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Steven Fried Sep 2013
Four black matchstick legs
with white strike tips
large belly and a strong black haired back

Gunk in his eyes and
behind the top of his long ears
he leans into delight

strong torse against leg
behind swaying in the breeze
belly rubs and dominance

the possessively agressive- toilet paper connoisseur
arthritis in his back right leg
I the nightly electronic chair lift
squatter on grass green blanket

I was away when it got worse
no acclimation
full on hell storm

ten years ago...
second grade he pooped in the hallways

he's grown out of the escapist gene
looking back now with our loving eyes
my best friend and brother
Spyro: My Brother Dog.
IL semblait grelotter, car la bise était dure.
C'était, sous un amas de rameaux sans verdure,
Une pauvre statue, au dos noir, au pied vert,
Un vieux faune isolé dans le vieux parc désert,
Qui, de son front penché touchant aux branches d'arbre,
Se perdait à mi-corps dans sa gaine de marbre.

Il était là, pensif, à la terre lié,
Et, comme toute chose immobile, - oublié !

Des arbres l'entouraient, fouettés d'un vent de glace,
Et comme lui vieillis à cette même place ;
Des marronniers géants, sans feuilles, sans oiseaux
Sous leurs tailles brouillés en ténébreux réseaux,
Pâle, il apparaissait, et la terre était brune.
Une âpre nuit d'hiver, sans étoile et sans lune,
Tombait à larges pans dans le brouillard diffus.
D'autres arbres plus **** croisaient leurs sombres fûts ;
Plus **** d'autre encore, estompés par l'espace,
Poussaient dans le ciel gris où le vent du soir passe
Mille petits rameaux noirs, tordus et mêlés,
Et se posaient partout, l'un par l'autre voilés,
Sur l'horizon, perdu dans les vapeurs informes,
Comme un grand troupeau roux de hérissons énormes.

Rien de plus. Ce vieux faune, un ciel morne, un bois noir.

Peut-être dans la brume au **** pouvait-on voir
Quelque longue terrasse aux verdâtres assises,
Ou, près d'un grand bassin, des nymphes indécises,
Honteuses à bon droit dans ce parc aboli,
Autrefois des regards, maintenant de l'oubli.

Le vieux faune riait. - Dans leurs ombres douteuses
Laissant le bassin triste et les nymphes honteuses,
Le vieux faune riait, c'est à lui que je vins ;
Ému, car sans pitié tous ces sculpteurs divins
Condamnent pour jamais, contents qu'on les admire,
Les nymphes à la honte et les faunes au rire.

Moi, j'ai toujours pitié du pauvre marbre obscur.
De l'homme moins souvent, parce qu'il est plus dur.

Et, sans froisser d'un mot son oreille blessée,
Car le marbre entend bien la voix de la pensée,
Je lui dis : - Vous étiez du beau siècle amoureux.
Sylvain, qu'avez-vous vu quand vous étiez heureux ?
Vous étiez de la cour ? Vous assistiez aux fêtes ?
C'est pour vous divertir que ces nymphes sont faites.
C'est pour vous, dans ces bois, que de savantes mains
Ont mêlé les dieux grecs et les césars romains,
Et, dans les claires eaux mirant les vases rares,
Tordu tout ce jardin en dédales bizarres.
Quand vous étiez heureux, qu'avez-vous vu, Sylvain ?
Contez-moi les secrets de ce passé trop vain,
De ce passé charmant, plein de flammes discrètes,
Où parmi les grands rois croissaient les grands poètes.
Que de frais souvenirs dont encor vous riez !
Parlez-moi, beau Sylvain, comme vous parleriez
A l'arbre, au vent qui souffle, à l'herbe non foulée.
D'un bout à l'autre bout de cette épaisse allée,
Avez-vous quelquefois, moqueur antique et grec,
Quand près de vous passait avec le beau Lautrec
Marguerite aux yeux doux, la reine béarnaise,
Lancé votre œil oblique à l'Hercule Farnèse ?
Seul sous votre antre vert de feuillage mouillé,
Ô Sylvain complaisant, avez-vous conseillé,
Vous tournant vers chacun du côté qui l'attire,
Racan comme berger, Regnier comme satyre ?
Avez-vous vu parfois, sur ce banc, vers midi,
Suer Vincent de Paul à façonner Gondi ?
Faune ! avez-vous suivi de ce regard étrange
Anne avec Buckingham, Louis avec Fontange,
Et se retournaient-ils, la rougeur sur le front,
En vous entendant rire au coin du bois profond ?
Étiez-vous consulté sur le thyrse ou le lierre,
Lorsqu'en un grand ballet de forme singulière
La cour du dieu Phœbus ou la cour du dieu Pan
Du nom d'Amaryllis enivraient Montespan ?
Fuyant des courtisans les oreilles de pierre,
La Fontaine vint-il, les pleurs dans la paupière,
De ses nymphes de Vaux vous conter les regrets ?
Que vous disait Boileau, que vous disait Segrais,
A vous, faune lettré qui jadis dans l'églogue
Aviez avec Virgile un charmant dialogue,
Et qui faisiez sauter, sur le gazon naissant,
Le lourd spondée au pas du dactyle dansant ?
Avez-vous vu jouer les beautés dans les herbes,
Chevreuse aux yeux noyés, Thiange aux airs superbes ?
Vous ont-elles parfois de leur groupe vermeil
Entouré follement, si bien que le soleil
Découpait tout à coup, en perçant quelque nue,
Votre profil lascif sur leur gorge ingénue ?
Votre arbre a-t-il reçu sous son abri serein
L'écarlate linceul du pâle Mazarin ?
Avez-vous eu l'honneur de voir rêver Molière ?
Vous a-t-il quelquefois, d'une voix familière,
Vous jetant brusquement un vers mélodieux,
Tutoyé, comme on fait entre les demi-dieux ?
En revenant un soir du fond des avenues,
Ce penseur, qui, voyant les âmes toutes nues,
Ne pouvait avoir peur de votre nudité,
À l'homme en son esprit vous a-t-il confronté ?
Et vous a-t-il trouvé, vous le spectre cynique,
Moins triste, moins méchant, moins froid, moins ironique,
Alors qu'il comparait, s'arrêtant en chemin,
Votre rire de marbre à notre rire humain ? -

Ainsi je lui parlais sous l'épaisse ramure.
Il ne répondit pas même par un murmure.
J'écoutais, incliné sur le marbre glacé,
Mais je n'entendis rien remuer du passé.
La blafarde lueur du jour qui se retire
Blanchissait vaguement l'immobile satyre,
Muet à ma parole et sourd à ma pitié.
À le voir là, sinistre, et sortant à moitié
De son fourreau noirci par l'humide feuillée,
On eût dit la poignée en torse ciselée
D'un vieux glaive rouillé qu'on laisse dans l'étui.

Je secouai la tête et m'éloignai de lui.
Alors des buissons noirs, des branches desséchées
Comme des sœurs en deuil sur sa tête penchées,
Et des antres secrets dispersés dans les bois,
Il me sembla soudain qu'il sortait une voix,
Qui dans mon âme obscure et vaguement sonore
Éveillait un écho comme au fond d'une amphore.

- Ô poète imprudent, que fais-tu ? laisse en paix
Les faunes délaissés sous les arbres épais !
Poète ! ignores-tu qu'il est toujours impie
D'aller, aux lieux déserts où dort l'ombre assoupie,
Secouer, par l'amour fussiez-vous entraînés,
Cette mousse qui pend aux siècles ruinés,
Et troubler, du vain bruit de vos voix indiscrètes,
Le souvenir des morts dans ses sombres retraites ! -

Alors dans les jardins sous la brume enfouis
Je m'enfonçai, rêvant aux jours évanouis,
Tandis que les rameaux s'emplissaient de mystère,
Et que derrière moi le faune solitaire,
Hiéroglyphe obscur d'un antique alphabet,
Continuait de rire à la nuit qui tombait.

J'allais, et contemplant d'un regard triste encore
Tous ces doux souvenirs, beauté, printemps, aurore,
Dans l'air et sous mes pieds épars, mêlés, flottants,
Feuilles de l'autre été, femmes de l'autre temps,
J'entrevoyais au ****, sous les branchages sombres,
Des marbres dans le bois, dans le passé des ombres !

Le 19 mars 1837.
Or ce vieillard était horrible : un de ses yeux,

Crevé, saignait, tandis que l'autre, chassieux,

Brutalement luisait sous son sourcil en brosse ;

Les cheveux se dressaient d'une façon féroce,

Blancs, et paraissaient moins des cheveux que des crins ;

Le vieux torse solide encore sur les reins,

Comme au ressouvenir des balles affrontées,

Cambré, contrariait les épaules voûtées ;

La main gauche avait l'air de chercher le pommeau

D'un sabre habituel et dont le long fourreau

Semblait, s'embarrassant avec la sabretache,

Gêner la marche et vers la tombante moustache

La main droite parfois montait, la retroussant.


Il était grand et maigre et jurait en toussant.


Fils d'un garçon de ferme et d'une lavandière,

Le service à seize ans le prit. Il fit entière,

La campagne d'Égypte. Austerlitz, Iéna,

Le virent. En Espagne un moine l'éborgna :

- Il tua le bon père, et lui vola sa bourse, -

Par trois fois traversa la Prusse au pas de course,

En Hesse eut une entaille épouvantable au cou,

Passa brigadier lors de l'entrée à Moscou,

Obtint la croix et fut de toutes les défaites

D'Allemagne et de France, et gagna dans ces fêtes

Trois blessures, plus un brevet de lieutenant

Qu'il résigna bientôt, les Bourbons revenant,

À Mont-Saint-Jean, bravant la mort qui l'environne,

Dit un mot analogue à celui de Cambronne,

Puis quand pour un second exil et le tombeau,

La Redingote grise et le petit Chapeau

Quittèrent à jamais leur France tant aimée

Et que l'on eut, hélas ! dissous la grande armée,

Il revint au village, étonné du clocher.


Presque forcé pendant un an de se cacher,

Il braconna pour vivre, et quand des temps moins rudes

L'eurent, sans le réduire à trop de platitudes,

Mis à même d'écrire en hauts lieux à l'effet

D'obtenir un secours d'argent qui lui fut fait,

Logea moyennant deux cents francs par an chez une

Parente qu'il avait, dont toute la fortune

Consistait en un champ cultivé par ses fieux,

L'un marié depuis longtemps et l'autre vieux

Garçon encore, et là notre foudre de guerre

Vivait et bien qu'il fût tout le jour sans rien faire

Et qu'il eût la charrue et la terre en horreur,

C'était ce qu'on appelle un soldat laboureur.

Toujours levé dès l'aube et la pipe à la bouche

Il allait et venait, engloutissait, farouche,

Des verres d'eau-de-vie et parfois s'enivrait,

Les dimanches tirait à l'arc au cabaret,

Après dîner faisait un quart d'heure sans faute

Sauter sur ses genoux les garçons de son hôte

Ou bien leur apprenait l'exercice et comment

Un bon soldat ne doit songer qu'au fourniment.

Le soir il voisinait, tantôt pinçant les filles,

Habitude un peu trop commune aux vieux soudrilles,

Tantôt, geste ample et voix forte qui dominait

Le grillon incessant derrière le chenet,

Assis auprès d'un feu de sarments qu'on entoure

Confusément disait l'Elster, l'Estramadoure,

Smolensk, Dresde, Lutzen et les ravins vosgeois

Devant quatre ou cinq gars attentifs et narquois

S'exclamant et riant très fort aux endroits farce.


Canonnade compacte et fusillade éparse,

Chevaux éventrés, coups de sabre, prisonniers

Mis à mal entre deux batailles, les derniers

Moments d'un officier ajusté par derrière,

Qui se souvient et qu'on insulte, la barrière

Clichy, les alliés jetés au fond des puits,

La fuite sur la Loire et la maraude, et puis

Les femmes que l'on force après les villes prises,

Sans choix souvent, si bien qu'on a des mèches grises

Aux mains et des dégoûts au cœur après l'ébat

Quand passe le marchef ou que le rappel bat,

Puis encore, les camps levés et les déroutes.


Toutes ces gaîtés, tous ces faits d'armes et toutes

Ces gloires défilaient en de longs entretiens,

Entremêlés de gros jurons très peu chrétiens

Et de grands coups de poing sur les cuisses voisines.


Les femmes cependant, sœurs, mères et cousines,

Pleuraient et frémissaient un peu, conformément

À l'usage, tout en se disant : « Le vieux ment. »


Et les hommes fumaient et crachaient dans la cendre.


Et lui qui quelquefois voulait bien condescendre

À parler discipline avec ces bons lourdauds

Se levait, à grands pas marchait, les mains au dos

Et racontait alors quelque fait politique

Dont il se proclamait le témoin authentique,

La distribution des Aigles, les Adieux,

Le Sacre et ce Dix-huit Brumaire radieux,

Beau jour où le soldat qu'un bavard importune

Brisa du même coup orateurs et tribune,

Où le dieu Mars mis par la Chambre hors la Loi

Mit la Loi hors la Chambre et, sans dire pourquoi,

Balaya du pouvoir tous ces ergoteurs glabres,

Tous ces législateurs qui n'avaient pas de sabres !


Tel parlait et faisait le grognard précité

Qui mourut centenaire à peu près l'autre été.

Le maire conduisit le deuil au cimetière.

Un feu de peloton fut tiré sur la bière

Par le garde champêtre et quatorze pompiers

Dont sept revinrent plus ou moins estropiés

À cause des mauvais fusils de la campagne.

Un tertre qu'une pierre assez grande accompagne

Et qu'orne un saule en pleurs est l'humble monument

Où notre héros dort perpétuellement.

De plus, suivant le vœu dernier du camarade,

On grava sur la pierre, après ses nom et grade,

Ces mots que tout Français doit lire en tressaillant :

« Amour à la plus belle et gloire au plus vaillant. »
Adam était fort amoureux.
Maigre comme un clou, les yeux creux ;
Son Ève était donc bien heureuse
D'être sa belle Ève amoureuse,
Mais... fiez-vous donc à demain !
Un soir, en promenant sa main
Sur le moins beau torse du monde,
Ah !... sa surprise fut profonde !
Il manquait une côte... là.
Tiens ! Tiens ! que veut dire cela ?
Se dit Ève, en baissant la tête.
Mais comme Ève n'était pas bête,
Tout d'abord Ève ne fit rien
Que s'en assurer bel et bien.
« Vous, Madame, avec cette mine ?
Qu'avez-vous donc qui vous chagrine ? »
Lui dit Adam, le jour suivant.
« Moi, rien... dit Ève... c'est... le vent. »
Or, le vent donnait sous la plume,
Contrairement à sa coutume.
Un autre eût été dépité,
Mais comme il avait la gaieté
Inaltérable de son âge,
Il s'en fut à son jardinage
Tout comme si de rien n'était.

Cependant, Ève s'em...bêtait
Comme s'ennuie une Princesse.
« Il faut, nom de Dieu ! que ça cesse »,
Se dit Ève, d'un ton tranchant.
« Je veux le voir, oui, sur-le-champ »,
Je dirai : « Sire, il manque à l'homme
Une côte, c'est sûr ; en somme,
En général, ça ne fait rien,
Mais ce général, c'est le mien.
Il faut donc la lui donner vite.
Moi, j'ai mon compte, ça m'évite
De vous importuner ; mais lui,
N'a pas le sien, c'est un ennui.
Ce détail me gâte la fête.
Puisque je suis toute parfaite,
J'ai bien droit au mari parfait.
Il ne peut que dire : en effet »,
Ici la Femme devint... rose,

« Et s'il dit, prenant mal la chose :
« Ton Adam n'est donc plus tout nu !
Que lui-même il n'est pas venu ?
A-t-il sa langue dans sa poche ?
Sur la mèche où le cœur s'accroche,
La casquette à n'en plus finir ?
Est-il en train de devenir...
Soutenu ?... » Que répliquerai-je ?
La Femme ici devint... de neige.

Sitôt qu'Adam fut de retour
Ève passa ses bras autour
Du cou, le plus fort de son monde,
Et, renversant sa tête blonde,
Reçut deux grands baisers joyeux ;
Puis fermant à demi les yeux,
Pâmée au rire de sa bouche,
Elle l'attira vers sa couche,
Où, commençant à s'incliner,
L'on se mit à se lutiner.
Soudain : « Ah ! qu'as-tu là ? » fit Ève.
Adam parut sortir d'un rêve.
« Là... mais, rien... », dit-il. « Justement,
Tu n'as rien, comme c'est charmant !
Tu vois, il te manque une côte.
Après tout, ce n'est pas ta faute,
Tu ne dois pas te tourmenter ;
Mais sur l'heure, il faut tout quitter,
Aller voir le Prince, et lui dire
Ce qu'humblement ton cœur désire ;
Que tu veux ta côte, voilà.
Or, pour lui, qu'est-ce que cela ?
Moins que rien, une bagatelle. »
Et prenant sa voix d'Immortelle :
« Allons ! Monsieur... tout de ce pas. »
Ève changea de ritournelle,
Et lorsqu'Adam était... sur elle,
Elle répétait d'un ton las :
« Pourquoi, dis, que tu m'aimes pas ? »
« Mais puisque ça ne se voit pas »,
Dit Adam. « Ça se sent », dit Ève,
Avec sa voix sifflante et brève.

Adam partit à contrecœur,
Car dans le fond il avait peur
De dire, en cette conjoncture,
À l'Auteur de la créature :
Vous avez fait un pas de clerc
En ratant ma côte, c'est clair.
Sa démarche impliquait un blâme.
Mais il voulait plaire à sa femme.

Ève attendit une heure vingt
Bonnes minutes ; il revint
Souriant, la mine attendrie,
Et, baisant sa bouche fleurie,
L'étreignant de son bras musclé :
« Je ne l'ai pas, pourtant je l'ai.
Je la tiens bien puisque je t'aime,
Sans l'avoir, je l'ai tout de même. »

Ève, sentant que ça manquait
Toujours, pensa qu'il se moquait ;
Mais il lui raconta l'histoire
Qu'il venait d'apprendre, il faut croire,
De l'origine de son corps,
Qu'Ève était sa côte, et qu'alors...
La chose...

« Ah ! c'est donc ça..., dit-elle,
Que le jour, oui, je me rappelle,
Où nous nous sommes rencontrés
Dans les parterres diaprés,
Tu m'as, en tendant tes mains franches,
Dit : « Voici la fleur de mes branches,
Et voilà le fruit de ma chair ! »
« En effet, ma chère ! »

« Ah !... mon cher !
J'avais pris moi cette parole
Au figuré... Mais j'étais folle ! »

« Je t'avais prise au figuré
Moi-même », dit Adam, paré
De sa dignité fraîche éclose
Et qui lui prêtait quelque chose
Comme un ton de maître d'hôtel,
Déjà suffisamment mortel ;
« L'ayant dit un peu comme on tousse.
Vois, quand la vérité nous pousse,
Il faut la dire, malgré soi. »

« Je ne peux pas moi comme toi »,
Fut tout ce que répondit Ève.

La nuit s'en va, le jour se lève,
Adam saisit son arrosoir,
Et : « Ma belle enfant, à ce soir ! »
Sa belle enfant ! pauvre petite !
Elle, jadis sa... favorite,
Était son enfant, à présent.
Quoi ? Ce n'était pas suffisant
Qu'Adam n'eût toujours pas sa côte,
À présent c'était de sa faute !
Elle en avait les bras cassés !
Et ce n'était encore assez.
Il fallait cette côte absente
Qu'elle en parût reconnaissante !

Doux Jésus !
Tout fut bien changé.

Ève prit son air affligé,
Et lorsqu'Adam parmi les branches
Voyait bouder ses... formes blanches
Et que, ne pouvant s'en passer,
Il accourait, pour l'embrasser,
Tout rempli d'une envie affreuse :
« Ah ! que je suis donc malheureuse ! »
Disait Ève, qui s'affalait.

Enfin, un jour qu'Adam parlait
D'une voix trop brusque et trop haute :
« Pourquoi, dis, que t'as pas ta côte ? »

« Voyons ! vous vous... fichez de moi !
Tu le sais bien,... comment, c'est toi,
Toi, ma côte, qui se réclame ! »
« Ça n'empêche pas, dit la Femme,
À ta place, j'insisterais. »

« Si je faisais de nouveaux frais,
Dit Adam, j'aurais trop de honte.
Nous avons chacun notre compte,
Toi comme moi, tu le sais bien,
Et le Prince ne nous doit rien ;
Car nul en terme de boutique
Ne tient mieux son arithmétique. »
Ce raisonnement était fort,
Ève pourtant n'avait pas tort.

Sur ces entrefaites, la femme
S'en vint errer, le vague à l'âme,
Autour de l'arbre défendu.
Le serpent s'y trouvait pendu
Par la queue, il leva la tête.
« Ève, comme vous voilà faite ! »
Dit-il, en la voyant venir.

La pauvre Ève n'y put tenir ;
Elle lui raconta sa peine,
Et même fit voir... une veine.
Le bon Vieux en parut navré.
« Tiens ! Tiens ! dit-il ; c'est pourtant vrai.
Eh ! bien ! moi : j'ai votre remède ;
Et je veux vous venir en aide,
Car je sais où tout ça conduit.
Écoute-moi, prends de ce fruit. »
« Oh ! non ! » dit Ève « Et la défense ? »
« Ton prince est meilleur qu'il ne pense
Et ne peut vous faire mourir.
Prends cette pomme et va l'offrir
À ton mari, pour qu'il en mange,
Et, dit, entr'autres choses, l'Ange,
Parfaits alors, comme des Dieux,
En lui, plus de vide odieux !
Vois quelle épine je vous ôte.
Ce pauvre Adam aura sa côte. »
C'était tout ce qu'Ève voulait.
Le fruit était là qui parlait,
Ève étendît donc sa main blanche
Et le fit passer de la branche
Sous sa nuque, dans son chignon.

Ève trouva son compagnon
Qui dormait étendu sur l'herbe,
Dans une pose peu superbe,
Le front obscurci par l'ennui.

Ève s'assit auprès de lui,
Ève s'empara de la pomme,
Se tourna du côté de l'Homme
Et la plaçant bien sous son nez,
**** de ses regards étonnés :
« Tiens ! regarde ! la belle pêche ! »
- « Pomme », dit-il d'une voix sèche.
« Pêche ! Pêche ! » - « Pomme. » - « Comment ?
Ce fruit d'or, d'un rose charmant,
N'est pas une pomme bien ronde ?
Voyons !... demande à tout le monde ? »
- « Qui, tout le monde ? » Ève sourit :
« J'ai dit tout le monde ? » et reprit,
Lui prenant doucement la tête :
« Eh ! oui, c'est une pomme, bête,
Qui ne comprends pas qu'on voulait
T'attraper... Ah ! fi ! que c'est laid !
Pour me punir, mon petit homme,
Je vais t'en donner, de ma pomme. »
Et l'éclair de son ongle luit,
Qui se perd dans la peau du fruit.

On était au temps des cerises,
Et justement l'effort des brises,
Qui soufflait dans les cerisiers,
En fit tomber une à leurs pieds !

« Malheureuse ! que vas-tu faire ? »
Crie Adam, rouge de colère,
Qui soudain a tout deviné,
Veut se saisir du fruit damné,
Mais l'homme avait trouvé son maître.
« Je serai seule à la commettre »,
Dit Ève en éloignant ses bras,
Si hautaine... qu'il n'osa pas.

Puis très tranquillement, sans fièvres,
Ève met le fruit sur ses lèvres,
Ève le mange avec ses dents.

L'homme baissa ses yeux ardents
Et de ses mains voila sa face.

« Moi, que voulez-vous que j'y fasse ?
Dit Ève ; c'est mon bon plaisir ;
Je n'écoute que mon désir
Et je le contente sur l'heure.
Mieux que vous... qu'a-t-il donc ? il pleure !
En voulez-vous ?
Non, et pourquoi ?
Vous voyez, j'en mange bien, moi.
D'ailleurs, songez qu'après ma faute
Nous ne vivrons plus côte à côte,
On va nous séparer... c'est sûr,
On me l'a dit, par un grand mur.
En voulez-vous ? »
Lui, tout en larmes,
S'enfonçait, songeant à ses charmes,
Dans le royaume de Sa voix.
Enfin, pour la dernière fois
Prenant sa tête qu'Ève couche,
« En veux-tu, dis ? Ouvre ta bouche ! »

Et c'est ainsi qu'Adam mangea
À peu près tout, Ève déjà
N'en ayant pris qu'une bouchée ;
Mais Ève eût été bien fâchée
Du contraire, pour l'avenir.
Il a besoin de devenir
Dieu, bien plus que moi, pensait-Elle.

Quand l'homme nous l'eut baillé belle,
Tu sais ce qui lors arriva ;
Le pauvre Adam se retrouva
Plus bête qu'avant, par sa faute.
Car s'il eût su plaindre sa côte,
Son Ève alors n'eût point péché ;
De plus, s'il se fût attaché
À son Prince, du fond de l'âme,
S'il n'eût point écouté sa femme,
Ton cœur a déjà deviné
Que le Seigneur eût pardonné,
Le motif d'Ève, au fond valable,
N'ayant pas eu pour détestable
Suite la faute du mari.

Lequel plus **** fut bien chéri
Et bien dorloté par « sa chère »,
Mais quand, mécontent de la chère,
Il disait : « Je suis trop bon, moi !
- Sans doute, disait Ève, toi,
T'es-un-bon-bonhomme, sur terre,
Mais... tu n'as pas de caractère ! »
Dieu fit votre corps noble et votre âme charmante.
Le corps sort de la terre et l'âme aspire aux cieux ;
L'un est un amoureux et l'autre est une amante.

Dans la paix d'un jardin vaste et délicieux,
Dieu souffla dans un peu de boue un peu de flamme,
Et le corps s'en alla sur ses pieds gracieux.

Et ce souffle enchantait le corps, et c'était l'âme
Qui, mêlée à l'amour des bêtes et des bois,
Chez l'homme adorait Dieu que contemplait la femme.

L'âme rit dans les yeux et vole avec la voix,
Et l'âme ne meurt pas, mais le corps ressuscite,
Sortant du limon noir une seconde fois.

Dieu fit suave et beau votre corps immortel :
Les jambes sont les deux colonnes de ce temple,
Les genoux sont la chaise et le buste est l'autel.

Et la ligne du torse, à son sommet plus ample,
Comme aux flancs purs de vase antique, rêve et court
Dans l'ordre harmonieux dont la lyre est l'exemple.

Pendant qu'un hymne à Dieu, dans un battement court,
Comme au coeur de la lyre une éternelle phrase,
Chante aux cordes du coeur mélodieux et sourd.

Des épaules, planant comme les bords du vase,
La tête émerge, et c'est une adorable fleur
Noyée en une longue et lumineuse extase.

Si l'âme est un oiseau, le corps est l'oiseleur.
Le regard brûle au fond des yeux qui sont des lampes
Où chaque larme douce est l'huile de douleur.

La mesure du temps tinte aux cloisons des tempes ;
Et les bras longs aux mains montant au firmament
Ont charitablement la sûreté des rampes.

Le coeur s'embrase et fond dans leur embrasement,
Comme sous les pressoirs fond le fruit de la vigne,
Et sur les bras croisés vit le recueillement.

Ni les béliers frisés ni les plumes de cygne,
Ni la crinière en feu des crieurs de la faim
N'effacent ta splendeur, ô chevelure insigne,

Faite avec l'azur noir de la nuit, ou l'or fin
De l'aurore, et sur qui nage un parfum farouche,
Où la femme endort l'homme en une mer sans fin.

Rossignol vif et clair, grave et sonore mouche
Frémis ou chante au bord des lèvres, douce voix !
Douce gloire du rire, épanouis la bouche !

Chaque chose du corps est soumise à tes lois,
Dieu grand, qui fais tourner la terre sous ton geste,
Dans la succession régulière des mois.

Tes lois sont la santé de ce compagnon leste
De l'âme, ainsi qu'un rythme est l'amour de ses pas,
Mais l'âme solitaire est joyeuse où Dieu reste.

La souffrance du corps s'éteint dans le trépas,
Mais la douleur de l'âme est l'océan sans borne ;
Et ce sont deux présents que l'on estime pas.

Oh ! ne négligez pas votre âme ! L'âme est morne
Que l'on néglige, et va s'effaçant, comme au jour
Qui monte le croissant voit s'effacer sa corne.

Et le corps, pour lequel l'âme n'a pas d'amour,
Dans la laideur, que Dieu condamne, s'étiole,
Comme un fou relégué dans le fond d'une cour.

La grâce de votre âme éclôt dans la parole,
Et l'autre dans le geste, aimant les frais essors,
Au vêtement léger comme une âme qui vole.

Sachez aimer votre âme en aimant votre corps,
Cherchez l'eau musicale aux bains de marbre pâle,
Et l'onde du génie au coeur des hommes forts.

Mêlez vos membres lourds de fatigue, où le hâle
De la vie imprima son baiser furieux,
Au gémissement frais que la Naïade exhale ;

Afin qu'au jour prochain votre corps glorieux,
Plus léger que celui des Mercures fidèles,
Monte à travers l'azur du ciel victorieux.

Dans l'onde du génie, aux sources sûres d'elles,
Plongez votre âme à nu, comme les bons nageurs,
Pour qu'elle en sorte avec la foi donneuse d'ailes !

Dans la nuit, vers une aube aux divines rougeurs,
Marchez par le sentier de la bonne habitude,
Soyez de patients et graves voyageurs.

Que cette jeune soeur charmante de l'étude
Et du travail tranquille et ***, la Chasteté,
Parfume vos discours et votre solitude.

La pâture de l'âme est toute vérité ;
Le corps, content de peu, cueille une nourriture
Dans le baiser mystique où règne la beauté.

Puisque Dieu répandit l'homme dans la nature,
Sachez l'aimer en vous, et d'abord soyez doux
A vous-mêmes, et doux à toute créature.

Si vous ne vous aimez en Dieu, vous aimez-vous ?
I.

Le nez rouge, la face blême,
Sur un pupitre de glaçons,
L'Hiver exécute son thème
Dans le quatuor des saisons.

Il chante d'une voix peu sûre
Des airs vieillots et chevrotants ;
Son pied glacé bat la mesure
Et la semelle en même temps ;

Et comme Haendel, dont la perruque
Perdait sa farine en tremblant,
Il fait envoler de sa nuque
La neige qui la poudre à blanc.

II.

Dans le bassin des Tuileries,
Le cygne s'est pris en nageant,
Et les arbres, comme aux féeries,
Sont en filigrane d'argent.

Les vases ont des fleurs de givre,
Sous la charmille aux blancs réseaux ;
Et sur la neige on voit se suivre
Les pas étoilés des oiseaux.

Au piédestal où, court-vêtue,
Vénus coudoyait Phocion,
L'Hiver a posé pour statue
La Frileuse de Clodion.

III.

Les femmes passent sous les arbres
En martre, hermine et menu-vair,
Et les déesses, frileux marbres,
Ont pris aussi l'habit d'hiver.

La Vénus Anadyomène
Est en pelisse à capuchon ;
Flore, que la brise malmène,
Plonge ses mains dans son manchon.

Et pour la saison, les bergères
De Coysevox et de Coustou,
Trouvant leurs écharpes légères,
Ont des boas autour du cou.

IV.

Sur la mode Parisienne
Le Nord pose ses manteaux lourds,
Comme sur une Athénienne
Un Scythe étendrait sa peau d'ours.

Partout se mélange aux parures
Dont Palmyre habille l'Hiver,
Le faste russe des fourrures
Que parfume le vétyver.

Et le Plaisir rit dans l'alcôve
Quand, au milieu des Amours nus,
Des poils roux d'une bête fauve
Sort le torse blanc de Vénus.

V.

Sous le voile qui vous protège,
Défiant les regards jaloux,
Si vous sortez par cette neige,
Redoutez vos pieds andalous ;

La neige saisit comme un moule
L'empreinte de ce pied mignon
Qui, sur le tapis blanc qu'il foule,
Signe, à chaque pas, votre nom.

Ainsi guidé, l'époux morose
Peut parvenir au nid caché
Où, de froid la joue encor rose,
A l'Amour s'enlace Psyché.
Mon hippocampe,
Donne-moi juste deux minutes
Le temps que je te vaccine
Religieusement
De ma machette
Le temps que je chante ma diane :
La la la la la la la la la lo lé lo la !
La la la la la la la la la lo lé lo la !
Je psalmodie
Un, deux,
Un, deux, trois...
Un, deux,
Un, deux, trois...
J'offre cette rumba à la santé de nos petites morts
De ces petites morts
Qui nous précèdent, nous suivent et nous hantent.
Au son des trois tambours de la rumba
Tu chantes faite bouteille de rhum
Et je te réponds en choeur cuillère et verre vide.
A la première reprise, chassée croisée,
Tu chantes le thème
A la deuxième reprise, mollets cambrés,
Je chante aussi couteau et toi assiette.
A la troisième reprise,
Moi, rayon de lune de lune,
Toi, croissant de soleil,
Frappons des mains à l'unisson
Communions avec nos morts sur l'aire de danse
Qu'ont foulée leurs chevaux de possession
Qui nous tiennent encore en bride
Et contiennent nos ombres.

Je me présente : Orphée
Je bombe le torse et je te dévisage
Tu te présentes : Eurydice
Tu te déhanches avec malice et tu me toises.
Un, deux,
Un, deux, trois...
Un, deux, trois,
Un, deux...
Mélangeons les syncopes,
Pervertissons la parade,
Convoquons un nouveau rituel,
Désarticulons la chorégraphie,
Nos corps interchangeables fusionnent
En une seule ombre :
Tu m'aguiches,
Je trémousse des épaules,
Tu m'habilles et déshabilles de tes passes,
Et je te chevauche de mon foulard écarlate en miroir inversé.
Viens en marchant
Dansons, marchons,
Suivons la clave
Vêtus de blanc
Gratifions nos petites morts d'une rumba
Plions, élevons, sautons, cabriolons
Retombons, tortillons, détortillons
Cambre le dos que je me déhanche !

Entre postures et figures
Improvisons, rusons, sautons-matons
Caracolons
Dans le chaud tempo
Des trois tambours de la rumba.
Et si je te vaccine
A l'improviste
Dérobe-toi, esquive-toi, nargue-moi
Pour que nos petites morts applaudissent à tout rompre
Leurs virtuoses
Et tortillent elles aussi du croupion .
Donc, vieux passé plaintif, toujours tu reviendras
Nous criant : - Pourquoi donc est-on si **** ? Ingrats !
Qu'êtes-vous devenus ? Dites, avec l'abîme
Quel pacte avez-vous fait ? Quel attentat ? Quel crime ? -
Nous questionnant, sombre et de rage écumant,
Furieux.
Nous avons marché, tout bonnement.
Qui marche t'assassine, ô bon vieux passé blême.
Mais que veux-tu ? Je suis de mon siècle, et je l'aime !
Je te l'ai déjà dit. Non, ce n'est plus du tout
L'époque où la nature était de mauvais goût,
Où Bouhours, vieux jésuite, et le Batteux, vieux cancre,
Lunette au nez et plume au poing, barbouillaient d'encre
Le cygne au bec doré, le bois vert, le ciel bleu ;
Où l'homme corrigeait le manuscrit de Dieu.
Non, ce n'est plus le temps où Lenôtre à Versailles
Raturait le buisson, la ronce, la broussaille ;
Siècle où l'on ne voyait dans les champs éperdus
Que des hommes poudrés sous des arbres tondus.
Tout est en liberté maintenant. Sur sa nuque
L'arbre a plus de cheveux, l'homme a moins de perruque.
La vieille idée est morte avec le vieux cerveau.
La révolution est un monde nouveau.
Notre oreille en changeant a changé la musique.
Lorsque Fernand Cortez arriva du Mexique,
Il revint la main pleine, et, du jeune univers,
Il rapporta de l'or ; nous rapportons des vers.
Nous rapportons des chants mystérieux. Nous sommes
D'autres yeux, d'autres fronts, d'autres cœurs, d'autres hommes.

Braves pédants, calmez votre bon vieux courroux.
Nous arrachons de l'âme humaine les verrous.
Tous frères, et mêlés dans les monts, dans les plaines,
Nous laissons librement s'en aller nos haleines
À travers les grands bois et les bleus firmaments.
Nous avons démoli les vieux compartiments.

Non, nous ne sommes plus ni paysan, ni noble,
Ni lourdaud dans son pré, ni rustre en son vignoble,
Ni baron dans sa tour, ni reître à ses canons ;
Nous brisons cette écorce, et nous redevenons
L'homme ; l'homme enfin hors des temps crépusculaires ;
L'homme égal à lui-même en tous ses exemplaires ;
Ni tyran, ni forçat, ni maître, ni valet ;
L'humanité se montre enfin telle qu'elle est,
Chaque matin plus libre et chaque soir plus sage ;
Et le vieux masque usé laisse voir le visage.

Avec Ézéchiel nous mêlons Spinosa.
La nature nous prend, la nature nous a ;
Dans son antre profond, douce, elle nous attire ;
Elle en chasse pour nous son antique satyre,
Et nous y montre un sphinx nouveau qui dit : pensez.
Pour nous les petits cris au fond des nids poussés,
Sont augustes ; pour nous toutes les monarchies
Que vous saluez, vous, de vos têtes blanchies,
Tous les fauteuils royaux aux dossiers empourprés,
Sont peu de chose auprès d'un liseron des prés.
Régner ! Cela vaut-il rêver sous un vieux aulne ?
Nous regardons passer Charles-Quint sur son trône,
Jules deux sous son dais, César dans les clairons,
Et nous avons pitié lorsque nous comparons
À l'aurore des cieux cette fausse dorure.
Lorsque nous contemplons, par une déchirure
Des nuages, l'oiseau volant dans sa fierté,
Nous sentons frissonner notre aile, ô liberté !
En fait d'or, à la cour nous préférons la gerbe.
La nature est pour nous l'unique et sacré verbe,
Et notre art poétique ignore Despréaux.
Nos rois très excellents, très puissants et très hauts,
C'est le roc dans les flots, c'est dans les bois le chêne.
Mai, qui brise l'hiver, c'est-à-dire la chaîne,
Nous plaît. Le vrai nous tient. Je suis parfois tenté
De dire au mont Blanc : - Sire ! Et : - Votre majesté
À la vierge qui passe et porte, agreste et belle,
Sa cruche sur son front et Dieu dans sa prunelle.
Pour nous, songeurs, bandits, romantiques, démons,
Bonnets rouges, les flots grondants, l'aigle, les monts,
La bise, quand le soir ouvre son noir portique,
La tempête effarant l'onde apocalyptique,
Dépassent en musique, en mystère, en effroi,
Les quatre violons de la chambre du roi.
Chaque siècle, il s'y faut résigner, suit sa route.
Les hommes d'autrefois ont été grands sans doute ;
Nous ne nous tournons plus vers les mêmes clartés.
Jadis, frisure au front, ayant à ses côtés
Un tas d'abbés sans bure et de femmes sans guimpes,
Parmi des princes dieux, sous des plafonds olympes,
Prêt dans son justaucorps à poser pour Audran,
La dentelle au cou, grave, et l'œil sur un cadran,
Dans le salon de Mars ou dans la galerie
D'apollon, submergé dans la grand'seigneurie,
Dans le flot des Rohan, des Sourdis, des Elbeuf,
Et des fiers habits d'or roulant vers l'Œil-de-Boeuf,
Le poète, fût-il Corneille, ou toi, Molière,
- Tandis qu'en la chapelle ou bien dans la volière,
Les chanteurs accordaient le théorbe et le luth,
Et que Lulli tremblant s'écriait : gare à l'ut ! -
Attendait qu'au milieu de la claire fanfare
Et des fronts inclinés apparût, comme un phare,
Le page, aux tonnelets de brocart d'argent fin,
Qui portait le bougeoir de monsieur le dauphin.
Aujourd'hui, pour Versaille et pour salon d'Hercule,
Ayant l'ombre et l'airain du rouge crépuscule,
Fauve, et peu coudoyé de Guiche ou de Brissac,
La face au vent, les poings dans un paletot sac,
Seul, dans l'immensité que l'ouragan secoue,
Il écoute le bruit que fait la sombre proue
De la terre, et pensif, sur le blême horizon,
À l'heure où, dans l'orchestre inquiet du buisson,
De l'arbre et de la source, un frémissement passe,
Où le chêne chuchote et prend sa contrebasse,
L'eau sa flûte et le vent son stradivarius,
Il regarde monter l'effrayant Sirius.

Pour la muse en paniers, par Dorat réchauffée,
C'est un orang-outang ; pour les bois, c'est Orphée.
La nature lui dit : mon fils. Ce malotru,
Ô grand siècle ! Écrit mieux qu'Ablancourt et Patru.
Est-il féroce ? Non. Ce troglodyte affable
À l'ormeau du chemin fait réciter sa fable ;
Il dit au doux chevreau : bien bêlé, mon enfant !
Quand la fleur, le matin, de perles se coiffant,
Se mire aux flots, coquette et mijaurée exquise,
Il passe et dit : Bonjour, madame la marquise.
Et puis il souffre, il pleure, il est homme ; le sort
En rayons douloureux de son front triste sort.
Car, ici-bas, si fort qu'on soit, si peu qu'on vaille,
Tous, qui que nous soyons, le destin nous travaille
Pour orner dans l'azur la tiare de Dieu.
Le même bras nous fait passer au même feu ;
Et, sur l'humanité, qu'il use de sa lime,
Essayant tous les cœurs à sa meule sublime,
Scrutant tous les défauts de l'homme transparent,
Sombre ouvrier du ciel, noir orfèvre, tirant
Du sage une étincelle et du juste une flamme,
Se penche le malheur, lapidaire de l'âme.

Oui, tel est le poète aujourd'hui. Grands, petits,
Tous dans Pan effaré nous sommes engloutis.
Et ces secrets surpris, ces splendeurs contemplées,
Ces pages de la nuit et du jour épelées,
Ce qu'affirme Newton, ce qu'aperçoit Mesmer,
La grande liberté des souffles sur la mer,
La forêt qui craint Dieu dans l'ombre et qui le nomme,
Les eaux, les fleurs, les champs, font naître en nous un homme
Mystérieux, semblable aux profondeurs qu'il voit.
La nature aux songeurs montre les cieux du doigt.
Le cèdre au torse énorme, athlète des tempêtes,
Sur le fauve Liban conseillait les prophètes,
Et ce fut son exemple austère qui poussa
Nahum contre Ninive, Amos contre Gaza.
Les sphères en roulant nous jettent la justice.
Oui, l'âme monte au bien comme l'astre au solstice ;
Et le monde équilibre a fait l'homme devoir.
Quand l'âme voit mal Dieu, l'aube le fait mieux voir.
La nuit, quand Aquilon sonne de la trompette,
Ce qu'il dit, notre cœur frémissant le répète.
Nous vivons libres, fiers, tressaillants, prosternés,
Éblouis du grand Dieu formidable ; et, tournés
Vers tous les idéals et vers tous les possibles,
Nous cueillons dans l'azur les roses invisibles.
L'ombre est notre palais. Nous sommes commensaux
De l'abeille, du jonc nourri par les ruisseaux,
Du papillon qui boit dans la fleur arrosée.
Nos âmes aux oiseaux disputent la rosée.
Laissant le passé mort dans les siècles défunts,
Nous vivons de rayons, de soupirs, de parfums,
Et nous nous abreuvons de l'immense ambroisie
Qu'Homère appelle amour et Platon poésie.
Sous les branchages noirs du destin, nous errons,
Purs et graves, avec les souffles sur nos fronts.

Notre adoration, notre autel, notre Louvre,
C'est la vertu qui saigne ou le matin qui s'ouvre ;
Les grands levers auxquels nous ne manquons jamais,
C'est Vénus des monts noirs blanchissant les sommets ;
C'est le lys fleurissant, chaste, charmant, sévère ;
C'est Jésus se dressant, pâle, sur le calvaire.

Le 22 novembre 1854.
Au poète Mérante.

I.

Ami, viens me rejoindre.
Les bois sont innocents.
Il est bon de voir poindre
L'aube des paysans.

Paris, morne et farouche,
Pousse des hurlements
Et se tord sous la ******
Des noirs événements.

Il revient, loi sinistre,
Étrange état normal !
À l'ennui par le cuistre
Et par le monstre au mal.

II.

J'ai fui ; viens. C'est dans l'ombre
Que nous nous réchauffons.
J'habite un pays sombre
Plein de rêves profonds.

Les récits de grand-mère
Et les signes de croix
Ont mis une chimère
Charmante dans les bois.

Ici, sous chaque porte,
S'assied le fabliau,
Nain du foyer qui porte
Perruque in-folio.

L'elfe dans les nymphées
Fait tourner ses fuseaux ;
Ici l'on a des fées
Comme ailleurs des oiseaux.

Le conte, aimé des chaumes,
Trouve au bord des chemins,
Parfois, un nid de gnomes
Qu'il prend dans ses deux mains.

Les follets sont des drôles
Pétris d'ombre et d'azur
Qui font au creux des saules
Un flamboiement obscur.

Le faune aux doigts d'écorce
Rapproche par moments
Sous la table au pied torse
Les genoux des amants.

Le soir un lutin cogne
Aux plafonds des manoirs ;
Les étangs de Sologne
Sont de pâles miroirs.

Les nénuphars des berges
Me regardent la nuit ;
Les fleurs semblent des vierges ;
L'âme des choses luit.

III.

Cette bruyère est douce ;
Ici le ciel est bleu,
L'homme vit, le blé pousse
Dans la bonté de Dieu.

J'habite sous les chênes
Frémissants et calmants ;
L'air est tiède, et les plaines
Sont des rayonnements.

Je me suis fait un gîte
D'arbres, sourds à nos pas ;
Ce que le vent agite,
L'homme ne l'émeut pas.

Le matin, je sommeille
Confusément encor.
L'aube arrive vermeille
Dans une gloire d'or.

- Ami, dit la ramée,
Il fait jour maintenant. -
Une mouche enfermée
M'éveille en bourdonnant.

IV.

Viens, **** des catastrophes,
Mêler sous nos berceaux
Le frisson de tes strophes
Au tremblement des eaux.

Viens, l'étang solitaire
Est un poème aussi.
Les lacs ont le mystère,
Nos coeurs ont le souci.

Tout comme l'hirondelle,
La stance quelquefois
Aime à mouiller son aile
Dans la mare des bois.

C'est, la tête inondée
Des pleurs de la forêt,
Que souvent le spondée
À Virgile apparaît.

C'est des sources, des îles,
Du hêtre et du glaïeul
Que sort ce tas d'idylles
Dont Tityre est l'aïeul.

Segrais, chez Pan son hôte,
Fit un livre serein
Où la grenouille saute
Du sonnet au quatrain.

Pendant qu'en sa nacelle
Racan chantait Babet,
Du bec de la sarcelle
Une rime tombait.

Moi, ce serait ma joie
D'errer dans la fraîcheur
D'une églogue où l'on voie
Fuir le martin-pêcheur.

L'ode même, superbe,
Jamais ne renia
Toute cette grande herbe
Où rit Titania.

Ami, l'étang révèle
Et mêle, brin à brin,
Une flore nouvelle
Au vieil alexandrin.

Le style se retrempe
Lorsque nous le plongeons
Dans cette eau sombre où rampe
Un esprit sous les joncs.

Viens, pour peu que tu veuilles
Voir croître ton vers
La sphaigne aux larges feuilles
Et les grands roseaux verts.
Seul Décébale et nul Autre, me dis-tu, pourrait de sa dague d'eau bénite
Eteindre le feu qui couve sous ta carapace douce et soyeuse!
Décébale le Dace seul aurait la fougue et le courage nécessaires
Pour te faire tournoyer
Et tu dis encore que toi et Décébale ne font quasiment qu'un.

Je ne suis pas jaloux !
A Décébale ce qui appartient à Décébale
A Nul Autre ce qui appartient à Nul Autre.

Moi, comme Nul Autre pareil
Je veux juste apaiser ton feu
L'apprivoiser, l'amadouer
Pour qu'il ne te brûle pas.
Pour cela il faut que je me muscle :
Affronter le feu de Décébale n 'est pas rien,
Décébale c'est dix hommes à la fois.
Je pourrais, s'il le fallait, convoquer dix diablotins,
Dix chats-huants pour me porter assistance
Et défier Décébale en combat singulier.
Sur l'échiquier de ton corps
Mais ce serait tricher
Et tricher n'est pas jouer.
Et à vaincre sans péril on triomphe sans gloire

En conclusion :
Je cède en vertu du droit d'aînesse
A Décébale le feu. A moi le sirocco, la glace !
Pistache, coco et rhum raisins si tu le permets !

Vois-tu ce sont tes lacs glacés que je veux réchauffer,
Tes pics et tes pitons enneigés que je veux faire fondre
A petit feu sous mon vent de braise
Et que la chevauchée prenne des lustres à se consommer
Je veux que partout où tu es
Tu saches
Que je suis là au fond de toi !

Je nage comme un saumon ivre dans tes eaux glacées.
C'est seulement dans ces criques et ces fjords que j'arrive à nager
Je fais du crawl, de la brasse, du ski nautique, du paddle.
Je suis casse-cou dans tes eaux
Comme jamais je ne l'ai été.

Je fais même du surf, du plongeon
et du water polo.
Tant que tu joues avec moi
Je flotte sans bouée
Tant que tu es généreuse
Je dérive
Tant que tu te donnes sans compter
Dans notre nage synchronisée
J'existe de figures en figures.

Et pendant que je te dis tout ça
Voila que ce fieffé diablotin lève la tête,
Bombe le torse,
Et se prend pour Décébale.
Ce n'est qu'un petit pétrel diablotin,
Un simple et infime cottous à peine sorti du nid
Mais j'ai beau lui dire
Qu'il n'est pas multiple de quatre
Il se prend pour Décébale
"Tu n'es pas Dace ",
Lui ai-je pourtant dit cent fois ce matin
Mais il persiste et signe.
Il chante même à tue-tête l'hymne :
Je suis Dacien, voila ma gloire, mon espérance et mon soutien
Un singe en veste de brocart

Trotte et gambade devant elle

Qui froisse un mouchoir de dentelle

Dans sa main gantée avec art,


Tandis qu'un négrillon tout rouge

Maintient à tour de bras les pans

De sa lourde robe en suspens,

Attentif à tout pli qui bouge ;


Le singe ne perd pas des yeux

La gorge blanche de la dame.

Opulent trésor que réclame

Le torse nu de l'un des dieux ;


Le négrillon parfois soulève

Plus haut qu'il ne faut, l'aigrefin,

Son fardeau somptueux, afin

De voir ce dont la nuit il rêve ;


Elle va par les escaliers,

Et ne paraît pas davantage

Sensible à l'insolent suffrage

De ses animaux familiers.
A l'horizon monte une nue,
Sculptant sa forme dans l'azur :
On dirait une vierge nue
Emergeant d'un lac au flot pur.

Debout dans sa conque nacrée,
Elle vogue sur le bleu clair,
Comme une Aphrodite éthérée,
Faite de l'écume de l'air.

On voit onder en molles poses
Son torse au contour incertain,
Et l'aurore répand des roses
Sur son épaule de satin.

Ses blancheurs de marbre et de neige
Se fondent amoureusement
Comme, au clair-obscur du Corrège,
Le corps d'Antiope dormant.

Elle plane dans la lumière
Plus haut que l'Alpe ou l'Apennin ;
Reflet de la beauté première,
Soeur de " l'éternel féminin ".

A son corps, en vain retenue,
Sur l'aile de la passion,
Mon âme vole à cette nue
Et l'embrasse comme Ixion.

La raison dit : " Vague fumée,
Où l'on croit voir ce qu'on rêva,
Ombre au gré du vent déformée,
Bulle qui crève et qui s'en va ? "

Le sentiment répond : " Qu'importe !
Qu'est-ce après tout que la beauté,
Spectre charmant qu'un souffle emporte
Et qui n'est rien, ayant été !

" A l'Idéal ouvre ton âme ;
Mets dans ton coeur beaucoup de ciel,
Aime une nue, aime une femme,
Mais aime ! - C'est l'essentiel ! "
J'ai dans ma chambre une aquarelle
Bizarre, et d'un peintre avec qui
Mètre et rime sont en querelle,
- Théophile Kniatowski.

Sur l'écume blanche qui frange
Le manteau glauque de la mer
Se groupent en bouquet étrange
Trois nymphes, fleurs du gouffre amer.

Comme des lis noyés, la houle
Fait dans sa volute d'argent
Danser leurs beaux corps qu'elle roule,
Les élevant, les submergeant.

Sur leurs têtes blondes, coiffées
De pétoncles et de roseaux,
Elles mêlent, coquettes fées,
L'écrin et la flore des eaux.

Vidant sa nacre, l'huître à perle
Constelle de son blanc trésor
Leur gorge, où le flot qui déferle
Suspend d'autres perles encor.

Et, jusqu'aux hanches soulevées
Par le bras des Tritons nerveux,
Elles luisent, d'azur lavées,
Sous l'or vert de leurs longs cheveux.

Plus bas, leur blancheur sous l'eau bleue
Se glace d'un visqueux frisson,
Et le torse finit en queue,
Moitié femme, moitié poisson.

Mais qui regarde la nageoire
Et les reins aux squameux replis,
En voyant les bustes d'ivoire
Par le baiser des mers polis ?

A l'horizon, - piquant mélange
De fable et de réalité, -
Paraît un vaisseau qui dérange
Le choeur marin épouvanté.

Son pavillon est tricolore ;
Son tuyau ***** la vapeur ;
Ses aubes fouettent l'eau sonore,
Et les nymphes plongent de peur.

Sans crainte elles suivaient par troupes
Les trirèmes de l'Archipel,
Et les dauphins, arquant leurs croupes,
D'Arion attendaient l'appel.

Mais le steam-boat avec ses roues,
Comme Vulcain battant Vénus,
Souffletterait leurs belles joues
Et meurtrirait leurs membres nus.

Adieu, fraîche mythologie !
Le paquebot passe et, de ****,
Croit voir sur la vague élargie
Une culbute de marsouin.
J'ai vu passer dans mon rêve

- Tel l'ouragan sur la grève, -

D'une main tenant un glaive

Et de l'autre un sablier,

Ce cavalier


Des ballades d'Allemagne

Qu'à travers ville et campagne,

Et du fleuve à la montagne,

Et des forêts au vallon,

Un étalon


Rouge-flamme et noir d'ébène,

Sans bride, ni mors, ni rêne,

Ni hop ! ni cravache, entraîne

Parmi des râlements sourds

Toujours ! toujours !


Un grand feutre à longue plume

Ombrait son oeil qui s'allume

Et s'éteint. Tel, dans la brume,

Éclate et meurt l'éclair bleu

D'une arme à feu.


Comme l'aile d'une orfraie

Qu'un subit orage effraie,

Par l'air que la neige raie,

Son manteau se soulevant

Claquait au vent,


Et montrait d'un air de gloire

Un torse d'ombre et d'ivoire,

Tandis que dans la nuit noire

Luisaient en des cris stridents

Trente-deux dents.
Courtisane au sein dur, à l'oeil opaque et brun

S'ouvrant avec lenteur comme celui d'un boeuf,

Ton grand torse reluit ainsi qu'un marbre neuf.


Fleur grasse et riche, autour de toi ne flotte aucun

Arôme, et la beauté sereine de ton corps

Déroule, mate, ses impeccables accords.


Tu ne sens même pas la chair, ce goût qu'au moins

Exhalent celles-là qui vont fanant les foins,

Et tu trônes, Idole insensible à l'encens.


- Ainsi le Dahlia, roi vêtu de splendeur,

Elève sans orgueil sa tête sans odeur,

Irritant au milieu des jasmins agaçants !
Always Somewhere Dec 2024
Je la réveille en l'embrassant et lui dis
« Regarde par la fenêtre, mon amour, il neige à Paris. »

Je me lève, me rends dans la cuisine pour lui
préparer un café et me tourne vers elle
« Ou bien, un verre de vin, qu'est-ce que tu préfères ? »

Elle me regarde, me sourit et me dit de son accent
« Ce qui t'arrange, mon amant. »

Et j'y dépose mes lèvres contre les siennes
Mon torse nu contre sa chaude poitrine
Que j'ouvre la fenêtre
Que ses tétons sensibles durcissent par la fraîcheur de l'hiver
Et sur son corps, j'y dépose ma tête et y écoute son cœur
Et mes yeux, je les ferme et je me dis discrètement

« Ce qui m'arrange, c'est toi contre moi
Toi dans mes bras, dans cet appartement-là, mon amour
À regarder la neige tomber et vêtir Montmartre
T'aimer, éperdument jusqu'à ce que l’euphorie s’évapore
Ô, mon étrangère
Je te suis dévoué
À jamais, ne me quitte plus
Reste à mes côtés, la journées dans les draps
Et fais-le moi, ressentir, l'amour. »
le 19 janvier 2022
Always Somewhere Dec 2024
Je voulais me réveiller auprès d'elle
Peut-être même sentir ses cheveux sur la surface de mon visage
Et les premiers rayons du soleil qui traversent la fenêtre

Elle ouvrirait ses paupières douces et le vert de ses yeux scintillerait
Une matinée d'un début d'automne
Elle se collerait à moi, juste comme elle le faisait auparavant
Ses seins nus et chauds sur mon torse elle
M'embrasserait
Peut-être même qu'elle ne dirait rien, qu'elle
Me regarderait simplement

Qu'elle me regarderait simplement

Mais,
Ce sont seules mes lourdes paupières que j'ouvre
Encore ivre de la veille,
Aujourd’hui je suis reclus et seul
Mon châton se
Blottit contre mon corps

J'aimerais lui écrire une lettre au réveil pour
Lui dire avec mes mots des trucs qui me viennent en tête, comme
Que j'aimerais qu'elle me revienne
Heureuse et accomplie
Que le vin est abondant et les grenades fraîches là-haut parmi les montagnes
Que j'ai appris à parler sa langue, même
Que j'ai étudié une nouvelle étymologie pour la séduire une troisième fois
Que l'air est doux et mon sang en ébullition
Que la paix m'a dominé, finalement mais
Que mon amour pour elle n'a cessé d'être
Mais mon sommeil en son absence, oui
le 25 février 2023
Mon corps est jeune mais cassé un peu
Alors j'essaye de faire l'amour avec comme je peux

Ma peau est blanche contre la sienne colorée
Je fais glisser ma main au-dessus de la sienne pour la saisir

Mon sexe est usé de son utilisation abusive
Et pour lui, je ne suis qu'un énième semblable avec qui partager des draps neufs blancs

Lorsque j'embrasse ses lèvres je les mords
Je caresse son visage avec la paume de ma main droite, sa barbe
Crépite.

L'homme de l'île est éphémère à celui du continent, mais au milieu de l'océan l'un comme l'autre trouve refuge dans l'un l'autre

Je fais passer ma main par-dessus son sous-vêtement et ressens ses formes au travers
Seules mes sensations et le peu de lumière que nous offre la nuit laissent libre au reste de mon imagination

J'aimais ses yeux profonds bien que je détestais son arrogance et ses phrases
Son corps quant à lui, apportait réconciliation à ma vie de marin

Il y avait un peu de violence dans sa langue
Dans ses mains, sur la surface de ma peau
Dans ses phalanges, celles autour de mon cou

Derrière la vitre, les vagues semblaient s'agiter et la lune devenait méconnaissable
Comme si comme moi, elle masquait sa présence dans l'agitation

Je pris plaisir sur son torse et sur le moment, je me sentis invincible pourtant vulnérable
Plus **** sur le pont supérieur, penché sur la rambarde
Je fais face à la mer, je la regarde.
le 10 février 2024
Et cette brillante lune apparaissant entre les feuilles noires des arbres hauts,
Lors des nuits sourdes de la ville enclavée
Perturbées par le bruit lourd des voitures du quotidien

Cette scintillante lune est et reste impénétrable
D'une circularité exemplaire en ces jours uniques
Sa lumière vive m'éclaire et me suit
Qu'il s'agisse de l'Angleterre ou de l'Arménie
Mes pensées te reviennent, à toi ma jolie

Et la lune me montre pour la énième fois
De tes yeux, tes prunelles et ton âme
Personne n'aura veillé sur moi comme toi
Et en la nuit, j'y trouve une sérénité absolue
Comme ton oreille contre mon torse et la sensation de ton cœur contre le mien

Cette seule lune, symbole de notre amour éternel
Elle est nous et elle ne cesse de croître
Chaque nuit de plus en plus claire, de plus en plus vive
Cette impression que la nuit ne sera plus nuit
Que la nuit éteindra d'elle-même nos interrupteurs
Comme si notre amour triomphera,
Devant les yeux de tous mais dans le silence

Toi, mon amour des années passées,
Tu as fait de mes pensées ton foyer
Et je te ressens dans l'ensemble de mon être
Tu m'étourdis parfois, tu me fais perdre l'équilibre
Tu me punis parfois, de cette souffrance que je t'ai donnée, prise, puis redonnée
Tu m'infliges à vivre en journée, quand le soleil m'agresse
Mais à la nuit tombée, tu me caresses
Quand tu apparais dans le ciel, tu m'apaises
Et j'attendrai, toujours, que tu m'emmènes
Que tu me murmures avec tes paroles silencieuses
Que tu m'aimes passionnément
Que nos deux corps, vains, après leur mort
Ne seront rien de plus que poussières et os
Quant à notre amour, lui
Par le scintillement de la lune nuit et jour, éternelle
Perdurera à travers les temps, sous les yeux des hommes
Je t'ai aimé, je t'aime, et je t'aimerai
le 26 août 2021

— The End —