Pour boire dessus l'herbe tendre Je veux sous un laurier m'étendre, Et veux qu'Amour, d'un petit brin Ou de lin ou de chènevière Trousse au flanc sa robe légère, Et, mi-nue, me verse du vin.
L'incertaine vie de l'homme De jour en jour se roule comme Aux rives se roulent les flots : Puis après notre heure dernière Rien de nous ne reste en la bière Qu'une vieille carcasse d'os.
Je ne veux, selon la coutume, Que d'encens ma tombe on parfume, Ni qu'on y verse des odeurs ; Mais tandis que je suis en vie, J'ai de me parfumer envie, Et de me couronner de fleurs,
De moi-même je me veux faire L'héritier pour me satisfaire ; Je ne veux vivre pour autrui. Fol le Pélican qui se blesse Pour les siens, et fol qui se laisse Pour les siens travailler d'ennui.