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Et vous, l'ancienne esclave à la caresse amère,
Vous le bétail des temps antiques et charnels,
Vous, femmes, dont Jésus fit la Vierge et la Mère,
D'après Celle qui porte en ses yeux maternels
Le reflet le plus grand des rayons éternels,

Aimez ces grands enfants pendus à votre robe,
Les hommes, dont la lèvre est ivre encore du lait
De vos mamelles d'or qu'un linge blanc dérobe ;
Aimez l'homme, il est bon ; aimez-le, s'il est laid.
S'il est déshérité, c'est ainsi qu'il vous plaît.

Les hommes sont vos fruits : partagez-leur votre âme
Votre âme est comme un lait qui ne doit pas tarir,
Ô femmes, pour ces fils douloureux de la femme
Que vous faites pour vivre, hélas ! et pour souffrir ;
Que seul, le Fils de l'homme empêche de mourir !

L'enfant c'est le mystère avec lequel tu joues,
C'est l'inconnu sacré que tu portes neuf mois,
Pendant que la douleur te baise sur les joues,
Mère qui fais des gueux et toi qui fais des rois,
Vous qui tremblez toujours et mourez quelquefois.

Comme autrefois les flancs d'Eve en pleurs sous les branches,
Au jardin favorable où depuis l'amour dort,
Ton labeur est maudit ! Ceux sur qui tu te penches,
Vois, mère, le plus doux, le plus beau, le plus fort,
Il apprend l'amertume et connaîtra la mort.

C'est toi la source, ô femme, écoute, ô mère folle
D'Ésope qui boitait, de Caïn qui griffait,
Vois le fruit noir tombé de ton baiser frivole,
Savoure-le pourtant, comme un divin effet,
En noyant dans l'amour l'horreur de l'avoir fait.

Pour l'amour, tout s'enchante en sa clarté divine.
Aimez comme vos fils les hommes ténébreux ;
Leur cœur, si vous voulez, votre cœur le devine :
Le plus graves au fond sont des enfants peureux ;
Le plus digne d'amour, c'est le plus malheureux.

Eclairez ces savants, ô vous les clairvoyantes,
Ne les avez-vous pas bercés sur vos genoux,
Tout petits ? Vous savez leurs âmes défaillantes ;
Quand ils tombent, venez ; ils sont francs, ils sont doux ;
S'ils deviennent méchants, c'est à cause de vous.

C'est à cause de vous que la discorde allume
Leurs yeux, et c'est pour vous, pour vous plaire un moment
Qu'ils font couler une encre impure sous leur plume.
Cet homme si loyal, ce héros si charmant,
S'il vous adore, il tue, et sur un signe il ment.

L'heure sonne, écoutez, c'est l'heure de la femme ;
Car les temps sont venus, où, tout vêtu de noir,
L'homme, funèbre, a l'air d'être en deuil de son âme
Ah ! rendez-lui son âme, et, comme en un miroir,
Qu'il regarde en la vôtre et qu'il aime à s'y voir.

Au lieu de le tenter, comme un démon vous tente,
Au lieu de garrotter ses membres las, au lieu
De tondre sur son front sa toison éclatante,
Vous, qui foulez son cœur, et vous faites un jeu
De piétiner sa mère, et d'en dissiper Dieu,

Ôtez-lui le vin rouge où son orgueil se grise ;
Retirez-lui l'épée où se crispe sa main ;
Montrez-lui les sentiers qui mènent à l'église,
Parmi l'œillet, le lys, la rose et le jasmin ;
Faites-lui voir le vice un banal grand chemin.

Dites à ces enfants qu'il n'est pas raisonnable
De poursuivre le ciel ailleurs que dans les cieux,
De rêver d'un amour qui cesse d'être aimable,
De se rire du Maître en s'appelant des dieux,
Et de nier l'enter quand ils l'ont dans les yeux.

Cependant l'homme est roi ; s'il courbe son échine
Sur le sillon amer qu'il creuse avec ennui,
S'il traîne ses pieds lourds, le sceau de l'origine
Céleste à son front reste, où l'amour même a lui ;
Et comme il sort de Dieu, femme, tu sors de lui.

Cette paternité brille dans sa faiblesse
Autant que dans sa force ; il a l'autorité.
N'en faites pas un maître irrité qui vous blesse ;
Dans la sombre forêt de l'âpre humanité
L'homme est le chêne, et Dieu lui-même l'a planté.

Respectez ses rameaux, redoutez sa colère,
Car Dieu mit votre sort aux mains de ce proscrit.
Voyez d'abord ce blanc porteur de scapulaire,
Ce moine, votre père auprès de Jésus-Christ :
Il montre dans ses yeux le feu du Saint-Esprit.

En faisant de l'amour leur éternelle étude
Les moines sont heureux à l'ombre de la Croix ;
Ils peuplent avec Dieu leur claire solitude ;
L'étang bleu qui se mêle à la paix des grands bois,
Voilà leur cœur limpide où s'éveillent des voix.

Les apôtres menteurs et les faux capitaines
Qui soumettent les cœurs, mais que Satan soumet,
Vous les reconnaîtrez à des tares certaines :
La luxure a Luther ; l'orgueil tient Mahomet ;
Saint Jean, lui, marchait pur, aussi Jésus l'aimait.

Plus haut que les guerriers, plus haut que les poètes,
Peuple sur lequel souffle un vent mystérieux,
Dominant jusqu'au trône ébloui par les fêtes
Des empereurs blanchis aux regards soucieux,
Et par-dessus la mer des peuples furieux,

À l'ombre de sa belle et haute basilique,
Dans Rome, où vous vivez, cendres du souvenir,
Gouvernant avec fruit sa douce République,
Qu'il mène vers le seul, vers l'unique avenir,
Jaloux de ne lever la main que pour bénir,

Le prêtre luit, vêtu de blanc, comme les marbres,
Dédoublement sans lin du Christ mystérieux,
Berger, comme Abraham qui campe sous les arbres ;
Toute la vérité vieille au fond de ses yeux.
Et maintenant, paissez, long troupeau, sous les cieux.
I.

Bien ! pillards, intrigants, fourbes, crétins, puissances !
Attablez-vous en hâte autour des jouissances !
Accourez ! place à tous !
Maîtres, buvez, mangez, car la vie est rapide.
Tout ce peuple conquis, tout ce peuple stupide,
Tout ce peuple est à vous !

Vendez l'état ! coupez les bois ! coupez les bourses !
Videz les réservoirs et tarissez les sources !
Les temps sont arrivés.
Prenez le dernier sou ! prenez, gais et faciles,
Aux travailleurs des champs, aux travailleurs des villes !
Prenez, riez, vivez !

Bombance ! allez ! c'est bien ! vivez ! faites ripaille !
La famille du pauvre expire sur la paille,
Sans porte ni volet.
Le père en frémissant va mendier dans l'ombre ;
La mère n'ayant plus de pain, dénûment sombre,
L'enfant n'a plus de lait.

II.

Millions ! millions ! châteaux ! liste civile !
Un jour je descendis dans les caves de Lille
Je vis ce morne enfer.
Des fantômes sont là sous terre dans des chambres,
Blêmes, courbés, ployés ; le rachis tord leurs membres
Dans son poignet de fer.

Sous ces voûtes on souffre, et l'air semble un toxique
L'aveugle en tâtonnant donne à boire au phtisique
L'eau coule à longs ruisseaux ;
Presque enfant à vingt ans, déjà vieillard à trente,
Le vivant chaque jour sent la mort pénétrante
S'infiltrer dans ses os.

Jamais de feu ; la pluie inonde la lucarne ;
L'œil en ces souterrains où le malheur s'acharne
Sur vous, ô travailleurs,
Près du rouet qui tourne et du fil qu'on dévide,
Voit des larves errer dans la lueur livide
Du soupirail en pleurs.

Misère ! l'homme songe en regardant la femme.
Le père, autour de lui sentant l'angoisse infâme
Etreindre la vertu,
Voit sa fille rentrer sinistre sous la porte,
Et n'ose, l'œil fixé sur le pain qu'elle apporte,
Lui dire : D'où viens-tu ?

Là dort le désespoir sur son haillon sordide ;
Là, l'avril de la vie, ailleurs tiède et splendide,
Ressemble au sombre hiver ;
La vierge, rose au jour, dans l'ombre est violette ;
Là, rampent dans l'horreur la maigreur du squelette,
La nudité du ver ;

Là frissonnent, plus bas que les égouts des rues,
Familles de la vie et du jour disparues,
Des groupes grelottants ;
Là, quand j'entrai, farouche, aux méduses pareille,
Une petite fille à figure vieille
Me dit : J'ai dix-huit ans !

Là, n'ayant pas de lit, la mère malheureuse
Met ses petits enfants dans un trou qu'elle creuse,
Tremblants comme l'oiseau ;
Hélas ! ces innocents aux regards de colombe
Trouvent en arrivant sur la terre une tombe
En place d'un berceau !

Caves de Lille ! on meurt sous vos plafonds de pierre !
J'ai vu, vu de ces yeux pleurant sous ma paupière,
Râler l'aïeul flétri,
La fille aux yeux hagards de ses cheveux vêtue,
Et l'enfant spectre au sein de la mère statue !
Ô Dante Alighieri !

C'est de ces douleurs-là que sortent vos richesses,
Princes ! ces dénûments nourrissent vos largesses,
Ô vainqueurs ! conquérants !
Votre budget ruisselle et suinte à larges gouttes
Des murs de ces caveaux, des pierres de ces voûtes,
Du cœur de ces mourants.

Sous ce rouage affreux qu'on nomme tyrannie,
Sous cette vis que meut le fisc, hideux génie,
De l'aube jusqu'au soir,
Sans trêve, nuit et jour, dans le siècle où nous sommes
Ainsi que des raisins on écrase des hommes,
Et l'or sort du pressoir.

C'est de cette détresse et de ces agonies,
De cette ombre, où jamais, dans les âmes ternies,
Espoir, tu ne vibras,
C'est de ces bouges noirs pleins d'angoisses amères,
C'est de ce sombre amas de pères et de mères
Qui se tordent les bras,

Oui, c'est de ce monceau d'indigences terribles
Que les lourds millions, étincelants, horribles,
Semant l'or en chemin,
Rampant vers les palais et les apothéoses,
Sortent, monstres joyeux et couronnés de roses,
Et teints de sang humain !

III.

Ô paradis ! splendeurs ! versez à boire aux maîtres !
L'orchestre rit, la fête empourpre les fenêtres,
La table éclate et luit ;
L'ombre est là sous leurs pieds ! les portes sont fermées
La prostitution des vierges affamées
Pleure dans cette nuit !

Vous tous qui partagez ces hideuses délices,
Soldats payés, tribuns vendus, juges complices,
Évêques effrontés,
La misère frémit sous ce Louvre où vous êtes !
C'est de fièvre et de faim et de mort que sont faites
Toutes vos voluptés !

À Saint-Cloud, effeuillant jasmins et marguerites,
Quand s'ébat sous les fleurs l'essaim des favorites,
Bras nus et gorge au vent,
Dans le festin qu'égaie un lustre à mille branches,
Chacune, en souriant, dans ses belles dents blanches
Mange un enfant vivant !

Mais qu'importe ! riez ! Se plaindra-t-on sans cesse ?
Serait-on empereur, prélat, prince et princesse,
Pour ne pas s'amuser ?
Ce peuple en larmes, triste, et que la faim déchire,
Doit être satisfait puisqu'il vous entend rire
Et qu'il vous voit danser !

Qu'importe ! Allons, emplis ton coffre, emplis ta poche.
Chantez, le verre en main, Troplong, Sibour, Baroche !
Ce tableau nous manquait.
Regorgez, quand la faim tient le peuple en sa serre,
Et faites, au -dessus de l'immense misère,
Un immense banquet !

IV.

Ils marchent sur toi, peuple ! Ô barricade sombre,
Si haute hier, dressant dans les assauts sans nombre
Ton front de sang lavé,
Sous la roue emportée, étincelante et folle,
De leur coupé joyeux qui rayonne et qui vole,
Tu redeviens pavé !

À César ton argent, peuple ; à toi la famine.
N'es-tu pas le chien vil qu'on bat et qui chemine
Derrière son seigneur ?
À lui la pourpre ; à toi la hotte et les guenilles.
Peuple, à lui la beauté de ces femmes, tes filles,
À toi leur déshonneur !

V.

Ah ! quelqu'un parlera. La muse, c'est l'histoire.
Quelqu'un élèvera la voix dans la nuit noire.
Riez, bourreaux bouffons !
Quelqu'un te vengera, pauvre France abattue,
Ma mère ! et l'on verra la parole qui tue
Sortir des cieux profonds !

Ces gueux, pires brigands que ceux des vieilles races,
Rongeant le pauvre peuple avec leurs dents voraces,
Sans pitié, sans merci,
Vils, n'ayant pas de cœur, mais ayant deux visages,
Disent : - Bah ! le poète ! il est dans les nuages ! -
Soit. Le tonnerre aussi.

Le 19 janvier 1853.
Un bonhomme de mes parents,
Que j'ai connu dans mon jeune âge,
Se faisait adorer de tout son voisinage ;
Consulté, vénéré des petits et des grands,
Il vivait dans sa terre en véritable sage.
Il n'avait pas beaucoup d'écus,
Mais cependant assez pour vivre dans l'aisance ;
En revanche force vertus,
Du sens, de l'esprit par-dessus,
Et cette aménité que donne l'innocence.
Quand un pauvre venait le voir,
S'il avait de l'argent, il donnait des pistoles ;
Et s'in n'en avait point, du moins par ses paroles
Il lui rendait un peu de courage et d'espoir.
Il raccommodait les familles,
Corrigeait doucement les jeunes étourdis,
Riait avec les jeunes filles,
Et leur trouvait de bons maris.
Indulgent aux défauts des autres,
Il répétait souvent : n'avons-nous pas les nôtres ?
Ceux-ci sont nés boiteux, ceux-là sont nés bossus,
L'un un peu moins, l'autre un peu plus :
La nature de cent manières
Voulut nous affliger : marchons ensemble en paix ;
Le chemin est assez mauvais
Sans nous jeter encor des pierres.
Or il arriva certain jour
Que notre bon vieillard trouva dans une tour
Un trésor caché sous la terre.
D'abord il n'y voit qu'un moyen
De pouvoir faire plus de bien ;
Il le prend, l'emporte et le serre.
Puis, en réfléchissant, le voilà qui se dit :
Cet or que j 'ai trouvé ferait plus de profit
Si j'en augmentais mon domaine ;
J'aurais plus de vassaux, je serais plus puissant.
Je peux mieux faire encor : dans la ville prochaine
Achetons une charge, et soyons président.
Président ! Cela vaut la peine.
Je n'ai pas fait mon droit ; mais, avec mon argent,
On m'en dispensera, puisque cela s'achète.
Tandis qu'il rêve et qu'il projette,
Sa servante vient l'avertir
Que les jeunes gens du village
Dans la cour du château sont à se divertir.
Le dimanche, c'était l'usage,
Le seigneur se plaisait à danser avec eux.
Oh ! Ma foi, répond-il, j'ai bien d'autres affaires ;
Que l'on danse sans moi. L'esprit plein de chimères,
Il s'enferme tout seul pour se tourmenter mieux.
Ensuite il va joindre à sa somme
Un petit sac d'argent, reste du mois dernier.
Dans l'instant arrive un pauvre homme
Qui tout en pleurs vient le prier
De vouloir lui prêter vingt écus pour sa taille :
Le collecteur, dit-il, va me mettre en prison,
Et n'a laissé dans ma maison
Que six enfants sur de la paille.
Notre nouveau Crésus lui répond durement
Qu'il n'est point en argent comptant.
Le pauvre malheureux le regarde, soupire,
Et s'en retourne sans mot dire.
Mais il n'était pas ****, que notre bon seigneur
Retrouve tout-à-coup son cœur ;
Il court au paysan, l'embrasse,
De cent écus lui fait don,
Et lui demande encor pardon.
Ensuite il fait crier que sur la grande place
Le village assemblé se rende dans l'instant.
On obéit : notre bonhomme
Arrive avec toute sa somme,
En un seul monceau la répand.
Mes amis, leur dit-il, vous voyez cet argent :
Depuis qu'il m'appartient, je ne suis plus le même,
Mon âme est endurcie et la voix du malheur
N'arrive plus jusqu'à mon cœur.
Mes enfants, sauvez-moi de ce péril extrême ;
Prenez et partagez ce dangereux métal ;
Emportez votre part chacun dans votre asile ;
Entre tous divisé, cet or peut être utile ;
Réuni chez un seul, il ne fait que du mal.
Soyons contents du nécessaire
Sans jamais souhaiter de trésors superflus :
Il faut les redouter autant que la misère,
Comme elle ils chassent les vertus.
Mayte Sep 2019
Leurs imaginations conservent toujours l'espoir
De comprendre la signification de ce grand voyage
Peut être un jour ils se retrouveront
A l'endroit où le calme et l’ innocence l’emportent

Vite!, résolvez vos énigmes
Vite!, avant que la lumière dans vos yeux ne s'éteigne
Découvrez dans vos rides,
Les secrets bien gardés de la vie et de la mémoire

Pour vous, le temps n'est qu'un simple mot
Un oiseau qui a depuis longtemps débuté son vol
Les beaux moments peu à peu disparaissent
Comme un petit bateau au **** dans l'horizon

Ne trouvez vous pas que c'est affreux?
De se détacher lentement de son corps
Par l'absence de vie et l'excès de vide

Et d'essayer de trouver une place dans ce monde
En étant si désactualisé?

Ne partez pas encore, on vous en prie
Laissez nous le temps d'y réfléchir
Partagez avec nous vos découvertes
Et les ombres et démons que vous avez libérés

— The End —