prétendent tout savoir, ne peuvent pas expliquer d'où vient si subitement une si folle énergie à ces âmes paresseuses et voluptueuses, et comment, incapables d'accomplir les choses les plus simples et les plus nécessaires, elles trouvent à une certaine minute un courage de luxe pour exécuter les actes les plus absurdes et souvent même les plus dangereux.

Un de mes amis, le plus inoffensif rêveur qui ait existé, a mis une fois le feu à une forêt pour voir, disait-il, si le feu prenait avec autant de facilité qu'on l'affirme généralement. Dix fois de suite, l'expérience manqua ; mais, à la onzième, elle réussit beaucoup trop bien.

Un autre allumera un cigare à côté d'un tonneau de poudre, pour voir, pour savoir, pour tenter la destinée, pour se contraindre lui-même à faire preuve d'énergie, pour faire le joueur, pour connaître les plaisirs de l'anxiété, pour rien, par caprice, par désœuvrement.

C'est une espèce d'énergie qui jaillit de l'ennui et de la rêverie ; et ceux en qui elle se manifeste si opinément sont, en général, comme je l'ai dit, les plus indolents et les plus rêveurs des êtres.

Un autre, timide à ce point qu'il baisse les yeux même devant les regards des hommes, à ce point qu'il lui faut rassembler toute sa pauvre volonté pour entrer dans un café ou passer devant le bureau d'un théâtre, où les contrôleurs lui paraissent investis de la majesté de Minos, d'Éaque et de Rhadamanthe, sautera brusquement au cou d'un vieillard qui passe à côté de lui et l'embrassera avec enthousiasme devant la foule étonnée.

- Pourquoi ? Parce que... parce que cette physionomie lui était irrésistiblement sympathique ? Peut-être ; mais il est plus légitime de supposer que lui-même il ne sait pas pourquoi.

J'ai été plus d'une fois victime de ces crises et de ces élans, qui nous autorisent à croire que des Démons malicieux se glissent en nous et nous font accomplir, à notre insu, leurs plus absurdes volontés.

Un matin je m'étais levé maussade, triste, fatigué d'oisiveté, et poussé, me semblait-il, à faire quelque chose de grand, une action d'éclat ; et j'ouvris la fenêtre, hélas !

(Observez, je vous prie, que l'esprit de mystification qui, chez quelques personnes, n'est pas le résultat d'un travail ou d'une combinaison, mais d'une inspiration fortuite, participe beaucoup, ne fût-ce que par l'ardeur du désir, de cette humeur, hystérique selon les médecins, satanique selon ceux qui pensent un peu mieux que les médecins, qui nous pousse sans résistance vers une foule d'actions dangereuses ou inconvenantes.)

La première personne que j'aperçus dans la rue, ce fut un vitrier dont le cri perçant, discordant, monta jusqu'à moi à travers la lourde et sale atmosphère parisienne. Il me serait d'ailleurs impossible de dire pourquoi je fus pris à l'égard de ce pauvre homme d'une haine aussi soudaine que despotique.

« - Hé ! hé ! » et je lui criai de monter. Cependant je réfléchissais, non sans quelque gaieté, que, la chambre étant au sixième étage et l'escalier fort étroit, l'homme devait éprouver quelque peine à opérer son ascension et accrocher en maint endroit les angles de sa fragile marchandise.

Enfin il parut : j'examinai curieusement toutes ses vitres, et je lui dis : « - Comment ? vous n'avez pas de verres de couleur ? des verres roses, rouges, bleus, des vitres magiques, des vitres de paradis ? Impudent que vous êtes ! vous osez vous promener dans des quartiers pauvres, et vous n'avez pas même de vitres qui fassent voir la vie en beau ! » Et je le poussai vivement vers l'escalier, où il trébucha en grognant.

Je m'approchai du balcon et je me saisis d'un petit *** de fleurs, et quand l'homme reparut au débouché de la porte, je laissai tomber perpendiculairement mon engin de guerre sur le rebord postérieur de ses crochets ; et le choc le renversant, il acheva de briser sous son dos toute sa pauvre fortune ambulatoire qui rendit le bruit éclatant d'un palais de cristal crevé par la foudre.

Et, ivre de ma folie, je lui criai furieusement : « La vie en beau ! la vie en beau ! »

Ces plaisanteries nerveuses ne sont pas sans péril, et on peut souvent les payer cher. Mais qu'importe l'éternité de la damnation à qui a trouvé dans une seconde l'infini de la jouissance ?
« Du vin ! Nous sommes trois ; du vin, allons, du vin !
Hôtesse ! nous voulons chanter jusqu'au matin.
As-tu toujours ta vigne et ta fille jolie ?
L'amour, le vin, voilà les seuls biens de la vie.

- Entrez, seigneurs, entrez.... le vent est froid, la nuit.
Ma vigne donne un vin qui brûle et réjouit ;
Le soleil a mûri les raisins qu'elle porte,
Mon vin est clair et bon : buvez !... Ma fille est morte !

- Morte ? - Depuis un jour. - Morte, la belle enfant !
Laisse-nous la revoir. Plus de vin, plus de chant !
Que ta lampe un instant éclaire son visage ;
Chapeau bas, nous dirons la prière d'usage. »

Et les passants criaient : « Du vin, allons, du vin !
Hôtesse ! nous voulons chanter jusqu'au matin.
As-tu toujours ta vigne et ta fille jolie ?
L'amour, le vin, voilà les seuls biens de la vie. »

Le premier voyageur s'inclina près du lit,
Écartant les rideaux, à demi-voix il dit :
« Belle enfant, maintenant glacée, inanimée,
Pourquoi mourir si tôt ? Moi, je t'aurais aimée ! »

Et l'on disait en bas : « Du vin, allons, du vin !
Hôtesse ! nous voulons chanter jusqu'au matin.
As-tu toujours ta vigne et ta fille jolie ?
L'amour, le vin, voilà les seuls biens de la vie. »

Le second voyageur s'inclina près du lit,
Et fermant les rideaux, à demi-voix il dit :
« Moi, je t'aimais, enfant ; j'aurais été fidèle
Adieu donc pour toujours, à toi qui fus si belle ! »

Et l'on disait en bas : « Du vin, allons, du vin !
Hôtesse ! nous voulons chanter jusqu'au matin.
As-tu toujours ta vigne et ta fille jolie ?
L'amour, le vin, voilà les seuls biens de la vie. »

Le dernier voyageur s'inclina près du lit ;
Baisant ce front de marbre, à demi-voix il dit :
« Je t'aimais et je t'aime, enfant si tôt enfuie !
Je n'aimerai que toi jusqu'au soir de ma vie. »

Et l'on disait en bas : « Du vin, allons, du vin !
Hôtesse ! nous voulons chanter jusqu'au matin.
As-tu toujours ta vigne et ta fille jolie ?
L'amour, le vin, voilà les seuls biens de la vie. »

Et la mère à genoux disait, mais sans pleurer :
« Un cœur pur en ces lieux ne pouvait demeurer ;
Un bon ange veillait sur ma fille innocente...
Elle pleurait ici, dans le ciel elle chante ! »

Et l'on disait en bas : « Du vin, allons, du vin !
Hôtesse ! nous voulons chanter jusqu'au matin.
As-tu toujours ta vigne et ta fille jolie ?
L'amour, le vin, voilà les seuls biens de la vie.

- Entrez, seigneurs, entrez ! le vent est froid, la nuit.
Ma vigne donne un vin qui brûle et réjouit ;
Le soleil a mûri les raisins qu'elle porte,
Mon vin est clair et bon ; buvez !... Ma fille est morte !
Puisque c'est ton métier, misérable poète,
Même en ces temps d'orage, où la bouche est muette,
Tandis que le bras parle, et que la fiction
Disparaît comme un songe au bruit de l'action ;
Puisque c'est ton métier de faire de ton âme
Une prostituée, et que, joie ou douleur,
Tout demande sans cesse à sortir de ton coeur ;
Que du moins l'histrion, couvert d'un masque infâme,
N'aille pas, dégradant ta pensée avec lui,
Sur d'ignobles tréteaux la mettre au pilori ;
Que nul plan, nul détour, nul voile ne l'ombrage.
Abandonne aux vieillards sans force et sans courage
Ce travail d'araignée, et tous ces fils honteux
Dont s'entoure en tremblant l'orgueil qui craint les yeux.
Point d'autel, de trépied, point d'arrière aux profanes !
Que ta muse, brisant le luth des courtisanes,
Fasse vibrer sans peur l'air de la liberté ;
Qu'elle marche pieds nus, comme la vérité.

O Machiavel ! tes pas retentissent encore
Dans les sentiers déserts de San Casciano.
Là, sous des cieux ardents dont l'air sèche et dévore,
Tu cultivais en vain un sol maigre et sans eau.
Ta main, lasse le soir d'avoir creusé la terre,
Frappait ton pâle front dans le calme des nuits.
Là, tu fus sans espoir, sans proches, sans amis ;
La vile oisiveté, fille de la misère,
A ton ombre en tous lieux se traînait lentement,
Et buvait dans ton coeur les flots purs de ton sang :
"Qui suis-je ? écrivais-tu; qu'on me donne une pierre,
"Une roche à rouler ; c'est la paix des tombeaux
"Que je fuis, et je tends des bras las du repos."

C'est ainsi, Machiavel, qu'avec toi je m'écrie :
O médiocre, celui qui pour tout bien
T'apporte à ce tripot dégoûtant de la vie,
Est bien poltron au jeu, s'il ne dit : Tout ou rien.
Je suis jeune; j'arrive. A moitié de ma route,
Déjà las de marcher, je me suis retourné.
La science de l'homme est le mépris sans doute ;
C'est un droit de vieillard qui ne m'est pas donné.
Mais qu'en dois-je penser ? Il n'existe qu'un être
Que je puisse en entier et constamment connaître
Sur qui mon jugement puisse au moins faire foi,
Un seul !... Je le méprise. - Et cet être, c'est moi.

Qu'ai-je fait ? qu'ai-je appris ? Le temps est si rapide !
L'enfant marche joyeux, sans songer au chemin ;
Il le croit infini, n'en voyant pas la fin.
Tout à coup il rencontre une source limpide,
Il s'arrête, il se penche, il y voit un vieillard.
Que me dirai-je alors ? Quand j'aurai fait mes peines,
Quand on m'entendra dire : Hélas ! il est trop **** ;
Quand ce sang, qui bouillonne aujourd'hui dans mes veines
Et s'irrite en criant contre un lâche repos,
S'arrêtera, glacé jusqu'au fond de mes os...
O vieillesse ! à quoi donc sert ton expérience ?
Que te sert, spectre vain, de te courber d'avance
Vers le commun tombeau des hommes, si la mort
Se tait en y rentrant, lorsque la vie en sort ?
N'existait-il donc pas à cette loterie
Un joueur par le sort assez bien abattu
Pour que, me rencontrant sur le seuil de la vie,
Il me dît en sortant : N'entrez pas, j'ai perdu !

Grèce, ô mère des arts, terre d'idolâtrie,
De mes voeux insensés éternelle patrie,
J'étais né pour ces temps où les fleurs de ton front
Couronnaient dans les mers l'azur de l'Hellespont.
Je suis un citoyen de tes siècles antiques ;
Mon âme avec l'abeille erre sous tes portiques.
La langue de ton peuple, ô Grèce, peut mourir ;
Nous pouvons oublier le nom de tes montagnes ;
Mais qu'en fouillant le sein de tes blondes campagnes
Nos regards tout à coup viennent à découvrir
Quelque dieu de tes bois, quelque Vénus perdue...
La langue que parlait le coeur de Phidias
Sera toujours vivante et toujours entendue ;
Les marbres l'ont apprise, et ne l'oublieront pas.
Et toi, vieille Italie, où sont ces jours tranquilles
Où sous le toit des cours Rome avait abrité
Les arts, ces dieux amis, fils de l'oisiveté ?
Quand tes peintres alors s'en allaient par les villes,
Elevant des palais, des tombeaux, des autels,
Triomphants, honorés, dieux parmi les mortels ;
Quand tout, à leur parole, enfantait des merveilles,
Quand Rome combattait Venise et les Lombards,
Alors c'étaient des temps bienheureux pour les arts !
Là, c'était Michel-Ange, affaibli par les veilles,
Pâle au milieu des morts, un scalpel à la main,
Cherchant la vie au fond de ce néant humain,
Levant de temps en temps sa tête appesantie,
Pour jeter un regard de colère et d'envie
Sur les palais de Rome, où, du pied de l'autel,
A ses rivaux de **** souriait Raphaël.
Là, c'était le Corrège, homme pauvre et modeste,
Travaillant pour son coeur, laissant à Dieu le reste ;
Le Giorgione, superbe, au jeune Titien
Montrant du sein des mers son beau ciel vénitien ;
Bartholomé, pensif, le front dans la poussière,
Brisant son jeune coeur sur un autel de pierre,
Interrogé tout bas sur l'art par Raphaël,
Et bornant sa réponse à lui montrer le ciel...
Temps heureux, temps aimés ! Mes mains alors peut-être,
Mes lâches mains, pour vous auraient pu s'occuper ;
Mais aujourd'hui pour qui ? dans quel but ? sous quel maître ?
L'artiste est un marchand, et l'art est un métier.
Un pâle simulacre, une vile copie,
Naissent sous le soleil ardent de l'Italie...
Nos oeuvres ont un an, nos gloires ont un jour ;
Tout est mort en Europe, - oui, tout, - jusqu'à l'amour.

Ah ! qui que vous soyez, vous qu'un fatal génie
Pousse à ce malheureux métier de poésie
Rejetez **** de vous, chassez-moi hardiment
Toute sincérité; gardez que l'on ne voie
Tomber de votre coeur quelques gouttes de sang ;
Sinon, vous apprendrez que la plus courte joie
Coûte cher, que le sage est ami du repos,
Que les indifférents sont d'excellents bourreaux.

Heureux, trois fois heureux, l'homme dont la pensée
Peut s'écrire au tranchant du sabre ou de l'épée !
Ah ! qu'il doit mépriser ces rêveurs insensés
Qui, lorsqu'ils ont pétri d'une fange sans vie
Un vil fantôme, un songe, une froide effigie,
S'arrêtent pleins d'orgueil, et disent : C'est assez !
Qu'est la pensée, hélas ! quand l'action commence ?
L'une recule où l'autre intrépide s'avance.
Au redoutable aspect de la réalité,
Celle-ci prend le fer, et s'apprête à combattre ;
Celle-là, frêle idole, et qu'un rien peut abattre,
Se détourne, en voilant son front inanimé.

Meurs, Weber ! meurs courbé sur ta harpe muette ;
Mozart t'attend. - Et toi, misérable poète,
Qui que tu sois, enfant, homme, si ton coeur bat,
Agis ! jette ta lyre; au combat, au combat !
Ombre des temps passés, tu n'es pas de cet âge.
Entend-on le nocher chanter pendant l'orage ?
A l'action ! au mal ! Le bien reste ignoré.
Allons ! cherche un égal à des maux sans remède.
Malheur à qui nous fit ce sens dénaturé !
Le mal cherche le mal, et qui souffre nous aide.
L'homme peut haïr l'homme, et fuir; mais malgré lui,
Sa douleur tend la main à la douleur d'autrui.
C'est tout. Pour la pitié, ce mot dont on nous leurre,
Et pour tous ces discours prostitués sans fin,
Que l'homme au coeur joyeux jette à celui qui pleure,
Comme le riche jette au mendiant son pain,
Qui pourrait en vouloir ? et comment le vulgaire,
Quand c'est vous qui souffrez, pourrait-il le sentir,
Lui que Dieu n'a pas fait capable de souffrir ?

Allez sur une place, étalez sur la terre
Un corps plus mutilé que celui d'un martyr,
Informe, dégoûtant, traîné sur une claie,
Et soulevant déjà l'âme prête à partir ;
La foule vous suivra. Quand la douleur est vraie,
Elle l'aime. Vos maux, dont on vous saura gré,
Feront horreur à tous, à quelques-uns pitié.
Mais changez de façon : découvrez-leur une âme
Par le chagrin brisée, une douleur sans fard,
Et dans un jeune coeur des regrets de vieillard ;
Dites-leur que sans mère, et sans soeur, et sans femme,
Sans savoir où verser, avant que de mourir,
Les pleurs que votre sein peut encor contenir,
Jusqu'au soleil couchant vous n'irez point peut-être...
Qui trouvera le temps d'écouter vos malheurs ?
On croit au sang qui coule, et l'on doute des pleurs.
Votre ami passera, mais sans vous reconnaître.

Tu te gonfles, mon coeur?... Des pleurs, le croirais-tu,
Tandis que j'écrivais ont baigné mon visage.
Le fer me manque-t-il, ou ma main sans courage
A-t-elle lâchement glissé sur mon sein nu ?
Non, rien de tout cela. Mais si **** que la haine
De cette destinée aveugle et sans pudeur
Ira, j'y veux aller. - J'aurai du moins le coeur
De la mener si bas que la honte l'en prenne.
À Paul Léautaud.

Et je chantais cette romance
En 1903 sans savoir
Que mon amour à la semblance
Du beau Phénix s'il meurt un soir
Le matin voit sa renaissance.


Un soir de demi-brume à Londres
Un voyou qui ressemblait à
Mon amour vint à ma rencontre
Et le regard qu'il me jeta
Me fit baisser les yeux de honte

Je suivis ce mauvais garçon
Qui sifflotait mains dans les poches
Nous semblions entre les maisons
Onde ouverte de la Mer Rouge
Lui les Hébreux moi Pharaon

Que tombent ces vagues de briques
Si tu ne fus pas bien aimée
Je suis le souverain d'Égypte
Sa sœur-épouse son armée
Si tu n'es pas l'amour unique

Au tournant d'une rue brûlant
De tous les feux de ses façades
Plaies du brouillard sanguinolent
Où se lamentaient les façades
Une femme lui ressemblant

C'était son regard d'inhumaine
La cicatrice à son cou nu
Sortit saoule d'une taverne
Au moment où je reconnus
La fausseté de l'amour même

Lorsqu'il fut de retour enfin
Dans sa patrie le sage Ulysse
Son vieux chien de lui se souvint
Près d'un tapis de haute lisse
Sa femme attendait qu'il revînt

L'époux royal de Sacontale
Las de vaincre se réjouit
Quand il la retrouva plus pâle
D'attente et d'amour yeux pâlis
Caressant sa gazelle mâle

J'ai pensé à ces rois heureux
Lorsque le faux amour et celle
Dont je suis encore amoureux
Heurtant leurs ombres infidèles
Me rendirent si malheureux

Regrets sur quoi l'enfer se fonde
Qu'un ciel d'oubli s'ouvre à mes vœux
Pour son baiser les rois du monde
Seraient morts les pauvres fameux
Pour elle eussent vendu leur ombre

J'ai hiverné dans mon passé
Revienne le soleil de Pâques
Pour chauffer un cœur plus glacé
Que les quarante de Sébaste
Moins que ma vie martyrisés

Mon beau navire ô ma mémoire
Avons-nous assez navigué
Dans une onde mauvaise à boire
Avons-nous assez divagué
De la belle aube au triste soir

Adieu faux amour confondu
Avec la femme qui s'éloigne
Avec celle que j'ai perdue
L'année dernière en Allemagne
Et que je ne reverrai plus

Voie lactée ô sœur lumineuse
Des blancs ruisseaux de Chanaan
Et des corps blancs des amoureuses
Nageurs morts suivrons-nous d'ahan
Ton cours vers d'autres nébuleuses

Je me souviens d'une autre année
C'était l'aube d'un jour d'avril
J'ai chanté ma joie bien-aimée
Chanté l'amour à voix virile
Au moment d'amour de l'année.
Triste et soudain fracas d'un trône héréditaire,

Profond enseignement aux puissants de la terre,

Qui vous eût pu prévoir, et dire : Dans trois jours,

Cette tige de rois par les siècles blanchie

Et ce vaste pouvoir et cette monarchie

Auront fui sans espoir et croulé pour toujours ?


Et toi qui n'es plus rien et qui fus roi naguère,

Charles ! n'avais-tu pas ton droit de paix, de guerre.

Ta large part d'impôts, tes châteaux à choisir,

Tes veneurs, tes laquais, tes chiens, tes équipages,

Tes chambellans dorés, tes hérauts et tes pages

Et tes vastes forêts où chasser à loisir ?


T'empêchait-on d'aller au sein des basiliques,

Courbant ton front royal et baisant les reliques.

Garder, comme un soldat, un prêtre à tes côtés.

Et, du ministre saint implorant l'assistance,

Consumer dans le jeûne et dans la pénitence

Tout le restant des jours que le ciel t'a comptés ?


On t'entourait d'honneurs, de respects, et la France,

Qui voyait tout cela d'un air d'indifférence.

T'eût laissé jusqu'au bout, sans haine et sans effroi.

Saluer de la main du haut des galeries,

Sourire à tes valets et dans tes Tuileries

Mourir tranquillement sur ton fauteuil de roi !


Mais des hommes t'ont dit : « Sire, l'heure est venue,

Où votre volonté, trop longtemps méconnue.

Doit être apprise à tous et s'ouvrir un chemin ;

Et si quelque mutin se dresse et se récrie.

Nous avons-là Foucault et sa gendarmerie ;

C'est l'affaire d'un coup de main.


« On en eut bon marché sous l'autre ministère.

Quelques coups de mitraille à propos l'ont fait taire,

Ce peuple ; il faut qu'il sache, au moins, si c'est en vain

Que Charles Xdix est roi de France et de Navarre

Et si d'un peu de sang il lui sied d'être avare

Pour soutenir le droit divin,


« Et si des gens venaient, artisans d'imposture,

Vous parler de promesse et que c'est forfaiture

Que manquer de la sorte à la foi des serments

Jurés, devant l'autel, sur les saints Évangiles,

Et qu'après tout, la terre a des trônes fragiles,

Et l'avenir des châtiments ;


« Sophismes dangereux, maximes immorales !

Propos séditieux de feuilles libérales !

Mais seulement un mot, un signe de la main,

Et vous verrez pâlir tous ces faiseurs d'émeute,

Comme un gibier peureux qui fuit devant la meute,

Dans les forêts de Saint-Germain. »


Et toi, tu les as crus et, risquant la partie,

Sur un seul coup de dé perdu ta dynastie,

Bien puni maintenant, ô roi, pour avoir mis

Tant d'espoir dans ton Dieu, tant de foi dans sa grâce,

Et compté, pour ton trône et les gens de ta race,

Sur l'avenir sans fin qui leur était promis !


Mais comme au premier coup du marteau populaire

Ta vieille royauté, masure séculaire.

Lézardée et disjointe et qui n'en pouvait plus,

A craqué jusqu'au fond, tant l'heure était critique.

Tant sa chute était mûre et de ce dais gothique

La toile était usée et les ais vermoulus !


Et pour baisser si bas des têtes couronnées,

Qu'a-t-il fallu de temps au peuple ? Trois journées

D'ouvriers descendus en hâte des faubourgs,

Qui couraient sans savoir, au fort de la mêlée,

Ce que c'est qu'une marche, et comme elle est réglée

Sur les sons plus pressés ou plus lents des tambours.


Trois jours, et tout fut dit ; et la pâle bannière

Du faîte des palais a roulé dans l'ornière.

Et les trois fleurs de lis, honneur de ta maison,

N'ont d'asile aujourd'hui, tristes et détrônées,

Que dans quelques foyers de vieilles cheminées.

Ou les feuillets jaunis d'un traité de blason.


Eh quoi ! de tes malheurs le rude apprentissage

N'avait-il pu t'instruire et te faire assez sage,

Sans qu'il fallût encor, vieillard en cheveux gris,

Entendre le fracas de ton trône qui tombe.

Et retrouver si **** et si près de la tombe.

Ces leçons de l'exil qui ne t'ont rien appris ?


Tu l'as voulu pourtant ! Aussi bien, à ton âge.

Quand la mort à ce point est dans le voisinage,

A tout prendre, il vaut mieux, de tous ces vains joyaux

Débarrasser un front qu'a touché le Saint-Chrême,

Car pour qui va paraître au tribunal suprême.

Les plis sont bien persans des ornements royaux !


Va, mais ne songe plus, Majesté solitaire,

Qu'à ce royaume saint qui n'est plus de la terre ;

Songe au soin de ton âme, et, déchargé du faix

De cette royauté dont t'a perdu l'envie,

Songe à bien profiter, au moins pour l'autre vie,

De ces derniers loisirs que le peuple t'a faits.
Quentin Briscoe Dec 2011
She said 1 plus 1 was 4 ,
But i thought it was us.
See that 4 **** brought up the fus
Cant add 2 more to our mix
that aint the way to fix
Our problems.
Sad thats how we had to slove them.

Swinging in my door came ******
thats what she said
honestly I thought that would leave me dead
It took time to see her tricks,
Starten fights to call me a son of *****
The delima,
What more could I do but to deliever.

Time be lost since then
start out fresh took time to begin,
I been on track
she been on her back,
no more drama
****, now she feelin the karma
Moonlight Jan 2015
In the coldest day of the year everyone must go
When all hope we once fear has lost its meaning everyone must go
When the time seems right and we've lost the fight
Everyone will go
In the end
Until defend
In which end will we go?
When the ones we love pass away
And even the great fayes fly away
Everyone will go

When Everyone has gone and left were will you go?
Leave the fus
Join the Must
And let everybody go
C'était l'explosion du nouvel an : chaos de boue et de neige, traversé de mille carrosses, étincelant de joujoux et de bonbons, grouillant de cupidités et de désespoirs, délire officiel d'une grande ville fait pour troubler le cerveau du solitaire le plus fort.

Au milieu de ce tohu-bohu et de ce vacarme, un âne trottait vivement, harcelé par un malotru armé d'un fouet.

Comme l'âne allait tourner l'angle d'un trottoir, un beau monsieur ganté, verni, cruellement cravaté et emprisonné dans des habits tout neufs, s'inclina cérémonieusement devant l'humble bête, et lui dit, en ôtant son chapeau : « Je vous la souhaite bonne et heureuse ! » puis se retourna vers je ne sais quels camarades avec un air de fatuité, comme pour les prier d'ajouter leur approbation à son contentement.

L'âne ne vit pas ce beau plaisant, et continua de courir avec zèle où l'appelait son devoir.

Pour moi, je fus pris subitement d'une incommensurable rage contre ce magnifique imbécile, qui me parut concentrer en lui tout l'esprit de la France.
TreadingWater Jul 2016
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Sur un écueil battu par la vague plaintive,
Le nautonier de **** voit blanchir sur la rive
Un tombeau près du bord par les flots déposé ;
Le temps n'a pas encor bruni l'étroite pierre,
Et sous le vert tissu de la ronce et du lierre
On distingue... un sceptre brisé !

Ici gît... point de nom !... demandez à la terre !
Ce nom ? il est inscrit en sanglant caractère
Des bords du Tanaïs au sommet du Cédar,
Sur le bronze et le marbre, et sur le sein des braves,
Et jusque dans le cœur de ces troupeaux d'esclaves
Qu'il foulait tremblants sous son char.

Depuis ces deux grands noms qu'un siècle au siècle annonce,
Jamais nom qu'ici-bas toute langue prononce
Sur l'aile de la foudre aussi **** ne vola.
Jamais d'aucun mortel le pied qu'un souffle efface
N'imprima sur la terre une plus forte trace,
Et ce pied s'est arrêté là !...

Il est là !... sous trois pas un enfant le mesure !
Son ombre ne rend pas même un léger murmure !
Le pied d'un ennemi foule en paix son cercueil !
Sur ce front foudroyant le moucheron bourdonne,
Et son ombre n'entend que le bruit monotone
D'une vague contre un écueil !

Ne crains rien, cependant, ombre encore inquiète,
Que je vienne outrager ta majesté muette.
Non. La lyre aux tombeaux n'a jamais insulté.
La mort fut de tout temps l'asile de la gloire.
Rien ne doit jusqu'ici poursuivre une mémoire.
Rien !... excepté la vérité !

Ta tombe et ton berceau sont couverts d'un nuage,
Mais pareil à l'éclair tu sortis d'un orage !
Tu foudroyas le monde avant d'avoir un nom !
Tel ce Nil dont Memphis boit les vagues fécondes
Avant d'être nommé fait bouilloner ses ondes
Aux solitudes de Memnom.

Les dieux étaient tombés, les trônes étaient vides ;
La victoire te prit sur ses ailes rapides
D'un peuple de Brutus la gloire te fit roi !
Ce siècle, dont l'écume entraînait dans sa course
Les mœurs, les rois, les dieux... refoulé vers sa source,
Recula d'un pas devant toi !

Tu combattis l'erreur sans regarder le nombre ;
Pareil au fier Jacob tu luttas contre une ombre !
Le fantôme croula sous le poids d'un mortel !
Et, de tous ses grands noms profanateur sublime,
Tu jouas avec eux, comme la main du crime
Avec les vases de l'autel.

Ainsi, dans les accès d'un impuissant délire
Quand un siècle vieilli de ses mains se déchire
En jetant dans ses fers un cri de liberté,
Un héros tout à coup de la poudre s'élève,
Le frappe avec son sceptre... il s'éveille, et le rêve
Tombe devant la vérité !

Ah ! si rendant ce sceptre à ses mains légitimes,
Plaçant sur ton pavois de royales victimes,
Tes mains des saints bandeaux avaient lavé l'affront !
Soldat vengeur des rois, plus grand que ces rois même,
De quel divin parfum, de quel pur diadème
L'histoire aurait sacré ton front !

Gloire ! honneur! liberté ! ces mots que l'homme adore,
Retentissaient pour toi comme l'airain sonore
Dont un stupide écho répète au **** le son :
De cette langue en vain ton oreille frappée
Ne comprit ici-bas que le cri de l'épée,
Et le mâle accord du clairon !

Superbe, et dédaignant ce que la terre admire,
Tu ne demandais rien au monde, que l'empire !
Tu marchais !... tout obstacle était ton ennemi !
Ta volonté volait comme ce trait rapide
Qui va frapper le but où le regard le guide,
Même à travers un cœur ami !

Jamais, pour éclaircir ta royale tristesse,
La coupe des festins ne te versa l'ivresse ;
Tes yeux d'une autre pourpre aimaient à s'enivrer !
Comme un soldat debout qui veille sous les armes,
Tu vis de la beauté le sourire ou les larmes,
Sans sourire et sans soupirer !

Tu n'aimais que le bruit du fer, le cri d'alarmes !
L'éclat resplendissant de l'aube sur tes armes !
Et ta main ne flattait que ton léger coursier,
Quand les flots ondoyants de sa pâle crinière
Sillonnaient comme un vent la sanglante poussière,
Et que ses pieds brisaient l'acier !

Tu grandis sans plaisir, tu tombas sans murmure !
Rien d'humain ne battait sous ton épaisse armure :
Sans haine et sans amour, tu vivais pour penser :
Comme l'aigle régnant dans un ciel solitaire,
Tu n'avais qu'un regard pour mesurer la terre,
Et des serres pour l'embrasser !

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S'élancer d'un seul bon au char de la victoire,
Foudroyer l'univers des splendeurs de sa gloire,
Fouler d'un même pied des tribuns et des rois ;
Forger un joug trempé dans l'amour et la haine,
Et faire frissonner sous le frein qui l'enchaîne
Un peuple échappé de ses lois !

Etre d'un siècle entier la pensée et la vie,
Emousser le poignard, décourager l'envie ;
Ebranler, raffermir l'univers incertain,
Aux sinistres clarté de ta foudre qui gronde
Vingt fois contre les dieux jouer le sort du monde,
Quel rêve ! et ce fut ton destin !...

Tu tombas cependant de ce sublime faîte !
Sur ce rocher désert jeté par la tempête,
Tu vis tes ennemis déchirer ton manteau !
Et le sort, ce seul dieu qu'adora ton audace,
Pour dernière faveur t'accorda cet espace
Entre le trône et le tombeau !

Oh ! qui m'aurait donné d'y sonder ta pensée,
Lorsque le souvenir de te grandeur passée
Venait, comme un remords, t'assaillir **** du bruit !
Et que, les bras croisés sur ta large poitrine,
Sur ton front chauve et nu, que la pensée incline,
L'horreur passait comme la nuit !

Tel qu'un pasteur debout sur la rive profonde
Voit son ombre de **** se prolonger sur l'onde
Et du fleuve orageux suivre en flottant le cours ;
Tel du sommet désert de ta grandeur suprême,
Dans l'ombre du passé te recherchant toi-même,
Tu rappelais tes anciens jours !

Ils passaient devant toi comme des flots sublimes
Dont l'oeil voit sur les mers étinceler les cimes,
Ton oreille écoutait leur bruit harmonieux !
Et, d'un reflet de gloire éclairant ton visage,
Chaque flot t'apportait une brillante image
Que tu suivais longtemps des yeux !

Là, sur un pont tremblant tu défiais la foudre !
Là, du désert sacré tu réveillais la poudre !
Ton coursier frissonnait dans les flots du Jourdain !
Là, tes pas abaissaient une cime escarpée !
Là, tu changeais en sceptre une invincible épée !
Ici... Mais quel effroi soudain ?

Pourquoi détournes-tu ta paupière éperdue ?
D'où vient cette pâleur sur ton front répandue ?
Qu'as-tu vu tout à coup dans l'horreur du passé ?
Est-ce d'une cité la ruine fumante ?
Ou du sang des humains quelque plaine écumante ?
Mais la gloire a tout effacé.

La gloire efface tout !... tout excepté le crime !
Mais son doigt me montrait le corps d'une victime ;
Un jeune homme! un héros, d'un sang pur inondé !
Le flot qui l'apportait, passait, passait, sans cesse ;
Et toujours en passant la vague vengeresse
Lui jetait le nom de Condé !...

Comme pour effacer une tache livide,
On voyait sur son front passer sa main rapide ;
Mais la trace du sang sous son doigt renaissait !
Et, comme un sceau frappé par une main suprême,
La goutte ineffaçable, ainsi qu'un diadème,
Le couronnait de son forfait !

C'est pour cela, tyran! que ta gloire ternie
Fera par ton forfait douter de ton génie !
Qu'une trace de sang suivra partout ton char !
Et que ton nom, jouet d'un éternel orage,
Sera par l'avenir ballotté d'âge en âge
Entre Marius et César !

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Tu mourus cependant de la mort du vulgaire,
Ainsi qu'un moissonneur va chercher son salaire,
Et dort sur sa faucille avant d'être payé !
Tu ceignis en mourant ton glaive sur ta cuisse,
Et tu fus demander récompense ou justice
Au dieu qui t'avait envoyé !

On dit qu'aux derniers jours de sa longue agonie,
Devant l'éternité seul avec son génie,
Son regard vers le ciel parut se soulever !
Le signe rédempteur toucha son front farouche !...
Et même on entendit commencer sur sa bouche
Un nom !... qu'il n'osait achever !

Achève... C'est le dieu qui règne et qui couronne !
C'est le dieu qui punit ! c'est le dieu qui pardonne !
Pour les héros et nous il a des poids divers !
Parle-lui sans effroi ! lui seul peut te comprendre !
L'esclave et le tyran ont tous un compte à rendre,
L'un du sceptre, l'autre des fers !

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Son cercueil est fermé ! Dieu l'a jugé ! Silence !
Son crime et ses exploits pèsent dans la balance :
Que des faibles mortels la main n'y touche plus !
Qui peut sonder, Seigneur, ta clémence infinie ?
Et vous, fléaux de Dieu ! qui sait si le génie
N'est pas une de vos vertus ?...
(Extrait)

Ce n'est pas le canon du noir vendémiaire,
Ni les boulets de juin, ni les bombes de mai,
Qui font la haine éteinte et l'ulcère fermé.
Moi, pour aider le peuple à résoudre un problème,
Je me penche vers lui. Commencement : je l'aime.
Le reste vient après. Oui, je suis avec vous,
J'ai l'obstination farouche d'être doux,
Ô vaincus, et je dis : Non, pas de représailles !
Ô mon vieux coeur pensif, jamais tu ne tressailles
Mieux que sur l'homme en pleurs, et toujours tu vibras
Pour des mères ayant leurs enfants dans les bras.

Quand je pense qu'on a tué des femmes grosses,
Qu'on a vu le matin des mains sortir des fosses,
Ô pitié ! quand je pense à ceux qui vont partir !
Ne disons pas : Je fus proscrit, je fus martyr.
Ne parlons pas de nous devant ces deuils terribles ;
De toutes les douleurs ils traversent les cribles ;
Ils sont vannés au vent qui les emporte, et vont
Dans on ne sait quelle ombre au fond du ciel profond.
Où ? qui le sait ? leurs bras vers nous en vain se dressent.
Oh ! ces pontons sur qui j'ai pleuré reparaissent,
Avec leurs entreponts où l'on expire, ayant
Sur soi l'énormité du navire fuyant !
On ne peut se lever debout ; le plancher tremble ;
On mange avec les doigts au baquet tous ensemble,
On boit l'un après l'autre au bidon, on a chaud,
On a froid, l'ouragan tourmente le cachot ;
L'eau gronde, et l'on ne voit, parmi ces bruits funèbres,
Qu'un canon allongeant son cou dans les ténèbres.
Je retombe en ce deuil qui jadis m'étouffait.
Personne n'est méchant, et que de mal on fait !
Tous ceux qui parlent des merveilles
Leurs fables cachent des sanglots
Et les couleurs de leur oreille
Toujours à des plaintes pareilles
Donnent leurs larmes pour de l'eau

Le peintre assis devant sa toile
A-t-il jamais peint ce qu'il voit
Ce qu'il voit son histoire voile
Et ses ténèbres sont étoiles
Comme chanter change la voix

Ses secrets partout qu'il expose
Ce sont des oiseaux déguisés
Son regard embellit les choses
Et les gens prennent pour des roses
La douleur dont il est brisé

Ma vie au **** mon étrangère
Ce que je fus je l'ai quitté
Et les teintes d'aimer changèrent
Comme roussit dans les fougères
Le songe d'une nuit d'été

Automne automne long automne
Comme le cri du vitrier
De rue en rue et je chantonne
Un air dont lentement s'étonne
Celui qui ne sait plus prier.
Qui donc fera fleurir toute la pauvreté ?
Quand Jésus a quitté le ciel, il l'a quitté
Pour une étable ; il est charpentier, il travaille ;
Né sur l'or, mais sur l'or mystique de la paille,
Entre l'âne et bœuf, l'ignorance et l'erreur,
Lui qui pouvait choisir un berceau d'empereur,
Qu'aurait ému le pied rieur des chambrières,
Préfère une humble crèche où l'ange est en prières !
Certes l'argent est bon, l'or est délicieux,
Mais l'un ouvre l'enfer, l'autre ferme les cieux ;
L'un sait glacer le cœur, l'autre étouffer les âmes ;
L'or met sa clarté louche où l'amour met ses flammes,
L'or est un soleil froid ; le soleil chauffe et luit,
Car il est fils du ciel ; l'or est fils de la nuit :
À pleins bords pour le crime, et rare pour l'aumône,
Il coule, et la famille, où sonne son flot jaune,
S'écroule au bruit joyeux des pièces de vingt francs !
Et plus ils sont dorés, moins les baisers sont francs.
L'or est un mal où l'homme, hélas! cherche un remède.
Sitôt qu'il crie et souffre, il l'appelle à son aide,
Pour vêtir sa misère et combler avec lui
Son cœur vide, et le gouffre amer de son ennui.
Grâce à l'argent, le mal trône et rit sur la terre.
À son contact banal, quelle âme ne s'altère ?
Jésus était-il riche, et Pierre l'était-il ?
Une humble barque, ouvrant sa voile de coutil,
C'est peu - même en comptant le souffle de la brise, -
Cette voile a grandi ; voyez-là, c'est l'Eglise !

Travaillez, c'est la règle, enrichissez-vous, mais
Restez pauvres d'esprit. Laissant les fiers sommets,
Les lys, pour s'élancer, ont mieux aimé les plaines,
Et quant aux dons du ciel : « Aux pauvres les mains pleines. »
Dieu ne visite pas le riche orgueilleux, non !
Pauvre, Jésus le lut, ne voulant d'autre nom.
Mais Jésus l'est toujours, mais son cri monte encore.
Tout pauvre que la lièvre et que la soif dévore,
C'est Jésus. Tout petit qui va pieds nus, c'est Lui.
Notre ennemi sans pain, est-ce encor Jésus ? Oui.
Etre pauvre, avant tout, c'est aimer la sagesse,
Et l'on peut l'être même aux bras de la richesse ;
Être riche, avant tout, c'est n'aimer que l'argent,
Et l'on peut l'être, même en étant indigent !
Être riche d'esprit, désirer, c'est la gêne,
C'est river à son pied une bien lourde chaîne ;
Être pauvre d'esprit, c'est être libre, Eh bien !
Aimez ha liberté, n'appartenez à rien,
Pas même au lit qui s'ouvre à votre échine lasse,
Pas même à votre habit : il est au temps qui passe.

Toute la pauvreté, disais-je en commençant,
La mauvaise richesse, elle est dans notre sang :
Elle est dans nos pourpoints, elle est dans notre code
Et fait l'opinion, comme elle fait la mode.
Ô pauvreté, la France entende votre voix !
France riche d'esprit, beaucoup trop riche en lois !
L'esprit de pauvreté, voilà l'esprit pratique
Qui doit ensoleiller la sombre politique ;
Le roi. ton noble époux, César, un sombre amant,
Sont **** de ta pensée, ô France, en ce moment !
Le front coiffé des plis d'une laine écarlate,
La liberté te rit, la liberté te flatte :
C'est un ange éclatant qui semble un lutteur noir,
Radieux comme l'aube et beau comme le soir,
Car il porte, pareil aux séraphins de l'ombre,
Un masque étincelant sur son visage sombre.
Tu n'as pas peur ? C'est bien. Tu veux le suivre ? Allons.
Mais ne va pas saisir les ciseaux des félons,
Et du fier inconnu dont tu fus curieuse
Sinistrement rogner l'aile mystérieuse.
Ne lui mets pas de loi perfide autour du cou.
S'il n'est pas une brute, arrière le licou !
Qu'il puisse au grand soleil marcher nu dans l'arène,
Et tordre toute chose en sa main souveraine,
Et retremper toute âme en sa cuve qui bout.
Alors nous pourrons voir qui restera debout,
La sagesse divine ou la sagesse humaine,
Si c'est le nom obscur que cet ange ramène,
Ou le nom lumineux dans chaque étoile écrit,
Et si c'est Robespierre ou si c'est Jésus-Christ !
En vain le jour succède au jour,
Ils glissent sans laisser de trace ;
Dans mon âme rien ne t'efface,
Ô dernier songe de l'amour !

Je vois mes rapides années
S'accumuler derrière moi,
Comme le chêne autour de soi
Voit tomber ses feuilles fanées.

Mon front est blanchi par le temps ;
Mon sang refroidi coule à peine,
Semblable à cette onde qu'enchaîne
Le souffle glacé des autans.

Mais ta jeune et brillante image,
Que le regret vient embellir,
Dans mon sein ne saurait vieillir
Comme l'âme, elle n'a point d'âge.

Non, tu n'as pas quitté mes yeux ;
Et quand mon regard solitaire
Cessa de te voir sur la terre,
Soudain je te vis dans les cieux.

Là, tu m'apparais telle encore
Que tu fus à ce dernier jour,
Quand vers ton céleste séjour
Tu t'envolas avec l'aurore.

Ta pure et touchante beauté
Dans les cieux même t'a suivie ;
Tes yeux, où s'éteignait la vie,
Rayonnent d'immortalité !

Du zéphyr l'amoureuse haleine
Soulève encor tes longs cheveux ;
Sur ton sein leurs flots onduleux
Retombent en tresses d'ébène,

L'ombre de ce voile incertain
Adoucit encor ton image,
Comme l'aube qui se dégage
Des derniers voiles du matin.

Du soleil la céleste flamme
Avec les jours revient et fuit ;
Mais mon amour n'a pas de nuit,
Et tu luis toujours sur mon âme.

C'est toi que j'entends, que je vois,
Dans le désert, dans le nuage ;
L'onde réfléchit ton image ;
Le zéphyr m'apporte ta voix.

Tandis que la terre sommeille,
Si j'entends le vent soupirer,
Je crois t'entendre murmurer
Des mots sacrés à mon oreille.

Si j'admire ces feux épars
Qui des nuits parsèment le voile,
Je crois te voir dans chaque étoile
Qui plaît le plus à mes regards.

Et si le souffle du zéphyr
M'enivre du parfum des fleurs.
Dans ses plus suaves odeurs
C'est ton souffle que je respire.

C'est ta main qui sèche mes pleurs,
Quand je vais, triste et solitaire,
Répandre en secret ma prière
Près des autels consolateurs.

Quand je dors, tu veilles dans l'ombre ;
Tes ailes reposent sur moi ;
Tous mes songes viennent de toi,
Doux comme le regard d'une ombre.

Pendant mon sommeil, si ta main
De mes jours déliait la trame,
Céleste moitié de mon âme,
J'irais m'éveiller dans ton sein !

Comme deux rayons de l'aurore,
Comme deux soupirs confondus,
Nos deux âmes ne forment plus
Qu'une âme, et je soupire encore !
Maintenant que Paris, ses pavés et ses marbres,
Et sa brume et ses toits sont bien **** de mes yeux ;
Maintenant que je suis sous les branches des arbres,
Et que je puis songer à la beauté des cieux ;

Maintenant que du deuil qui m'a fait l'âme obscure
Je sors, pâle et vainqueur,
Et que je sens la paix de la grande nature
Qui m'entre dans le cœur ;

Maintenant que je puis, assis au bord des ondes,
Emu par ce superbe et tranquille horizon,
Examiner en moi les vérités profondes
Et regarder les fleurs qui sont dans le gazon ;

Maintenant, ô mon Dieu ! que j'ai ce calme sombre
De pouvoir désormais
Voir de mes yeux la pierre où je sais que dans l'ombre
Elle dort pour jamais ;

Maintenant qu'attendri par ces divins spectacles,
Plaines, forêts, rochers, vallons, fleuve argenté,
Voyant ma petitesse et voyant vos miracles,
Je reprends ma raison devant l'immensité ;

Je viens à vous, Seigneur, père auquel il faut croire ;
Je vous porte, apaisé,
Les morceaux de ce cœur tout plein de votre gloire
Que vous avez brisé ;

Je viens à vous, Seigneur ! confessant que vous êtes
Bon, clément, indulgent et doux, ô Dieu vivant !
Je conviens que vous seul savez ce que vous faites,
Et que l'homme n'est rien qu'un jonc qui tremble au vent ;

Je dis que le tombeau qui sur les morts se ferme
Ouvre le firmament ;
Et que ce qu'ici-bas nous prenons pour le terme
Est le commencement ;

Je conviens à genoux que vous seul, père auguste,
Possédez l'infini, le réel, l'absolu ;
Je conviens qu'il est bon, je conviens qu'il est juste
Que mon cœur ait saigné, puisque Dieu l'a voulu !

Je ne résiste plus à tout ce qui m'arrive
Par votre volonté.
L'âme de deuils en deuils, l'homme de rive en rive,
Roule à l'éternité.

Nous ne voyons jamais qu'un seul côté des choses ;
L'autre plonge en la nuit d'un mystère effrayant.
L'homme subit le joug sans connaître les causes.
Tout ce qu'il voit est court, inutile et fuyant.

Vous faites revenir toujours la solitude
Autour de tous ses pas.
Vous n'avez pas voulu qu'il eût la certitude
Ni la joie ici-bas !

Dès qu'il possède un bien, le sort le lui retire.
Rien ne lui fut donné, dans ses rapides jours,
Pour qu'il s'en puisse faire une demeure, et dire :
C'est ici ma maison, mon champ et mes amours !

Il doit voir peu de temps tout ce que ses yeux voient ;
Il vieillit sans soutiens.
Puisque ces choses sont, c'est qu'il faut qu'elles soient ;
J'en conviens, j'en conviens !

Le monde est sombre, ô Dieu ! l'immuable harmonie
Se compose des pleurs aussi bien que des chants ;
L'homme n'est qu'un atome en cette ombre infinie,
Nuit où montent les bons, où tombent les méchants.

Je sais que vous avez bien autre chose à faire
Que de nous plaindre tous,
Et qu'un enfant qui meurt, désespoir de sa mère,
Ne vous fait rien, à vous !

Je sais que le fruit tombe au vent qui le secoue,
Que l'oiseau perd sa plume et la fleur son parfum ;
Que la création est une grande roue
Qui ne peut se mouvoir sans écraser quelqu'un ;

Les mois, les jours, les flots des mers, les yeux qui pleurent,
Passent sous le ciel bleu ;
Il faut que l'herbe pousse et que les enfants meurent ;
Je le sais, ô mon Dieu !

Dans vos cieux, au-delà de la sphère des nues,
Au fond de cet azur immobile et dormant,
Peut-être faites-vous des choses inconnues
Où la douleur de l'homme entre comme élément.

Peut-être est-il utile à vos desseins sans nombre
Que des êtres charmants
S'en aillent, emportés par le tourbillon sombre
Des noirs événements.

Nos destins ténébreux vont sous des lois immenses
Que rien ne déconcerte et que rien n'attendrit.
Vous ne pouvez avoir de subites clémences
Qui dérangent le monde, ô Dieu, tranquille esprit !

Je vous supplie, ô Dieu ! de regarder mon âme,
Et de considérer
Qu'humble comme un enfant et doux comme une femme,
Je viens vous adorer !

Considérez encor que j'avais, dès l'aurore,
Travaillé, combattu, pensé, marché, lutté,
Expliquant la nature à l'homme qui l'ignore,
Eclairant toute chose avec votre clarté ;

Que j'avais, affrontant la haine et la colère,
Fait ma tâche ici-bas,
Que je ne pouvais pas m'attendre à ce salaire,
Que je ne pouvais pas

Prévoir que, vous aussi, sur ma tête qui ploie
Vous appesantiriez votre bras triomphant,
Et que, vous qui voyiez comme j'ai peu de joie,
Vous me reprendriez si vite mon enfant !

Qu'une âme ainsi frappée à se plaindre est sujette,
Que j'ai pu blasphémer,
Et vous jeter mes cris comme un enfant qui jette
Une pierre à la mer !

Considérez qu'on doute, ô mon Dieu ! quand on souffre,
Que l'œil qui pleure trop finit par s'aveugler,
Qu'un être que son deuil plonge au plus noir du gouffre,
Quand il ne vous voit plus, ne peut vous contempler,

Et qu'il ne se peut pas que l'homme, lorsqu'il sombre
Dans les afflictions,
Ait présente à l'esprit la sérénité sombre
Des constellations !

Aujourd'hui, moi qui fus faible comme une mère,
Je me courbe à vos pieds devant vos cieux ouverts.
Je me sens éclairé dans ma douleur amère
Par un meilleur regard jeté sur l'univers.

Seigneur, je reconnais que l'homme est en délire
S'il ose murmurer ;
Je cesse d'accuser, je cesse de maudire,
Mais laissez-moi pleurer !

Hélas ! laissez les pleurs couler de ma paupière,
Puisque vous avez fait les hommes pour cela !
Laissez-moi me pencher sur cette froide pierre
Et dire à mon enfant : Sens-tu que je suis là ?

Laissez-moi lui parler, incliné sur ses restes,
Le soir, quand tout se tait,
Comme si, dans sa nuit rouvrant ses yeux célestes,
Cet ange m'écoutait !

Hélas ! vers le passé tournant un œil d'envie,
Sans que rien ici-bas puisse m'en consoler,
Je regarde toujours ce moment de ma vie
Où je l'ai vue ouvrir son aile et s'envoler !

Je verrai cet instant jusqu'à ce que je meure,
L'instant, pleurs superflus !
Où je criai : L'enfant que j'avais tout à l'heure,
Quoi donc ! je ne l'ai plus !

Ne vous irritez pas que je sois de la sorte,
Ô mon Dieu ! cette plaie a si longtemps saigné !
L'angoisse dans mon âme est toujours la plus forte,
Et mon cœur est soumis, mais n'est pas résigné.

Ne vous irritez pas ! fronts que le deuil réclame,
Mortels sujets aux pleurs,
Il nous est malaisé de retirer notre âme
De ces grandes douleurs.

Voyez-vous, nos enfants nous sont bien nécessaires,
Seigneur ; quand on a vu dans sa vie, un matin,
Au milieu des ennuis, des peines, des misères,
Et de l'ombre que fait sur nous notre destin,

Apparaître un enfant, tête chère et sacrée,
Petit être joyeux,
Si beau, qu'on a cru voir s'ouvrir à son entrée
Une porte des cieux ;

Quand on a vu, seize ans, de cet autre soi-même
Croître la grâce aimable et la douce raison,
Lorsqu'on a reconnu que cet enfant qu'on aime
Fait le jour dans notre âme et dans notre maison,

Que c'est la seule joie ici-bas qui persiste
De tout ce qu'on rêva,
Considérez que c'est une chose bien triste
De le voir qui s'en va !
Porte ta vie ailleurs, ô toi qui fus ma vie ;
Verse ailleurs ce trésor que j'avais pour tout bien.
Va chercher d'autres lieux, toi qui fus ma patrie,
Va fleurir, ô soleil, ô ma belle chérie,
Fais riche un autre amour et souviens-toi du mien.

Laisse mon souvenir te suivre **** de France ;
Qu'il parte sur ton coeur, pauvre bouquet fané,
Lorsque tu l'as cueilli, j'ai connu l'Espérance,
Je croyais au bonheur, et toute ma souffrance
Est de l'avoir perdu sans te l'avoir donné.
L'année avait trois fois noué mon humble trame,
Et modelé ma forme en y broyant ses fleurs ,
Et trois fois de ma mère acquitté les douleurs,
Quand le Banc de la tienne éclata : ma jeune âme
Eut dès lors sa promise et l'attira toujours,
Toujours ; tant qu'à la fin elle entra dans mes jours.
Et lorsqu'à ton insu tu venais vers ma vie,
J'inventais par le monde un chemin jusqu'à toi ;
C'était **** ; mais l'étoile allait, cherchait pour moi,
Et me frayait la terre où tu m'avais suivie,
Ou tu me reconnus d'autre part ; oui, des cieux ;
Moi de même ; il restait tant de ciel dans tes jeux !

Mais le sais-tu ? trois fois le jour de la naissance
Baisa mon front limpide assoupi d'innocence,
Avant que ton étoile à toi, lente à venir,
Descendît marier notre double avenir.
Oh ! devions-nous ainsi naître absents de nous-mêmes !
Toi, tu ne le sais pas en ce moment ; tu m'aimes,
Je ne suis pas l'aînée. Encor vierge au bonheur,
J'avais un pur aimant pour attirer ton cœur ;
Car le mien, fleur tardive en soi-même exilée,
N'épanouit qu'à toi sa couronne voilée,
Cœur d'attente oppressé dans un tremblant séjour
Où ma mère enferma son nom de femme : Amour.

Comme le rossignol qui meurt de mélodie
Souffle sur son enfant sa tendre maladie,
Morte d'aimer, ma mère, à son regard d'adieu,
Me raconta son âme et me souffla son Dieu.
Triste de me quitter, cette mère charmante,
Me léguant à regret la flamme qui tourmente,
Jeune, à son jeune enfant tendit longtemps sa main,
Comme pour le sauver par le même chemin.
Et je restai longtemps, longtemps, sans la comprendre,
Et longtemps à pleurer son secret sans l'apprendre,
A pleurer de sa mort le mystère inconnu,
Le portant tout scellé dans mon cœur ingénu,
Ce cœur signé d'amour comme sa tendre proie,
Où pas un chant mortel n'éveillait une joie.
On eût dit, à sentir ses faibles battements,
Une montre cachée où s'arrêtait le temps ;
On eût dit qu'à plaisir il se retint de vivre.
Comme un enfant dormeur qui n'ouvre pas son livre,
Je ne voulais rien lire à mon sort, j'attendais ;
Et tous les jours levés sur moi, je les perdais.
Par ma ceinture noire à la terre arrêtée,
Ma mère était partie et tout m'avait quittée :
Le monde était trop grand, trop défait, trop désert ;
Une voix seule éteinte en changeait le concert :
Je voulais me sauver de ses dures contraintes,
J'avais peur de ses lois, de ses morts, de ses craintes,
Et ne sachant où fuir ses échos durs et froids,
Je me prenais tout haut à chanter mes effrois !

Mais quand tu dis : « Je viens ! » quelle cloche de fête
Fit bondir le sommeil attardé sur ma tête ;
Quelle rapide étreinte attacha notre sort,
Pour entre-ailer nos jours d'un fraternel essor !
Ma vie, elle avait froid, s'alluma dans la tienne,
Et ma vie a brillé, comme on voit au soleil
Se dresser une fleur sans que rien la soutienne,
Rien qu'un baiser de l'air, rien qu'un rayon vermeil...
Aussi, dès qu'en entier ton âme m'eut saisie,
Tu fus ma piété ! Mon ciel ! Ma poésie !
Aussi, sans te parler, je te nomme souvent
Mon frère devant Dieu ! Mon âme ! Ou mon enfant !
Tu ne sauras jamais, comme je sais moi-même,
A quelle profondeur je t'atteins et je t'aime !
Tu serais par la mort arraché de mes vœux,
Que pour te ressaisir mon âme aurait des yeux,
Des lueurs, des accents, des larmes, des prières,
Qui forceraient la mort à rouvrir tes paupières !
Je sais de quels frissons ta mère a dû frémir
Sur tes sommeils d'enfant : moi, je t'ai vu dormir :
Tous ses effrois charmants ont tremblé dans mon âme ;
Tu dis vrai, tu dis vrai ; je ne suis qu'une femme ;
Je ne sais qu'inventer pour te faire un bonheur ;
Une surprise à voir s'émerveiller ton cœur !

Toi, ne sois pas jaloux ! Quand tu me vois penchée,
Quand tu me vois me taire, et te craindre et souffrir,
C'est que l'amour m'accable. Oh ! Si j'en dois mourir,
Attends : je veux savoir si, quand tu m'as cherchée,
Tu t'es dit : « Voici l'âme où j'attache mon sort
Et que j'épouserai dans la vie ou la mort. »
Oh ! Je veux le savoir. Oh ! L'as-tu dit ? ... pardonne !
On est étrange, on veut échanger ce qu'on donne.
Ainsi, pour m'acquitter de ton regard à toi,
Je voudrais être un monde et te dire : « Prends-moi ! »
Née avant toi... douleur ! Tu le verrais peut-être,
Si je vivais trop ****. Ne le fais point paraître,
Ne dis pas que l'amour sait compter, trompe-moi :
Je m'en ressouviendrai pour mourir avant toi !
Mère des jeux latins et des voluptés grecques,
******, où les baisers, languissants ou joyeux,
Chauds comme les soleils, frais comme les pastèques,
Font l'ornement des nuits et des jours glorieux,
Mère des jeux latins et des voluptés grecques,

******, où les baisers sont comme les cascades
Qui se jettent sans peur dans les gouffres sans fonds
Et courent , sanglotant et gloussant par saccades,
Orageux et secrets, fourmillants et profonds ;
******, où les baisers sont comme les cascades !

******, où les Phrynés l'une l'autre s'attirent,
Où jamais un soupir ne resta sans écho,
A l'égal de Paphos les étoiles t'admirent,
Et Vénus à bon droit peut jalouser Sapho !
******, où les Phrynés l'une l'autre s'attirent,

******, terre des nuits chaudes et langoureuses,
Qui font qu'à leurs miroirs, stérile volupté !
Les filles aux yeux creux, de leur corps amoureuses,
Caressent les fruits mûrs de leur nubilité ;
******, terre des nuits chaudes et langoureuses,

Laisse du vieux Platon se froncer l'oeil austère ;
Tu tires ton pardon de l'excès des baisers,
Reine du doux empire, aimable et noble terre,
Et des raffinements toujours inépuisés.
Laisse du vieux Platon se froncer l'oeil austère.

Tu tires ton pardon de l'éternel martyre,
Infligé sans relâche aux coeurs ambitieux,
Qu'attire **** de nous le radieux sourire
Entrevu vaguement au bord des autres cieux !
Tu tires ton pardon de l'éternel martyre !

Qui des Dieux osera, ******, être ton juge
Et condamner ton front pâli dans les travaux,
Si ses balances d'or n'ont pesé le déluge
De larmes qu'à la mer ont versé tes ruisseaux ?
Qui des Dieux osera, ******, être ton juge ?

Que nous veulent les lois du juste et de l'injuste ?
Vierges au coeur sublime, honneur de l'Archipel,
Votre religion comme une autre est auguste,
Et l'amour se rira de l'Enfer et du Ciel !
Que nous veulent les lois du juste et de l'injuste ?

Car ****** entre tous m'a choisi sur la terre
Pour chanter le secret de ses vierges en fleurs,
Et je fus dès l'enfance admis au noir mystère
Des rires effrénés mêlés aux sombres pleurs ;
Car ****** entre tous m'a choisi sur la terre.

Et depuis lors je veille au sommet de Leucate,
Comme une sentinelle à l'oeil perçant et sûr,
Qui guette nuit et jour brick, tartane ou frégate,
Dont les formes au **** frissonnent dans l'azur ;
Et depuis lors je veille au sommet de Leucate,

Pour savoir si la mer est indulgente et bonne,
Et parmi les sanglots dont le roc retentit
Un soir ramènera vers ******, qui pardonne,
Le cadavre adoré de Sapho qui partit
Pour savoir si la mer est indulgente et bonne !

De la mâle Sapho, l'amante et le poète,
Plus belle que Vénus par ses mornes pâleurs !
- L'oeil d'azur est vaincu par l'oeil noir que tachète
Le cercle ténébreux tracé par les douleurs
De la mâle Sapho, l'amante et le poète !

- Plus belle que Vénus se dressant sur le monde
Et versant les trésors de sa sérénité
Et le rayonnement de sa jeunesse blonde
Sur le vieil Océan de sa fille enchanté ;
Plus belle que Vénus se dressant sur le monde !

- De Sapho qui mourut le jour de son blasphème,
Quand, insultant le rite et le culte inventé,
Elle fit son beau corps la pâture suprême
D'un brutal dont l'orgueil punit l'impiété
De celle qui mourut le jour de son blasphème.

Et c'est depuis ce temps que ****** se lamente,
Et, malgré les honneurs que lui rend l'univers,
S'enivre chaque nuit du cri de la tourmente
Que poussent vers les cieux ses rivages déserts.
Et c'est depuis ce temps que ****** se lamente !

— The End —