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Ma chatte !
Pourrais-tu me rendre un petit service ?
J'aimerais te prendre toute habillée
De pleins et de déliés
Dans le noir le plus complet de l'encre
Puisque la nudité t'effraie et te chagrine.
Mais pas n 'importe comment, ma minou !
J'aimerais te prendre déguisée,
Fardée, maquillée, parfumée, pomponnée.
J'hésite entre astronaute, religieuse dans l'ordre des Carmélites Déchaussées
Astrologue et paléontologue, déchiffreuse de hiéroglyphes.
Ah cartomancienne aussi.
Tu t'occupes, ma chatte, du déguisement du haut
Je me charge du déguisement du bas !
D'accord ? Tu veux bien ! Je t'adore !
Et toi tu veux que je me déguise en quoi ?
Ou tu préfères que je reste nu comme un ver ?
Tu te réserves le haut ou le bas ?
Ou la panoplie toute entière ?
Ah tu veux te charger de tout ?
Je te laisse faire ton choix.
Je peux incarner ce que tu veux
Ensemble ou séparément
Cowboy, homme de Néandertal ou de Cro-Magnon au choix
Curé, comme le bon curé d'Ars ou simplement pape impie
Libellule, homme grenouille, raccoon, orphie,
Oiseau-lyre ou mangouste, pharaon, dragon, E.T.
Quelle que soit la panoplie que tu choisiras pour moi
Je précise la taille : XXL
Et si d'aventure tu me choisis un masque, ma Muse
Je voudrais porter ton visage car je suis ton ombre.
Et je voudrais te regarder dans mes yeux
Et t'embrasser longuement iris contre iris.
Biorn, étrange cénobite,
Sur le plateau d'un roc pelé,
Hors du temps et du monde, habite
La tour d'un burg démantelé.

De sa porte l'esprit moderne
En vain soulève le marteau.
Biorn verrouille sa poterne
Et barricade son château.

Quand tous ont les yeux vers l'aurore
Biorn, sur son donjon perché,
A l'horizon contemple encore
La place du soleil couché.

Ame rétrospective, il loge
Dans son burg et dans le passé ;
Le pendule de son horloge
Depuis des siècles est cassé.

Sous ses ogives féodales
Il erre, éveillant les échos,
Et ses pas, sonnant sur les dalles,
Semblent suivis de pas égaux.

Il ne voit ni laïcs, ni prêtres,
Ni gentilshommes, ni bourgeois,
Mais les portraits de ses ancêtres
Causent avec lui quelquefois.

Et certains soirs, pour se distraire,
Trouvant manger seul ennuyeux,
Biorn, caprice funéraire,
Invite à souper ses aïeux.

Les fantômes, quand minuit sonne,
Viennent armés de pied en cap ;
Biorn, qui malgré lui frissonne,
Salue en haussant son hanap.

Pour s'asseoir, chaque panoplie
Fait un angle avec son genou,
Dont l'articulation plie
En grinçant comme un vieux verrou ;

Et tout d'une pièce, l'armure,
D'un corps absent gauche cercueil,
Rendant un creux et sourd murmure,
Tombe entre les bras du fauteuil.

Landgraves, rhingraves, burgraves,
Venus du ciel ou de l'enfer,
Ils sont tous là, muets et graves,
Les roides convives de fer !

Dans l'ombre, un rayon fauve indique
Un monstre, guivre, aigle à deux cous,
Pris au bestiaire héraldique
Sur les cimiers faussés de coups.

Du mufle des bêtes difformes
Dressant leurs ongles arrogants,
Partent des panaches énormes,
Des lambrequins extravagants ;

Mais les casques ouverts sont vides
Comme les timbres du blason ;
Seulement deux flammes livides
Y luisent d'étrange façon.

Toute la ferraille est assise
Dans la salle du vieux manoir,
Et, sur le mur, l'ombre indécise
Donne à chaque hôte un page noir.

Les liqueurs aux feux des bougies
Ont des pourpres d'un ton suspect ;
Les mets dans leurs sauces rougies
Prennent un singulier aspect.

Parfois un corselet miroite,
Un morion brille un moment ;
Une pièce qui se déboîte
Choit sur la nappe lourdement.

L'on entend les battements d'ailes
D'invisibles chauves-souris,
Et les drapeaux des infidèles
Palpitent le long du lambris.

Avec des mouvements fantasques
Courbant leurs phalanges d'airain,
Les gantelets versent aux casques
Des rasades de vin du Rhin,

Ou découpent au fil des dagues
Des sangliers sur des plats d'or...
Cependant passent des bruits vagues
Par les orgues du corridor.

D'une voix encore enrouée
Par l'humidité du caveau,
Max fredonne, ivresse enjouée,
Un lied, en treize cents, nouveau.

Albrecht, ayant le vin féroce,
Se querelle avec ses voisins,
Qu'il martèle, bossue et rosse,
Comme il faisait des Sarrasins.

Échauffé, Fritz ôte son casque,
Jadis par un crâne habité,
Ne pensant pas que sans son masque
Il semble un tronc décapité.

Bientôt ils roulent pêle-mêle
Sous la table, parmi les brocs,
Tête en bas, montrant la semelle
De leurs souliers courbés en crocs.

C'est un hideux champ de bataille
Où les pots heurtent les armets,
Où chaque mort par quelque entaille,
Au lieu de sang ***** des mets.

Et Biorn, le poing sur la cuisse,
Les contemple, morne et hagard,
Tandis que, par le vitrail suisse
L'aube jette son bleu regard.

La troupe, qu'un rayon traverse,
Pâlit comme au jour un flambeau,
Et le plus ivrogne se verse
Le coup d'étrier du tombeau.

Le coq chante, les spectres fuient
Et, reprenant un air hautain,
Sur l'oreiller de marbre appuient
Leurs têtes lourdes du festin !
Un slow sobre à minuit
Une robe de matadore
De mousseline et taffetas
Bleu Klein
Muse danse avec son rêve les yeux clos
Muse se blottit contre le ventre atypique du vent
Muse bouge et épouse sans calcul la transe
De ce mâle équipage
Débordant de gammes et de dièse
Muse sent monter en elle une meute de renoncules dodues
Qui mordillent et desagrafent
Sa panoplie de lune et de lumière
Comme une œuvre d'art à la roue libre,
Un tableau vivant où les sueurs s'epanchent, vont et viennent
En une pluie de rires et d'étoiles filantes
En forme de notes bleues
Jaillies de l'outre-noir de l'outre-mer
De ses reins mouillés par ce bal musette invisible mais réel.

— The End —