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L B May 2019
No one so shy
as moonlight on waterlilies
of a blue-black night



         Personne si timide
         au clair de lune sur les nénuphars
         Ce soir, bleu-noir
Written first in English as a poetry assignment to be translated to another language.  I realized  immediately that my translation was far more beautiful.  It usually works the other way around.
À Catulle Mendès


La petite marquise Osine est toute belle,

Elle pourrait aller grossir la ribambelle

Des folles de Watteau sous leur chapeau de fleurs

Et de soleil, mais comme on dit, elle aime ailleurs

Parisienne en tout, spirituelle et bonne

Et mauvaise à ne rien redouter de personne,

Avec cet air mi-faux qui fait que l'on vous croit,

C'est un ange fait pour le monde qu'elle voit,

Un ange blond, et même on dit qu'il a des ailes.


Vingt soupirants, brûlés du feu des meilleurs zèles

Avaient en vain quêté leur main à ses seize ans,

Quand le pauvre marquis, quittant ses paysans

Comme il avait quitté son escadron, vint faire

Escale au Jockey ; vous connaissez son affaire

Avec la grosse Emma de qui - l'eussions-nous cru ?

Le bon garçon était absolument féru,

Son désespoir après le départ de la grue,

Le duel avec Gontran, c'est vieux comme la rue ;

Bref il vit la petite un jour dans un salon,

S'en éprit tout d'un coup comme un fou ; même l'on

Dit qu'il en oublia si bien son infidèle

Qu'on le voyait le jour d'ensuite avec Adèle.

Temps et mœurs ! La petite (on sait tout aux Oiseaux)

Connaissait le roman du cher, et jusques aux

Moindres chapitres : elle en conçut de l'estime.

Aussi quand le marquis offrit sa légitime

Et sa main contre sa menotte, elle dit : Oui,

Avec un franc parler d'allégresse inouï.

Les parents, voyant sans horreur ce mariage

(Le marquis était riche et pouvait passer sage)

Signèrent au contrat avec laisser-aller.

Elle qui voyait là quelqu'un à consoler

Ouït la messe dans une ferveur profonde.


Elle le consola deux ans. Deux ans du monde !


Mais tout passe !

Si bien qu'un jour qu'elle attendait

Un autre et que cet autre atrocement tardait,

De dépit la voilà soudain qui s'agenouille

Devant l'image d'une Vierge à la quenouille

Qui se trouvait là, dans cette chambre en garni,

Demandant à Marie, en un trouble infini,

Pardon de son péché si grand, - si cher encore

Bien qu'elle croie au fond du cœur qu'elle l'abhorre.


Comme elle relevait son front d'entre ses mains

Elle vit Jésus-Christ avec les traits humains

Et les habits qu'il a dans les tableaux d'église.

Sévère, il regardait tristement la marquise.

La vision flottait blanche dans un jour bleu

Dont les ondes voilant l'apparence du lieu,

Semblaient envelopper d'une atmosphère élue

Osine qui tremblait d'extase irrésolue

Et qui balbutiait des exclamations.

Des accords assoupis de harpes de Sions

Célestes descendaient et montaient par la chambre

Et des parfums d'encens, de cinnamome et d'ambre

Fluaient, et le parquet retentissait des pas

Mystérieux de pieds que l'on ne voyait pas,

Tandis qu'autour c'était, en cadences soyeuses,

Un grand frémissement d'ailes mystérieuses

La marquise restait à genoux, attendant,

Toute admiration peureuse, cependant.


Et le Sauveur parla :

« Ma fille, le temps passe,

Et ce n'est pas toujours le moment de la grâce.

Profitez de cette heure, ou c'en est fait de vous. »


La vision cessa.

Oui certes, il est doux

Le roman d'un premier amant. L'âme s'essaie,

C'est un jeune coureur à la première haie.

C'est si mignard qu'on croit à peine que c'est mal.

Quelque chose d'étonnamment matutinal.

On sort du mariage habitueux. C'est comme

Qui dirait la lueur aurorale de l'homme

Et les baisers parmi cette fraîche clarté

Sonnent comme des cris d'alouette en été,

Ô le premier amant ! Souvenez-vous, mesdames !

Vagissant et timide élancement des âmes

Vers le fruit défendu qu'un soupir révéla...

Mais le second amant d'une femme, voilà !

On a tout su. La faute est bien délibérée

Et c'est bien un nouvel état que l'on se crée,

Un autre mariage à soi-même avoué.

Plus de retour possible au foyer bafoué.

Le mari, débonnaire ou non, fait bonne garde

Et dissimule mal. Déjà rit et bavarde

Le monde hostile et qui sévirait au besoin.

Ah, que l'aise de l'autre intrigue se fait **** !

Mais aussi cette fois comme on vit ; comme on aime,

Tout le cœur est éclos en une fleur suprême.

Ah, c'est bon ! Et l'on jette à ce feu tout remords,

On ne vit que pour lui, tous autres soins sont morts.

On est à lui, on n'est qu'à lui, c'est pour la vie,

Ce sera pour après la vie, et l'on défie

Les lois humaines et divines, car on est

Folle de corps et d'âme, et l'on ne reconnaît

Plus rien, et l'on ne sait plus rien, sinon qu'on l'aime !


Or cet amant était justement le deuxième

De la marquise, ce qui fait qu'un jour après,

- Ô sans malice et presque avec quelques regrets -

Elle le revoyait pour le revoir encore.

Quant au miracle, comme une odeur s'évapore,

Elle n'y pensa plus bientôt que vaguement.


Un matin, elle était dans son jardin charmant,

Un matin de printemps, un jardin de plaisance.

Les fleurs vraiment semblaient saluer sa présence,

Et frémissaient au vent léger, et s'inclinaient

Et les feuillages, verts tendrement, lui donnaient

L'aubade d'un timide et délicat ramage

Et les petits oiseaux, volant à son passage,

Pépiaient à plaisir dans l'air tout embaumé

Des feuilles, des bourgeons et des gommes de mai.

Elle pensait à lui ; sa vue errait, distraite,

À travers l'ombre jeune et la pompe discrète

D'un grand rosier bercé d'un mouvement câlin,

Quand elle vit Jésus en vêtements de lin

Qui marchait, écartant les branches de l'arbuste

Et la couvait d'un long regard triste. Et le Juste

Pleurait. Et tout en un instant s'évanouit.


Elle se recueillait.

Soudain un petit bruit

Se fit. On lui portait en secret une lettre,

Une lettre de lui, qui lui marquait peut-être

Un rendez-vous.


Elle ne put la déchirer.


. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .


Marquis, pauvre marquis, qu'avez-vous à pleurer

Au chevet de ce lit de blanche mousseline ?

Elle est malade, bien malade.

« Sœur Aline,

A-t-elle un peu dormi ? »

- « Mal, monsieur le marquis. »

Et le marquis pleurait.

« Elle est ainsi depuis

Deux heures, somnolente et calme. Mais que dire

De la nuit ? Ah, monsieur le marquis, quel délire !

Elle vous appelait, vous demandait pardon

Sans cesse, encor, toujours, et tirait le cordon

De sa sonnette. »

Et le marquis frappait sa tête

De ses deux poings et, fou dans sa douleur muette

Marchait à grands pas sourds sur les tapis épais

(Dès qu'elle fut malade, elle n'eut pas de paix

Qu'elle n'eût avoué ses fautes au pauvre homme

Qui pardonna.) La sœur reprit pâle : « Elle eut comme

Un rêve, un rêve affreux. Elle voyait Jésus,

Terrible sur la nue et qui marchait dessus,

Un glaive dans la main droite, et de la main gauche

Qui ramait lentement comme une faux qui fauche,

Écartant sa prière, et passait furieux. »


. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .


Un prêtre, saluant les assistants des yeux,

Entre.

Elle dort.

Ô ses paupières violettes !

Ô ses petites mains qui tremblent maigrelettes !

Ô tout son corps perdu dans les draps étouffants !


Regardez, elle meurt de la mort des enfants.

Et le prêtre anxieux, se penche à son oreille.

Elle s'agite un peu, la voilà qui s'éveille,

Elle voudrait parler, la voilà qui s'endort

Plus pâle.

Et le marquis : « Est-ce déjà la mort ? »

Et le docteur lui prend les deux mains, et sort vite.


On l'enterrait hier matin. Pauvre petite !
Il y a des natures purement contemplatives et tout à fait impropres à l'action, qui cependant, sous une impulsion mystérieuse et inconnue, agissent quelquefois avec une rapidité dont elles se seraient crues elles-mêmes incapables.

Tel qui, craignant de trouver chez son concierge une nouvelle chagrinante, rôde lâchement une heure devant sa porte sans oser rentrer, tel qui garde quinze jours une lettre sans la décacheter, ou ne se résigne qu'au bout de six mois à opérer une démarche nécessaire depuis un an, se sentent quelquefois brusquement précipités vers l'action par une force irrésistible, comme la flèche d'un arc. Le moraliste et le médecin, qui prétendent tout savoir, ne peuvent pas expliquer d'où vient si subitement une si folle énergie à ces âmes paresseuses et voluptueuses, et comment, incapables d'accomplir les choses les plus simples et les plus nécessaires, elles trouvent à une certaine minute un courage de luxe pour exécuter les actes les plus absurdes et souvent même les plus dangereux.

Un de mes amis, le plus inoffensif rêveur qui ait existé, a mis une fois le feu à une forêt pour voir, disait-il, si le feu prenait avec autant de facilité qu'on l'affirme généralement. Dix fois de suite, l'expérience manqua ; mais, à la onzième, elle réussit beaucoup trop bien.

Un autre allumera un cigare à côté d'un tonneau de poudre, pour voir, pour savoir, pour tenter la destinée, pour se contraindre lui-même à faire preuve d'énergie, pour faire le joueur, pour connaître les plaisirs de l'anxiété, pour rien, par caprice, par désœuvrement.

C'est une espèce d'énergie qui jaillit de l'ennui et de la rêverie ; et ceux en qui elle se manifeste si opinément sont, en général, comme je l'ai dit, les plus indolents et les plus rêveurs des êtres.

Un autre, timide à ce point qu'il baisse les yeux même devant les regards des hommes, à ce point qu'il lui faut rassembler toute sa pauvre volonté pour entrer dans un café ou passer devant le bureau d'un théâtre, où les contrôleurs lui paraissent investis de la majesté de Minos, d'Éaque et de Rhadamanthe, sautera brusquement au cou d'un vieillard qui passe à côté de lui et l'embrassera avec enthousiasme devant la foule étonnée.

- Pourquoi ? Parce que... parce que cette physionomie lui était irrésistiblement sympathique ? Peut-être ; mais il est plus légitime de supposer que lui-même il ne sait pas pourquoi.

J'ai été plus d'une fois victime de ces crises et de ces élans, qui nous autorisent à croire que des Démons malicieux se glissent en nous et nous font accomplir, à notre insu, leurs plus absurdes volontés.

Un matin je m'étais levé maussade, triste, fatigué d'oisiveté, et poussé, me semblait-il, à faire quelque chose de grand, une action d'éclat ; et j'ouvris la fenêtre, hélas !

(Observez, je vous prie, que l'esprit de mystification qui, chez quelques personnes, n'est pas le résultat d'un travail ou d'une combinaison, mais d'une inspiration fortuite, participe beaucoup, ne fût-ce que par l'ardeur du désir, de cette humeur, hystérique selon les médecins, satanique selon ceux qui pensent un peu mieux que les médecins, qui nous pousse sans résistance vers une foule d'actions dangereuses ou inconvenantes.)

La première personne que j'aperçus dans la rue, ce fut un vitrier dont le cri perçant, discordant, monta jusqu'à moi à travers la lourde et sale atmosphère parisienne. Il me serait d'ailleurs impossible de dire pourquoi je fus pris à l'égard de ce pauvre homme d'une haine aussi soudaine que despotique.

« - Hé ! hé ! » et je lui criai de monter. Cependant je réfléchissais, non sans quelque gaieté, que, la chambre étant au sixième étage et l'escalier fort étroit, l'homme devait éprouver quelque peine à opérer son ascension et accrocher en maint endroit les angles de sa fragile marchandise.

Enfin il parut : j'examinai curieusement toutes ses vitres, et je lui dis : « - Comment ? vous n'avez pas de verres de couleur ? des verres roses, rouges, bleus, des vitres magiques, des vitres de paradis ? Impudent que vous êtes ! vous osez vous promener dans des quartiers pauvres, et vous n'avez pas même de vitres qui fassent voir la vie en beau ! » Et je le poussai vivement vers l'escalier, où il trébucha en grognant.

Je m'approchai du balcon et je me saisis d'un petit *** de fleurs, et quand l'homme reparut au débouché de la porte, je laissai tomber perpendiculairement mon engin de guerre sur le rebord postérieur de ses crochets ; et le choc le renversant, il acheva de briser sous son dos toute sa pauvre fortune ambulatoire qui rendit le bruit éclatant d'un palais de cristal crevé par la foudre.

Et, ivre de ma folie, je lui criai furieusement : « La vie en beau ! la vie en beau ! »

Ces plaisanteries nerveuses ne sont pas sans péril, et on peut souvent les payer cher. Mais qu'importe l'éternité de la damnation à qui a trouvé dans une seconde l'infini de la jouissance ?
AJ Sep 2015
Tu es comme le printemps,
Comme le vent qui souffle
Par terre, qui me frappe
À cœur, qui me soulève
Et me jete au ciel,
Où les nuages me caressent le visage
Et me disent des mots
D'amour et gentillesse,
De force et de jeunesse.

Tu es comme le printemps,
Comme les arbres qui grossissent
Pour que je puisse les admirer,
Pour que je puisse les toucher,
Et sentir la soie de ses
P'**** cheveux qui restent
Dans l'air timide mais éclatant,
En attendant le couche de soleil
Qui s'avance à l'horizon.

Tu es comme le printemps,
Comme les fleurs bleues et rouges
Qui balancent comme des
Spectateurs qui écoutent au musique,
Qui descendent d'espace et embrasse
La terre, et tu es comme le soleil
Qui brille sur les champs,
Qui réchauffe ma poitrine
Et me caresse les lèvres.

Tu es comme le printemps,
Comme l'air frais en descendant
Le soleil, comme l'orange du ciel
Qui se couvre le monde,
Comme l'odeur souple des pommes
Qui accrochent des branches,
Comme le tranquillité de ne rien se passer.

Tu es comme le printemps,
Comme la nuit qui s'approche
Les villes et les campagnes,
Comme les étoiles qui
Me font penser, espérer
Que je peux t'aimer,
Ou te comprendre,
Même si le printemps devient l'hiver.

/

You're like the spring,
Like the wind that blows
Across the earth,
That knocks on my heart,
That lifts me up
And shoots me to heaven,
Where the clouds caress my face
And tell me words
Of love and kindness,
Of strength and youth.

You are like the spring,
Like the trees that grow
So that I can admire them,
So that I can touch them,
And feel the silk of their
Little hairs that sit
In the timid yet lively air,
Waiting for the sunset
That advances on the horizon.

You are like the spring,
Like the blue and red flowers
That sway like audience members
Listening to music,
Who descend from space and kiss the soil,
And you are like the sun
That shines on the fields,
That heats my chest and kisses my lips.

You are like the spring,
Like the cool air that comes
When the sun goes down,
Like the orange of the sky that covers the world,
Like the supple scent of apples
That hang from branches,
Like the peace of nothing happening.

You are like the spring,
Like the night that approaches
The cities and country-sides,
Like the stars that make me think,
Even hope that I can love you,
Or understand you,
Even if the spring becomes winter.
Je peux emporter votre douleur encore
une fois vous vous sentez comme retomber
dans le même lit c'était presque facile
de tomber en amour avec moi comme je t'aime , mais vous ne serez jamais m'aimer
comme que vous
êtes un ange et je suis Satan spawn

Très chers mère Marie veuillez me pardonner votre favori pécheur car je suis maintenant n'est plus capable de faire la lumière dans ce monde de la sombre et froide Blackhearts timide que j'adore
AJ Oct 2015
Le ciel me parle des mots doux
qui brillent comme des feux rouges
et brûlent dans la poitrine,
piquent sur les champs créés des espères
et des possibilités oubliés.

Peut-être que je suis perdu,
sorti de la maison des conséquences,
rendu malheureux par des phrases simples
et lavé par les eaux de ton étreinte ;
peut-être que je suis oublié,
pas connu par les gens qui se crient
pour l’amour ou la douleur
ou contaminé par le sang bleu
du jour qui reste dans l’air timide.

Peut-être que j’ai peur,
peur de ta regarde, peur d’être  
frappé par tes yeux sympathiques
et éclatants, peur d’être jugé par
le bon dieu de la tristesse,
embrassé par le cœur qui me fait pleurer.

Peut-être que je vis avec
l’incertitude de tes pensés éphémères,
avec l’obligation de ne rien se faire,
avec l’impression de doute sur ta bouche,
avec la sourire malhonnête
qui ne me respecte en plus.

Peut-être que je dois vivre sans toi,
car tu me rends fâché avec ton voix couché,
car tu me montres ton cœur mais
ne me laisse pas de le tenir,
car tu me dis que tu es sincère  
sans avoir assez de témoins,
car tu me fais faim
mais ne me laisse pas manger.

Peut-être que tu n'es pas pour moi ;
Peut-être que tu es vraiment pour toi.  

/

The sky speaks to me sweet words
that shine like red fires
and burn in the chest,
sting on the fields created by hopes
and forgotten possibilities.

Maybe I’m lost,
parted with the house of consequences,
made unhappy by simple phrases
and bathed by the waters of your embrace;
maybe I’m forgotten,
unknown by people who cry
for love or pain
or contaminated by the blue blood
of the day that sits in the timid air.

Maybe I’m afraid,
afraid of your gaze, afraid
of being struck by your lovely
and gleaming eyes, afraid to be judged
by the good God of sadness,
afraid to be kissed by the
heart that makes me weep.

Maybe I’m living with
the uncertainty of your fleeting thoughts,
with the obligation to do nothing,
with the impression of doubt on your mouth,
with the dishonest smile
that doesn’t respect me anymore.

Maybe I have to live without you,
because you enrage me with your cloaked voice,
because you show me your heart but
don’t let me hold it,
because you tell me that you’re sincere
without brandishing enough witnesses,
because you make me hungry
but don’t let me eat.

Maybe you're not for me;
Maybe you’re truly for you.
À Manoel de Barros

PSAUME I

Tapi dans la mangrove, bondissant...sautant-matant

Le ciel aux trois-quarts nu

De giraumon, de pissat et de sang...

Assis sur le trottoir, le ciel tousse

Kein-hein kein-hein

Ivre de parfums rouges errants,

De brocarts et de confettis à ses trousses.

Assis à marée basse, électrique...

Insensible aux chevaux des dieux

Qui tournoient

Au-dessus des tambours

Qui chavirent

Insensibles

Aux orgues charnelles

Des moites guérisseuses...

Le ciel caracole,

Glisse, contorsionniste,

Mascarade immobile

Démêlant le cours des amours burlesques

Entre les atolls obscurs

De pistaches et de bonbons,

D’anges et de démons...

Cabriole, tiède et poisseux,

Cisaille à contre-jour

L’orpailleur en transe

Aboyant dans le sérail de mes âmes

Sevrées, esseulées...

L’aube culbute

Dans les lambeaux du gouffre

Dans les calypsos du soleil

D’où sourdent, dégénérées,

Les jambes et les larmes

Qui fraient encore, exotiques

Sur les pilotis

Du carnaval nocturne

D’où va saillir le jour.

PSAUME II

Il pleut sur le kiosque des songes

Des encres mornes

Comme des brindilles

Enfantées de l’œuf tiède

Où s’aimante

Délicieusement noire

La mygale

Fleuve des nuages

Qui emballe

De son ouate ludique

Le rayon nain

Dérobé

Au serpent arc-en-ciel

Enfin rassasié

PSAUME III

Tellurique, dame Terre esquive les amarres

Effervescentes. Le ciel, hameçon entre les îles,

Rayonne, entonne l’odyssée perpétuelle,

Pion libre dans l’espace

Sempiternellement baigné par les baumes

Incendiaires du soleil obèse, son jumeau

Complice des moissons violées, œcuménique,

Humble, jadis et toujours, Terre :

Oasis, océan, oxygène, oeil

Revêtu d’or, jardin où les ombres basses

Exultent, balbutiant des airs amnésiques..."

PSAUME IV

Rebelle lascive

Telle la lune blette

Suçant les corps subtils

Des mangues sauvages

Enroulées dans la pluie d’obsidienne...

Courtisane de toutes les brousses

Avaleuse de poisson vivant

Pour mieux apprendre à nager

Dans les moues du fleuve douillet...

Les lacets se cabrent, dans un baiser de peaux, de tôles et de croix

Les laves du dernier décan affleurent,

Saupoudrent l’écloserie de marbre humide

Et la pellicule humide de feu cru

Enfouit les dieux écartelés

Aux moues du fleuve endiablé..."

PSAUME V

Soudain pagayer dans le vent et découdre l’odeur légère de la forêt

Chasser les désirs cueillis dans la poudre des oiseaux rares

Et repriser dans les entrailles des pétales juteux...

Puis amarrer à la lumière verticale des matins

Un éclair avec le mot “boum”.

PSAUME VI

"Nomades, où sont les nuits ?"

Grince l’arc débandé du soleil

Embrassé à la portée de cristal

Des nuages en menstrues...

Peut-être que la nuit décante
Blottie dans le nid du large

Faite une enfant, se vautre

Sous les flottilles de jasmin

Dévastant les marées,

Traquant le ressac du temps...

Peut-être que la nuit accouche
Bien après les chaleurs

Faite une gueuse, brise

De son cœur de soprano

Les rames de glace de la lune qui s’épand

Dans un banc d’aquarelles...

Ou peut-être, la nuit, peut-être

La nuit, lisse et lasse,

Allaite les étoiles prises

Aux moustiquaires de cendre

Où le ciel foudroyé

Bat en retraite la chamade.

Peut-être qu’elle arraisonne
Les frêles écailles de l’orgasme total

Pour que nul ne sache

Qu’elle est née sans nombril,

Pour que nul ne sache

Qu’elle est grosse d’un jour

Au goût de sel...

PSAUME VII

"Abysses en vue !" vocifère l’huile en larmes

Faisant voler dans l’onguent vagabond

Les feux follets sortis de leur miroir,

Condors de phosphore, cyclones désemparés

Où se bousculent, palefrenières distraites,

Les couleurs qui rient en allant au supplice...

En chapelets, la lumière débouche, foule, broute,

S’autodévore sous la caresse des truelles,

Moud les étincelles, les taches, les brèches

En route vers le seuil du sacrifice,

Et dans l’embellie de l’œil

Éclot le prétendant buriné

Dans l’apothéose du matin soigneusement peint...

PSAUME VIII

Noyée dans la saumure en flammes

Du soir délicieusement grand ouvert, l’indicible lueur

Cloîtrée dans son écrin liquide

Jalonné de boues, moustiques et palétuviers,

Harponne la braise moribonde de charbon rose

Innombrable qui serpente dans le cirque de sable

A force de nager, à force de nager

Éternellement à joncher les grèves de l’arc-en-ciel.

PSAUME IX

Dans la baie, un sein vert flambe

Campant dans un bain de coton...

L’écho, hypnotique, tourne, tourne, prolifique...

Ô îles, les îles

Notes en menottes, ailes balafrées,

Miels de sel, fiels de ciel...

Ô îles, les îles

Filaments de mangue, eaux assoiffées

Larmes chaudes de tambours incoagulables...

Ô îles, les îles

D’où venez-vous, miettes de sang ?

Comment vous êtes-vous posés, papillons,

Au milieu de la grande termitière d’or bleu ?

PSAUME X

Kaki, dans le jour rectiligne,

Le soleil, bibelot tiède et omniprésent,

Affalé dans les sortilèges

De la pluie ensorceleuse..

.
Incrustée dans son terrier maternel,

Luciole équilibriste,

A demi ivre souffre l’espérance,

Soufflant des goélettes de papier...

Les lunes se rétractent lestes et faibles,

La visibilité est bonne

De chenaux en détroits, vont, naufragées,

En débandade, les voluptés,

Roues flamboyantes

Dilacérant les haillons allumés

Des orbites sismiques..

PSAUME XI

Zéro heure, la chauve cascade

Où le délire se découd

Dans les courbes de l’ennui...

Zéro heure, l’édentée

Déchirant les échos

Des obsèques de minuit...

Zéro heure, poupée

Aptère, assoupie

A l’ombre des rêves...

Cartomancienne hérétique

Châtrant les éruptions chagrines,

Châtrant, multipliant les yeux

Vers les plages pourpres...

Zéro heure, nymphe sourde

Défunte à la canne bossue,

Hissant le grand pavois

De la couleur polyphonique,

L’accord,

La peau du poète,

Éclipse magique

De tous les déluges...

PSAUME XII

Songes dans l’extrême sud

Monochromatique

Ancres tapissées,

Couples éteints, inflorescences...

Chevaux cardiaques

Occultés dans un nid lunaire...

Passager de la nef du fou

Fouetté par le roi si bémol

Qui monte à l’échafaud...

Battements rupestres,

Sentiers crevant les lieues

Au rythme des ailes de nuages...

La pluie soudain s’est tue

La liesse s’est tue soudain

Dilapidée dans ce jour rongé...

PSAUME XIII

Éteint dans la lumière, le portraitiste

Brûle l’absence mate,

La suie insolite...

La haute mer se dilue..

L’arche hiberne aussi **** que porte la vie

Dans son sanctuaire de sève

Où la terre saigne ses eaux bouclées

Qui écument des épaves de pierre

Aussi **** que porte la vie.

PSAUME XIV

Les îles du matin m’embrassent

Après une nuit de lune rase

Le ronflement du rayon

Macule en naissant le chœur torride

De l’alcôve qui s’écaille émaillée.

Entre traits, tracés et rayures

Flottent des oranges polymorphes

A portée des mains...

Sous la ménagerie de ses eaux poissonneuses

La gomme méthylique du soleil

Frotte dans le bassin d’étincelles

L’orchestre infime de ce lointain carnaval renié

Qui crépite, savonné...

Entre gravillons et bulles

Flottent des oranges polymorphes

A portée des mains...

Devant l’horloge en rut

Se signent les orangers...

Le soleil consent à la lune

La mare de feu

Greffée dans le pouls vivace de l’ombre ivre...

Entre ruines et volutes

Flottent des oranges polymorphes

Scandaleusement

A portée des mains...

PSAUME XV

Le matin nage, innombrable

Salamandre aux cent venins de verre

Qui se distillent dans une encre de cendres

Offertes au soleil insatiable...

Dans le calice débordant

Des récoltes que la nuit

Ne grignote qu’à moitié,

Les sargasses du désir plongent,

Cinglant le silence des incohérences...

Hilare, la lune

Se réveille et butine

Le nectar indigo

Qui s’attarde

Comme une musique rétinienne

Aux confins du jour...

Ainsi emmurés vifs

Dans le flux impénétrable des reflets,

Vont à l’aveuglette

Dans le palais des singes volants

L’amour et ses tribus aborigènes

Veillant sur la toison rouge du ciel...

PSAUME XVI

Mon deuil échoue à l’aube

Les yeux ouverts sur les laves

De ce volcan éteint

Où s’apaisent les étoiles...

La flèche de l’archer s’évanouit, fauchée...

Le licol de mousseline de l’archipel précieux

Vacille, se dissout,

Orphelin mélancolique

Murmurant des baisers d’aniline

Aux marges du rêve...

Insomnuit d’été

Si seulement je pouvais rêver !

PSAUME XVII

Sur l’échiquier, la nuit chancelle, vénéneuse...

Un vaisseau de pierre au galop s’envole

Au chevet de la mer noyée

Suant la résine...

Sifflotant, le saltimbanque

Éconduit les horizons pétales

Pris du soleil gemme étanche

Dans les écumes du ciel d’étain...

Bientôt, les lunes oscillent

Ondulent, se dérobent frivoles,

L’étalon noir se dissipe

Décochant des flèches en forme de cœur...

Quelque chose se brise dans le noir :

Était-ce un masque ou un miroir ?

Quand luit la dernière tranche d’ombre

Déboussolées, dans la dune de verre, les étoiles

Bégaient...

Les coquilles se détellent de la terre réfractaire...

Le soleil dévastateur s’abreuve de ciel

Cachant les antres de brai...

Tâtant les décadences nacrées

Ointes de sueurs salines

L’amazone enfin répudiée

Chantonne aux aguets

Dans la baie couleur sépia...

PSAUME XVIII

Clic
Hennissement aveugle, l’île

Se déhanche

Toute soie et serpent

Contre l’épi de maïs vert...

Clac
“Marée basse”, dit la reine-mère...

Aucune abeille ne rame,

Ne laboure les pollens de la mer...

Clic
**** des brise-lames

Lisses et bouillonnants

Des crinières sans fin et du goémon,

L’iguane sous la villa jaune...

Le long des bougies

Coule le gouvernail du silence...

Clic
Sous les fleurs délabrées de l’éclair

Dans leur hamac vert

Les vagues veuves, les vagues nues

Courent après les lunes

Et lentement chantent les araignées...

Clic
Parfums de lumière

Qui jouent, jouent, jouent

Se décomposent

Dans une brise d’alcools...

Clic
Chimères de la mer, coup de sifflet final

Rongeant les sables glauques

Les tranchées dans le ciel ouvert

Tapis du soleil et son essaim de sujets...

Clic
La nuit, la mer fructifie

Au ralenti...

PSAUME XIX

"Au feu, au feu !

Feu à la dérive !"

Scandent deux coléoptères...

Le feu fuit !

Le magicien s’est brûlé

A faire sa magie.

Le pôle s’évapore,

Le puits fait l’aumône,

L’enfant aboie,

La moto boite,

La forêt détale,

Le lion se vêt de singe

Noir et doré

Et petit à petit

Va planer

Au-dessus de l’autel fugace

Où gît

Hululant, pullulant, virulent,

Le vol agile craché

Du saxophone ténor...

L’hiver fouette le ciel,

La terre meurt prématurée,

Liane après liane,

Sécrétant comme vestiges

Le tapis de talc

D’une aile de sirène

Et le vertige nuptial

De deux notes jaunes inachevées

Au sein des similitudes.

PSAUME **

Prunelle de gris jaune
Prunelle nuit et mer
Bleu coursier d’argile
Tigresse à la crinière couleur de brume.
Dans le rare verger qu’est l’amour
Audacieuse, elle va, incendiaire
Empaillée dans un paquebot hystérique
Vers le hasard des quais identiques
Les yeux pleins de chaux.

Dans ce chant veuf, dans cette capitale pyromane
La voilà, légère,
Aspirant les équinoxes dans cet air enchaîné
En selle pour un bain d’herbes monastique
Geôlière verte
D’émeraude pure...

PSAUME XXI

L’accordéoniste des abysses
Peint dans l’œil de l’obscur :
Un nuage en zigzaguant
Ancre aux eaux du vide.

Et le gong sue...timide.
Et comme en un tango antique
S’écoule le cri acide

Des teintes atteintes par les balles,
Hoquet du temps incarné
A l’aube d’une pluie sèche de chaleurs vertes.
Et le gong sue...tumide.

Et comme en un tango marin
Caracole la pirogue étoilée du tigre intime
Renversant de son parapluie
Les certitudes les plus ensevelies de la peur.

Et le gong sue...tumide.
Et les papillons enfantent
Des flammes dans les sables mouvants,
Des harpes éoliennes
Comme des gymnastes hués par le soleil en ruines
A la recherche des marées sèches.

Et le gong sue... tumide.
Et comme en un tango de funambules
Les œillères des brebis galeuses
Traversent la toile, vieillissent, exhument le salpêtre
D’un bandonéon dont la sueur incendie les cernes
De la nuit qui jazze...

PSAUME XXII

Tendrement
Le messager lit
Les lignes du vent,
Prend le pouls
Du ventre jaspé
De la basilique d’encre de chine :

-Là-bas, sous les monts de Vénus
Rode le messager,
Troubadour englouti
Par une lave obscure,

Passager invisible
Des failles muettes
Qu’il restaure encore...

Tendrement
Le messager
Harponne
Les coquilles du temps...
A la pointe de l’hameçon,

Un morceau de vitrail
Où à peine filtre
La lueur des entrailles,
On devine soudain
La forme d’un cheval marron
Qui hennit.

PSAUME XXIII

Bleu roi
De ces couleurs pièges.
Bleu de ces teintes imprévisibles.
Issu du venin tribal
Des roses du désert
Le bleu tombe,
Comme un nuage de coton doux,
Sur la brousse atlantique des lèvres
Enflées de secrets,
Où, hystérique, il donne le jour
Sous le kiosque sympathique des pluies cyanes
A une larme de sang,
Daltonienne.

Bleu roi
De ces couleurs mutantes :
Seul le baiser de cobalt réchauffe
Les escales mélancoliques
De ces ailes closes,
Révèle les jeux d’artifice,
Et murmurant des flammes,
Fait évanouir
Le deuil magnétique
Des rênes d’ivoire...

La flèche de l’archer pénètre,
Débridée,
Le voile de mousseline de l’archipel précieux
Qui vacille, se dissout,
Orphelin en suspens, spectre d’aniline
Aux gants d’émeraude
Et aux chaussons d’améthyste...

PSAUME XXIV

Dormir, virgule,
Souffler doucement
Des cases jumelles,
Ramper à nouveau, gigoter,
Jusqu’à ce que tout ne soit plus
Qu’une seule immensité...

Au lieu de l’abîme
La clairière dans la caféière.
Dormir, virgule,
Ça et là,
Lune bleue
Embuée
Sous la baguette du silence...

Le rêve entre et sort

Et jusqu’aux nuages
Craignent la chute
Vers le sommeil...

PSAUME XXV

Les îles et une nuits
Me font chavirer,
Je fuis,
Naufragée inlassable,
Hors du clan tentaculaire
Vers la clarté volatile
Des voiles incendiaires...

Mes nerfs à la fleur du large
Bifurquent,
S’évaporent en filigranes
Plus **** encore...

Bleu nuit devient la mer
Aux portes de son repaire
Ancré à la rive gauche du cœur.

La crique n’est plus ce qu’elle était :
La neige reptile teint les dauphins de rose...
Éden ?
De temps à autre

Passe un trapèze
Balayant le silence.

PSAUME XXVI

Ô Reine, Notre Duc
Sous tes ongles laqués
J’imagine un ciel rouge
Aux parfums de lait de cobra...
Le soleil fait pleuvoir des sceptres sur le fleuve
Et des piranhas aux dents d’eau
Larguent des cerfs-volants sans fin...

“Chantez les très riches heures de l’En-Dehors !”
Crie à la face du levant
Un caméléon qui lisse les ailes du hasard
Planté dans le dédale de ta langue baccarat.

PSAUME XXVII

Près de la passerelle d’ivoire :
“Odyssées,
Métamorphoses,
Mues,
Je vous aime !” "
Selman Akıl May 2017
J'avoue
J'ai mal compris sa beauté
Sa voix tremblante
Sa bouche timide
Ses lèvres émues
Ses yeux noirs
La peau bronzée brillante
Les mouvements de son corps
Et tout ça, et tout ça
Mais surtout
Sa voix tremblante
Et ses yeux noirs
J'ai mal compris tout ça.

Tout ça j'ai mal compris
Parce que
L'amour n'est qu'un écho dans lumière
Mais qu'en vérité
L'écho de la lumière n'existe pas.
Nicole Leblanc Aug 2015
Le soleil se déplie à nouveau
Timide et méfiant
Le mai qui tout a bouleversé
Le jour où je t'ai trouvé

Le paradis, je t'avais dis
Je ne t'avais pas mentis

Mon truc c'est d'apprivoiser les vagues
Rien qu'avec les yeux
C'est **** d'être une affaire facile
Ça demande du temps
De la patience
De la ruse

Ne jamais regarder la terre
Toujours l'horizon

Toujours toi
Excusez moi mademoiselle,
J'espionnais votre compte d'instagram et j'ai regardé toutes vos images,
Parce que votre apparence peut mettre des modèles hors entreprise si vous décidez de poursuivre la mode,
J'ai une théorie sur vos origines et j'aimerais partager cela avec vous,
Vos parents doivent être profondément amoureux quand ils vous ont donné naissance parce que c'est la seule explication que je puisse imaginer,
Vous êtes ridiculement belles, êtes-vous sûr d'être une femme et pas une déesse?


Haha. Je suis sûr que vous avez entendu de meilleurs compliments, mais ma chérie est sincère,
Je peux voir que vous êtes une femme amoureuse d'elle-même et que les gens vous envient pour cette réalisation,
Peut-être que certaines personnes pensent que vous êtes détestabile, mais je pense que vous êtes admirable,
Je me demande ce que les gars doivent faire pour passer du temps autour de vous parce que le chocolat noir, les roses bleues et les conversations douces ne sont pas assez bonnes pour une femme comme vous.

Vous mettez-vous une robe rouge la nuit et dansez-vous au clair de lune? Parce que vous avez l'air charmant tous les matins entre-temps, le reste d'entre nous est encore désordonné,
Je n'ai jamais essayé de cocaïne, mais je suis plutôt sûr que vous avez le goût de vous,
C'était censé être un compliment, alors j'espère que tu peux sourire,
Je suis athée mais Dieu vous bénit coiffeur parce que j'adore vraiment votre coiffure.
Lorsque vous mettez votre rouge à lèvres, vous avez l'air si beau que cela fait la grande faucheuse pour vous éviter tous les jours.

Je sais que nous ne nous connaissons pas et c'est tout à fait ma faute,
Peut-être la peur du rejet m'a-t-elle pris dans la tête et maintenant ça me rend timide comme une petite souris,
J'admet! Je suis passionnément curieux de vous et il me tue doucement ne vous connait pas,
Bien que vous sachiez quelle opportunité amusante pourrait être?
Pour moi de prendre une centaine de photos de vous, car c'est ce que font les photographes,
Et cela me donne beaucoup de chances de vous admirer,
Je sais que ce poème stupide n'a pas de rime, mais même si, j'espère que je vous ai fait rire pendant un moment et que tout ira bien.*

Stef Devid Alexandru ©
I wrote this poem in english and then translated into french for other purposes. If you're kind enough to point me any misspelling or grammar errors that may occur after this translation. I would appreciated it.
Reprends de ce bouquet les trompeuses couleurs,
Ces lettres qui font mon supplice,
Ce portrait qui fut ton complice ;
Il te ressemble, il rit, tout baigné de mes pleurs.

Je te rends ce trésor funeste,
Ce froid témoin de mon affreux ennui.
Ton souvenir brûlant, que je déteste,
Sera bientôt froid comme lui.

Oh ! Reprends tout. Si ma main tremble encore,
C'est que j'ai cru te voir sous ces traits que j'abhorre.
Oui, j'ai cru rencontrer le regard d'un trompeur ;
Ce fantôme a troublé mon courage timide.

Ciel ! On peut donc mourir à l'aspect d'un perfide,
Si son ombre fait tant de peur !
Comme ces feux errants dont le reflet égare,
La flamme de ses yeux a passé devant moi ;

Je rougis d'oublier qu'enfin tout nous sépare ;
Mais je n'en rougis que pour toi.
Que mes froids sentiments s'expriment avec peine !
Amour... que je te hais de m'apprendre la haine !

Eloigne-toi, reprends ces trompeuses couleurs,
Ces lettres, qui font mon supplice,
Ce portrait, qui fut ton complice ;
Il te ressemble, il rit, tout baigné de mes pleurs !

Cache au moins ma colère au cruel qui t'envoie,
Dis que j'ai tout brisé, sans larmes, sans efforts ;
En lui peignant mes douloureux transports,
Tu lui donnerais trop de joie.

Reprends aussi, reprends les écrits dangereux,
Où, cachant sous des fleurs son premier artifice,
Il voulut essayer sa cruauté novice
Sur un coeur simple et malheureux.

Quand tu voudras encore égarer l'innocence,
Quand tu voudras voir brûler et languir,
Quand tu voudras faire aimer et mourir,
N'emprunte pas d'autre éloquence.

L'art de séduire est là, comme il est dans son coeur !
Va ! Tu n'as plus besoin d'étude.
Sois léger par penchant, ingrat par habitude,
Donne la fièvre, amour, et garde ta froideur.

Ne change rien aux aveux pleins de charmes
Dont la magie entraîne au désespoir :
Tu peux de chaque mot calculer le pouvoir,
Et choisir ceux encore imprégnés de mes larmes...

Il n'ose me répondre, il s'envole... il est ****.
Puisse-t-il d'un ingrat éterniser l'absence !
Il faudrait par fierté sourire en sa présence :
J'aime mieux souffrir sans témoin.

Il ne reviendra plus, il sait que je l'abhorre ;
Je l'ai dit à l'amour, qui déjà s'est enfui.
S'il osait revenir, je le dirais encore :
Mais on approche, on parle... hélas ! Ce n'est pas lui !
À Manoel de Barros

PSAUME I

Tapi dans la mangrove, bondissant...sautant-matant

Le ciel aux trois-quarts nu

De giraumon, de pissat et de sang...

Assis sur le trottoir, le ciel tousse

Kein-hein kein-hein

Ivre de parfums rouges errants,

De brocarts et de confettis à ses trousses.

Assis à marée basse, électrique...

Insensible aux chevaux des dieux

Qui tournoient

Au-dessus des tambours

Qui chavirent

Insensibles

Aux orgues charnelles

Des moites guérisseuses...

Le ciel caracole,

Glisse, contorsionniste,

Mascarade immobile

Démêlant le cours des amours burlesques

Entre les atolls obscurs

De pistaches et de bonbons,

D’anges et de démons...

Cabriole, tiède et poisseux,

Cisaille à contre-jour

L’orpailleur en transe

Aboyant dans le sérail de mes âmes

Sevrées, esseulées...

L’aube culbute

Dans les lambeaux du gouffre

Dans les calypsos du soleil

D’où sourdent, dégénérées,

Les jambes et les larmes

Qui fraient encore, exotiques

Sur les pilotis

Du carnaval nocturne

D’où va saillir le jour.

PSAUME II

Il pleut sur le kiosque des songes

Des encres mornes

Comme des brindilles

Enfantées de l’œuf tiède

Où s’aimante

Délicieusement noire

La mygale

Fleuve des nuages

Qui emballe

De son ouate ludique

Le rayon nain

Dérobé

Au serpent arc-en-ciel

Enfin rassasié

PSAUME III

Tellurique, dame Terre esquive les amarres

Effervescentes. Le ciel, hameçon entre les îles,

Rayonne, entonne l’odyssée perpétuelle,

Pion libre dans l’espace

Sempiternellement baigné par les baumes

Incendiaires du soleil obèse, son jumeau

Complice des moissons violées, œcuménique,

Humble, jadis et toujours, Terre :

Oasis, océan, oxygène, oeil

Revêtu d’or, jardin où les ombres basses

Exultent, balbutiant des airs amnésiques..."

PSAUME IV

Rebelle lascive

Telle la lune blette

Suçant les corps subtils

Des mangues sauvages

Enroulées dans la pluie d’obsidienne...

Courtisane de toutes les brousses

Avaleuse de poisson vivant

Pour mieux apprendre à nager

Dans les moues du fleuve douillet...

Les lacets se cabrent, dans un baiser de peaux, de tôles et de croix

Les laves du dernier décan affleurent,

Saupoudrent l’écloserie de marbre humide

Et la pellicule humide de feu cru

Enfouit les dieux écartelés

Aux moues du fleuve endiablé..."

PSAUME V

Soudain pagayer dans le vent et découdre l’odeur légère de la forêt

Chasser les désirs cueillis dans la poudre des oiseaux rares

Et repriser dans les entrailles des pétales juteux...

Puis amarrer à la lumière verticale des matins

Un éclair avec le mot “boum”.

PSAUME VI

"Nomades, où sont les nuits ?"

Grince l’arc débandé du soleil

Embrassé à la portée de cristal

Des nuages en menstrues...

Peut-être que la nuit décante
Blottie dans le nid du large

Faite une enfant, se vautre

Sous les flottilles de jasmin

Dévastant les marées,

Traquant le ressac du temps...

Peut-être que la nuit accouche
Bien après les chaleurs

Faite une gueuse, brise

De son cœur de soprano

Les rames de glace de la lune qui s’épand

Dans un banc d’aquarelles...

Ou peut-être, la nuit, peut-être

La nuit, lisse et lasse,

Allaite les étoiles prises

Aux moustiquaires de cendre

Où le ciel foudroyé

Bat en retraite la chamade.

Peut-être qu’elle arraisonne
Les frêles écailles de l’orgasme total

Pour que nul ne sache

Qu’elle est née sans nombril,

Pour que nul ne sache

Qu’elle est grosse d’un jour

Au goût de sel...

PSAUME VII

"Abysses en vue !" vocifère l’huile en larmes

Faisant voler dans l’onguent vagabond

Les feux follets sortis de leur miroir,

Condors de phosphore, cyclones désemparés

Où se bousculent, palefrenières distraites,

Les couleurs qui rient en allant au supplice...

En chapelets, la lumière débouche, foule, broute,

S’autodévore sous la caresse des truelles,

Moud les étincelles, les taches, les brèches

En route vers le seuil du sacrifice,

Et dans l’embellie de l’œil

Éclot le prétendant buriné

Dans l’apothéose du matin soigneusement peint...

PSAUME VIII

Noyée dans la saumure en flammes

Du soir délicieusement grand ouvert, l’indicible lueur

Cloîtrée dans son écrin liquide

Jalonné de boues, moustiques et palétuviers,

Harponne la braise moribonde de charbon rose

Innombrable qui serpente dans le cirque de sable

A force de nager, à force de nager

Éternellement à joncher les grèves de l’arc-en-ciel.

PSAUME IX

Dans la baie, un sein vert flambe

Campant dans un bain de coton...

L’écho, hypnotique, tourne, tourne, prolifique...

Ô îles, les îles

Notes en menottes, ailes balafrées,

Miels de sel, fiels de ciel...

Ô îles, les îles

Filaments de mangue, eaux assoiffées

Larmes chaudes de tambours incoagulables...

Ô îles, les îles

D’où venez-vous, miettes de sang ?

Comment vous êtes-vous posés, papillons,

Au milieu de la grande termitière d’or bleu ?

PSAUME X

Kaki, dans le jour rectiligne,

Le soleil, bibelot tiède et omniprésent,

Affalé dans les sortilèges

De la pluie ensorceleuse..

.
Incrustée dans son terrier maternel,

Luciole équilibriste,

A demi ivre souffre l’espérance,

Soufflant des goélettes de papier...

Les lunes se rétractent lestes et faibles,

La visibilité est bonne

De chenaux en détroits, vont, naufragées,

En débandade, les voluptés,

Roues flamboyantes

Dilacérant les haillons allumés

Des orbites sismiques..

PSAUME XI

Zéro heure, la chauve cascade

Où le délire se découd

Dans les courbes de l’ennui...

Zéro heure, l’édentée

Déchirant les échos

Des obsèques de minuit...

Zéro heure, poupée

Aptère, assoupie

A l’ombre des rêves...

Cartomancienne hérétique

Châtrant les éruptions chagrines,

Châtrant, multipliant les yeux

Vers les plages pourpres...

Zéro heure, nymphe sourde

Défunte à la canne bossue,

Hissant le grand pavois

De la couleur polyphonique,

L’accord,

La peau du poète,

Éclipse magique

De tous les déluges...

PSAUME XII

Songes dans l’extrême sud

Monochromatique

Ancres tapissées,

Couples éteints, inflorescences...

Chevaux cardiaques

Occultés dans un nid lunaire...

Passager de la nef du fou

Fouetté par le roi si bémol

Qui monte à l’échafaud...

Battements rupestres,

Sentiers crevant les lieues

Au rythme des ailes de nuages...

La pluie soudain s’est tue

La liesse s’est tue soudain

Dilapidée dans ce jour rongé...

PSAUME XIII

Éteint dans la lumière, le portraitiste

Brûle l’absence mate,

La suie insolite...

La haute mer se dilue..

L’arche hiberne aussi **** que porte la vie

Dans son sanctuaire de sève

Où la terre saigne ses eaux bouclées

Qui écument des épaves de pierre

Aussi **** que porte la vie.

PSAUME XIV

Les îles du matin m’embrassent

Après une nuit de lune rase

Le ronflement du rayon

Macule en naissant le chœur torride

De l’alcôve qui s’écaille émaillée.

Entre traits, tracés et rayures

Flottent des oranges polymorphes

A portée des mains...

Sous la ménagerie de ses eaux poissonneuses

La gomme méthylique du soleil

Frotte dans le bassin d’étincelles

L’orchestre infime de ce lointain carnaval renié

Qui crépite, savonné...

Entre gravillons et bulles

Flottent des oranges polymorphes

A portée des mains...

Devant l’horloge en rut

Se signent les orangers...

Le soleil consent à la lune

La mare de feu

Greffée dans le pouls vivace de l’ombre ivre...

Entre ruines et volutes

Flottent des oranges polymorphes

Scandaleusement

A portée des mains...

PSAUME XV

Le matin nage, innombrable

Salamandre aux cent venins de verre

Qui se distillent dans une encre de cendres

Offertes au soleil insatiable...

Dans le calice débordant

Des récoltes que la nuit

Ne grignote qu’à moitié,

Les sargasses du désir plongent,

Cinglant le silence des incohérences...

Hilare, la lune

Se réveille et butine

Le nectar indigo

Qui s’attarde

Comme une musique rétinienne

Aux confins du jour...

Ainsi emmurés vifs

Dans le flux impénétrable des reflets,

Vont à l’aveuglette

Dans le palais des singes volants

L’amour et ses tribus aborigènes

Veillant sur la toison rouge du ciel...

PSAUME XVI

Mon deuil échoue à l’aube

Les yeux ouverts sur les laves

De ce volcan éteint

Où s’apaisent les étoiles...

La flèche de l’archer s’évanouit, fauchée...

Le licol de mousseline de l’archipel précieux

Vacille, se dissout,

Orphelin mélancolique

Murmurant des baisers d’aniline

Aux marges du rêve...

Insomnuit d’été

Si seulement je pouvais rêver !

PSAUME XVII

Sur l’échiquier, la nuit chancelle, vénéneuse...

Un vaisseau de pierre au galop s’envole

Au chevet de la mer noyée

Suant la résine...

Sifflotant, le saltimbanque

Éconduit les horizons pétales

Pris du soleil gemme étanche

Dans les écumes du ciel d’étain...

Bientôt, les lunes oscillent

Ondulent, se dérobent frivoles,

L’étalon noir se dissipe

Décochant des flèches en forme de cœur...

Quelque chose se brise dans le noir :

Était-ce un masque ou un miroir ?

Quand luit la dernière tranche d’ombre

Déboussolées, dans la dune de verre, les étoiles

Bégaient...

Les coquilles se détellent de la terre réfractaire...

Le soleil dévastateur s’abreuve de ciel

Cachant les antres de brai...

Tâtant les décadences nacrées

Ointes de sueurs salines

L’amazone enfin répudiée

Chantonne aux aguets

Dans la baie couleur sépia...

PSAUME XVIII

Clic
Hennissement aveugle, l’île

Se déhanche

Toute soie et serpent

Contre l’épi de maïs vert...

Clac
“Marée basse”, dit la reine-mère...

Aucune abeille ne rame,

Ne laboure les pollens de la mer...

Clic
**** des brise-lames

Lisses et bouillonnants

Des crinières sans fin et du goémon,

L’iguane sous la villa jaune...

Le long des bougies

Coule le gouvernail du silence...

Clic
Sous les fleurs délabrées de l’éclair

Dans leur hamac vert

Les vagues veuves, les vagues nues

Courent après les lunes

Et lentement chantent les araignées...

Clic
Parfums de lumière

Qui jouent, jouent, jouent

Se décomposent

Dans une brise d’alcools...

Clic
Chimères de la mer, coup de sifflet final

Rongeant les sables glauques

Les tranchées dans le ciel ouvert

Tapis du soleil et son essaim de sujets...

Clic
La nuit, la mer fructifie

Au ralenti...

PSAUME XIX

"Au feu, au feu !

Feu à la dérive !"

Scandent deux coléoptères...

Le feu fuit !

Le magicien s’est brûlé

A faire sa magie.

Le pôle s’évapore,

Le puits fait l’aumône,

L’enfant aboie,

La moto boite,

La forêt détale,

Le lion se vêt de singe

Noir et doré

Et petit à petit

Va planer

Au-dessus de l’autel fugace

Où gît

Hululant, pullulant, virulent,

Le vol agile craché

Du saxophone ténor...

L’hiver fouette le ciel,

La terre meurt prématurée,

Liane après liane,

Sécrétant comme vestiges

Le tapis de talc

D’une aile de sirène

Et le vertige nuptial

De deux notes jaunes inachevées

Au sein des similitudes.

PSAUME **

Prunelle de gris jaune
Prunelle nuit et mer
Bleu coursier d’argile
Tigresse à la crinière couleur de brume.
Dans le rare verger qu’est l’amour
Audacieuse, elle va, incendiaire
Empaillée dans un paquebot hystérique
Vers le hasard des quais identiques
Les yeux pleins de chaux.

Dans ce chant veuf, dans cette capitale pyromane
La voilà, légère,
Aspirant les équinoxes dans cet air enchaîné
En selle pour un bain d’herbes monastique
Geôlière verte
D’émeraude pure...

PSAUME XXI

L’accordéoniste des abysses
Peint dans l’œil de l’obscur :
Un nuage en zigzaguant
Ancre aux eaux du vide.

Et le gong sue...timide.
Et comme en un tango antique
S’écoule le cri acide

Des teintes atteintes par les balles,
Hoquet du temps incarné
A l’aube d’une pluie sèche de chaleurs vertes.
Et le gong sue...tumide.

Et comme en un tango marin
Caracole la pirogue étoilée du tigre intime
Renversant de son parapluie
Les certitudes les plus ensevelies de la peur.

Et le gong sue...tumide.
Et les papillons enfantent
Des flammes dans les sables mouvants,
Des harpes éoliennes
Comme des gymnastes hués par le soleil en ruines
A la recherche des marées sèches.

Et le gong sue... tumide.
Et comme en un tango de funambules
Les œillères des brebis galeuses
Traversent la toile, vieillissent, exhument le salpêtre
D’un bandonéon dont la sueur incendie les cernes
De la nuit qui jazze...

PSAUME XXII

Tendrement
Le messager lit
Les lignes du vent,
Prend le pouls
Du ventre jaspé
De la basilique d’encre de chine :

-Là-bas, sous les monts de Vénus
Rode le messager,
Troubadour englouti
Par une lave obscure,

Passager invisible
Des failles muettes
Qu’il restaure encore...

Tendrement
Le messager
Harponne
Les coquilles du temps...
A la pointe de l’hameçon,

Un morceau de vitrail
Où à peine filtre
La lueur des entrailles,
On devine soudain
La forme d’un cheval marron
Qui hennit.

PSAUME XXIII

Bleu roi
De ces couleurs pièges.
Bleu de ces teintes imprévisibles.
Issu du venin tribal
Des roses du désert
Le bleu tombe,
Comme un nuage de coton doux,
Sur la brousse atlantique des lèvres
Enflées de secrets,
Où, hystérique, il donne le jour
Sous le kiosque sympathique des pluies cyanes
A une larme de sang,
Daltonienne.

Bleu roi
De ces couleurs mutantes :
Seul le baiser de cobalt réchauffe
Les escales mélancoliques
De ces ailes closes,
Révèle les jeux d’artifice,
Et murmurant des flammes,
Fait évanouir
Le deuil magnétique
Des rênes d’ivoire...

La flèche de l’archer pénètre,
Débridée,
Le voile de mousseline de l’archipel précieux
Qui vacille, se dissout,
Orphelin en suspens, spectre d’aniline
Aux gants d’émeraude
Et aux chaussons d’améthyste...

PSAUME XXIV

Dormir, virgule,
Souffler doucement
Des cases jumelles,
Ramper à nouveau, gigoter,
Jusqu’à ce que tout ne soit plus
Qu’une seule immensité...

Au lieu de l’abîme
La clairière dans la caféière.
Dormir, virgule,
Ça et là,
Lune bleue
Embuée
Sous la baguette du silence...

Le rêve entre et sort

Et jusqu’aux nuages
Craignent la chute
Vers le sommeil...

PSAUME XXV

Les îles et une nuits
Me font chavirer,
Je fuis,
Naufragée inlassable,
Hors du clan tentaculaire
Vers la clarté volatile
Des voiles incendiaires...

Mes nerfs à la fleur du large
Bifurquent,
S’évaporent en filigranes
Plus **** encore...

Bleu nuit devient la mer
Aux portes de son repaire
Ancré à la rive gauche du cœur.

La crique n’est plus ce qu’elle était :
La neige reptile teint les dauphins de rose...
Éden ?
De temps à autre

Passe un trapèze
Balayant le silence.

PSAUME XXVI

Ô Reine, Notre Duc
Sous tes ongles laqués
J’imagine un ciel rouge
Aux parfums de lait de cobra...
Le soleil fait pleuvoir des sceptres sur le fleuve
Et des piranhas aux dents d’eau
Larguent des cerfs-volants sans fin...

“Chantez les très riches heures de l’En-Dehors !”
Crie à la face du levant
Un caméléon qui lisse les ailes du hasard
Planté dans le dédale de ta langue baccarat.

PSAUME XXVII

Près de la passerelle d’ivoire :
“Odyssées,
Métamorphoses,
Mues,
Je vous aime !” "
brandon nagley Jun 2015
calice timide, débordé par évanouissement ourn, un château lointain pour nous entourent, un manifeste de tombes romantiques ourn!!!!( french version)

English version-
Shy chalice, overflowed by ourn swoon, a distant castle to surround us, a manifest of ourn romantic tombs!!!
Nourrissez votre cœur du feu des charités,
Filles du Fils de l'homme, aux yeux pleins de clartés.
Aimez celle qu'un peuple appelle politesse.
Avant Notre-Seigneur, savoir vivre, qu'était-ce ?
Quelque chose au dehors, mais au fond, presque rien.
Etre civilisé, c'est bien ; poli, très bien ;
La politesse, fleur de l'homme charitable,
Règle notre attitude et rit à notre table,
Et donne un sens exquis aux choses du repas.
Science qui s'apprend, et qui ne s'apprend pas :
Code intime et profond, né dans la quiétude
Du cloître, et dont le monde, après, fit son étude.
L'âme où passa Jésus toujours en garde un pli,
Et c'est encor rester chrétien qu'être poli,
La politesse est reine et fait son doux royaume
Des cœurs purs, c'est un lis royal qui les embaume !
Non celle qui se montre en chapeaux élégants,
Bien qu'un homme se lise aux couleurs de ses gants,
Ni celle qui fatigue, ou bien qui complimente,
Obligée à se taire à moins qu'elle ne mente :
Mais celle-là qui règne avec simplicité,
Qui sait servir le miel pur de la vérité ;
Qui veut laisser chacun ou chacune à sa place,
Qui calme les transports, comme elle rompt la glace.
Parmi les charités, si légères au sol
Qu'elles foulent si peu, que l'on dirait un vol
Timide, à fleur déterre, ou d'ange ou d'hirondelle ;
Au nom des tout petits qui soupent sans chandelle
Sous les arbres, les yeux dans leurs cheveux trop longs,
Et viennent d'Italie avec leurs violons ;
Du vieux joueur de flûte, aux mèches toutes grises,
Et du pauvre, à genoux sur le seuil des églises,
Qui marmotte une antienne ou qui froisse les grains
Du rosaire, à la fête où vont les pèlerins ;
Parmi les charités, porteuses d'escarcelles,
D'un vers reconnaissant je veux célébrer celle
Qui passe en écoutant les plaintes des roseaux,
Et qui donne aux petits comme on donne aux oiseaux !
Fais ton miel admirable, ô reine des abeilles,
Charité, donne encor tes jours, ton cœur, tes veilles ;
Jésus multiplia les poissons et les pains.
Voyez, dans ce palais, dont les plafonds sont peints,
Où les lustres ont plus de branches que les arbres,
Où le peuple des sphinx taillés au cœur des marbres
Garde la cour sonore et les vastes paliers,
Château plein de frontons, d'urnes et de piliers,
Cette royale entant toute belle, qui foule,
Comme un jardin fleuri, l'éloge de la foule !
Eh bien, la charité qui lui parle à mi-voix
Saura lui retirer les bagues de ses doigts,
La perle éclose au coin de son oreille en flamme,
Sa chevelure où rit la gloire de la femme,
Sa chambre où le soleil allonge dans la paix
Sa large griffe d'or sur les tapis épais,
Ses miroirs éclatants, les servantes accortes,
Ce vestibule altier, plein de dessus de portes
Où des gens, dont le vent chiffonne le manteau,
Sont poudrés par Boucher et fardés par Watteau,
Et l'œil de ces bergers diseurs de douces choses,
Les grands vases de fleurs, où Sèvre a peint les roses !
Ses pieds si délicats chaussés de gros souliers,
Sa taille consacrée à d'humbles tabliers,
Sous sa coiffe de tulle et d'épingles légères,
L'enfant ira, parmi les âmes étrangères,
Fermer les yeux des morts, coudre le drap fatal,
Ou, sous les crucifix des murs de l'hôpital,
Au chevet d'un mourant dont la bouche blasphème,
Pour lui dire : « Je suis votre sœur qui vous aime ! »
Cette charité-là se nomme amour divin,
Elle enivre les cœurs, plus forte que le vin.
Père des charités, dont le Père pardonne,
Jésus, ô doux Jésus, pour qu'enfin l'on se donne
À vous, dont on tient l'âme et le cœur que l'on a,
Vous qui changiez en vin l'eau claire de Cana
Qui chantait en entrant sonore au col des vases,
Changez la boue en or dans nos cœurs lourds de vases.
Vous qui rendiez la vue à ceux dont les bâtons
Tâtent le pied des murs, nous marchons à tâtons,
Et nous sommes des sourds, et la pierre est pareille
À nous. Maître, mettez le doigt sur notre oreille !
Vous, dont l'ordre, au soleil qui sur le peuple luit,
Tirait Lazare blanc des brunies de la nuit,
Seigneur, ressuscitez aussi nos cœurs de roche,
S'il est vrai, ô Seigneur, que votre règne approche !
Petite étoile, au sein des vastes cieux,
Toi que suivaient et mon cœur et mes yeux,
Toi dont j'aimais la lumière timide,
Où t'en vas-tu dans ta course rapide ?
Ah ! j'espérais que, dans ce ciel d'azur,
Du moins pour toi le repos était sûr.
Pourquoi t'enfuir, mon étoile chérie ?
Pourquoi quitter le ciel de ma patrie ?

Mon cœur connut le bonheur et l'amour :
Amour, bonheur, tout n'a duré qu'un jour.
Près d'un ami, je cherchai l'espérance...
Et mon ami m'oublia dans l'absence !
Le cœur brisé, j'aimais encor les fleurs,
Quand je les vis se faner sous mes pleurs ;
Au ciel alors, pour n'être plus trahie,
J'avais aimé.... l'étoile qui m'oublie !

Adieux à toi, belle étoile du soir !
Adieux à toi, toi, mon dernier espoir !...
Errante au ciel comme moi sur la terre,
En d'autres lieux va briller ta lumière.
Rien n'est constant pour moi que la douleur,
Rien ici-bas n'a voulu de mon cœur ;
Autour de moi, tout est sombre et se voile,
Et tout me fuit... même au ciel, une étoile !
À Madame * qui demandait des vers pour son album.


Les vers n'arrivent pas au gré de mon désir,
L'heure du feu sacré ne saurait se choisir.
Dites-vous au bouton qu'il devienne une rose,
À l'oiseau dans son nid que sa couvée éclose ?
Pourquoi me dire à moi : « Prends ton luth pour chanter ?  »
Les feuilles **** du vent ne sauraient s'agiter ;
Et comme elles j'attends, immobile et timide,
Qu'une brise du ciel, dans sa course rapide,
Vienne douce et suave, inclinant les buissons,
Comme aux feuilles des bois m'arracher quelques sons.

Ne forcez point mes chants, je n'ai vu que l'aurore ;
Pour moi, si Dieu le veut, le jour est long encore !
Doux espoir ou regret, amertume ou plaisir,
Indécise en son vol, mon âme veut choisir ;
Elle parcourt la vie, effleurant chaque chose ;
Elle espère et soupire, et sur rien ne se pose.
Ainsi l'on voit l'abeille, active en son labeur,
S'agitant dans les airs, chercher longtemps la fleur,
Qui, livrant ses trésors à son aile légère,
Lui permet de porter son doux miel à la terre.
Mais hélas ! nul calice, entr'ouvert à ma voix,
Ne veut, dans ses parfums, laisser baigner mes doigts;
Je m'arrête, interdite au seuil de ma demeure :
En vain je veux chanter... je me tais et je pleure !
J'ai ri d'abord.
J'étais dans mon champ plein de roses.
J'errais. Âme attentive au clair-obscur des choses,
Je vois au fond de tout luire un vague flambeau.
C'était le matin, l'heure où le bois se fait beau,
Où la nature semble une immense prunelle
Éblouie, ayant Dieu presque visible en elle.
Pour faire fête à l'aube, au bord des flots dormants,
Les ronces se couvraient d'un tas de diamants ;
Les brins d'herbe coquets mettaient toutes leurs perles ;
La mer chantait ; les geais causaient avec les merles ;
Les papillons volaient du cytise au myrtil.
Entre un ami. - Bonjour. Savez-vous ? Me dit-il,
On vient de vous brûler sur la place publique.
- Où ça ? - Dans un pays honnête et catholique.
- Je le suppose. - Peste ! Ils vous ont pris vivant
Dans un livre où l'on voit le bagne et le couvent,
Vous ont brûlé, vous diable et juif, avec esclandre,
Ensuite ils ont au vent fait jeter votre cendre.
- Il serait peu décent qu'il en fût autrement.
Mais quand ça ? - L'autre jour. En Espagne. - Vraiment.
- Ils ont fait cuire au bout de leur grande pincette
Myriel, Jean ValJean, Marius et Cosette,
Vos Misérables, vous, toute votre âme enfin.
Vos êtes un de ceux dont Escobar a faim.
Vous voilà quelque peu grillé comme Voltaire.
- Donc j'ai chaud en Espagne et froid en Angleterre.
Tel est mon sort. - La chose est dans tous les journaux.
Ah ! Si vous n'étiez pas chez ces bons huguenots !
L'ennui, c'est qu'on ne peut jusqu'ici vous poursuivre.
Ne pouvant rôtir l'homme, on a flambé le livre.

- C'est le moins. - Vous voyez d'ici tous les détails.
De gros bonshommes noirs devant de grands portails,
Un feu, de quoi brûler une bibliothèque.
- Un évêque m'a fait cet honneur ! - Un évêque ?
Morbleu ! Pour vous damner ils se sont assemblés,
Et ce n'est pas un seul, c'est tous. ? Vous me comblez. -
Et nous rions.

Et puis je rentre, et je médite.
Ils en sont là.

Du temps de Vénus Aphrodite,
Parfois, seule, écoutant on ne sait quelles voix,
La déesse errait nue et blanche au fond des bois ;
Elle marchait tranquille, et sa beauté sans voiles,
Ses cheveux faits d'écume et ses yeux faits d'étoiles,
Étaient dans la forêt comme une vision ;
Cependant, retenant leur respiration,
Voyant au **** passer cette clarté, les faunes
S'approchaient ; l'ægipan, le satyre aux yeux jaunes,
Se glissaient en arrière ivres d'un vil désir,
Et brusquement tendaient le bras pour la saisir,
Et le bois frissonnait, et la surnaturelle,
Pâle, se retournait sentant leur main sur elle.
Ainsi, dans notre siècle aux mirages trompeurs,
La conscience humaine a d'étranges stupeurs ;
Lumineuse, elle marche en notre crépuscule,
Et tout à coup, devant le faune, elle recule.
Tartuffe est là, nouveau Satan d'un autre éden.
Nous constatons dans l'ombre, à chaque instant, soudain,
Le vague allongement de quelque griffe infâme
Et l'essai ténébreux de nous prendre notre âme.
L'esprit humain se sent tâté par un bourreau.
Mais doucement. On jette au noir quemadero
Ce qu'on peut, mais plus **** on fera mieux peut-être,
Et votre meurtrier est timide ; il est prêtre.
Il vous demanderait presque permission.
Il allume un brasier, fait sa procession,
Met des bûches au feu, du bitume au cilice,
Soit ; mais si gentiment qu'après votre supplice
Vous riez.

Grillandus n'est plus que Loyola.
Vous lui dites : ma foi, c'est drôle. Touchez là.

Eh bien, riez. C'est bon. Attendez, imbéciles !
Lui qui porte en ses yeux l'âme des noirs Basiles,
Il rit de vous voir rire. Il est Vichnou, Mithra,
Teutatès, et ce feu pour rire grandira.
Ah ! Vous criez : bravo ! Ta rage est ma servante.
Brûle mes livres. Bien, très bien ! Pousse à la vente !
Et lui songe. Il se dit : - La chose a réussi.
Quand le livre est brûlé, l'écrivain est roussi.
La suite à demain. - Vous, vous raillez. Il partage
Votre joie, avec l'air d'un prêtre de Carthage.
Il dit : leur cécité toujours me protégea.
Sa mâchoire, qui rit encor, vous mord déjà.
N'est-ce pas ? Ce brûleur avec bonté nous traite,
Et son autodafé n'est qu'une chaufferette !
Ah ! Les vrais tourbillons de flamme auront leur tour.
En elle, comme un œuf contient le grand vautour,
La petite étincelle a l'incendie énorme.
Attendez seulement que la France s'endorme,
Et vous verrez.

Peut-on calculer le chemin
Que ferait pas à pas, hier, aujourd'hui, demain,
L'effroyable tortue avec ses pieds fossiles ?
Qui sait ? Bientôt peut-être on aura des conciles !
On entendra, qui sait ? Un homme dire à Dieu :
- L'infaillible, c'est moi. Place ! Recule un peu. -
Quoi ! Recommence-t-on ? Ciel ! Serait-il possible
Que l'homme redevînt pâture, proie et cible !
Et qu'on revît les temps difformes ! Qu'on revît
Le double joug qui tue autant qu'il asservit !
Qu'on revît se dresser sur le globe, vil bouge,
Près du sceptre d'airain la houlette en fer rouge !
Nos pères l'ont subi, ce double pouvoir-là !
Nuit ! Mort ! Melchisédech compliqué d'Attila !
Ils ont vu sur leurs fronts, eux parias sans nombre,
Le côte à côte affreux des deux sceptres dans l'ombre ;
Ils entendaient leur foudre au fond du firmament,
Moins effrayante encor que leur chuchotement.
- Prends les peuples, César. - Toi, Pierre, prends les âmes.
- Prends la pourpre, César. - Mais toi, qu'as-tu ? - Les flammes.
- Et puis ? - Cela suffit. - Régnons.

Âges hideux !
L'homme blanc, l'homme sombre. Ils sont un. Ils sont deux.
Là le guerrier, ici le pontife ; et leurs suites,
Confesseurs, massacreurs, tueurs, bourreaux, jésuites !
Ô deuil ! Sur les bûchers et les sanbenitos
Rome a, quatre cents ans, braillé son vil pathos,
Jetant sur l'univers terrifié qui souffre
D'une main l'eau bénite et de l'autre le soufre.
Tous ces prêtres portaient l'affreux masque aux trous noirs ;
Leurs mitres ressemblaient dans l'ombre aux éteignoirs ;
Ils ont été la Nuit dans l'obscur moyen-âge ;
Ils sont tout prêts à faire encor ce personnage,
Et jusqu'en notre siècle, à cette heure engourdi,
On les verrait, avec leur torche en plein midi,
Avec leur crosse, avec leurs bedeaux, populace,
Reparaître et rentrer, s'ils trouvaient de la place
Pour passer, ô Voltaire, entre Jean-Jacques et toi !

Non, non, non ! Reculez, faux pouvoir, fausse foi !
Oh ! La Rome des frocs ! Oh ! L'Espagne des moines !
Disparaissez ! Prêcheurs captant les patrimoines !
Bonnets carrés ! Camails ! Capuchons ! Clercs ! Abbés !
Tas d'horribles fronts bas, tonsurés ou nimbés !
Ô mornes visions du tison et du glaive !

Exécrable passé qui toujours se relève
Et sur l'humanité se dresse menaçant !
Saulx-Tavanne, écumant une écume de sang,
Criant : égorgez tout ! Dieu fera le triage !
La juive de seize ans brûlée au mariage
De Charles deux avec Louise d'Orléans,
Et dans l'autodafé plein de brasiers béants
Offerte aux fiancés comme un cierge de noce ;
Campanella brisé par l'église féroce ;
Jordan Bruno lié sous un ruisseau de poix
Qui ronge par sa flamme et creuse par son poids ;
D'Albe qui dans l'horreur des bûchers se promène
Séchant sa main sanglante à cette braise humaine ;
Galilée abaissant ses genoux repentants ;
La place d'Abbeville où Labarre à vingt ans,
Pour avoir chansonné toute cette canaille,
Eut la langue arrachée avec une tenaille,
Et hurla dans le feu, tordant ses noirs moignons ;
Le marché de Rouen dont les sombres pignons
Ont le rouge reflet de ton supplice, ô Jeanne !
Huss brûlé par Martin, l'aigle tué par l'âne ;
Farnèse et Charles-Quint, Grégoire et Sigismond,
Toujours ensemble assis comme au sommet d'un mont,
À leurs pieds toute l'âme humaine épouvantée
Sous cet effrayant Dieu qui fait le monde athée ;
Ce passé m'apparaît ! Vous me faites horreur,
Croulez, toi monstre pape, et toi monstre empereur !
Il est deux Amitiés comme il est deux Amours.
L'une ressemble à l'imprudence ;
Faite pour l'âge heureux dont elle a l'ignorance,
C'est une enfant qui rit toujours.
Bruyante, naïve, légère,
Elle éclate en transports joyeux.
Aux préjugés du monde indocile, étrangère,
Elle confond les rangs et folâtre avec eux.
L'instinct du cœur est sa science,
Et son guide est la confiance.
L'enfance ne sait point haïr ;
Elle ignore qu'on peut trahir.
Si l'ennui dans ses yeux (on l'éprouve à tout âge)
Fait rouler quelques pleurs,
L'Amitié les arrête, et couvre ce nuage
D'un nuage de fleurs.
On la voit s'élancer près de l'enfant qu'elle aime,
Caresser la douleur sans la comprendre encor,
Lui jeter des bouquets moins riants qu'elle-même,
L'obliger à la fuite et reprendre l'essor.

C'est elle, ô ma première amie !
Dont la chaîne s'étend pour nous unir toujours.
Elle embellit par toi l'aurore de ma vie,
Elle en doit embellir encor les derniers jours.
Oh ! que son empire est aimable !
Qu'il répand un charme ineffable
Sur la jeunesse et l'avenir,
Ce doux reflet du souvenir !
Ce rêve pur de notre enfance
En a prolongé l'innocence ;
L'Amour, le temps, l'absence, le malheur,
Semblent le respecter dans le fond de mon cœur.
Il traverse avec nous la saison des orages,
Comme un rayon du ciel qui nous guide et nous luit :
C'est, ma chère, un jour sans nuages
Qui prépare une douce nuit.

L'autre Amitié, plus grave, plus austère,
Se donne avec lenteur, choisit avec mystère ;
Elle observe en silence et craint de s'avancer ;
Elle écarte les fleurs, de peur de s'y blesser.
Choisissant la raison pour conseil et pour guide,
Elle voit par ses yeux et marche sur ses pas :
Son abord est craintif, son regard est timide ;
Elle attend, et ne prévient pas.
Je ne sais plus d'où naissait ma colère ;
Il a parlé... ses torts sont disparus ;
Ses yeux priaient, sa bouche voulait plaire :
Où fuyais-tu, ma timide colère ?
Je ne sais plus.

Je ne veux plus regarder ce que j'aime ;
Dès qu'il sourit tous mes pleurs sont perdus ;
En vain, par force ou par douceur suprême,
L'amour et lui veulent encor que j'aime ;
Je ne veux plus.

Je ne sais plus le fuir en son absence,
Tous mes serments alors sont superflus.
Sans me trahir, j'ai bravé sa présence ;
Mais sans mourir supporter son absence,
Je ne sais plus !
ODE.
(Couronnée aux jeux floraux.)


Des longs ennuis du jour quand le soir me délivre,
Poète aux chants divins, j'ouvre en rêvant ton livre,
Je me recueille en toi, dans l'ombre et **** du bruit ;
De ton monde idéal, j'ose aborder la rive :
Tes chants que je répète, à mon âme attentive
Semblent plus purs la nuit !

Mais qu'il reste caché, ce trouble de mon âme,
De moi rien ne t'émeut, ni louange, ni blâme.
Quelques hivers à peine ont passé sur mon front...
Et qu'importe à ta muse, en tous lieux adorée,
Qu'au sein de ses foyers une femme ignorée
S'attendrisse à ton nom !

Qui te dira qu'aux sons de ta lyre sublime,
À ses accords divins, ma jeune âme s'anime,
Laissant couler ensemble et ses vers et ses pleurs ?
Quand près de moi ta muse un instant s'est posée,
Je chante.... ainsi le ciel, en versant sa rosée,
Entr'ouvre quelques fleurs.

Poètes ! votre sort est bien digne d'envie.
Le Dieu qui nous créa vous fit une autre vie,
L'horizon ne sert point de limite à vos yeux,
D'un univers plus grand vous sondez le mystère,
Et quand, pauvres mortels, nous vivons sur la terre,
Vous vivez dans les cieux !

Et si, vous éloignant des voûtes éternelles,
Vous descendez vers nous pour reposer vos ailes,
Notre monde à vos yeux se dévoile plus pur ;
L'hiver garde des fleurs, les bois un vert feuillage,
La rose son parfum, les oiseaux leur ramage,
Et le ciel son azur.

Si Dieu, vous révélant les maux de l'existence,
Au milieu de vos chants fait naître la souffrance,
Votre âme, en sa douleur poursuivant son essor,
Comme au temps des beaux jours vibre dans ses alarmes ;
Le monde s'aperçoit, quand vous montrez vos larmes,
Que vous chantez encor !

Le malheur se soumet aux formes du génie,
En passant par votre âme, il devient harmonie.
Votre plainte s'exhale en sons mélodieux.
L'ouragan qui, la nuit, rugit et se déchaîne,
S'il rencontre en son cours la harpe éolienne,
Devient harmonieux.

Moi, sur mes jeunes ans j'ai vu gronder l'orage,
Le printemps fut sans fleurs, et l'été, sans ombrage ;
Aucun ange du ciel n'a regardé mes pleurs.
Que ne puis-je, changeant l'absinthe en ambroisie,
Comme vous, aux accords d'un chant de poésie
Endormir mes douleurs !

À notre âme, ici-bas , il n'est rien qui réponde ;
Poètes inspirés, montrez-nous votre monde !
À ce vaste désert, venez nous arracher.
Pour le divin banquet votre table se dresse...
Oh ! laissez, de la coupe où vous puisez l'ivresse,
Mes lèvres s'approcher !

Oui, penchez jusqu'à moi voire main que j'implore ;
Votre coupe est trop ****, baissez, baissez encore !...
Répandez dans mes vers l'encens inspirateur.
Pour monter jusqu'à vous, mon pied tremble et chancelle...
Poètes ! descendez, et portez sur votre aile
Une timide sœur !
Je vois bien l'arbre aux pommes d'or
Prospérer dans vos prés humides ;
Mais cela n'en fait pas encor
Un vrai jardin des Hespérides.

La timide sécurité
N'avait pas de plus doux asile
Que le verger riche çt tranquille,
Par les fils d'Atlas habité.

**** du loup, la brebis, en joie,
Y bondissait parmi les fleurs,
Et de l'hyène aux yeux menteurs
Les agneaux n'étaient pas la proie.

L'honnête homme, sans passe-ports,
S'y promenait exempt d'alarmes.
Un dragon veillait au dehors ;
Mais au dedans pas de gendarmes.

Écrit à La Haye, en 1818.
À *.


De même espèce que la nôtre,
Le sage est sujet à l'erreur.
Notre Anglais, si j'en crois mon cœur,
Se trompe ici tout comme un autre.

De l'ami souvent, par détour,
L'amant timide a pris le style ;
Mais l'amitié sage et tranquille
Prend-elle celui de l'amour ?

Daphné, qui dicta ces épîtres,
De l'un ou l'autre sentiment ?
Qui les inspire également
Pour en juger a bien des titres.

Est-ce le style d'un amant,
Ou celui d'un ami bien tendre ?
Ah ! je sais bien qu'en t'écrivant,
C'est celui que je voudrais prendre !

Écrit en 1790.
Vous m'envoyez, belle Emilie,
Un poulet bien emmailloté ;
Votre main discrète et polie
L'a soigneusement cacheté.
Mais l'aumône est un peu légère,
Et malgré sa dextérité,
Cette main est bien ménagère
Dans ses actes de charité.
C'est regarder à la dépense
Si votre offrande est un paiement,
Et si c'est une récompense,
Vous n'aviez pas besoin d'argent.
A l'avenir, belle Emilie,
Si votre coeur est généreux,
Aux pauvres gens, je vous en prie
Faites l'aumône avec vos yeux.
Quand vous trouverez le mérite,
Et quand vous voudrez le payer,
Souvenez-vous de Marguerite
Et du poète Alain Chartier
Il était bien laid, dit l'histoire,
La dame était fille de roi ;
Je suis bien obligé de croire
Qu'il faisait mieux les vers que moi.
Mais si ma plume est peu de chose,
Mon coeur, hélas ! ne vaut pas mieux ;
Fût-ce même pour de la prose
Vos cadeaux sont trop dangereux.
Que votre charité timide
Garde son argent et son or,
Car en ouvrant votre main vide
Vous pouvez donner un trésor.
L'épouse, la compagne à mon cœur destinée,
Promise à mon jeune tourment,
Je ne la connais pas, mais je sais qu'elle est née ;
Elle respire en ce moment.

Son âge et ses devoirs lui font la vie étroite ;
Sa chambre est un frais petit coin ;
Elle y prend sa leçon, bien soumise et bien droite,
Et sa mère n'est jamais ****.

Ma mère, parlez-lui du bon Dieu, de la Vierge
Et des saints tant qu'il lui plaira ;
Oui, rendez-la timide, et qu'elle brûle un cierge
Quand le tonnerre grondera.

Je veux, entendez-vous, qu'elle soit grave et tendre,
Qu'elle chérisse et qu'elle ait peur ;
Je veux que tout mon sang me serve à la défendre,
À la caresser de tout mon cœur.

Déjà dans l'inconnu je t'épouse et je t'aime,
Tu m'appartiens dès le passé,
Fiancée invisible et dont j'ignore même
Le nom sans cesse prononcé.

À défaut de mes yeux, mon rêve te regarde,
Je te soigne et te sers tout bas :
« Que veux-tu ? Le voici. Couvre-toi bien, prends garde
Au vent du soir, et ne sors pas. »

Pour te sentir à moi je fais un peu le maître,
Et je te gronde avec amour ;
Mais j'essuie aussitôt les pleurs que j'ai fait naître,
Implorant ma grâce à mon tour.

Tu t'assiéras, l'été, bien ****, dans la campagne,
En robe claire, au bord de l'eau.
Qu'il est bon d'emporter sa nouvelle compagne
Tout seul dans un pays nouveau !

Et dire que ma vie est cependant déserte,
Que mon bonheur peut aujourd'hui
Passer tout près de moi dans la foule entr'ouverte
Qui se refermera sur lui,

Et que déjà peut-être elle m'est apparue,
Et j'ai dit : ! La jolie enfant ! »
Peut-être suivons-nous toujours la même rue,
Elle derrière et moi devant.

Nous pourrons nous croiser en un point de l'espace,
Sans nous sourire, bien longtemps,
Puisqu'on n'oserait dire à la vierge qui passe :
Ô Vous êtes celle que j'attends. »

Un jour, mais je sais trop ce que l'épreuve en coûte,
J'ai cru la voir sur mon chemin,
Et j'ai dit : « C'est bien vous. » Je me trompais sans doute,
Car elle a retiré sa main.

Depuis lors, je me tais ; mon âme solitaire
Confie au Dieu qui sait unir
Par les souffles du ciel les plantes sur la terre
Notre union dans l'avenir.

À moins que, me privant de la jamais connaître,
La mort déjà n'ait emporté
Ma femme encore enfant, toi qui naissais pour l'être
Et ne l'auras jamais été.
Murmure autour de ma nacelle,
Douce mer dont les flots chéris,
Ainsi qu'une amante fidèle,
Jettent une plainte éternelle
Sur ces poétiques débris.

Que j'aime à flotter sur ton onde.
A l'heure où du haut du rocher
L'oranger, la vigne féconde,
Versent sur ta vague profonde
Une ombre propice au nocher !

Souvent, dans ma barque sans rame,
Me confiant à ton amour,
Comme pour assoupir mon âme,
Je ferme au branle de ta lame
Mes regards fatigués du jour.

Comme un coursier souple et docile
Dont on laisse flotter le mors,
Toujours, vers quelque frais asile,
Tu pousses ma barque fragile
Avec l'écume de tes bords.

Ah ! berce, berce, berce encore,
Berce pour la dernière fois,
Berce cet enfant qui t'adore,
Et qui depuis sa tendre aurore
N'a rêvé que l'onde et les bois !

Le Dieu qui décora le monde
De ton élément gracieux,
Afin qu'ici tout se réponde,
Fit les cieux pour briller sur l'onde,
L'onde pour réfléchir les cieux.

Aussi pur que dans ma paupière,
Le jour pénètre ton flot pur,
Et dans ta brillante carrière
Tu sembles rouler la lumière
Avec tes flots d'or et d'azur.

Aussi libre que la pensée,
Tu brises le vaisseau des rois,
Et dans ta colère insensée,
Fidèle au Dieu qui t'a lancée,
Tu ne t'arrêtes qu'à sa voix.

De l'infini sublime image,
De flots en flots l'oeil emporté
Te suit en vain de plage en plage,
L'esprit cherche en vain ton rivage,
Comme ceux de l'éternité.

Ta voix majestueuse et douce
Fait trembler l'écho de tes bords,
Ou sur l'herbe qui te repousse,
Comme le zéphyr dans la mousse,
Murmure de mourants accords.

Que je t'aime, ô vague assouplie,
Quand, sous mon timide vaisseau,
Comme un géant qui s'humilie,
Sous ce vain poids l'onde qui plie
Me creuse un liquide berceau.

Que je t'aime quand, le zéphire
Endormi dans tes antres frais,
Ton rivage semble sourire
De voir dans ton sein qu'il admire
Flotter l'ombre de ses forêts !

Que je t'aime quand sur ma poupe
Des festons de mille couleurs,
Pendant au vent qui les découpe,
Te couronnent comme une coupe
Dont les bords sont voilés de fleurs !

Qu'il est doux, quand le vent caresse
Ton sein mollement agité,
De voir, sous ma main qui la presse,
Ta vague, qui s'enfle et s'abaisse
Comme le sein de la beauté !

Viens, à ma barque fugitive
Viens donner le baiser d'adieux ;
Roule autour une voix plaintive,
Et de l'écume de ta rive
Mouille encor mon front et mes yeux.

Laisse sur ta plaine mobile
Flotter ma nacelle à son gré,
Ou sous l'antre de la sibylle,
Ou sur le tombeau de Virgile :
Chacun de tes flots m'est sacré.

Partout, sur ta rive chérie,
Où l'amour éveilla mon coeur,
Mon âme, à sa vue attendrie,
Trouve un asile, une patrie,
Et des débris de son bonheur,

Flotte au hasard : sur quelque plage
Que tu me fasses dériver,
Chaque flot m'apporte une image ;
Chaque rocher de ton rivage
Me fait souvenir ou rêver...
Fable VII, Livre V.


Hercule avait chassé sur le mont Pélion.
Percés de traits inévitables,
Frappés de coups épouvantables,
Que de monstres défaits ! Un énorme lion
À l'œil étincelant, à la voix menaçante,
À la faim toujours renaissante,
Depuis dix ans la crainte et l'horreur de ces lieux,
Ou le roi, si vous l'aimez mieux,
Malgré sa griffe aiguë et sa dent meurtrière,
Vaincu lui-même enfin gisait sur la poussière.
Du lion Néméen c'était l'affreux pendant.
Expirant comme lui sur une roche aride,
Il menaçait encor son vainqueur intrépide,
Dont la suite de **** tremble en le regardant.
Quelques vermisseaux cependant,
Qui, vils rebuts de la nature,
Sur quiconque a vécu s'arrogeant certains droits,
Des ânes, des lions, des goujats et des rois
Et des dieux mêmes, que je crois,
Font également leur pâture,
Quelques vermisseaux prétendaient
Qu'à tort on avait fait le défunt si terrible ;
À leur gré, rien de plus risible
Que les bruits qui s'en répandaient.
« Trois coups ont suffi pour l'abattre.
« Il serait dès longtemps ce qu'il est aujourd'hui
« Si, **** de trembler devant lui,
« Tel qu'il a digéré l'avait osé combattre.
« S'il a vaincu, s'il a régné,
« Sa force était dans leur faiblesse.
« - Cessez, dit Hercule indigné,
« Cessez un discours qui me blesse :
« Pareils à maint historien
« Qui dans sa nullité dissèque aussi la gloire,
« Vous réduisez l'obstacle à rien
« Pour réduire à rien la victoire.
« Quoi que vous en disiez, le roi de ces forêts
« N'était ni faible, ni timide.
« Songez que pour le vaincre il a fallu les traits,
« La massue et le bras d'Alcide. »
C'était du temps que j'étais jeune ;
Je maigrissais ; rien ne maigrit
Comme cette espèce de jeûne
Qu'on appelle nourrir l'esprit.

J'étais devenu vieux, timide,
Et jaune comme un parchemin,
À l'ombre de la pyramide
Des bouquins de l'esprit humain.

Tous ces tomes que l'âge rogne
Couvraient ma planche et ma cloison.
J'étais parfois comme un ivrogne
Tant je m'emplissais de raison.

Cent bibles encombraient ma table ;
Cent systèmes étaient dedans ;
On eût, par le plus véritable,
Pu se faire arracher les dents.

Un jour que je lisais Jamblique,
Callinique, Augustin, Plotin,
Un nain tout noir à mine oblique
Parut et me dit en latin :

- « Ne va pas plus ****. Jette l'ancre,
« Fils, contemple en moi ton ancien,
« Je m'appelle Bouteille-à-l'encre ;
« Je suis métaphysicien.

« Ton front fait du tort à ton ventre.
« Je viens te dire le fin mot
« De tous ces livres où l'on entre
« Jocrisse et d'où l'on sort grimaud.

« Amuse-toi. Sois jeune, et digne
« De l'aurore et des fleurs. Isis
« Ne donnait pas d'autre consigne
« Aux sages que l'ombre a moisis.

« Un verre de vin sans litharge
« Vaut mieux, quand l'homme le boit pur,
« Que tous ces tomes dont la charge
« Ennuie énormément ton mur.

« Une bamboche à la Chaumière,
« D'où l'on éloigne avec soin l'eau,
« Contient cent fois plus de lumière
« Que Longin traduit par Boileau.

« Hermès avec sa bandelette
« Occupe ton coeur grave et noir ;
« Bacon est le livre où s'allaite
« Ton esprit, marmot du savoir.

« Si Ninette, la giletière,
« Veut la bandelette d'Hermès
« Pour s'en faire une jarretière,
« Donne-la-lui sans dire mais.

« Si Fanchette ou Landerirette
« Prend dans ton Bacon radieux
« Du papier pour sa cigarette,
« Fils des muses, rends grâce aux dieux.

« Veille, étude, ennui, patience,
« Travail, cela brûle les yeux ;
« L'unique but de la science
« C'est d'être immensément joyeux.

« Le vrai savant cherche et combine
« Jusqu'à ce que de son bouquin
« Il jaillisse une Colombine
« Qui l'accepte pour Arlequin.

« Maxime : N'être point morose,
« N'être pas bête, tout goûter,
« Dédier son nez à la rose,
« Sa bouche à la femme, et chanter.

« Les anciens vivaient de la sorte ;
« Mais vous êtes dupes, vous tous,
« De la fausse barbe que porte
« Le profil grec de ces vieux fous.

« Fils, tous ces austères visages
« Sur les plaisirs étaient penchés.
« L'homme ayant inventé sept sages,
« Le bon Dieu créa sept péchés.

« Ô docteurs, comme vous rampâtes !
« Campaspe est nue en son grenier
« Sur Aristote à quatre pattes ;
« L'esprit a l'amour pour ânier.

« Grâce à l'amour, Socrate est chauve.
« L'amour d'Homère est le bâton.
« Phryné rentrait dans son alcôve
« En donnant le bras à Platon.

« Salomon, repu de mollesses,
« Étudiant les tourtereaux,
« Avait juste autant de drôlesses
« Que Léonidas de héros.

« Sénèque, aujourd'hui sur un socle,
« Prenait Chloé sous le menton.
« Fils, la sagesse est un binocle
« Braqué sur Minerve et Goton.

« Les nymphes n'étaient pas des ourses,
« Horace n'était pas un loup ;
« Lise aujourd'hui se baigne aux sources,
« Et Tibur s'appelle Saint-Cloud.

« Les arguments dont je te crible
« Te sauveront, toi-même aidant,
« De la stupidité terrible,
« Robe de pierre du pédant.

« Guette autour de toi si quelque être
« Ne sourit pas innocemment ;
« Un chant dénonce une fenêtre,
« Un *** de fleurs cherche un amant.

« La grisette n'est point difforme,
« On donne aux noirs soucis congé
« Pour peu que le soir on s'endorme
« Sur un oreiller partagé.

« Aime. C'est ma dernière botte.
« Et je mêle à mes bons avis
« Cette fillette qui jabote
« Dans la mansarde vis-à-vis. »

Or je n'écoutai point ce drôle,
Et je le chassai. Seulement,
Aujourd'hui que sur mon épaule
Mon front penche, pâle et clément,

Aujourd'hui que mon oeil plus blême
Voit la griffe du sphinx à nu,
Et constate au fond du problème
Plus d'infini, plus d'inconnu,

Aujourd'hui que, hors des ivresses,
Près des mers qui vont m'abîmer,
Je regarde sur les sagesses
Les religions écumer,

Aujourd'hui que mon esprit sombre
Voit sur les dogmes, flot changeant,
L'épaisseur croissante de l'ombre,
Ô ciel bleu, je suis indulgent

Quand j'entends, dans le vague espace
Où toujours ma pensée erra,
Une belle fille qui passe
En chantant traderidera.
Madame et Pauline Roland,

Charlotte, Théroigne, Lucile,

Presque Jeanne d'Arc, étoilant

Le front de la foule imbécile,

Nom des cieux, cœur divin qu'exile

Cette espèce de moins que rien

France bourgeoise au dos facile,

Louise Michel est très bien.


Elle aime le Pauvre âpre et franc

Ou timide, elle est la faucille

Dans le blé mûr pour le pain blanc

Du Pauvre, et la sainte Cécile

Et la Muse rauque et gracile

Du Pauvre et son ange gardien

À ce simple, à cet indocile.

Louise Michel est très bien.


Gouvernements de maltalent,

Mégathérium ou bacille,

Soldat brut, robin insolent,

Ou quelque compromis fragile,

Géant de boue aux pieds d'argile,

Tout cela son courroux chrétien

L'écrase d'un mépris agile.

Louise Michel est très bien.


ENVOI


Citoyenne ! votre évangile

On meurt pour ! c'est l'Honneur ! et bien

**** des Taxil et des Bazile,

Louise Michel est très bien.
Un de ses bras fléchit sous son cou qui le presse,
L'autre sur son beau front retombe avec mollesse,
Et le couvre à demi :
Telle, pour sommeiller, la blanche tourterelle
Courbe son cou d'albâtre et ramène son aile
Sur son oeil endormi !

Le doux gémissement de son sein qui respire
Se mêle au bruit plaintif de l'onde qui soupire
À flots harmonieux ;
Et l'ombre de ses cils, que le zéphyr soulève,
Flotte légèrement comme l'ombre d'un rêve
Qui passe sur ses yeux !

.................................................

Que ton sommeil est doux, ô vierge ! ô ma colombe !
Comme d'un cours égal ton sein monte et retombe
Avec un long soupir !
Deux vagues que blanchit le rayon de la lune,
D'un mouvement moins doux viennent l'une après l'une
Murmurer et mourir !

Laisse-moi respirer sur ces lèvres vermeilles
Ce souffle parfumé !...Qu'ai-je fait ? Tu t'éveilles :
L'azur voilé des cieux
Vient chercher doucement ta timide paupière ;
Mais toi, ton doux regard, en voyant la lumière,
N'a cherché que mes yeux !

Ah ! que nos longs regards se suivent, se prolongent,
Comme deux purs rayons l'un dans l'autre se plongent,
Et portent tour à tour
Dans le coeur l'un de l'autre une tremblante flamme,
Ce jour intérieur que donne seul à l'âme
Le regard de l'amour !

Jusqu'à ce qu'une larme aux bords de ta paupière,
De son nuage errant te cachant la lumière,
Vienne baigner tes yeux,
Comme on voit, au réveil d'une charmante aurore,
Les larmes du matin, qu'elle attire et colore,
L'ombrager dans les cieux.

.................................................

Parle-­moi ! Que ta voix me touche !
Chaque parole sur ta bouche
Est un écho mélodieux !
Quand ta voix meurt dans mon oreille,
Mon âme résonne et s'éveille,
Comme un temple à la voix des dieux !

Un souffle, un mot, puis un silence,
C'est assez : mon âme devance
Le sens interrompu des mots,
Et comprend ta voix fugitive,
Comme le gazon de la rive
Comprend le murmure des flots.

Un son qui sur ta bouche expire,
Une plainte, un demi-sourire,
Mon coeur entend tout sans effort :
Tel, en passant par une lyre,
Le souffle même du zéphyre
Devient un ravissant accord !
À M. le comte Gaspard de Pons.


Voici ce qu'ont dit les prophètes,
Aux jours où ces hommes pieux
Voyaient en songe sur leurs têtes
L'Esprit-Saint descendre des cieux :
« Dès qu'un siècle, éteint pour le monde,
Redescend dans la nuit profonde,
De gloire ou de honte chargé,
Il va répondre et comparaître
Devant le Dieu qui le fit naître,
Seul juge qui n'est pas jugé. »

Or écoutez, fils de la terre,
Vil peuple à la tombe appelé,
Ce qu'en un rêve solitaire
La vision m'a révélé. -
C'était dans la cité flottante,
De joie et de gloire éclatante,
Où le jour n'a pas de soleil,
D'où sortit la première aurore,
Et d'où résonneront encore
Les clairons du dernier réveil.

Adorant l'essence inconnue,
Les saints, les martyrs glorieux
Contemplaient, sous l'ardente nue,
Le triangle mystérieux.
Près du trône où dort le tonnerre
Parut un spectre centenaire
Par l'ange des français conduit ;
Et l'ange, vêtu d'un long voile,
Etait pareil à l'humble étoile
Qui mène au ciel la sombre nuit.

Dans les cieux et dans les abîmes
Une voix alors s'entendit,
Qui, jusque parmi ses victimes,
Fit trembler l'archange maudit.
Le char des séraphins fidèles,
Semé d'yeux, brillant d'étincelles
S'arrêta sur son triple essieu ;
Et la roue, aux flammes bruyantes,
Et les quatre ailes tournoyantes
Se turent au souffle de Dieu.

LA VOIX.

« Déjà du livre séculaire
La page a dix-sept fois tourné ;
Le gouffre attend que ma colère
Te pardonne ou t'ait condamné.
Approche : - je tiens la balance ;
Te voilà nu dans ma présence,
Siècle innocent ou criminel.
Faut-il que ton souvenir meure ?
Réponds : « un siècle est comme une heure
Devant mon regard éternel. »

LE SIÈCLE.

« J'ai, dans mes pensers magnanimes,
Tout divisé, tout réuni ;
J'ai soumis à mes lois sublimes
Et l'immuable et l'infini ;
J'ai pesé tes volontés mêmes... »

LA VOIX.

« Fantôme, arrête ! tes blasphèmes
Troublent mes saints d'un juste effroi ;
Sors de ton orgueilleuse ivresse ;
Doute aujourd'hui de ta sagesse ;
Car tu ne peux douter de moi.

« Fier de tes aveugles sciences,
N'as-tu pas ri, dans tes clameurs,
Et de mon être et des croyances
Qui gardent les lois et les mœurs ?
De la mort souillant le mystère,
N'as-tu pas effrayé la terre
D'un crime aux humains inconnu ?
Des rois, avant les temps céleste,
N'as-tu pas réveillé les restes ? »

LE SIÈCLE.

« Ô Dieu ! votre jour est venu ! »

LA VOIX.

« Pleure, ô siècle ! D'abord timide,
L'erreur grandit comme un géant ;
L'athée invite au régicide ;
Le chaos est fils du néant.
J'aimais une terre lointaine ;
Un roi bon, une belle reine,
Conduisaient son peuple joyeux,
Je bénissais leurs jours augustes ;
Réponds, qu'as-tu fait de ces justes ? »

LE SIÈCLE.

« Seigneur, je les vois dans vos cieux. »

LA VOIX.

« Oui, l'épouvante enfin t'éclaire !
C'est moi qui marque leur séjour
Aux réprouvés de ma colère,
Comme aux élus de mon amour.
Qu'un rayon tombe de ma face,
Soudain tout s'anime ou s'efface
Tout naît ou retourne au tombeau.
Mon souffle, propice ou terrible,
Allume l'incendie horrible,
Comme il éteint le pur flambeau !
Que l'oubli muet te dévore ! »

LE SIÈCLE.

« Eh bien donc ! l'âge qui va naître
Absoudra les forfaits plus odieux ! »
Ici gémit l'humble Espérance,
Et le bel ange de la France
De son aile voila ses yeux.

LA VOIX.

« Va, ma main t'ouvre les abîmes ;
Un siècle nouveau prend l'essor,
Mais, **** de t'absoudre, ses crimes,
Maudit ! t'accuseront encor. »

Et, comme l'ouragan qui gronde
Chasse à grand bruit jusque sur l'onde
Le flocon vers les mers jeté,
Longtemps la voix inexorable
Poursuit le siècle coupable,
Qui tombait dans l'éternité.

Septembre 1821.
Ave, Maria, gratia plena.


Oh ! votre oeil est timide et votre front est doux.
Mais quoique, par pudeur ou par pitié pour nous,
Vous teniez secrète votre âme,
Quand du souffle d'en haut votre coeur est touché,
Votre coeur, comme un feu sous la cendre caché,
Soudain étincelle et s'enflamme.

Élevez-là souvent cette voix qui se tait.
Quand vous vîntes au jour un rossignol chantait ;
Un astre charmant vous vit naître.
Enfant, pour vous marquer du poétique sceau,
Vous eûtes au chevet de votre heureux berceau
Un dieu, votre père peut-être !

Deux vierges, Poésie et Musique, deux soeurs,
Vous font une pensée infinie en douceurs ;
Votre génie a deux aurores,
Et votre esprit tantôt s'épanche en vers touchants,
Tantôt sur le clavier, qui frémit sous vos chants,
S'éparpille en notes sonores !

Oh ! vous faites rêver le poète, le soir !
Souvent il songe à vous, lorsque le ciel est noir,
Quand minuit déroule ses voiles ;
Car l'âme du poète, âme d'ombre et d'amour,
Est une fleur des nuits qui s'ouvre après le jour
Et s'épanouit aux étoiles !

Décembre 1830.
Domremy, 182...

Moi, que je sois royaliste !
C'est à peu près comme si
Le ciel devait rester triste
Quand l'aube a dit : Me voici !

Un roi, c'est un homme équestre,
Personnage à numéro,
En marge duquel de Maistre
Écrit : Roi, lisez : Bourreau.

Je n'y crois plus. Est-ce un crime
Que d'avoir, par ma cloison,
Vu ce point du jour sublime,
Le lever de la raison !

J'étais jadis à l'école
Chez ce pédant, le Passé ;
J'ai rompu cette bricole ;
J'épelle un autre A B C.

Mon livre, ô fils de Lutèce,
C'est la nature, alphabet
Où le lys n'est point altesse,
Où l'arbre n'est point gibet.

Maintenant, je te l'avoue,
Je ne crois qu'au droit divin
Du coeur, de l'enfant qui joue,
Du franc rire et du bon vin.

Puisque tu me fais visite
Sous mon chaume, à Domremy,
À toi le Grec, moi le Scythe,
J'ouvre mon âme à demi...

Pas tout à fait. - La feuillée
Doit voiler le carrefour,
Et la porte entrebâillée
Convient au timide amour.

J'aime, en ces bois que j'habite,
L'aurore ; et j'ai dans mon trou
Pour pareil, lé cénobite,
Pour contraire, le hibou.

Une femme me fascine ;
Comme Properce, j'entends
Une flûte tibicine
Dans les branches du printemps.

J'ai pour jeu la poésie ;
J'ai pour torture un minois,
Vieux style, et la jalousie,
Ce casse-tête chinois.

Je suis fou d'une charmeuse,
De Paris venue ici,
Dont les saules de la Meuse
Sont tous amoureux aussi.

Je l'ai suivie en Sologne,
Je la suis à Vaucouleurs.
Mon coeur rit, ma raison grogne,
Et me voilà dans les fleurs.

Je l'ai nommée Euryanthe.
J'en perds l'âme et l'appétit.
Circonstance atténuante :
Elle a le pied très petit.

Plains-moi. Telle est ma blessure.
Cela dit, amusons-nous.
Oublions tout, la censure,
Rome, et l'abbé Frayssinous.

Cours les bals, danse aux kermesses.
Les filles ont de la foi ;
Fais-toi tenir les promesses
Qu'elles m'ont faites à moi.

Ris, savoure, aime, déguste,
Et, libres, narguons un peu
Le roi, ce faux nez auguste
Que le prêtre met à Dieu.
Distraite et malheureuse,

Sur un bouquet de fleurs

Une fille rêveuse

Laissait tomber des pleurs ;

Un timide sourire

Dans ses pleurs se glissa ;

Mais un triste délire

A son tour l'effaça.


« Au sein de Clémentine,

Brûlé d'un fol amour,

Douce fleur d'églantine,

Tu n'as brillé qu'un jour :

Ta courte destinée

Vient m'annoncer mon sort

Un seul jour dans l'année,

Pour l'Amour et la Mort.


Vers la froide Angleterre

Quand le bonheur fuira,

Toutes deux, sur la terre,

On nous retrouvera ;

Symbole de souffrance,

Et gage de pardon,

Meurs avec l'imprudence

Qui troubla ma raison.


Adieu, mère chérie !

Le ciel a vu vos pleurs ;

Je suis calme et guérie,

Couronnez-moi de fleurs.

Des anges en prière

J'entends les chants pieux ;

Leur voix pure et légère

M'appelle dans les cieux. »


Du monastère antique

C'étaient les saints concerts :

L'orgue mélancolique

Gémissait dans les airs.

A la mort résignée,

La vierge y vint un jour...

L'Ange de l'hyménée

La rendit à l'Amour.
Tu t'en vas ? Reste encore :

Je te perds pour longtemps !

Et tu vois que l'aurore

Luit depuis peu d'instants.

Tantôt sur le rivage

Je marcherai sans toi :

J'y reste en esclavage,

Pauvre de moi !


Nous avons vu la vie

Sous les mêmes couleurs ;

Elle a pu faire envie,

Car elle eut bien des fleurs.

La guerre était la gloire,

J'y courus avec toi :

J'ai payé la victoire,

Pauvre de moi !


Sur combien de blessures

A-t-on rivé nos fers !

Ils en font de plus sûres,

Dans leurs prisons d'enfers.

J'ai raillé ma souffrance,

Enchaîné près de toi ;

Mais tu pars pour la France,

Pauvre de moi !


Ma plaie envenimée

Arrête ici mes pas ;

Mortelle et renfermée,

Elle s'aigrit tout bas.

Sur un ponton de guerre

Faut-il languir sans toi ?

Je te suivais naguère,

Pauvre de moi !


Si ma blonde Angeline,

En te voyant passer,

Inquiète s'incline,

Timide à t'embrasser ;

A cet auge modeste,

Qui m'attend avec toi,

Ne dis pas où je reste,

Pauvre de moi !


Au foyer de ton père

Si le mien va s'asseoir,

Mon nom sera, j'espère,

Dans vos récits du soir,

Quand ses yeux pleins de larmes

S'attacheront sur toi,

Fais-lui bénir nos armes,

Pauvre de moi !
Un bouvreuil, un corbeau, chacun dans une cage,
Habitaient le même logis.
L'un enchantait par son ramage
La femme, le mari, les gens, tout le ménage :
L'autre les fatiguait sans cesse de ses cris ;
Il demandait du pain, du rôti, du fromage,
Qu'on se pressait de lui porter,
Afin qu'il voulût bien se taire.
Le timide bouvreuil ne faisait que chanter,
Et ne demandait rien : aussi, pour l'ordinaire,
On l'oubliait ; le pauvre oiseau
Manquait souvent de grain et d'eau.
Ceux qui louaient le plus de son chant l'harmonie
N'auraient pas fait le moindre pas
Pour voir si l'auge était remplie.
Ils l'aimaient bien pourtant, mais ils n'y pensaient pas.
Un jour on le trouva mort de faim dans sa cage.
Ah ! Quel malheur ! Dit-on : las ! Il chantait si bien !
De quoi donc est-il mort ? Certes, c'est grand dommage !
Le corbeau crie encore et ne manque de rien.
Vous aviez l'âge où flotte encore
La double natte sur le dos,
Mais où l'enfant qu'elle décore
Sent le prix de pareils fardeaux ;

L'âge où l'œil déjà nous évite,
Quand, sous des vêtements moins courts,
Devant sa mère, droit et vite,
On va tous les matins au cours ;

Où déjà l'on pince les lèvres
Au tutoiement d'un grand garçon,
Lasse un peu des tendresses mièvres
Pour la poupée au cœur de son.

Alors mon idéal suprême
N'était pas l'inouï bonheur,
En aimant, d'être aimé moi-même,
Mais d'en mourir avec honneur,

De vous arracher votre estime
Sous les tenailles des bourreaux,
Dans un martyre magnanime,
Car les enfants sont des héros !

Si les enfants ont l'air timide,
C'est qu'ils n'osent que soupirer,
Se sentant le cœur intrépide,
Mais trop humble pour espérer.

Comme un page épris d'une reine,
Je n'avais d'autre ambition
Que de ramasser dans l'arène
Votre gant au pied d'un lion.

Mais une demoiselle sage
Ne laisse pas traîner son gant.
Le vôtre, un jour, sur mon passage
Échappa de vos doigts pourtant.

Oh ! Ce fut bien involontaire !
Mais j'en frémis. Comment laisser
Sous vos yeux votre gant par terre,
Quand je n'avais qu'à me baisser ?

C'était au parloir du collège,
Pas un lion sur mon chemin.
- « Allons, courage ! » me disais-je,
Le devoir me poussait la main ;

Mais mon trouble demandait grâce
Au défi de ce gant perdu,
Et c'est le dernier de ma classe,
Madame, qui vous l'a rendu.
Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
Sur l'esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
Et que de l'horizon embrassant tout le cercle
Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits ;

Quand la terre est changée en un cachot humide,
Où l'Espérance, comme une chauve-souris,
S'en va battant les murs de son aile timide
Et se cognant la tête à des plafonds pourris ;

Quand la pluie étalant ses immenses traînées
D'une vaste prison imite les barreaux,
Et qu'un peuple muet d'infâmes araignées
Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux,

Des cloches tout à coup sautent avec furie
Et lancent vers le ciel un affreux hurlement,
Ainsi que des esprits errants et sans patrie
Qui se mettent à geindre opiniâtrement.

- Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,
Défilent lentement dans mon âme ; l'Espoir,
Vaincu, pleure, et l'Angoisse atroce, despotique,
Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.
Flebile nescio quid.
OVIDE.


Oh ! pourquoi te cacher ? Tu pleurais seule ici.
Devant tes yeux rêveurs qui donc passait ainsi ?
Quelle ombre flottait dans ton âme ?
Était-ce long regret ou noir pressentiment,
Ou jeunes souvenirs dans le passé dormant,
Ou vague faiblesse de femme ?

Voyais-tu fuir déjà l'amour et ses douceurs,
Ou les illusions, toutes ces jeunes soeurs
Qui le matin, devant nos portes,
Dans l'avenir sans borne ouvrant mille chemins,
Dansent, des fleurs au front et les mains dans les mains,
Et bien avant le soir sont mortes ?

Ou bien te venait-il des tombeaux endormis
Quelque ombre douloureuse avec des traits amis,
Te rappelant le peu d'années,
Et demandant tout bas quand tu viendrais le soir
Prier devant ces croix de pierre ou de bois noir
Où pendent tant de fleurs fanées ?

Mais non, ces visions ne te poursuivaient pas.
Il suffit pour pleurer de songer qu'ici-bas
Tout miel est amer, tout ciel sombre,
Que toute ambition trompe l'effort humain,
Que l'espoir est un leurre, et qu'il n'est pas de main
Qui garde l'onde ou prenne l'ombre !

Toujours ce qui là-bas vole au gré du zéphyr
Avec des ailes d'or, de pourpre et de saphir,
Nous fait courir et nous devance ;
Mais adieu l'aile d'or, pourpre, émail, vermillon,
Quand l'enfant a saisi le frêle papillon,
Quand l'homme a pris son espérance !

Pleure. Les pleurs vont bien, même au bonheur ; tes chants
Sont plus doux dans les pleurs ; tes yeux purs et touchants
Sont plus beaux quand tu les essuies.
L'été, quand il a plu, le champ est plus vermeil,
Et le ciel fait briller plus au beau soleil
Son azur lavé par les pluies !

Pleure comme Rachel, pleure comme Sara.
On a toujours souffert ou bien on souffrira.
Malheur aux insensés qui rient !
Le Seigneur nous relève alors que nous tombons.
Car s'il préfère encor les malheureux aux bons,
Ceux qui pleurent à ceux qui prient !

Pleure afin de savoir ! Les larmes sont un don.
Souvent les pleurs, après l'erreur et l'abandon,
Raniment nos forces brisées !
Souvent l'âme, sentant, au doute qui s'enfuit,
Qu'un jour l'intérieur se lève dans sa nuit,
Répand de ces douces rosées !

Pleure ! mais, tu fais bien, cache-toi pour pleurer.
Aie un asile en toi. Pour t'en désaltérer,
Pour les savourer avec charmes,
Sous le riche dehors de ta prospérité,
Dans le fond de ton coeur, comme un fruit pour l'été,
Mets à part ton trésor de larmes !

Car la fleur, qui s'ouvrit avec l'aurore en pleurs,
Et qui fait à midi de ses belles couleurs
Admirer la splendeur timide,
Sous ses corolles d'or, **** des yeux importuns,
Au fond de ce calice où sont tous ses parfums,
Souvent cache une perle humide !

Le 17 juin 1830.
Qui, toi, mon bien-aimé, t'attacher à mon sort,
Te parer d'une fleur que la tombe t'envie !
Lier tes jours de gloire à ma tremblante vie,
Et ton baiser d'amour au baiser de la mort !
Me suivre, toi si cher, aux rives enchantées
Que pour jamais bientôt mes pas auront quittées !
Mes pas que tu soutiens, qui te cherchaient toujours,
Dont la trace légère effleura le rivage
Où tu m'avais montré des fleurs et de beaux jours,
Où je vais devant toi passer comme un nuage !
Oui, devant toi ma vie incline son flambeau,
De ses pâles rayons le dernier va s'éteindre.
Ces fleurs, ces belles fleurs, que je ne puis atteindre,
Tu les effeuilleras un soir sur mon tombeau.

La Mort m'a regardée, et ta plainte adorable,
Ma jeunesse, tes vœux, rien ne doit l'attendrir.
Elle m'a regardée, et cette inexorable,
Quand j'écoutais ton chant, m'a dit : Tu vas mourir !

Oh ! non : prodigue encor les hymnes, les offrandes ;
Jette-lui ta couronne et tes lauriers en fleurs ;
Cache-moi dans ton sein, couvre-moi de guirlandes,
Et, longtemps immobile, elle craindra tes pleurs.
Conduis-moi près des flots. La nymphe qui soupire
Y rafraîchit l'air de sa voix :
Cet air doux et mortel, que ma bouche respire,
Brûle moins à l'ombre des bois.

Vois dans l'eau, vois ce lis, dont la tête abaissée
Semble se dérober au sourire des cieux :
Telle, craignant l'Amour et le cherchant des yeux,
J'essayais de te fuir, innocente et blessée.
Je demandais aux bois l'oubli de tes accents :
Un vague, un triste écho m'en rappelait les charmes,
Et dans les rameaux frémissants
Ton image venait s'attendrir à mes larmes.

Un jour, ce fut toi-même, un jour, à mes genoux,
Je te vis sous le saule, ami de mon jeune âge :
Je ne m'y trouvai plus seule avec ton image,
Il nous cachait ensemble, il se penchait sur nous.
Trop ****, hélas ! trop **** ; et ta flamme timide
Enhardit vainement mes timides secrets.
Tu les connus trop ****, et ma fuite rapide
T'abandonne à de longs regrets.

Oh ! que je crains pour toi l'aurore désolée
Qui ne pourra me rendre à tes vœux superflus,
Quand sa douce lueur, pour moi seule voilée,
Ne m'éveillera plus !
Mais le ruisseau répond, par un faible murmure,
Au souffle expirant des zéphyrs ;
La nymphe qui s'endort entraîne mes soupirs
À la source déjà moins pure.
Demain... L'écho plus triste a dit aussi : Demain.
Adieu, ma jeune vie ! adieu, toi que j'adore !
Ne gémis pas. Ce soir, je serre encor ta main :
Ce soir, efforce-toi de me sourire encore.
Sara, belle d'indolence,
Se balance
Dans un hamac, au-dessus
Du bassin d'une fontaine
Toute pleine
D'eau puisée à l'Ilyssus ;

Et la frêle escarpolette
Se reflète
Dans le transparent miroir,
Avec la baigneuse blanche
Qui se penche,
Qui se penche pour se voir.

Chaque fois que la nacelle,
Qui chancelle,
Passe à fleur d'eau dans son vol,
On voit sur l'eau qui s'agite
Sortir vite
Son beau pied et son beau col.

Elle bat d'un pied timide
L'onde humide
Où tremble un mouvant tableau,
Fait rougir son pied d'albâtre,
Et, folâtre,
Rit de la fraîcheur de l'eau.

Reste ici caché : demeure !
Dans une heure,
D'un œil ardent tu verras
Sortir du bain l'ingénue,
Toute nue,
Croisant ses mains sur ses bras.

Car c'est un astre qui brille
Qu'une fille
Qui sort d'un bain au flot clair,
Cherche s'il ne vient personne,
Et frissonne
Toute mouillée au grand air.

Elle est là, sous la feuillée,
Eveillée
Au moindre bruit de malheur ;
Et rouge, pour une mouche
Qui la touche,
Comme une grenade en fleur.

On voit tout ce que dérobe
Voile ou robe ;
Dans ses yeux d'azur en feu,
Son regard que rien ne voile
Et l'étoile
Qui brille au fond d'un ciel bleu.

L'eau sur son corps qu'elle essuie
Roule en pluie,
Comme sur un peuplier ;
Comme si, gouttes à gouttes,
Tombaient toutes
Les perles de son collier.

Mais Sara la nonchalante
Est bien lente
A finir ses doux ébats ;
Toujours elle se balance
En silence,
Et va murmurant tout bas :

« Oh ! si j'étais capitane,
Ou sultane,
Je prendrais des bains ambrés,
Dans un bain de marbre jaune,
Près d'un trône,
Entre deux griffons dorés !

« J'aurais le hamac de soie
Qui se ploie
Sous le corps prêt à pâmer ;
J'aurais la molle ottomane
Dont émane
Un parfum qui fait aimer.

« Je pourrais folâtrer nue,
Sous la nue,
Dans le ruisseau du jardin,
Sans craindre de voir dans l'ombre
Du bois sombre
Deux yeux s'allumer soudain.

« Il faudrait risquer sa tête
Inquiète,
Et tout braver pour me voir,
Le sabre nu de l'heiduque,
Et l'eunuque
Aux dents blanches, au front noir !

« Puis, je pourrais, sans qu'on presse
Ma paresse,
Laisser avec mes habits
Traîner sur les larges dalles
Mes sandales
De drap brodé de rubis. »

Ainsi se parle en princesse,
Et sans cesse
Se balance avec amour,
La jeune fille rieuse,
Oublieuse
Des promptes ailes du jour.

L'eau, du pied de la baigneuse
Peu soigneuse,
Rejaillit sur le gazon,
Sur sa chemise plissée,
Balancée
Aux branches d'un vert buisson.

Et cependant des campagnes
Ses compagnes
Prennent toutes le chemin.
Voici leur troupe frivole
Qui s'envole
En se tenant par la main.

Chacune, en chantant comme elle,
Passe, et mêle
Ce reproche à sa chanson :
- Oh ! la paresseuse fille
Qui s'habille
Si **** un jour de moisson !

Juillet 1828.

— The End —