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Patty P Jul 2018
The planes in the sky look dwarf size, compare to the large skies.
Swallowing the blue atheist clouds
all spotless
as the ocean sparkles, flirting with the blazing sun, flirting with sailing ships as they smoothly take their leave.
Hypnotizing the captains onto their long journey on this massive 70% part of water they are on.
they are seen somewhere along the lines of the horizon
in the Atlantic ocean leaving with the sun at 7:52 PM  with 17 seconds.
The black haired beauty is seen, with a beige round hat wearing a long black dress, fleeing into the black hole sun.

                     ***************                 
­Les avions dans le ciel ressemblent à la taille des nains, comparés aux grands cieux.
Avaler les nuages ​​athées bleus
tout impeccable
alors que l'océan scintille, flirtant avec le soleil flamboyant, flirtant avec des voiliers alors qu'ils partent tranquillement.
Hypnotiser les capitaines sur leur long voyage sur cette énorme partie de soixante dix pour cent d'eau qu'ils sont.
ils sont vus quelque part le long des lignes de l'horizon
dans l'océan Atlantique laissant au soleil à 19h52 avec 17 secondes.
On voit la beauté aux cheveux noirs, avec un chapeau rond beige portant une longue robe noire, fuyant dans le soleil du trou noir.
Dans le ciel gris des anges de faïence
Dans le ciel gris des sanglots étouffés
Il me souvient de ces jours de Mayence
Dans le Rhin noir pleuraient des filles-fées

On trouvait parfois au fond des ruelles
Un soldat tué d'un coup de couteau
On trouvait parfois cette paix cruelle
Malgré le jeune vin blanc des coteaux

J'ai bu l'alcool transparent des cerises
J'ai bu les serments échangés tout bas
Qu'ils étaient beaux les palais les églises
J'avais vingt ans Je ne comprenais pas

Qu'est-ce que je savais de la défaite
Quand ton pays est amour défendu
Quand il te faut la voix des faux-prophètes
Pour redonner vie à l'espoir perdu

Il me souvient de chansons qui m'émurent
Il me souvient des signes à la craie
Qu'on découvrait au matin sur les murs
Sans en pouvoir déchiffrer les secrets

Qui peut dire où la mémoire commence
Qui peut dire où le temps présent finit
Où le passé rejoindra la romance
Où le malheur n'est qu'un papier jauni

Comme l'enfant surprit parmi ses rêves
Les regards bleus des vaincus sont gênants
Le pas des pelotons à la relève
Faisait frémir le silence rhénan.
Que ce soit dimanche ou lundi
Soir ou matin minuit midi
Dans l'enfer ou le paradis
Les amours aux amours ressemblent
C'était hier que je t'ai dit
Nous dormirons ensemble

C'était hier et c'est demain
Je n'ai plus que toi de chemin
J'ai mis mon cœur entre tes mains
Avec le tien comme il va l'amble
Tout ce qu'il a de temps humain
Nous dormirons ensemble

Mon amour ce qui fut sera
Le ciel est sur nous comme un drap
J'ai refermé sur toi mes bras
Et tant je t'aime que j'en tremble
Aussi longtemps que tu voudras
Nous dormirons ensemble.
Le monde attend un nouveau Dieu.
Joseph de Maistre.


Je m'adresse à tout l'Univers,
Après David, le roi psalmiste.
Oui, Madame, en ces quelques vers,
Je m'adresse à tout l'Univers.
Sur les continents et les mers,
Si tant est qu'un athée existe,
C'est moi, dis-je, à tout l'Univers,
Après David, le roi psalmiste.

Je me fous bien de tous vos dieux,
Ils sont jolis, s'ils vous ressemblent,
Et bons à foutre dans les lieux.
Je me fous bien de tous vos dieux,
Je me fous même du bon vieux,
L'unique, devant qui tous tremblent ;
Je me fous bien de tous vos dieux,
Ils sont jolis, s'ils vous ressemblent.

Je ris du Dieu des bonnes gens,
S'il en est encor par le monde ;
Avec les gens intelligents.
Je ris du Dieu des bonnes gens.
Sacré Dieu ! quels airs indulgents !
Quel gros cul, quelle panse ronde !
Mais... pour les seules bonnes gens,
S'il en est encor par le monde.

Je me fous aussi de celui
Des grands philosophes, très drôles,
Qui parfois se prennent pour lui.
Je me fous aussi de celui
Dont l'incommensurable ennui
Voudrait peser sur nos épaules.
Je me fous aussi de celui
Des grands philosophes, très drôles.

Je plains fort, vous entendez bien,
Tout homme qui dit : Dieu, sur terre,
Indou, musulman ou chrétien,
Je le plains, vous entendez bien ;
Le déiste aussi, qui n'est rien
Dans l'église ou le phalanstère.
Je plains fort, vous entendez bien,
Tout homme qui dit : Dieu sur terre.

Je suis comme le vieux Blanqui
Je dis aussi : « Ni Dieu ni maître. »
Ni maîtresse... c'est riquiqui.
Je suis comme le vieux Blanqui.
Je me fous de n'importe qui.
Je jette tout par la fenêtre,
Et je me fous bien de Blanqui,
Comme de son « Ni Dieu ni maître. »

Je n'en ai qu'un, mais assez bon
Nom de Dieu ! pour que je l'écule,
Votre vrai Dieu, Dieu sans... rayon.
Je n'en ai qu'un, mais assez bon :
Le monde entier, ce grand capon,
Vit dans la peur de sa férule.
Je n'en ai qu'un mais assez bon
Nom de Dieu ! pour que je l'écule.

L'un ou l'autre mot m'est égal,
Si mon langage est clair, Madame.
Être clair c'est le principal.
L'un ou l'autre mot m'est égal.
Mais l'autre était grossier pas mal,
Et... j'ai le respect de la femme.
L'un ou l'autre mot m'est égal.
Si mon langage est clair, Madame.
Paul d'Aubin Jan 2017
Toulouse en Hiver

Quand le roux de l’automne s'estompe ou s'étiole,
Que la Garonne charrie un flot de boues terreuses,
Que les arbres sans feuille ressemblent à des sculptures de fer,
L’hiver a déjà pris possession de la ville.
Mais sitôt venu le solstice d’hiver,
L'assombrissement de la lumière des jours
S’estompe en partie grâce aux feux de la ville.
Toulouse apparaît alors ruisselante de lumières.
Ensuite viennent les premières journées de froidure ;
Tempérées par la bruine et quelques retours de soleil,
Sans quoi la cité ne serait pas aussi joyeuse
Et le chaland se ferait rare et casanier.
Les rues de l'hiver sont plus emplies de gens pressés,
Qu’en d’autres saisons, particulièrement dans les bus,
Où les mères s'efforcent de faire place aux poussettes,
Parmi les acheteurs surchargés de cadeaux.
Mais la neige reste rare à Toulouse et accueillie comme une fête
Par les bambins ravis et les adultes retrouvant leurs jeunesses
Quel dommage que son empire soit si éphémère.
et se transforme vite en débâcle boueuse.
Il nous manque alors le vin chaud des cités Pyrénéennes,
Et de grands brasiers auprès desquels se réchauffer.
Mais pointent déjà, avril et mai, où l’hiver se traîne,
Où les jours rallongent et le besoin de soleil se fait intense.
Nous ne sommes plus **** du printemps qui est renaissance
Des plantes, et du besoin de flâner et de « tchatcher»
Du Peuple de Toulouse qui rêve déjà des robes légères de l’été,
Et de leurs promesses charmantes et enivrantes.
Déjà percent les bourgeons et les premières fleurs,
Et cette fin d’hiver prend une vêture pimpante,
Les rues et les places se remplissent à nouveau du spectacle de la ville.
Il ne reste plus qu’à tordre le coup aux fâcheux «saints de glace».

Paul Arrighi
La muse

Poète, prends ton luth et me donne un baiser ;
La fleur de l'églantier sent ses bourgeons éclore,
Le printemps naît ce soir ; les vents vont s'embraser ;
Et la bergeronnette, en attendant l'aurore,
Aux premiers buissons verts commence à se poser.
Poète, prends ton luth, et me donne un baiser.

Le poète

Comme il fait noir dans la vallée !
J'ai cru qu'une forme voilée
Flottait là-bas sur la forêt.
Elle sortait de la prairie ;
Son pied rasait l'herbe fleurie ;
C'est une étrange rêverie ;
Elle s'efface et disparaît.

La muse

Poète, prends ton luth ; la nuit, sur la pelouse,
Balance le zéphyr dans son voile odorant.
La rose, vierge encor, se referme jalouse
Sur le frelon nacré qu'elle enivre en mourant.
Écoute ! tout se tait ; songe à ta bien-aimée.
Ce soir, sous les tilleuls, à la sombre ramée
Le rayon du couchant laisse un adieu plus doux.
Ce soir, tout va fleurir : l'immortelle nature
Se remplit de parfums, d'amour et de murmure,
Comme le lit joyeux de deux jeunes époux.

Le poète

Pourquoi mon coeur bat-il si vite ?
Qu'ai-je donc en moi qui s'agite
Dont je me sens épouvanté ?
Ne frappe-t-on pas à ma porte ?
Pourquoi ma lampe à demi morte
M'éblouit-elle de clarté ?
Dieu puissant ! tout mon corps frissonne.
Qui vient ? qui m'appelle ? - Personne.
Je suis seul ; c'est l'heure qui sonne ;
Ô solitude ! ô pauvreté !

La muse

Poète, prends ton luth ; le vin de la jeunesse
Fermente cette nuit dans les veines de Dieu.
Mon sein est inquiet ; la volupté l'oppresse,
Et les vents altérés m'ont mis la lèvre en feu.
Ô paresseux enfant ! regarde, je suis belle.
Notre premier baiser, ne t'en souviens-tu pas,
Quand je te vis si pâle au toucher de mon aile,
Et que, les yeux en pleurs, tu tombas dans mes bras ?
Ah ! je t'ai consolé d'une amère souffrance !
Hélas ! bien jeune encor, tu te mourais d'amour.
Console-moi ce soir, je me meurs d'espérance ;
J'ai besoin de prier pour vivre jusqu'au jour.

Le poète

Est-ce toi dont la voix m'appelle,
Ô ma pauvre Muse ! est-ce toi ?
Ô ma fleur ! ô mon immortelle !
Seul être pudique et fidèle
Où vive encor l'amour de moi !
Oui, te voilà, c'est toi, ma blonde,
C'est toi, ma maîtresse et ma soeur !
Et je sens, dans la nuit profonde,
De ta robe d'or qui m'inonde
Les rayons glisser dans mon coeur.

La muse

Poète, prends ton luth ; c'est moi, ton immortelle,
Qui t'ai vu cette nuit triste et silencieux,
Et qui, comme un oiseau que sa couvée appelle,
Pour pleurer avec toi descends du haut des cieux.
Viens, tu souffres, ami. Quelque ennui solitaire
Te ronge, quelque chose a gémi dans ton coeur ;
Quelque amour t'est venu, comme on en voit sur terre,
Une ombre de plaisir, un semblant de bonheur.
Viens, chantons devant Dieu ; chantons dans tes pensées,
Dans tes plaisirs perdus, dans tes peines passées ;
Partons, dans un baiser, pour un monde inconnu,
Éveillons au hasard les échos de ta vie,
Parlons-nous de bonheur, de gloire et de folie,
Et que ce soit un rêve, et le premier venu.
Inventons quelque part des lieux où l'on oublie ;
Partons, nous sommes seuls, l'univers est à nous.
Voici la verte Écosse et la brune Italie,
Et la Grèce, ma mère, où le miel est si doux,
Argos, et Ptéléon, ville des hécatombes,
Et Messa la divine, agréable aux colombes,
Et le front chevelu du Pélion changeant ;
Et le bleu Titarèse, et le golfe d'argent
Qui montre dans ses eaux, où le cygne se mire,
La blanche Oloossone à la blanche Camyre.
Dis-moi, quel songe d'or nos chants vont-ils bercer ?
D'où vont venir les pleurs que nous allons verser ?
Ce matin, quand le jour a frappé ta paupière,
Quel séraphin pensif, courbé sur ton chevet,
Secouait des lilas dans sa robe légère,
Et te contait tout bas les amours qu'il rêvait ?
Chanterons-nous l'espoir, la tristesse ou la joie ?
Tremperons-nous de sang les bataillons d'acier ?
Suspendrons-nous l'amant sur l'échelle de soie ?
Jetterons-nous au vent l'écume du coursier ?
Dirons-nous quelle main, dans les lampes sans nombre
De la maison céleste, allume nuit et jour
L'huile sainte de vie et d'éternel amour ?
Crierons-nous à Tarquin : " Il est temps, voici l'ombre ! "
Descendrons-nous cueillir la perle au fond des mers ?
Mènerons-nous la chèvre aux ébéniers amers ?
Montrerons-nous le ciel à la Mélancolie ?
Suivrons-nous le chasseur sur les monts escarpés ?
La biche le regarde ; elle pleure et supplie ;
Sa bruyère l'attend ; ses faons sont nouveau-nés ;
Il se baisse, il l'égorge, il jette à la curée
Sur les chiens en sueur son coeur encor vivant.
Peindrons-nous une vierge à la joue empourprée,
S'en allant à la messe, un page la suivant,
Et d'un regard distrait, à côté de sa mère,
Sur sa lèvre entr'ouverte oubliant sa prière ?
Elle écoute en tremblant, dans l'écho du pilier,
Résonner l'éperon d'un hardi cavalier.
Dirons-nous aux héros des vieux temps de la France
De monter tout armés aux créneaux de leurs tours,
Et de ressusciter la naïve romance
Que leur gloire oubliée apprit aux troubadours ?
Vêtirons-nous de blanc une molle élégie ?
L'homme de Waterloo nous dira-t-il sa vie,
Et ce qu'il a fauché du troupeau des humains
Avant que l'envoyé de la nuit éternelle
Vînt sur son tertre vert l'abattre d'un coup d'aile,
Et sur son coeur de fer lui croiser les deux mains ?
Clouerons-nous au poteau d'une satire altière
Le nom sept fois vendu d'un pâle pamphlétaire,
Qui, poussé par la faim, du fond de son oubli,
S'en vient, tout grelottant d'envie et d'impuissance,
Sur le front du génie insulter l'espérance,
Et mordre le laurier que son souffle a sali ?
Prends ton luth ! prends ton luth ! je ne peux plus me taire ;
Mon aile me soulève au souffle du printemps.
Le vent va m'emporter ; je vais quitter la terre.
Une larme de toi ! Dieu m'écoute ; il est temps.

Le poète

S'il ne te faut, ma soeur chérie,
Qu'un baiser d'une lèvre amie
Et qu'une larme de mes yeux,
Je te les donnerai sans peine ;
De nos amours qu'il te souvienne,
Si tu remontes dans les cieux.
Je ne chante ni l'espérance,
Ni la gloire, ni le bonheur,
Hélas ! pas même la souffrance.
La bouche garde le silence
Pour écouter parler le coeur.

La muse

Crois-tu donc que je sois comme le vent d'automne,
Qui se nourrit de pleurs jusque sur un tombeau,
Et pour qui la douleur n'est qu'une goutte d'eau ?
Ô poète ! un baiser, c'est moi qui te le donne.
L'herbe que je voulais arracher de ce lieu,
C'est ton oisiveté ; ta douleur est à Dieu.
Quel que soit le souci que ta jeunesse endure,
Laisse-la s'élargir, cette sainte blessure
Que les noirs séraphins t'ont faite au fond du coeur :
Rien ne nous rend si grands qu'une grande douleur.
Mais, pour en être atteint, ne crois pas, ô poète,
Que ta voix ici-bas doive rester muette.
Les plus désespérés sont les chants les plus beaux,
Et j'en sais d'immortels qui sont de purs sanglots.
Lorsque le pélican, lassé d'un long voyage,
Dans les brouillards du soir retourne à ses roseaux,
Ses petits affamés courent sur le rivage
En le voyant au **** s'abattre sur les eaux.
Déjà, croyant saisir et partager leur proie,
Ils courent à leur père avec des cris de joie
En secouant leurs becs sur leurs goitres hideux.
Lui, gagnant à pas lents une roche élevée,
De son aile pendante abritant sa couvée,
Pêcheur mélancolique, il regarde les cieux.
Le sang coule à longs flots de sa poitrine ouverte ;
En vain il a des mers fouillé la profondeur ;
L'Océan était vide et la plage déserte ;
Pour toute nourriture il apporte son coeur.
Sombre et silencieux, étendu sur la pierre
Partageant à ses fils ses entrailles de père,
Dans son amour sublime il berce sa douleur,
Et, regardant couler sa sanglante mamelle,
Sur son festin de mort il s'affaisse et chancelle,
Ivre de volupté, de tendresse et d'horreur.
Mais parfois, au milieu du divin sacrifice,
Fatigué de mourir dans un trop long supplice,
Il craint que ses enfants ne le laissent vivant ;
Alors il se soulève, ouvre son aile au vent,
Et, se frappant le coeur avec un cri sauvage,
Il pousse dans la nuit un si funèbre adieu,
Que les oiseaux des mers désertent le rivage,
Et que le voyageur attardé sur la plage,
Sentant passer la mort, se recommande à Dieu.
Poète, c'est ainsi que font les grands poètes.
Ils laissent s'égayer ceux qui vivent un temps ;
Mais les festins humains qu'ils servent à leurs fêtes
Ressemblent la plupart à ceux des pélicans.
Quand ils parlent ainsi d'espérances trompées,
De tristesse et d'oubli, d'amour et de malheur,
Ce n'est pas un concert à dilater le coeur.
Leurs déclamations sont comme des épées :
Elles tracent dans l'air un cercle éblouissant,
Mais il y pend toujours quelque goutte de sang.

Le poète

Ô Muse ! spectre insatiable,
Ne m'en demande pas si long.
L'homme n'écrit rien sur le sable
À l'heure où passe l'aquilon.
J'ai vu le temps où ma jeunesse
Sur mes lèvres était sans cesse
Prête à chanter comme un oiseau ;
Mais j'ai souffert un dur martyre,
Et le moins que j'en pourrais dire,
Si je l'essayais sur ma lyre,
La briserait comme un roseau.
Ode XXVIII.

Si j'avois un riche tresor,
Ou des vaisseaux engravez d'or,
Tableaux ou medailles de cuivre,
Ou ces joyaux qui font passer
Tant de mers pour les amasser,
Où le jour se laisse revivre,

Je t'en ferois un beau present.
Mais quoy ! cela ne t'est plaisant,
Aux richesses tu ne t'amuses
Qui ne font que nous estonner ;
C'est pourquoy je te veux donner
Le bien que m'ont donné les Muses.

Je sçay que tu contes assez
De biens l'un sur l'autre amassez,
Qui perissent comme fumée,
Ou comme un songe qui s'enfuit
Du cerveau si tost que la nuit
Au second somme est consumée.

L'un au matin s'enfle en son bien,
Qui au soleil couchant n'a rien,
Par défaveur, ou par disgrace,
Ou par un changement commun,
Ou par l'envie de quelqu'un
Qui ravit ce que l'autre amasse.

Mais les beaux vers ne changent pas,
Qui durent contre le trespas,
Et en devançant les années,
Hautains de gloire et de bonheur,
Des hommes emportent l'honneur
Dessur leurs courses empennées.

Dy-moy, Verdun, qui penses-tu
Qui ait deterré la vertu
D'Hector, d'Achille et d'Alexandre,
Envoyé Bacchus dans les Cieux,
Et Hercule au nombre des dieux,
Et de Junon l'a fait le gendre,

Sinon le vers bien accomply,
Qui tirant leurs noms de l'oubly,
Plongez au plus profond de l'onde
De Styx, les a remis au jour,
Les relogeant au grand sejour
Par deux fois de nostre grand monde ?

Mort est l'honneur de tant de rois
Espagnols, germains et françois,
D'un tombeau pressant leur mémoire ;
Car les rois et les empereurs
Ne different aux laboureurs
Si quelcun ne chante leur gloire.

Quant à moy, je ne veux souffrir
Que ton beau nom se vienne offrir
A la Mort, sans que je le vange,
Pour n'estre jamais finissant,
Mais d'âge en âge verdissant,
Surmonter la Mort et le change.

Je veux, malgré les ans obscurs,
Que tu sois des peuples futurs
Cognu sur tous ceux de nostre âge,
Pour avoir conçeu volontiers
Des neuf Pucelles les mestiers,
Qui t'ont enflamé le courage,

Non pas au gain ny au vil prix,
Mais pour estre des mieux appris
Entre les hommes qui s'assemblent
Sur Parnasse au double sourci ;
C'est pourquoy tu aimes aussi
Les bons esprits qui te ressemblent.

Or pour le plaisir, quant à moy,
Verdun, que j'ay reçeu de toy,
Tu n'auras rien de ton poète
Sinon ces vers que je t'ay faits,
Et avec ces vers les souhaits
Que pour bonheur je te souhaite.

Dieu vueille benir ta maison
De beaux enfans naiz à foison
De ta femme belle et pudique ;
La concorde habite en ton lit,
Et bien **** de toy soit le bruit
De toute noise domestique.

Sois gaillard, dispost et joyeux,
Ny convoiteux ny soucieux
Des choses qui nous rongent l'âme ;
Fuy toutes sortes de douleurs,
Et ne pren soucy des malheurs
Qui sont predits par Nostradame.

Ne romps ton tranquille repos
Pour papaux, ny pour huguenots,
Ny amy d'eux, ny adversaire,
Croyant que Dieu père très doux
(Qui n'est partial comme nous)
Sçait ce qui nous est nécessaire.

N'ayes soucy du lendemain,
Mais, serrant le temps en la main,
Vy joyeusement la journée
Et l'heure en laquelle seras :
Et que sçais-tu si tu verras
L'autre lumiere retournée ?

Couche-toy à l'ombre d'un bois,
Ou près d'un rivage où la vois
D'une fontaine jazeresse
Tressaute, et tandis que tes ans
Sont encore et verds et plaisans,
Par le jeu trompe la vieillesse.

Tout incontinent nous mourrons,
Et bien **** bannis nous irons
Dedans une nacelle obscure
Où plus de rien ne nous souvient,
Et d'où jamais on ne revient :
Car ainsi l'a voulu Nature.
Enfants, beaux fronts naïfs penchés autour de moi,
Bouches aux dents d'émail disant toujours : Pourquoi ?
Vous qui, m'interrogeant sur plus d'un grand problème,
Voulez de chaque chose, obscure pour moi-même,
Connaître le vrai sens et le mot décisif,
Et qui touchez à tout dans mon esprit pensif ;
- Si bien que, vous partis, souvent je passe
Des heures, fort maussade, à remettre à leur place
Au fond de mon cerveau mes plans, mes visions,
Mes sujets éternels de méditations,
Dieu, l'homme, l'avenir, la raison, la démence,
Mes systèmes, tas sombre, échafaudage immense,
Dérangés tout à coup, sans tort de votre part,
Par une question d'enfant, faite au hasard ! -
Puisqu'enfin vous voilà sondant mes destinées,
Et que vous me parlez de mes jeunes années,
De mes premiers instincts, de mon premier espoir,
Écoutez, doux amis, qui voulez tout savoir !

J'eus dans ma blonde enfance, hélas ! trop éphémère,
Trois maîtres : - un jardin, un vieux prêtre et ma mère.

Le jardin était grand, profond, mystérieux,
Fermé par de hauts murs aux regards curieux,
Semé de fleurs s'ouvrant ainsi que des paupières,
Et d'insectes vermeils qui couraient sur les pierres ;
Plein de bourdonnements et de confuses voix ;
Au milieu, presque un champ, dans le fond, presque un bois.
Le prêtre, tout nourri de Tacite et d'Homère,
Était un doux vieillard. Ma mère - était ma mère !

Ainsi je grandissais sous ce triple rayon.

Un jour... - Oh ! si Gautier me prêtait son crayon,
Je vous dessinerais d'un trait une figure
Qui chez ma mère un jour entra, fâcheux augure !
Un docteur au front pauvre, au maintien solennel,
Et je verrais éclore à vos bouches sans fiel,
Portes de votre cœur qu'aucun souci ne mine,
Ce rire éblouissant qui parfois m'illumine !

Lorsque cet homme entra, je jouais au jardin.
Et rien qu'en le voyant je m'arrêtai soudain.

C'était le principal d'un collège quelconque.

Les tritons que Coypel groupe autour d'une conque,
Les faunes que Watteau dans les bois fourvoya,
Les sorciers de Rembrandt, les gnomes de Goya,
Les diables variés, vrais cauchemars de moine
Dont Callot en riant taquine saint Antoine,
Sont laids, mais sont charmants ; difformes, mais remplis
D'un feu qui de leur face anime tous les plis
Et parfois dans leurs yeux jette un éclair rapide.
- Notre homme était fort laid, mais il était stupide.

Pardon, j'en parle encor comme un franc écolier.
C'est mal. Ce que j'ai dit, tâchez de l'oublier ;
Car de votre âge heureux, qu'un pédant embarrasse,
J'ai gardé la colère et j'ai perdu la grâce.

Cet homme chauve et noir, très effrayant pour moi,
Et dont ma mère aussi d'abord eut quelque effroi,
Tout en multipliant les humbles attitudes,
Apportait des avis et des sollicitudes :
- Que l'enfant n'était pas dirigé ; - que parfois
Il emportait son livre en rêvant dans les bois ;
Qu'il croissait au hasard dans cette solitude ;
Qu'on devait y songer ; que la sévère étude
Était fille de l'ombre et des cloîtres profonds ;
Qu'une lampe pendue à de sombres plafonds,
Qui de cent écoliers guide la plume agile,
Éclairait mieux Horace et Catulle et Virgile,
Et versait à l'esprit des rayons bien meilleurs
Que le soleil qui joue à travers l'arbre en fleurs ;
Et qu'enfin il fallait aux enfants, - **** des mères, -
Le joug, le dur travail et les larmes amères.
Là-dessus, le collège, aimable et triomphant,
Avec un doux sourire offrait au jeune enfant
Ivre de liberté, d'air, de joie et de roses,
Ses bancs de chêne noirs, ses longs dortoirs moroses,
Ses salles qu'on verrouille et qu'à tous leurs piliers
Sculpte avec un vieux clou l'ennui des écoliers,
Ses magisters qui font, parmi les paperasses,
Manger l'heure du jeu par les pensums voraces,
Et, sans eux, sans gazon, sans arbres, sans fruits mûrs,
Sa grande cour pavée entre quatre murs.

L'homme congédié, de ses discours frappée,  
Ma mère demeura triste et préoccupée.
Que faire ? que vouloir ? qui donc avait raison,
Ou le morne collège, ou l'heureuse maison ?
Qui sait mieux de la vie accomplir l'œuvre austère,
L'écolier turbulent, ou l'enfant solitaire ?
Problèmes ! questions ! elle hésitait beaucoup.
L'affaire était bien grave. Humble femme après tout,
Âme par le destin, non par les livres faite,
De quel front repousser ce tragique prophète,
Au ton si magistral, aux gestes si certains,
Qui lui parlait au nom des Grecs et des Latins ?
Le prêtre était savant sans doute ; mais, que sais-je ?
Apprend-on par le maître ou bien par le collège ?
Et puis, enfin, - souvent ainsi nous triomphons ! -
L'homme le plus vulgaire a de grands mots profonds :
- « Il est indispensable ! - il convient ! - il importe ! »
Qui troublent quelquefois la femme la plus forte.
Pauvre mère ! lequel choisir des deux chemins ?
Tout le sort de son fils se pesait dans ses mains.
Tremblante, elle tenait cette lourde balance,
Et croyait bien la voir par moments en silence
Pencher vers le collège, hélas ! en opposant
Mon bonheur à venir à mon bonheur présent.

Elle songeait ainsi sans sommeil et sans trêve.

C'était l'été. Vers l'heure où la lune se lève,
Par un de ces beaux soirs qui ressemblent au jour
Avec moins de clarté, mais avec plus d'amour,
Dans son parc, où jouaient le rayon et la brise,
Elle errait, toujours triste et toujours indécise,
Questionnant tout bas l'eau, le ciel, la forêt,
Écoutant au hasard les voix qu'elle entendait.

C'est dans ces moments-là que le jardin paisible,
La broussaille où remue un insecte invisible,
Le scarabée ami des feuilles, le lézard
Courant au clair de lune au fond du vieux puisard,
La faïence à fleur bleue où vit la plante grasse,
Le dôme oriental du sombre Val-de-Grâce,
Le cloître du couvent, brisé, mais doux encor,
Les marronniers, la verte allée aux boutons-d'or,
La statue où sans bruit se meut l'ombre des branches,
Les pâles liserons, les pâquerettes blanches,
Les cent fleurs du buisson, de l'arbre, du roseau,
Qui rendent en parfums ses chansons à l'oiseau,
Se mirent dans la mare ou se cachent dans l'herbe,
Ou qui, de l'ébénier chargeant le front superbe,
Au bord des clairs étangs se mêlant au bouleau,
Tremblent en grappes d'or dans les moires de l'eau,
Et le ciel scintillant derrière les ramées,
Et les toits répandant de charmantes fumées,
C'est dans ces moments-là, comme je vous le dis,
Que tout ce beau jardin, radieux paradis,
Tous ces vieux murs croulants, toutes ces jeunes roses,
Tous ces objets pensifs, toutes ces douces choses,
Parlèrent à ma mère avec l'onde et le vent,
Et lui dirent tout bas : - « Laisse-nous cet enfant ! »

« Laisse-nous cet enfant, pauvre mère troublée !
Cette prunelle ardente, ingénue, étoilée,
Cette tête au front pur qu'aucun deuil ne voila,
Cette âme neuve encor, mère, laisse-nous-la !
Ne vas pas la jeter au hasard dans la foule.
La foule est un torrent qui brise ce qu'il roule.
Ainsi que les oiseaux les enfants ont leurs peurs.
Laisse à notre air limpide, à nos moites vapeurs,
À nos soupirs, légers comme l'aile d'un songe,
Cette bouche où jamais n'a passé le mensonge,
Ce sourire naïf que sa candeur défend !
Ô mère au cœur profond, laisse-nous cet enfant !
Nous ne lui donnerons que de bonnes pensées ;
Nous changerons en jour ses lueurs commencées ;
Dieu deviendra visible à ses yeux enchantés ;
Car nous sommes les fleurs, les rameaux, les clartés,
Nous sommes la nature et la source éternelle
Où toute soif s'épanche, où se lave toute aile ;
Et les bois et les champs, du sage seul compris,
Font l'éducation de tous les grands esprits !
Laisse croître l'enfant parmi nos bruits sublimes.
Nous le pénétrerons de ces parfums intimes,
Nés du souffle céleste épars dans tout beau lieu,
Qui font sortir de l'homme et monter jusqu'à Dieu,
Comme le chant d'un luth, comme l'encens d'un vase,
L'espérance, l'amour, la prière, et l'extase !
Nous pencherons ses yeux vers l'ombre d'ici-bas,
Vers le secret de tout entr'ouvert sous ses pas.
D'enfant nous le ferons homme, et d'homme poète.
Pour former de ses sens la corolle inquiète,
C'est nous qu'il faut choisir ; et nous lui montrerons
Comment, de l'aube au soir, du chêne aux moucherons,
Emplissant tout, reflets, couleurs, brumes, haleines,
La vie aux mille aspects rit dans les vertes plaines.
Nous te le rendrons simple et des cieux ébloui :
Et nous ferons germer de toutes parts en lui
Pour l'homme, triste effet perdu sous tant de causes,
Cette pitié qui naît du spectacle des choses !
Laissez-nous cet enfant ! nous lui ferons un cœur
Qui comprendra la femme ; un esprit non moqueur,
Où naîtront aisément le songe et la chimère,
Qui prendra Dieu pour livre et les champs pour grammaire,
Une âme, pur foyer de secrètes faveurs,
Qui luira doucement sur tous les fronts rêveurs,
Et, comme le soleil dans les fleurs fécondées,
Jettera des rayons sur toutes les idées ! »

Ainsi parlaient, à l'heure où la ville se tait,
L'astre, la plante et l'arbre, - et ma mère écoutait.

Enfants ! ont-ils tenu leur promesse sacrée ?
Je ne sais. Mais je sais que ma mère adorée
Les crut, et, m'épargnant d'ennuyeuses prisons,
Confia ma jeune âme à leurs douces leçons.

Dès lors, en attendant la nuit, heure où l'étude
Rappelait ma pensée à sa grave attitude,
Tout le jour, libre, heureux, seul sous le firmament,
Je pus errer à l'aise en ce jardin charmant,
Contemplant les fruits d'or, l'eau rapide ou stagnante,
L'étoile épanouie et la fleur rayonnante,
Et les prés et les bois, que mon esprit le soir,
Revoyait dans Virgile ainsi qu'en un miroir.

Enfants ! aimez les champs, les vallons, les fontaines,
Les chemins que le soir emplit de voix lointaines,
Et l'onde et le sillon, flanc jamais assoupi,
Où germe la pensée à côté de l'épi.
Prenez-vous par la main et marchez dans les herbes ;
Regardez ceux qui vont liant les blondes gerbes ;
Épelez dans le ciel plein de lettres de feu,
Et, quand un oiseau chante, écoutez parler Dieu.
La vie avec le choc des passions contraires
Vous attend ; soyez bons, soyez vrais, soyez frères ;
Unis contre le monde où l'esprit se corrompt,
Lisez au même livre en vous touchant du front,
Et n'oubliez jamais que l'âme humble et choisie
Faite pour la lumière et pour la poésie,
Que les cœurs où Dieu met des échos sérieux
Pour tous les bruits qu'anime un sens mystérieux,
Dans un cri, dans un son, dans un vague murmure,
Entendent les conseils de toute la nature !

Le 31 mai 1839.
Dans ce bar dont la porte
Sans cesse bat au vent
Une affiche écarlate
Vante un autre savon
Dansez dansez ma chère
Dansez nous avons des banjos
Oh
Qui me donnera seulement à mâcher
Les chewing-gums inutiles
Qui parfument très doucement
L'haleine des filles des villes

Épices dans l'alcool mesuré par les pailles
Et menthes sans raison barbouillant les liqueurs
Il est des amours sans douceurs
Dans les docks sans poissons où la barmaid
Défaille
Sous le fallacieux prétexte
Que je n'ai pas rasé ma barbe
Aux relents douteux d'un gin
Que son odorat devine
D'un bar du Massachussets

Au trente-troisième étage
Sous l'œil fixe des fenêtres
Arrête
Mon cœur est dans le ciel et manque de vertu
Mais les ascenseurs se suivent
Et ne se ressemblent pas
Le groom nègre sourit tout bas
Pour ne pas salir ses dents blanches
Ha si j'avais mon revolver
Pour interrompre la musique
De la chanson polyphonique
Des cent machines à écrire

Dans l'état de Michigan
Justement quatre-vingt-trois jours
Après la mort de quelqu'un
Trois joyeux garçons de velours
Dansèrent entre eux un quadrille
Dansèrent avec le défunt
Comme font avec les filles
Les gens de la vieille Europe
Dans les quartiers mal famés
Heureusement que leurs lèvres
Ignoraient les mots méchants
Car tous les trois étaient vierges
Comme on ne l'est pas longtemps.
Fable I, Livre V.


« On suivait Paul hier, on le fuit aujourd'hui.
Me direz-vous, monsieur, à quelle circonstance
Il faut imputer l'inconstance
Que le public montre envers lui ? »
Après un moment de silence,
Monsieur l'abbé répond : « Mets d'abord, mets, mon fils,
« Ce bocal sur notre fenêtre.
« Est-il découvert ? - Non. - Découvre-le. - Mon maître,
Il est plein de sirop. - Fais ce que je te dis.
« - Vous en aurez regret. - Peut-être.
« Tu riras si je m'en repens.
« - Ne voyez-vous donc pas quel essaim nous arrive ?
« Voilà déjà plus d'un convive,
« Qui se régale à nos dépens.
« - Il faut que tout le monde vive, »
Répond le sage en souriant.
« Le sucre est un mets très friand ;
« Mais n'est-il fait que pour nos bouches ?
« Et la terre est-elle, entre nous,
« Chiche à ce point d'un mets si doux,
« Qu'on n'en puisse laisser aux mouches ?
« Il nous en reste assez pour toi.
« - Il est vrai. - Quant à Paul, quant à cette injustice
« Dont tu veux savoir le pourquoi,
« Nous en reparlerons ; pour l'instant laisse-moi :
« L'objet vaut qu'on y réfléchisse. »
Cependant autour du bocal
Bourdonne l'essaim parasite,
Et, comme à qui mieux mieux, chacun s'y précipite :
Si vaste qu'elle soit, la panse de cristal
Pour tant de commensaux bientôt est trop petite.
Ce spectacle amusa l'écolier jusqu'au soir.
N'ayant alors plus rien à voir,
Il reprit son propos. « - Un peu de patience.
« Est-ce en un jour, mon fils, que l'on peut tout savoir
« Demain peut-être, grâce à notre expérience,
« En dirai-je un peu plus. » De crainte d'accident,
L'enfant veut recouvrir le vase en attendant.
Mais notre précepteur autrement en décide.
Il avait ses raisons. Le sirop cependant,
De doux qu'il fut, devient acide.
Plus matinal que le soleil,
Notre écolier à son réveil
De courir au bocal. Mais quelle est sa surprise !
Il ne retrouve, au lieu de ce peuple goulu,
Q'une mouche confite, et qui, comme à la glu,
Dans le sucre se trouvait prise.
« D'où provient tout ce changement ?
« - Du motif qui, dans ce moment,
**** du malheureux Paul écarte tous les hommes.
« Les mouches, les amis dans le temps où nous sommes
« Se ressemblent plus qu'on ne croit.
« Cet essaim qui croît ou décroît,
« Suivant que la liqueur est plus douce ou plus aigre,
« T'apprend ce qu'entre humains parfois nous éprouvons,
« Suivant que le sort verse au vase où nous buvons,
« Ou du sirop, ou du vinaigre. »
Causa tangor ab omni.
OVIDE.

Souvent, quand mon esprit riche en métamorphoses
Flotte et roule endormi sur l'océan des choses,
Dieu, foyer du vrai jour qui ne luit point aux yeux,
Mystérieux soleil dont l'âme est embrasée,
Le frappe d'un rayon, et, comme une rosée,
Le ramasse et l'enlève aux cieux.

Alors, nuage errant, ma haute poésie
Vole capricieuse, et sans route choisie,
De l'occident au sud, du nord à l'orient ;
Et regarde, du haut des radieuses voûtes,
Les cités de la terre, et, les dédaignant toutes,
Leur jette son ombre en fuyant.

Puis, dans l'or du matin luisant comme une étoile,
Tantôt elle y découpe une frange à son voile ;
Tantôt, comme un guerrier qui résonne en marchant,
Elle frappe d'éclairs la forêt qui murmure ;
Et tantôt en passant rougit sa noire armure
Dans la fournaise du couchant.

Enfin sur un vieux mont, colosse à tête grise,
Sur des Alpes de neige un vent jaloux la brise.
Qu'importe ! suspendu sur l'abîme béant
Le nuage se change en un glacier sublime,
Et des mille fleurons qui hérissent sa cime
Fait une couronne au géant !

Comme le haut cimier du mont inabordable,
Alors il dresse au **** sa crête formidable.
L'arc-en-ciel vacillant joue à son flanc d'acier ;
Et, chaque soir, tandis que l'ombre en bas l'assiège,
Le soleil, ruisselant en lave sur sa neige,
Change en cratère le glacier.

Son front blanc dans la nuit semble une aube éternelle ;
La chamois effaré, dont le pied vaut une aile,
L'aigle même le craint, sombre et silencieux ;
La tempête à ses pieds tourbillonne et se traîne ;
L'œil ose à peine atteindre à sa face sereine,
Tant il est avant dans les cieux !
Et seul, à ces hauteurs, sans crainte et sans vertige
Mon esprit, de la terre oubliant le prestige,
Voit le jour étoilé, le ciel qui n'est plus bleu,
Et contemple de près ces splendeurs sidérales
Dont la nuit sème au **** ses sombres cathédrales,
Jusqu'à ce qu'un rayon de Dieu

Le frappe de nouveau, le précipite, et change
Les prismes du glacier en flots mêlés de fange ;
Alors il croule, alors, éveillant mille échos,
Il retombe en torrent dans l'océan du monde,
Chaos aveugle et sourd, mer immense et profonde,
Où se ressemblent tous les flots !

Au gré du divin souffle ainsi vont mes pensées,
Dans un cercle éternel incessamment poussées.
Du terrestre océan dont les flots sont amers,
Comme sous un rayon monte une nue épaisse,
Elles montent toujours vers le ciel, et sans cesse
Redescendent des cieux aux mers.

Mai 1829.
Ces hommes passeront comme un ver sur le sable.
Qu'est-ce que tu ferais de leur sang méprisable ?
Le dégoût rend clément.
Retenons la colère âpre, ardente, électrique.
Peuple, si tu m'en crois, tu prendras une trique
Au jour du châtiment.

Ô de Soulouque-deux burlesque cantonade !
Ô ducs de Trou-Bonbon, marquis de Cassonade,
Souteneurs du larron,
Vous dont la poésie, ou sublime ou mordante,
Ne sait que faire, gueux, trop grotesques pour Dante,
Trop sanglants pour Scarron,

Ô jongleurs, noirs par l'âme et par la servitude,
Vous vous imaginez un lendemain trop rude,
Vous êtes trop tremblants,
Vous croyez qu'on en veut, dans l'exil où nous sommes,
À cette peau qui fait qu'on vous prend pour des hommes ;
Calmez-vous, nègres blancs !

Cambyse, j'en conviens, eût eu ce cœur de roche
De faire asseoir Troplong sur la peau de Baroche
Au bout d'un temps peu long,
Il eût crié : Cet autre est pire. Qu'on l'étrangle !
Et, j'en conviens encore, eût fait asseoir Delangle
Sur la peau de Troplong.

Cambyse était stupide et digne d'être auguste ;
Comme s'il suffisait pour qu'un être soit juste,
Sans vices, sans orgueil,
Pour qu'il ne soit pas traître à la loi, ni transfuge,
Que d'une peau de tigre ou d'une peau de juge
On lui fasse un fauteuil !

Toi, peuple, tu diras : - Ces hommes se ressemblent.
Voyons les mains. - Et tous trembleront comme tremblent
Les loups pris aux filets.
Bon. Les uns ont du sang, qu'au bagne on les écroue,
À la chaîne ! Mais ceux qui n'ont que de la boue,
Tu leur diras : - Valets !

La loi râlait, ayant en vain crié : main-forte !
Vous avez partagé les habits de la morte.
Par César achetés,
De tous nos droits livrés vous avez fait des ventes ;
Toutes ses trahisons ont trouvé pour servantes
Toutes vos lâchetés !

Allez, fuyez, vivez ! pourvu que, mauvais prêtre,
Mauvais juge, on vous voie en vos trous disparaître,
Rampant sur vos genoux,
Et qu'il ne reste rien, sous les cieux que Dieu dore,
Sous le splendide azur où se lève l'aurore,
Rien de pareil à vous !

Vivez, si vous pouvez ! l'opprobre est votre asile.
Vous aurez à jamais, toi, cardinal Basile,
Toi, sénateur Crispin,
De quoi boire et manger dans vos fuites lointaines,
Si le mépris se boit comme l'eau des fontaines,
Si la honte est du pain ! -

Peuple, alors nous prendrons au collet tous ces drôles,
Et tu les jetteras dehors par les épaules
À grands coups de bâton ;
Et dans le Luxembourg, blancs sous les branches d'arbre,
Vous nous approuverez de vos têtes de marbre,
Ô Lycurgue, ô Caton !

Citoyens ! le néant pour ces laquais se rouvre
Qu'importe, ô citoyens ! l'abjection les couvre
De son manteau de plomb.
Qu'importe que, le soir, un passant solitaire,
Voyant un récureur d'égouts sortir de terre,
Dise : Tiens ! c'est Troplong !

Qu'importe que Rouher sur le Pont-Neuf se carre,
Que Baroche et Delangle, en quittant leur simarre,
Prennent des tabliers,
Qu'ils s'offrent pour trois sous, oubliés quoique infâmes,
Et qu'ils aillent, après avoir sali leurs âmes,
Nettoyer vos souliers !

Jersey, le 23 novembre 1853.
C'est une grande allée à deux rangs de tilleuls.
Les enfants, en plein jour, n'osent y marcher seuls,
Tant elle est haute, large et sombre.
Il y fait froid l'été presque autant que l'hiver ;
On ne sait quel sommeil en appesantit l'air,
Ni quel deuil en épaissit l'ombre.

Les tilleuls sont anciens ; leurs feuillages pendants
Font muraille au dehors et font voûte au dedans,
Taillés selon leurs vieilles formes ;
L'écorce en noirs lambeaux quitte leurs troncs fendus ;
Ils ressemblent, les bras l'un vers l'autre tendus,
À des candélabres énormes ;

Mais en haut, feuille à feuille, ils composent leur nuit :
Par les jours de soleil pas un caillou ne luit
Dans le sable dur de l'allée,
Et par les jours de pluie à peine l'on entend
Le dôme vert bruire, et, d'instant en instant,
Tomber une goutte isolée.

Tout au fond, dans un temple en treillis dont le bois,
Par la mousse pourri, plie et rompt sous le poids
De la vigne vierge et du lierre,
Un amour malin rit, et de son doigt cassé
Désigne encore au **** les cœurs du temps passé
Qu'ont meurtris ses flèches de pierre.

À toute heure on sent là les mystères du soir :
Autour de la statue impassible on croit voir
Deux à deux voltiger des flammes.
L'esprit du souvenir pleure en paix dans ces lieux ;
C'est là que, malgré l'âge et les derniers adieux,
Se donnent rendez-vous les âmes,

Les âmes de tous ceux qui se sont aimés là,
De tous ceux qu'en avril le dieu jeune appela
Sous les roses de sa tonnelle ;
Et sans cesse vers lui montent ces pauvres morts ;
Ils viennent, n'ayant plus de lèvres comme alors,
S'unir sur sa bouche éternelle.
Marie-Lyne Feb 2017
Il y a des amours
qui sont inoubliables
Il y a des gens
qui ne nous ressemblent pas
Il y a des choses
qu'on ne pourra jamais expliquer
Il y a des films
plus vrais que nos vies
Il y a des soleils
plus froides que la neige
Il y a des places
plus sacrées que l'église
Il y a des sentiments
qui nous brûlent
Fable XIII, Livre I.


Un lièvre avait son gîte auprès de la tanière
D'un maussade et vieux hérisson.
Chacun, de son côté, vivait à sa manière,
À l'abri du même buisson,
Quand une taupe y vint creuser sa taupinière.
Entre les gens de certaine façon,
Nous savons tous qu'il est d'usage
Que le dernier venu dans tout le voisinage
Promène sa personne, ou tout au moins son nom.
En habit de velours, notre taupe au plus vite,
Fait donc au lièvre sa visite.
Après la révérence, après maint compliment,
(Ceux des bêtes, dit-on, ressemblent fort aux nôtres)
Après avoir parlé de soi fort longuement,
On parla tant soit peu des autres,
Et du voisin conséquemment.
Quel esprit ! dit la taupe ; y peut-on rien comprendre ?
Est-il rien de moins amusant ?
Est-il rien de moins complaisant ?
Savez-vous par quel bout le prendre ?
Il vit toujours triste et caché ;
Une sombre humeur le dévore ;
Il blesse quand il est fâché,
Et quand il joue il blesse encore ;
Et c'est pourtant chez lui que je cours de ce pas !
Madame, dit le lièvre, assurément badine.
- Et le bon ton, voisin ! - Et le bon sens, voisine,
M'assure que vous n'irez pas.
Plains et fuis, nous dit-il, ces personnes chagrines
Qu'on ne peut aborder avec sécurité,
Et qui, même dans la gaîté,
Ne quittent jamais leurs épines.
Heureux les cœurs, les cœurs de sang !
Leurs battements peuvent s'entendre ;
Et les bras ! Ils peuvent se tendre,
Se posséder en s'enlaçant.

Heureux aussi les doigts ! Ils touchent ;
Les yeux ! Ils voient. Heureux les corps !
Ils ont la paix quand ils se couchent,
Et le néant quand ils sont morts.

Mais, oh ! Bien à plaindre les âmes !
Elles ne se touchent jamais :
Elles ressemblent à des flammes
Ardentes sous un verre épais.

De leurs prisons mal transparentes
Ces flammes ont beau s'appeler,
Elles se sentent bien parentes,
Mais ne peuvent pas se mêler.

On dit qu'elles sont immortelles ;
Ah ! Mieux leur vaudrait vivre un jour,
Mais s'unir enfin !... dussent-elles
S'éteindre en épuisant l'amour !
À la sœur d'Astrée.

Printemps, fils du Soleil, que la terre arrosée
De la fertile humeur d'une douce rosée,
Au milieu des œillets et des roses conçut,
Quand Flore entre ses bras nourrice vous reçut,
Naissez, croissez, Printemps, laissez-vous apparaître :
En voyant Isabeau vous pourrez vous connaître,
Elle est votre miroir, et deux lis assemblés
Ne se ressemblent tant que vous entresemblez :
Tous les deux n'êtes qu'un, c'est une même chose.
La rose que voici ressemble à cette rose,
Le diamant à l'autre, et la fleur à la fleur :
Le Printemps est le frère, Isabeau est la sœur.

On dit que le Printemps, pompeux de sa richesse,
Orgueilleux de ses fleurs, enflé de sa jeunesse,
Logé comme un grand prince en ses vertes maisons,
Se vantait le plus beau de toutes les saisons,
Et se glorifiant le contait à Zéphyre ;
Le Ciel en fut marri, qui soudain le vint dire
À la mère Nature. Elle, pour rabaisser
L'orgueil de cet enfant, va partout ramasser
Les biens qu'elle serrait de maint et mainte année.
Je veille. Ne crains rien. J'attends que tu t'endormes.
Les anges sur ton front viendront poser leurs bouches.
Je ne veux pas sur toi d'un rêve ayant des formes
Farouches ;

Je veux qu'en te voyant là, ta main dans la mienne,
Le vent change son bruit d'orage en bruit de lyre.
Et que sur ton sommeil la sinistre nuit vienne
Sourire.

Le poète est penché sur les berceaux qui tremblent ;
Il leur parle, il leur dit tout bas de tendres choses,
Il est leur amoureux, et ses chansons ressemblent
Aux roses.

Il est plus pur qu'avril embaumant la pelouse
Et que mai dont l'oiseau vient piller la corbeille ;
Sa voix est un frisson d'âme, à rendre jalouse
L'abeille ;

Il adore ces nids de soie et de dentelles ;
Son coeur a des gaîtés dans la fraîche demeure
Qui font rire aux éclats avec des douceurs telles
Qu'on pleure ;

Il est le bon semeur des fraîches allégresses ;
Il rit. Mais si les rois et leurs valets sans nombre
Viennent, s'il voit briller des prunelles tigresses
Dans l'ombre,

S'il voit du Vatican, de Berlin ou de Vienne
Sortir un guet-apens, une horde, une bible,
Il se dresse, il n'en faut pas plus pour qu'il devienne
Terrible.

S'il voit ce basilic, Rome, ou cette araignée,
Ignace, ou ce vautour, Bismarck, faire leur crime,
Il gronde, il sent monter dans sa strophe indignée
L'abîme.

C'est dit. Plus de chansons. L'avenir qu'il réclame,
Les peuples et leur droit, les rois et leur bravade,
Sont comme un tourbillon de tempête où cette âme
S'évade.

Il accourt. Reviens, France, à ta fierté première !
Délivrance ! Et l'on voit cet homme qui se lève
Ayant Dieu dans le coeur et dans l'oeil la lumière
Du glaive.

Et sa pensée, errante alors comme les proues
Dans l'onde et les drapeaux dans les noires mêlées,
Est un immense char d'aurore avec des roues
Ailées.
C'est l'hiver. Ô villes folles,
Dansez ! Dans le bal béant
Tourbillonnent les paroles
De la joie et du néant.

L'homme flotte dans la voie
Où l'homme errant se perdit ;
En bas le plaisir flamboie,
En haut l'amour resplendit.

Le plaisir, clarté hagarde
Du faux rire et des faux biens,
Dit au noir passant : Prends garde !
L'amour rayonne et dit: Viens !

Ces deux lueurs, sur la lame
Guidant l'hydre et l'alcyon,
Nous éclairent ; toute l'âme
Vogue à ce double rayon.

Mer ! j'ai fui **** des Sodomes ;
Je cherche tes grands tableaux ;
Mais ne voit-on pas les hommes
Quand on regarde les flots ?

Les spectacles de l'abîme
Ressemblent à ceux du cour ;
Le vent est le fou sublime,
Le jonc est le-nain moqueur.

Comme un ami l'onde croule ;
Sitôt que le jour s'enfuit
La mer n'est plus qu'une foule
Qui querellé dans la nuit ;

Le désert de l'eau qui souffre
Est plein de cris et de voix,
Et parle dans tout le gouffre
A toute l'ombre à la fois.

Que dit-il ? Dieu seul recueille
Ce blasphème ou ce sanglot ;
Dieu seul répond à la feuille,
Et Dieu seul réplique au flot.
Je suis enceinte de toi
Je suis le coq pondeur
Mes oeufs sont bleus outre-mer
Et ma gemme est couleur bordeaux.

Tu veux que je te ponde
Que je pullule en toi
A tire larigot
Jusqu'à ce que j'accouche des jumeaux
Ulysse et Olguta,
Bambins dodus aux fesses potelées,
Qui nous ressemblent comme deux coquilles
Et qui concrétisent notre attirance cosmique.

Chaque poème que je ponds est un voyage en germe vers La Médéléni
L'île, l'atoll fétiche en mer d'Aménorrhée
Où flotte le sentiment complice d'être amants depuis toujours.

Chaque Ulysse que je ponds
Chaque Olguta
Naît dans ce va-et-viens de retrouvailles
Physiques et charnelles
Nu et complètement dessiné dans le miroir.

Je suis enceinte de toi
Et je reconnais tiens et miens
Et je légitime devant témoins,
Attendu qu'ils ne sont ni incestueux ni adultérins,
Olguta comme Ulysse
Enfants naturels
Dans ton livre fétiche
Rempli d'aphorismes.

— The End —