Tu ne vas pas me croire. Moi-même je n'en reviens pas ! Je suis traumatisé, grand brûlé, Mutilé de guerre Tout cela à cause de tes huit soeurs Tes ombres femelles, les Muses. Je te raconte, excuse les sanglots, Les spasmes, les soubresauts de ton petit oiseau orphie Dépecé, déplumé, vide de toute substance. Ratatiné. Ratiboisé. Tes fieffées soeurs, ces gredines m'ont violé ! M'entends-tu? Je ne suis plus que l'ombre de moi-même Sans tambour ni trompettes En plein tunnel de Fréjus Entre la France et l'Italie. Je ne me souviens plus très bien du début de mon calvaire : Je dormais à poings fermés Je rêvais de toi et je sentais tes paumes chaudes Qui me dorlotaient et me murmuraient des mots doux Tu disais que j'étais l'oiseau lyre L'oiseau de feu l'oiseau paon Tu voulais que je pavane En toi sur ton balcon En faisant mine de regarder les étoiles Et que comme Marlborough je m'en aille en guerre Mironton mironton mirontaine On se ravitaillait tous les deux pour supporter l'exil Et de provisions en provisions nous ne sortions plus du lit. Tu me disais "qui aime bien châtie bien" Et "quand on s'aime on sème " Et tu me châtiais de va et vient subtils Et tu semais ma semence aux quatre vents Sur les champs blancs et roses de ta chair Tu disais no nu niet Pour battre la mesure No nu niet de ta petite voix No nu niet de ta grosse voix Une caresse pour marraine Une caresse pour la Muse J'étais aux anges Je dormais du sommeil tranquille Des orphies Je croyais que c'étaient des formules bibliques Et que tu baptisais ainsi l'oiseau Nonuniet Je croyais que c'était toi, C'étaient tes ombres qui se relayaient C'étaient elles qui étaient à la manoeuvre Pour me punir de t'avoir choisie toi, mon ange, Et pas elles, ces diablesses Déguisées sous leurs masques de la comédia dell'arte. Rien ne me fut épargné sous la férule de ces Amazones A huit elles m'ont pénétré par mes neuf orifices Ou étais-tu alors Quand j'ai crié ton nom ? J'ai perdu mon dernier pucelage J'ai eu beau leur dire Vietato l'ingresso qui ! Leur dire que j'étais Cagnolo Nogerola detto Roméo Et que ma Muse à moi n'était aucune d'entre elles Mais bel et bien toi, Giulietta Cappelletti, Elles m'ont fait endurer ce que je souhaiterai pas A mon pire ennemi, foi de Montecchi. Elles m'ont tatoué la peau de long en large De phrases inintelligibles Elles ont gravé dans ma chair des choses insensées : Chiudi gli occhi e sogna, Farinelli ! Dante, ti amo ! Portami ovunque tu sia. No ! Non smettere mai di splendere con il tuo sorriso ! Nacio nustra maravilhosa historia de amor ! Gracais mi amor por compartir un viaje tan romantico ! I love you forever Elles m'ont dégusté comme on déguste Un riso venere con gamberi e crema de zafferano Elles m'ont emmaillotté de chapelets Et de litanies Elles m'ont marqué au chewing gum Comme on marque au fer rouge En me laissant leurs mots d'amour. Je me suis retrouvé au centre de l'arène Comme un gladiateur en guenilles Et j'ai chanté de ma plus belle voix de castrat Un Lascia ch'io pianga Que n'aurait pas désavoué Haendel... Me voilà à tes pieds ce matin, émasculé, Implorant ta miséricorde, Muse bienfaitrice, Je voudrais que tu me cautérises ces plaies Que tu me soignes de tes Furies de soeurs Tu me manques ! Concède-moi cent jours d'indulgence Comme délai de latence Le Ciel te le rendra au centuple ! Te saludo Mama Del nostro Dio Je sais que seul toi pourra effacer le traumatisme Me débloquer, me redonner le sourire Aurais-tu un peu de teinture d'arnica De la racine de ***** contra et un peu de cyprine Pour lentement me badigeonner?