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A Ernest Raynaud


Couché dans l'herbe pâle et froide de l'exil,

Sous les ifs et les pins qu'argente le grésil,

Ou bien errant, semblable aux formes que suscite

Le rêve, par l'horreur du paysage scythe,

Tandis qu'autour, pasteurs de troupeaux fabuleux,

S'effarouchent les blancs Barbares aux yeux bleus,

Le poète de l'art d'Aimer, le tendre Ovide

Embrasse l'horizon d'un long regard avide

Et contemple la mer immense tristement.


Le cheveu poussé rare et gris que le tourment

Des bises va mêlant sur le front qui se plisse,

L'habit troué livrant la chair au froid, complice,

Sous l'aigreur du sourcil tordu l'œil terne et las,

La barbe épaisse, inculte et presque blanche, hélas

Tous ces témoins qu'il faut d'un deuil expiatoire

Disent une sinistre et lamentable histoire

D'amour excessif, d'âpre envie et de fureur

Et quelque responsabilité d'Empereur.

Ovide morne pense à Rome et puis encore

À Rome que sa gloire illusoire décore.


Or, Jésus ! vous m'avez justement obscurci :

Mais n'étant pas Ovide, au moins je suis ceci.
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