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(À Brunette, le chien de Sophie.)


Objet si cher à ma Sophie,
Toi que nourrit sa belle main,
Toi qui passes toute ta vie
Entre ses genoux et son sein ;
Que ton sort, heureuse Brunette,
Hélas ! est différent du mien !
En amant elle traite un chien,
En chien, c'est l'amant qu'elle traite.

Et pourtant, cette préférence
Qui peut te l'obtenir sur moi ?
Ai-je moins de persévérance,
Moins de fidélité que toi ?
De mes fers **** que je m'échappe,
Enchaîné sans aucuns liens,
Toujours battu, toujours je viens
Baiser cette main qui me frappe.

Le pur sentiment qui m'enflamme
Vaut ton instinct, s'il ne vaut mieux ;
Et le feu qui brûle en mon âme
Vaut le feu qui brille en tes yeux :
Mais près de ma beauté suprême
Je suis trop coupable en effet,
Quand je hais tout ce qu'elle hait,
De n'aimer pas tout ce qu'elle aime.

Dans le dépit qui me transporte,
Souvent je ne connais plus rien.
Le grelot que Brunette porte
Serait mieux à mon cou qu'au sien.
Soins, constance, pleurs, sacrifice,
Je vous crois perdus sans retour :
Je n'espère plus de l'amour ;
Mais j'espère encor du caprice.

Écrit en 1792.
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