Pardonnez-moi, Seigneur, mon visage attristé, Vous qui l'aviez formé de sourire et de charmes ; Mais sous le front joyeux vous aviez mis les larmes, Et de vos dons, Seigneur, ce don seul m'est resté.
C'est le mois envié, c'est le meilleur peut-être : Je n'ai plus à mourir à mes liens de fleurs ; Ils vous sont tous rendus, cher auteur de mon être, Et je n'ai plus à moi que le sel de mes pleurs.
Les fleurs sont pour l'enfant ; le sel est pour la femme ; Faites-en l'innocence et trempez-y mes jours. Seigneur ! quand tout ce sel aura lavé mon âme, Vous me rendrez un coeur pour vous aimer toujours !
Tous mes étonnements sont finis sur la terre, Tous mes adieux sont faits, l'âme est prête à jaillir, Pour atteindre à ses fruits protégés de mystère Que la pudique mort a seule osé cueillir,
Ô Sauveur ! soyez tendre au moins à d'autres mères, Par amour pour la vôtre et par pitié pour nous ! Baptisez leurs enfants de nos larmes amères, Et relevez les miens tombés à vos genoux !
Que mon nom ne soit rien qu'une ombre douce et vaine, Qu'il ne cause jamais ni l'effroi ni la peine ! Qu'un indigent l'emporte après m'avoir parlé Et le garde longtemps dans son coeur consolé !