Un auteur se plaignait que ses meilleurs écrits Etaient rongés par les souris. Il avait beau changer d'armoire, Avoir tous les pièges à rats Et de bons chats, Rien n'y faisait : prose, vers, drame, histoire, Tout était entamé ; les maudites souris Ne respectaient pas plus un héros et sa gloire, Ou le récit d'une victoire, Qu'un petit bouquet à Chloris. Notre homme au désespoir, et, l'on peut bien m'en croire, Pour y mettre un auteur peu de chose suffit, Jette un peu d'arsenic au fond de l'écritoire ; Puis, dans sa colère, il écrit. Comme il le prévoyait, les souris grignotèrent, Et crevèrent. C'est bien fait, direz-vous ; cet auteur eut raison. Je suis **** de le croire : il n'est point de volume Qu'on n'ait mordu, mauvais ou bon ; Et l'on déshonore sa plume En la trempant dans du poison.