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Voici le trou, voici l'échelle. Descendez.
Tandis qu'au corps de garde en face on joue aux dés
En riant sous le nez des matrones bourrues,
Laissez le crieur rauque, assourdissant les rues,
Proclamer le numide ou le dace aux abois,
Et, groupés sous l'auvent des échoppes de bois,
Les savetiers romains et les marchandes d'herbes
De la Minerve étrusque échanger les proverbes ;
Descendez.

Vous voilà dans un lieu monstrueux.
Enfer d'ombre et de boue aux porches tortueux,
Où les murs ont la lèpre, où, parmi les pustules,
Glissent les scorpions mêlés aux tarentules.
Morne abîme !

Au-dessus de ce plafond fangeux,
Dans les cieux, dans le cirque immense et plein de jeux,
Sur les pavés sabins, dallages centenaires,
Roulent les chars, les bruits, les vents et les tonnerres ;
Le peuple gronde ou rit dans le forum sacré ;
Le navire d'Ostie au port est amarré,
L'arc triomphal rayonne, et sur la borne agraire
Tettent, nus et divins, Rémus avec son frère
Romulus, louveteaux de la louve d'airain ;
Non ****, le fleuve Tibre épand son flot serein,
Et la vache au flanc roux y vient boire, et les buffles
Laissent en fils d'argent l'eau tomber de leurs mufles.

Le hideux souterrain s'étend dans tous les sens ;
Il ouvre par endroits sous les pieds des passants
Ses soupiraux infects et flairés par les truies ;
Cette cave se change en fleuve au temps des pluies
Vers midi, tout au bord du soupirail vermeil,
Les durs barreaux de fer découpent le soleil,
Et le mur apparaît semblable au dos des zèbres
Tout le reste est miasme, obscurité, ténèbres
Par places le pavé, comme chez les tueurs,
Paraît sanglant ; la pierre a d'affreuses sueurs
Ici l'oubli, la peste et la nuit font leurs œuvres
Le rat heurte en courant la taupe ; les couleuvres
Serpentent sur le mur comme de noirs éclairs ;
Les tessons, les haillons, les piliers aux pieds verts,
Les reptiles laissant des traces de salives,
La toile d'araignée accrochée aux solives,
Des mares dans les coins, effroyables miroirs,
Où nagent on ne sait quels êtres lents et noirs,
Font un fourmillement horrible dans ces ombres.
La vieille hydre chaos rampe sous ces décombres.
On voit des animaux accroupis et mangeant ;
La moisissure rose aux écailles d'argent
Fait sur l'obscur bourbier luire ses mosaïques
L'odeur du lieu mettrait en fuite des stoïques
Le sol partout se creuse en gouffres empestés
Et les chauves-souris volent de tous côtés
Comme au milieu des fleurs s'ébattent les colombes.
On croit, dans cette brume et dans ces catacombes,
Entendre bougonner la mégère Atropos ;
Le pied sent dans la nuit le dos mou des crapauds ;
L'eau pleure ; par moments quelque escalier livide
Plonge lugubrement ses marches dans le vide.
Tout est fétide, informe, abject, terrible à voir.
Le charnier, le gibet, le ruisseau, le lavoir,
Les vieux parfums rancis dans les fioles persanes,
Le lavabo vidé des pâles courtisanes,
L'eau lustrale épandue aux pieds des dieux menteurs,
Le sang des confesseurs et des gladiateurs,
Les meurtres, les festins, les luxures hardies,
Le chaudron renversé des noires Canidies,
Ce que Trimalcion ***** sur le chemin,
Tous les vices de Rome, égout du genre humain,
Suintent, comme en un crible, à travers cette voûte,
Et l'immonde univers y filtre goutte à goutte.
Là-haut, on vit, on teint ses lèvres de carmin,
On a le lierre au front et la coupe à la main,
Le peuple sous les fleurs cache sa plaie impure
Et chante ; et c'est ici que l'ulcère suppure.
Ceci, c'est le cloaque, effrayant, vil, glacé.
Et Rome tout entière avec tout son passé,
Joyeuse, souveraine, esclave, criminelle,
Dans ce marais sans fond croupit, fange éternelle.
C'est le noir rendez-vous de l'immense néant ;
Toute ordure aboutit à ce gouffre béant ;
La vieille au chef branlant qui gronde et qui soupire
Y vide son panier, et le monde l'empire.
L'horreur emplit cet antre, infâme vision.
Toute l'impureté de la création
Tombe et vient échouer sur cette sombre rive.
Au fond, on entrevoit, dans une ombre où n'arrive
Pas un reflet de jour, pas un souffle de vent,
Quelque chose d'affreux qui fut jadis vivant,
Des mâchoires, des yeux, des ventres, des entrailles,
Des carcasses qui font des taches aux murailles
On approche, et longtemps on reste l'œil fixé
Sur ce tas monstrueux, dans la bourbe enfoncé,
Jeté là par un trou redouté des ivrognes,
Sans pouvoir distinguer si ces mornes charognes
Ont une forme encor visible en leurs débris,
Et sont des chiens crevés ou des césars pourris.

Jersey, le 30 avril 1853.
Patty P Jul 2018
The planes in the sky look dwarf size, compare to the large skies.
Swallowing the blue atheist clouds
all spotless
as the ocean sparkles, flirting with the blazing sun, flirting with sailing ships as they smoothly take their leave.
Hypnotizing the captains onto their long journey on this massive 70% part of water they are on.
they are seen somewhere along the lines of the horizon
in the Atlantic ocean leaving with the sun at 7:52 PM  with 17 seconds.
The black haired beauty is seen, with a beige round hat wearing a long black dress, fleeing into the black hole sun.

                     ***************                 
­Les avions dans le ciel ressemblent à la taille des nains, comparés aux grands cieux.
Avaler les nuages ​​athées bleus
tout impeccable
alors que l'océan scintille, flirtant avec le soleil flamboyant, flirtant avec des voiliers alors qu'ils partent tranquillement.
Hypnotiser les capitaines sur leur long voyage sur cette énorme partie de soixante dix pour cent d'eau qu'ils sont.
ils sont vus quelque part le long des lignes de l'horizon
dans l'océan Atlantique laissant au soleil à 19h52 avec 17 secondes.
On voit la beauté aux cheveux noirs, avec un chapeau rond beige portant une longue robe noire, fuyant dans le soleil du trou noir.
solenn fresnay Mar 2012
Je ne sais plus quel jour nous sommes
J'ai peur du temps qui passe, qu'il s'en aille et me laisse, toute seule et toute bleue, la corde au cou, pendue au cerisier, du gravier plein la bouche
Ce n'est pas moi la folle mais bien toi et juste toi
Écoute mon cri
Compare-le à ton silence, à tes mensonges
C’est bon, tellement bon, d’écrire sur ta musique
J’ai peur de perdre la tête
JE VAIS PERDRE LA TETE
Il y a Kerouac, ses mots, tes mots et encore Kerouac
Il y a l’espoir, aussi
L’espoir sur ta musique
J’écris à en perdre la tête
JE VAIS PERDRE LA TETE
Mais cela ne m’appartient plus, tu ne m’appartiens plus et je voudrais tant m’endormir dans tes bras sur mon sofa rouge
M’endormir avec toi, m’endormir dans tes bras et juste, s’il te plaît, que ton prochain appel soit celui qui m’avertira de ta mort.
Personne ne peut comprendre
Qu’il ne comprend rien
Je ne me sens pas très bien ce soir
J’écris, mais je n’ai pas la tête suffisamment hors de mon corps
Je n’attends plus rien
Ne m’attends plus à rien
Je voudrais que ça s’arrête
Çà va s’arrêter
Je ne savais pas
Je n’avais pas compris
Je vais me faire cuire du riz
Je voudrais disparaître maintenant
Fais-moi disparaître
Car tout à jamais t’appartiendra
Y compris mon cadavre dans le fossé.

Ce n'est pas moi la folle mais toi et juste toi
Désolée d'avoir dû te couper la tête.

Maintenant que le trou s'est refermé
Que le vide s'est rempli
Je me tais pour toujours.

Je ne me sens vraiment pas bien
J’écris sans exister, à me tapoter le thymus dans un vide noirâtre et purulent
Mais ça va aller
Bien sûr que ça va aller
Je suis bien plus forte que le néant.

Laisse- moi disparaître.
John F McCullagh Oct 2015
Jeudi, 21 Février, 1788, NYC

Il a été dit que la science progresse un décès à la fois. Pour Jeune Docteur Richard Bayley, professeur aspirant des études anatomiques, ce fut littéralement le cas. Il avait besoin d'un approvisionnement constant de cadavres récemment décédés pour ses recherches, et ce fut la raison pour laquelle il était là, la négociation avec les trois voleurs de corps dans le sous-sol de l'hôpital de New York.
"Il ya une jeune femme, Margaret La Stella, décédé jeudi dernier, et qui repose dans le complot de sa famille dans le cimetière de l'église de la Trinité." Ceci est le corps, je dois, pour ma recherche, et je suis prêt à payer le taux en vigueur pour vos services. "
Quel improbable trio étaient ces hommes debout avec lui. Leur chef, James, était un géant d'un homme robuste, près de six pieds de haut, ses deux compagnons étaient des nains par comparaison, à peine cinq pieds chacun. "Rafe ici est un bon pour crocheter les serrures sur les portes de fer et Alfie est rapide avec une pelle en bois. Il les ressuscite dans une hâte: «Je vais pousser le corps dans une brouette et de vous rencontrer de retour ici pour livrer la marchandise et récupérer notre argent. Vous aurez à payer un peu plus que vous le feriez pour un pauvre ou un nègre ".
Il était une négociation rapide et le docteur assez rapidement convenu à son prix, laissant James à se demander si il aurait dû demander plus. Eh bien, une bonne affaire est une bonne affaire, et une médaille d'or chacun Guinée était bon salaire pour un travail obscur de la nuit.
Ils défilaient sur puis, laissant le jeune Richard à ses pensées. Bientôt, très bientôt, il serait de nouveau afficher Margaret. Bientôt son corps allait abandonner ses secrets pour lui et il serait apprendre la mort avait pris celle qui avait été si belle et si jeune. Il n'y avait rien à faire pour lui maintenant, sauf à attendre. Il est assis avec une tasse de thé et a tenté de se distraire avec le journal du soir.
Body Snatchers, ou Resurrectionists, comme ils préfèrent être appelés, sont en mauvaise réputation en cette année de notre Seigneur 1788. gens souhaitent en général tourner un oeil aveugle quand le corps de certains pauvre a fini sur la table de dissection. Un bien faire femme blanche avec une famille était généralement prévu pour se reposer tranquillement. Encore James et ses deux petits complices connaissaient leur entreprise et vous faire le travail rapide de celui-ci sur cette nuit.
James arrêta son cheval et le chariot bien en deçà de la Trinité, ne voulant pas porter trop d'attention à eux. Il serait monter la garde à la porte du cimetière avec une brouette tandis que ses deux complices petits glissa à l'intérieur et fixés au corps.
Trinity Church cimetière était à côté du site de l'ancienne église qui avait brûlé dans le grand incendie de New York du 76 '. Le doyen actuel de l'église avait accumulé des fonds destinés à la construction d'un second, plus grandiose église de la Trinité, mais encore la construction avait pas encore commencé. L'absence de l'église physique devrait signifier pas de gardien et un cimetière qui serait totalement déserte sur une nuit la mi-hiver froid. Avec seulement une lune décroissante pour l'éclairage, les trois hommes étaient dépendants de lanternes à main qui ont donné peu de lumière et à côté de pas de chaleur lorsque les vents du sud de Manhattan serraient à la gorge comme un spectre vengeur.
"Et c'est parti. Rafe se rendre au travail cueillette de la serrure, tandis que je l'aide avec Alfe la bêche et les couvertures. "
«Je vais avoir besoin d'une longueur de corde, trop mate, à nouer autour du corps et le faire glisser le long de la tombe."
Ils ont été surpris par le cri plaintif d'un grand corbeau noir qui a été perché sur la porte du cimetière de fer et qui semblait être en regardant leurs activités avec curiosité et méfiance.
«Je dois la porte ouverte, allez, Alfe, je ne veux pas être là plus longtemps que je le dois."
James regarda les deux hommes petits happés leurs lanternes et des outils et ont disparu dans les ombres du cimetière de Trinity.
Ils ont trouvé la tombe récemment fini de la fille La Stella rapidement, et Alfe commencé tout de suite avec sa pelle de bois pour creuser le cercueil de son lieu de repos temporaire. Il a travaillé tranquillement, mais ses travaux ne vont pas complètement inaperçu.
"Mate, Prêtez-moi un coup de main et nous allons la faire sortir d'ici. Jetez la corde ".
Rafe a fait comme il a été soumissionné. Il a également ouvert sa lanterne et l'agita en un signal à James que le travail était presque terminé. James n'a cependant pas été le seul qui a vu le signal.
Comme le corps a été exhumé une lueur d'or attira l'attention de Alfe. Je t avais un anneau sur les cadavres quitté l'annulaire.
Grave voler était considéré comme une infraction plus grave que trafic de cadavres, mais sûrement pas l'un allait remarquer petit anneau d'or disparu. Quoi qu'il en soit ce corps allait retrouver tell disséqué et articulé, il avait entendu on fait bouillir la chair de l'os de fournir un squelette complet pour l'étude. Personne ne les payait pas assez d'argent à son retour ici quand le bon docteur avait fini avec son travail.

Était-ce juste imagination- de Alfe ou fait froid main morte des cadavres lui semblent se battre pour l'anneau avant qu'il arracha libre. Immédiatement, cependant, toutes les pensées de l'or est devenu secondary- il y avait des problèmes en cours de réalisation
"Vous là, montrez-moi vos mains!" Il y avait un garde dans les motifs de la chancellerie, un peu de malchance qu'ils avaient pas compté sur. Rafe, pas un héros, sa réaction immédiate a été de tourner et courir. Il lâcha la corde et le corps de la jeune fille se laissa retomber dans le trou, près de piégeage Alfe dans une étreinte indésirables.
Alfe bondit de la tombe ouverte et renversé le grand mince tombe garde qui semblait un peu plus d'un squelette lui-même. Il a entendu le crieur public dans la distance la sonnette d'alarme. Alfe a abandonné toute idée de récupérer le corps de la jeune fille et avait l'intention d'évasion. Comme il sauta de la porte, il pouvait entendre la garde frénétiquement essayant de charger son fusil. Alfe besoin de plus de distance. Il a dû se rendre à James à la porte.

Un fusil à âme lisse est une arme la plus fiable et à beaucoup plus que 100 verges pour atteindre un succès était plus de chance que d'habileté. Alfe entendit à peine la décharge de l'arme, mais la douleur dans son dos était difficile à ignorer. James l'a attrapé avant qu'il ne tombe, mais il est vite devenu évident pour les deux que Alfe ne fallut pas longtemps pour ce monde.
James et Rafe ont travaillé rapidement pour obtenir Alfe dans la brouette et le roue de l'écart. Le gardien tentait de recharger mais la distance et l'obscurité devenait leur ami. Il ne serait pas obtenir un deuxième coup avant qu'ils ont fait à la voiture.
Pour le docteur Bayley il semblait que les Resurrectionists étaient de retour plus tôt que prévu il, mais le corps dans la couverture était pas le corps qu'il avait prévu de recevoir.

«Il y avait un garde posté à la chancellerie en face du cimetière. Il faut avoir vu l'un de nos lanternes et est sorti pour enquêter. Il descendit un coup à nous pauvres Alfe obtenu dans le dos. "
Richard regarda par-dessus le corps de Alfe, le nouveau sujet du Royaume des morts. «Combien voulez-vous pour ce corps?" Ils ont conclu rapidement leur affaire, James ne fait pas tout à fait aussi bien qu'il aurait pour le corps de la jeune femme, mais divisées deux façons il serait suffisant pour obtenir de lui un endroit pour dormir et nourriture et la boisson en plus. Alfe allait être un homme difficile à remplacer, mais il y avait beaucoup d'hommes durs bas près des docks qui feraient le travail et ne pas trop parler aux mauvaises personnes.
Il pensait qu'il ne serait pas bientôt d'accord pour ouvrir la tombe d'un dame. Les corps des pauvres ne sont pas si étroitement participé.

Bientôt Docteur Bayley avait le corps d'Alfe déshabillé et lavé et prêt sur la table. Dans sa vie relativement brève ce corps avait rarement eu assez à manger et trop de gin à boire. Les dents qui lui restaient étaient jauni et il y avait des signes de maladie des gencives. Richard était sur le point de faire la première incision dans la poitrine quand il a remarqué une lueur d'or dans la main droite crispée.

Il était un anneau; il était la même bague qu'il avait donné sa Margaret quelques semaines avant. Juste quelques semaines avant la mort l'avait prise de lui. Il ne savait pas qu'elle avait été enterré avec lui. Richard a tenu le petit anneau dans sa main et a commencé à pleurer amèrement, dans la connaissance cruelle qu'il ne reverrait jamais son visage, pas dans cette vie ou la prochaine.
A short story, in French, based on a grave robbery that took place on Thursday February 21, 1788 in Trinity graveyard in New York City.
M Solav Sep 2018
La porte qui claque
A creusé un trou
Plus noir que noir
Dans le silence
De ta mémoire.

Le silence qui frappe -
Qui luit partout -
Quand vient le soir,
Il plaie les panses
Et te rend fou.

Ces plaies ouvertes
Se taisent et pleurent;
Le vacarme discret
Te couvre de secousses
Et disparaît.

Enveloppé dans tes draps,
La lumière devenue ligne,
Une porte entre-ouverte -
Tu voudrais qu'elle t’explique
Cet état d'alerte.

Le temps fait violence
Mais s'apaise comme le vent.
Très vite tu t'endors,
Et les mots se font tendre
Arrivé à bon port.

La veille se couvre d'un voile
Enroulé sur tes nuits.
Toujours l'éclat de noirceur
Qui alors t'attaqua
Luira sur ta vie.
Écrit en janvier 2018 sous le titre « Trauma ».


— Droits d'auteur © M. Solav —
www.msolav.com

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__________
Quand je mourrai, ce soir peut-être,
Je n'ai pas de jour préféré,
Si je voulais, je suis le maître,
Mais... ce serait mal me connaître,
N'importe, enfin, quand je mourrai.

Mes chers amis, qu'on me promette
De laisser le bois... au lapin,
Et, s'il vous plaît, qu'on ne me mette
Pas, comme une simple allumette,
Dans une boîte de sapin ;

Ni, comme un hareng, dans sa tonne ;
Ne me couchez pas tout du long,
Pour le coup de fusil qui tonne,
Dans la bière qu'on capitonne
Sous sa couverture de plomb.

Car, je ne veux rien, je vous jure ;
Pas de cercueil ; quant au tombeau,
J'y ferais mauvaise figure,
Je suis peu fait pour la sculpture,
Je le refuse, fût-il beau.

Mon vœu jusque-là ne se hausse ;
Ça me laisserait des remords,
Je vous dis (ma voix n'est pas fausse) :
Je ne veux pas même la fosse,
Où sont les lions et les morts.

Je ne suis ni puissant ni riche,
Je ne suis rien que le toutou,
Que le toutou de ma Niniche ;
Je ne suis que le vieux caniche
De tous les gens de n'importe où.

Je ne veux pas que l'on m'enferre
Ni qu'on m'enmarbre, non, je veux
Tout simplement que l'on m'enterre,
En faisant un trou... dans ma Mère,
C'est le plus ardent de mes vœux.

Moi, l'enterrement qui m'enlève,
C'est un enterrement d'un sou,
Je trouve ça chic ! Oui, mon rêve,
C'est de pourrir, comme une fève ;
Et, maintenant, je vais dire où.

Eh ! pardieu ! c'est au cimetière
Près d'un ruisseau (prononcez l'Ar),
Du beau village de Pourrière
De qui j'implore une prière,
Oui, c'est bien à Pourrières, Var.

Croisez-moi les mains sous la tête,
Qu'on laisse mon œil gauche ouvert ;
Alors ma paix sera complète,
Vraiment je me fais une fête
D'être enfoui comme un pois vert.

Creusez-moi mon trou dans la terre,
Sous la bière, au fond du caveau,
Où tout à côté de son père,
Dort déjà ma petite mère,
Madame Augustine Nouveau.

Puis... comblez-moi de terre... fine,
Sur moi, replacez le cercueil ;
Que comme avant dorme Augustine !
Nous dormirons bien, j'imagine,
Fût-ce en ne dormant... que d'un œil.

Et... retournez-la sur le ventre,
Car, il ne faut oublier rien,
Pour qu'en son regard le mien entre,
Nous serons deux tigres dans l'antre
Mais deux tigres qui s'aiment bien.

Je serai donc avec les Femmes
Qui m'ont fait et qui m'ont reçu,
Bonnes et respectables Dames,
Dont l'une sans cœur et sans flammes
Pour le fruit qu'elles ont conçu.

Ah ! comme je vais bien m'étendre,
Avec ma mère sur mon nez.
Comme je vais pouvoir lui rendre
Les baisers qu'en mon âge tendre
Elle ne m'a jamais donnés.

Paix au caveau ! Murez la porte !
Je ressuscite, au dernier jour.
Entre mes bras je prends la Morte,
Je m'élève d'une aile forte,
Nous montons au ciel dans l'Amour.

Un point... important... qui m'importe,
Pour vous ça doit vous être égal,
Je ne veux pas que l'on m'emporte
Dans des habits d'aucune sorte,
Fût-ce un habit de carnaval.

Pas de suaire en toile bise...
Tiens ! c'est presque un vers de Gautier ;
Pas de linceul, pas de chemise ;
Puisqu'il faut que je vous le dise,
Nu, tout nu, mais nu tout entier.

Comme sans fourreau la rapière,
Comme sans gant du tout la main,
Nu comme un ver sous ma paupière,
Et qu'on ne grave sur leur pierre,
Qu'un nom, un mot, un seul, GERMAIN.

Fou de corps, fou d'esprit, fou d'âme,
De cœur, si l'on veut de cerveau,
J'ai fait mon testament, Madame ;
Qu'il reste entre vos mains de femme,
Dûment signé : GERMAIN NOUVEAU.
¡Para el que sufre como yo he sufrido,
para el cansado corazón ya huérfano,
para el triste ya inerme ante la vida,
bendito agujero *****!

¡Para el que pierde lo que yo he perdido
(luz de su luz y hueso de sus huesos),
para el que ni recobra ya ni olvida,
bendito agujero *****!

¡Agujero sin límites, gigante
y medroso agujero,
cómo intriga a los tontos y a los sabios
la insondabilidad de tu misterio!

¡Mas si hay alma, he de hallar la suya errante;
si no, en la misma nada fundiremos
nuestras áridas bocas, ya sin labios,
en tu regazo, fúnebre agujero!
Noirs dans la neige et dans la brume,
Au grand soupirail qui s'allume,
Leurs culs en rond,

A genoux, cinq petits, - misère ! -
Regardent le Boulanger faire
Le lourd pain blond.

Ils voient le fort bras blanc qui tourne
La pâte grise et qui l'enfourne
Dans un trou clair.

Ils écoutent le bon pain cuire.
Le Boulanger au gras sourire
Grogne un vieil air.

Ils sont blottis, pas un ne bouge,
Au souffle du soupirail rouge
Chaud comme un sein.

Quand pour quelque médianoche,
Façonné comme une brioche
On sort le pain,

Quand, sous les poutres enfumées,
Chantent les croûtes parfumées
Et les grillons,

Que ce trou chaud souffle la vie,
Ils ont leur âme si ravie
Sous leurs haillons,

Ils se ressentent si bien vivre,
Les pauvres Jésus pleins de givre,
Qu'ils sont là tous,

Collant leurs petits museaux roses
Au treillage, grognant des choses
Entre les trous,

Tout bêtes, faisant leurs prières
Et repliés vers ces lumières
Du ciel rouvert,

Si fort qu'ils crèvent leur culotte
Et que leur chemise tremblote
Au vent d'hiver.
Huit millisecondes
Huit infimes millisecondes
Voici tout ce que Muse
M'a laissé entrevoir
De sa vulve.
Etait-ce par inadvertance
Par bravade ou en toute innocence
Qu'elle m'a autorisé ce jour-là
A me rincer l 'oeil
A travers le trou de la serrure
De mon portable
Alors qu'elle finissait son bain
Et allait se sécher?
Huit millisecondes
De peep show
Qui ont effacé tous les nu non niet
Nee nein não no
Huit millisecondes
Que depuis j'essaie de visualiser à nouveau au ralenti.

En vain.
Rien n'y fait
Muse est de marbre de Carrare.
Inflexible. Intransigeante.
Décidément Muse n 'est pas exhibitionniste.

J 'ai pourtant tout fait pour l 'amadouer.
Je lui dis je veux j 'exige
je la supplie, je lui joue de ma cornemuse
je me mets à genoux, je boude
je lui promets l'enfer et le paradis
Je fais ma grosse voix
je suis saint Thomas
je ne crois que ce que je vois
J 'ai tout fait pour la convaincre.
C'est une chatte comme toutes les chattes, me dit-elle
et moi je lui réponds : non c'est une sainte chatte diablesse
Elle me parle de foi et me jure qu'on ne voit bien qu'avec le coeur.
et pas avec la queue.
Fort bien. J 'ai donc décidé
De regarder la chatte de Muse avec le coeur
Aveugle et scientifique
Au ralenti de mon télescope électronique .
Et savez-vous ce que j 'ai découvert ?
Je vous le donne en mille.
La vulve de ma muse est un vrai diaporama !
La vulve de ma muse est écomorphe !
En un mot pour faire court
La vulve de ma muse a 88 nuances de vulve !
Du mons ***** aux ***** minora
Des ***** majora au *******
des glandes de Bartholin à l 'introïtus
Ma muse c'est quatre-vingt-huit vulves en une !
Toutes de la même espèce rare de vulvae anolis
Mais aux niches, couleurs, mucus et formes fort différents
En fonction de leur environnement et de leurs prédateurs.

Quand je fais l 'iguane
et que je m'approche trop d'elle
La vulve de Muse se perche
Dans les hautes sphères de la canopée
elle est verte alors et se confond avec le feuillage
Tel un zandoli vert
bien malin qui pourrait la voir.

Lors des grosses canicules elle devient marron
elle a soif , se faufile dans le tronc des arbres
A la recherche de la fraîcheur
et s'alimente de la maigre pitance
Du latex des sapotilliers

Et quand elle fait sa sieste
Elle est blanche et noire à la fois
fantomatique et phosphorescente
et elle se pend aux branches
Et est si vulnérable
offerte à tous vents
qu'on peut la capturer
l 'identifier
la mesurer la peser la baguer
et la photographier sous toutes les coutures
avant de la relâcher dans le flot de ses rêves.

Huit millisecondes
C 'est peu pour satisfaire
Même avec les yeux du coeur
Le désir du ******
Mais c'est assez pour alimenter
Les constellations de l 'écriture
Et n 'est-ce pas cela en fait la raison d'être des Muses :
Alimenter , nourrir, susciter l 'envie...d'avoir envie ?
Jy wys nie die son vir 'n blinde wat weer kan sien nie.
Dis mos nou kinders-kry dan trou ,
'n priem baba se : Ek is lief vir jou.
Verby nog voor dit begin het.
Of is my hart nou wiegiedood wat
doodluiters my eie galg om die baba hang.
Breek ek die glas-skoen? voordat die lewe dit kan breek?
Of het ek nou maar oulaas 'n manier
om al die goeie goed - uit vrees
van stapel te stuur?
Ek kan jou volg... sal jou volg;
sou jou volg tot waar die wind ons waai
en saam jou kan ek... sal ek
sou ek heeldag rondomtalie en tiekiedraai,
maar *** gaan ek die onbekende in
as dit tussen my en die horison le?
My hartklop eikehout in die gang,
hy klop nog koud , maar hy klop nou!
En jy praat van altyd en van later en van dan:
verder selfs as wat my sig durf reik!
Jy is my nou.
Jammer dat ek more jou gister gaan wees;
probeer verstaan, ek verlang nog silwer en plooie
en die wereld is my lapdoek en die lewe is my lee papier
en ek wil groei.
Ek kan nie die trouring dra nie
,as hy nog koud aan my vinger kleef...
my hart is dalk nog prematuur ,
maar ek wil graag uitgan
en die koue skouers en spervure
vir my self gaan beleef.
Moet my nie die son wys nie
Ek leer nou eers *** om te sien...
en moet nie se jy is lief vir my nie,
want more is dit verby nog voor dit begin het.
En dan hang ek die priem.
Tandis qu'au **** des nuées,
Qui semblent des paradis,
Dans le bleu sont remuées,
Je t'écoute, et tu me dis :

« Quelle idée as-tu de l'homme,
« De croire qu'il aide Dieu ?
« L'homme est-il donc l'économe
« De l'eau, de l'air et du feu ?

« Est-ce que, dans son armoire,
« Tu l'aurais vu de tes yeux
« Serrer les rouleaux de moire
« Que l'aube déploie aux cieux ?

« Est-ce lui qui gonfle et ride
« La vague, et lui dit : Assez !
« Est-ce lui qui tient la bride
« Des éléments hérissés ?

« Sait-il le secret de l'herbe ?
« Parle-t-il au nid vivant ?
« Met-il sa note superbe
« Dans le noir clairon du vent ?

« La marée âpre et sonore
« Craint-elle son éperon ?
« Connaît-il le météore ?
« Comprend-il le moucheron ?

« L'homme aider Dieu ! lui, ce songe,
« Ce spectre en fuite et tremblant !
« Est-ce grâce à son éponge
« Que le cygne reste blanc ?

« Le fait veut, l'homme acquiesce.
« Je ne vois pas que sa main
« Découpe à l'emporte-pièce
« Les pétales du jasmin.

« Donne-t-il l'odeur aux sauges,
« Parce qu'il sait faire un trou
« Pour mêler le grès des Vosges
« Au salpêtre du Pérou ?

« Règle-t-il l'onde et la brise,
« Parce qu'il disséquera
« De l'argile qu'il a prise
« Près de Rio-Madera ?

« Ôte Dieu ; puis imagine,
« Essaie, invente ; épaissis
« L'idéal subtil d'Égine
« Par les dogmes d'Éleusis ;

« Soude Orphée à Lamettrie ;
« Joins, pour ne pas être à court,
« L'école d'Alexandrie
« À l'école d'Edimbourg ;

« Va du conclave au concile,
« D'Anaximandre à Destutt ;
« Dans quelque cuve fossile
« Exprime tout l'institut ;

« Démaillote la momie ;
« Presse Œdipe et Montyon ;
« Mets en pleine académie
« Le sphinx à la question ;

« Fouille le doute et la grâce ;
« Amalgame en ton guano
« À la Sybaris d'Horace
« Les Chartreux de saint Bruno ;

« Combine Genève et Rome ;
« Fais mettre par ton fermier
« Toutes les vertus de l'homme
« Dans une fosse à fumier ;

« Travaille avec patience
« En puisant au monde entier ;
« Prends pour pilon la science
« Et l'abîme pour mortier ;

« Va, forge ! je te défie
« De faire de ton savoir
« Et de ta philosophie
« Sortir un grain de blé noir !

« Dieu, de sa droite, étreint, fauche,
« Sème, et tout est rajeuni ;
« L'homme n'est qu'une main gauche
« Tâtonnant dans l'infini.

« Aux heures mystérieuses,
« Quand l'eau se change en miroir,
« Rôdes-tu sous les yeuses,
« L'esprit plongé dans le soir ?

« Te dis-tu : - Qu'est-ce que l'homme ? -
« Sonde, ami, sa nullité ;
« Cherche, de quel chiffre, en somme,
« Il accroît l'éternité !

« L'homme est vain. Pourquoi, poète,
« Ne pas le voir tel qu'il est,
« Dans le sépulcre squelette,
« Et sur la terre valet !

« L'homme est nu, stérile, blême,
« Plus frêle qu'un passereau ;
« C'est le puits du néant même
« Qui s'ouvre dans ce zéro.

« Va, Dieu crée et développe
« Un lion très réussi,
« Un bélier, une antilope,
« Sans le concours de Poissy.

« Il fait l'aile de la mouche
« Du doigt dont il façonna
« L'immense taureau farouche
« De la Sierra Morena ;

« Et dans l'herbe et la rosée
« Sa génisse au fier sabot
« Règne, et n'est point éclipsée
« Par la vache Sarlabot.

« Oui, la graine dans l'espace
« Vole à travers le brouillard,
« Et de toi le vent se passe,
« Semoir Jacquet-Robillard !

« Ce laboureur, la tempête,
« N'a pas, dans les gouffres noirs,
« Besoin que Grignon lui prête
« Sa charrue à trois versoirs.

« Germinal, dans l'atmosphère,  
« Soufflant sur les prés fleuris,  
« Sait encor mieux son affaire  
« Qu'un maraîcher de Paris.

« Quand Dieu veut teindre de flamme
« Le scarabée ou la fleur,
« Je ne vois point qu'il réclame
« La lampe de l'émailleur.

« L'homme peut se croire prêtre,
« L'homme peut se dire roi,
« Je lui laisse son peut-être,
« Mais je doute, quant à moi,

« Que Dieu, qui met mon image
« Au lac où je prends mon bain,
« Fasse faire l'étamage
« Des étangs, à Saint-Gobain.

« Quand Dieu pose sur l'eau sombre
« L'arc-en-ciel comme un siphon,
« Quand au tourbillon plein d'ombre
« Il attelle le typhon,

« Quand il maintient d'âge en âge
« L'hiver, l'été, mai vermeil,
« Janvier triste, et l'engrenage
« De l'astre autour du soleil,

« Quand les zodiaques roulent,
« Amarrés solidement,
« Sans que jamais elles croulent,
« Aux poutres du firmament,

« Quand tournent, rentrent et sortent
« Ces effrayants cabestans
« Dont les extrémités portent
« Le ciel, les saisons, le temps ;

« Pour combiner ces rouages
« Précis comme l'absolu,
« Pour que l'urne des nuages
« Bascule au moment voulu,

« Pour que la planète passe,
« Tel jour, au point indiqué,
« Pour que la mer ne s'amasse
« Que jusqu'à l'ourlet du quai,

« Pour que jamais la comète
« Ne rencontre un univers,
« Pour que l'essaim sur l'Hymète
« Trouve en juin les lys ouverts,

« Pour que jamais, quand approche
« L'heure obscure où l'azur luit,
« Une étoile ne s'accroche
« À quelque angle de la nuit,

« Pour que jamais les effluves
« Les forces, le gaz, l'aimant,
« Ne manquent aux vastes cuves
« De l'éternel mouvement,

« Pour régler ce jeu sublime,
« Cet équilibre béni,
« Ces balancements d'abîme,
« Ces écluses d'infini,

« Pour que, courbée ou grandie,
« L'oeuvre marche sans un pli,
« Je crois peu qu'il étudie
« La machine de Marly ! »

Ton ironie est amère,
Mais elle se trompe, ami.
Dieu compte avec l'éphémère,
Et s'appuie à la fourmi.

Dieu n'a rien fait d'inutile.
La terre, hymne où rien n'est vain,
Chante, et l'homme est le dactyle
De l'hexamètre divin.

L'homme et Dieu sont parallèles :
Dieu créant, l'homme inventant.
Dieu donne à l'homme ses ailes.
L'éternité fait l'instant.

L'homme est son auxiliaire
Pour le bien et la vertu.
L'arbre est Dieu, l'homme est le lierre ;
Dieu de l'homme s'est vêtu.

Dieu s'en sert, donc il s'en aide.
L'astre apparaît dans l'éclair ;
Zeus est dans Archimède,
Et Jéhovah dans Képler.

Jusqu'à ce que l'homme meure,
Il va toujours en avant.
Sa pensée a pour demeure
L'immense idéal vivant.

Dans tout génie il s'incarne ;
Le monde est sous son orteil ;
Et s'il n'a qu'une lucarne,
Il y pose le soleil.

Aux terreurs inabordable,
Coupant tous les fatals noeuds,
L'homme marche formidable,
Tranquille et vertigineux.

De limon il se fait lave,
Et colosse d'embryon ;
Epictète était esclave,
Molière était histrion,

Ésope était saltimbanque,
Qu'importe ! - il n'est arrêté
Que lorsque le pied lui manque
Au bord de l'éternité.

L'homme n'est pas autre chose
Que le prête-nom de Dieu.
Quoi qu'il fasse, il sent la cause
Impénétrable, au milieu.

Phidias cisèle Athènes ;
Michel-Ange est surhumain ;
Cyrus, Rhamsès, capitaines,
Ont une flamme à la main ;

Euclide trouve le mètre,
Le rythme sort d'Amphion ;
Jésus-Christ vient tout soumettre,
Même le glaive, au rayon ;

Brutus fait la délivrance ;
Platon fait la liberté ;
Jeanne d'Arc sacre la France
Avec sa virginité ;

Dans le bloc des erreurs noires
Voltaire ses coins ;
Luther brise les mâchoires
De Rome entre ses deux poings ;

Dante ouvre l'ombre et l'anime ;
Colomb fend l'océan bleu... -
C'est Dieu sous un pseudonyme,
C'est Dieu masqué, mais c'est Dieu.

L'homme est le fanal du monde.
Ce puissant esprit banni
Jette une lueur profonde
Jusqu'au seuil de l'infini.

Cent carrefours se partagent
Ce chercheur sans point d'appui ;
Tous les problèmes étagent
Leurs sombres voûtes sur lui.

Il dissipe les ténèbres ;
Il montre dans le lointain
Les promontoires funèbres
De l'abîme et du destin.

Il fait voir les vagues marches
Du sépulcre, et sa clarté
Blanchit les premières arches
Du pont de l'éternité.

Sous l'effrayante caverne
Il rayonne, et l'horreur fuit.
Quelqu'un tient cette lanterne ;
Mais elle t'éclaire, ô nuit !

Le progrès est en litige
Entre l'homme et Jéhovah ;
La greffe ajoute à la tige ;
Dieu cacha, l'homme trouva.

De quelque nom qu'on la nomme,
La science au vaste voeu
Occupe le pied de l'homme
À faire les pas de Dieu.

La mer tient l'homme et l'isole,
Et l'égare **** du port ;
Par le doigt de la boussole
Il se fait montrer le nord.

Dans sa morne casemate,
Penn rend ce damné meilleur ;
Jenner dit : Va-t-en, stigmate !
Jackson dit : Va-t-en, douleur !

Dieu fait l'épi, nous la gerbe ;
Il est grand, l'homme est fécond ;
Dieu créa le premier verbe
Et Gutenberg le second.

La pesanteur, la distance,
Contre l'homme aux luttes prêt,
Prononcent une sentence ;
Montgolfier casse l'arrêt.

Tous les anciens maux tenaces,
Hurlant sous le ciel profond,
Ne sont plus que des menaces
De fantômes qui s'en vont.

Le tonnerre au bruit difforme
Gronde... - on raille sans péril
La marionnette énorme
Que Franklin tient par un fil.

Nemrod était une bête
Chassant aux hommes, parmi
La démence et la tempête
De l'ancien monde ennemi.

Dracon était un cerbère
Qui grince encor sous le ciel
Avec trois têtes : Tibère,
Caïphe et Machiavel.

Nemrod s'appelait la Force,
Dracon s'appelait la Loi ;
On les sentait sous l'écorce
Du vieux prêtre et du vieux roi.

Tous deux sont morts. Plus de haines !
Oh ! ce fut un puissant bruit
Quand se rompirent les chaînes
Qui liaient l'homme à la nuit !

L'homme est l'appareil austère
Du progrès mystérieux ;
Dieu fait par l'homme sur terre
Ce qu'il fait par l'ange aux cieux.

Dieu sur tous les êtres pose
Son reflet prodigieux,
Créant le bien par la chose,
Créant par l'homme le mieux.

La nature était terrible,
Sans pitié, presque sans jour ;
L'homme la vanne en son crible,
Et n'y laisse que l'amour.

Toutes sortes de lois sombres
Semblaient sortir du destin ;
Le mal heurtait aux décombres
Le pied de l'homme incertain.

Pendant qu'à travers l'espace
Elle roule en hésitant ;
Un flot de ténèbres passe
Sur la terre à chaque instant ;

Mais des foyers y flamboient,
Tout s'éclaircit, on le sent,
Et déjà les anges voient
Ce noir globe blanchissant.

Sous l'urne des jours sans nombre
Depuis qu'il suit son chemin,
La décroissance de l'ombre
Vient des yeux du genre humain.

L'autel n'ose plus proscrire ;
La misère est morte enfin ;
Pain à tous ! on voit sourire
Les sombres dents de la faim.

L'erreur tombe ; on l'évacue ;
Les dogmes sont muselés ;
La guerre est une vaincue ;
Joie aux fleurs et paix aux blés !

L'ignorance est terrassée ;
Ce monstre, à demi dormant,
Avait la nuit pour pensée
Et pour voix le bégaiement.

Oui, voici qu'enfin recule
L'affreux groupe des fléaux !
L'homme est l'invincible hercule,
Le balayeur du chaos.

Sa massue est la justice,
Sa colère est la bonté.
Le ciel s'appuie au solstice
Et l'homme à sa volonté.

Il veut. Tout cède et tout plie.
Il construit quand il détruit ;
Et sa science est remplie
Des lumières de la nuit.

Il enchaîne les désastres,
Il tord la rébellion,
Il est sublime ; et les astres
Sont sur sa peau de lion.
La prudence est bonne de soi,
Mais la pousser trop **** est une duperie :
L'exemple suivant en fait foi.
Des moineaux habitaient dans une métairie :
Un beau champ de millet, voisin de la maison,
Leur donnait du grain à foison.
Ces moineaux dans le champ passaient toute leur vie,
Occupés de gruger les épis de millet
Le vieux chat du logis les guettait d'ordinaire,
Tournait et retournait ; mais il avait beau faire,
Sitôt qu'il paraissait la bande s'envolait.
Comment les attraper ? Notre vieux chat y songe,
Médite, fouille en son cerveau,
Et trouve un tour tout neuf. II va tremper dans l'eau
Sa patte dont il fait éponge.
Dans du millet en grain aussitôt il la plonge ;
Le grain s'attache tout autour.
Alors à cloche-pied, sans bruit, par un détour,
II va gagner le champ, s'y couche
La patte en l'air et sur le dos,
Ne bougeant non plus qu'une souche :
Sa patte ressemblait à l'épi le plus gros.
L'oiseau s'y méprenait, il approchait sans crainte,
Venait pour becqueter ; de l'autre patte, crac,
Voilà mon oiseau dans le sac.
Il en prit vingt par cette feinte.
Un moineau s'aperçoit du piège scélérat,
Et prudemment fuit la machine ;
Mais dès ce jour il s'imagine
Que chaque épi de grain était patte de chat.
Au fond de son trou solitaire
II se retire, et plus n'en sort,
Supporte la faim, la misère,
Et meurt pour éviter la mort.
Au long des murs, quand le soleil y donne,

Pour réchauffer mon vieux sang engourdi,

Avec les chiens, auprès du lazarrone,

Je vais m'étendre à l'heure de midi.


Je reste là sans rêve et sans pensée,

Comme un prodigue à son dernier écu,

Devant ma vie, aux trois quarts dépensée,

Déjà vieillard et n'ayant pas vécu.


Je n'aime rien, parce que rien ne m'aime,

Mon âme usée abandonne mon corps,

Je porte en moi le tombeau de moi-même,

Et suis plus mort que ne sont bien des morts.


Quand le soleil s'est caché sous la nue,

Devers mon trou je me traîne en rampant,

Et jusqu'au fond de ma peine inconnue

Je me retire aussi froid qu'un serpent.
Daar's 'n droogte in Namakwaland
Daar's 'n droogte by die see
Droogte skeil in  Weste-winde
Wat oor ons mense vee
En as ons in ons diepstes
met ons gewete oorleg pleeg
merk ons ook die droogte
wat deur ons jeug beweeg

Geen meer: "jammer oom"; dis als net jy en jou
Weg -die dae van asseblief; dis "gee dit vir my nou"
Vergeet die ring, dis uit my ding, niks gewag totdat jy trou
dis oopmondkou , dis sharrap nou, 'n treurspel om te aanskou

en ek as buitestander, van die leuens en van die leed
ek kan rus met die wete, daar is 'n tent vir my gereed
WordWerks Feb 2013
“What is the most intimate thing
you've ever done?”  she asked,  as she
produced a small kit and withdrew
a syringe, holding it between
her long fingernails.  She turned
up the volume of the music
to intensify the moment.

“You think *** is intimacy?”
“*** is a body function!  I'm
talking about sharing myself
and becoming a part of you,
with the very essence of me
racing through your veins.  Are you scared?”
Metallica screamed in background.

What is the most intimate thing
I've ever done, I asked myself.
If it isn't ***, what is it?
Give flowers, candy, jewelry,
pen a song, write romantic verse?
Achelous's daughter enticed.

'Course I was thinking like a male.
A woman would think of sharing,
beautiful sunsets, long cruises,
romantic dinners, holding hands...
She prepared my entertainment,
like a sacral ritual, and
I imagined Japanese flutes.

Sharing isn't intimacy.
I could've shared by dropping my trou,
but it was doubtful, it would been
appreciated, but no less
than her sharing was to me then.
"It's making someone feel special."
Having said that I slammed the door.
Ô temps miraculeux ! ô gaîtés homériques !
Ô rires de l'Europe et des deux Amériques !
Croûtes qui larmoyez ! bons dieux mal accrochés
Qui saignez dans vos coins ! madones qui louchez !
Phénomènes vivants ! ô choses inouïes !
Candeurs ! énormités au jour épanouies !
Le goudron déclaré fétide par le suif,
Judas flairant Shylock et criant : c'est un juif !
L'arsenic indigné dénonçant la morphine,
La hotte injuriant la borne, Messaline
Reprochant à Goton son regard effronté,
Et Dupin accusant Sauzet de lâcheté !

Oui, le vide-gousset flétrit le tire-laine,
Falstaff montre du doigt le ventre de Silène,
Lacenaire, pudique et de rougeur atteint,
Dit en baissant les yeux : J'ai vu passer Castaing !

Je contemple nos temps. J'en ai le droit, je pense.
Souffrir étant mon lot, rire est ma récompense.
Je ne sais pas comment cette pauvre Clio
Fera pour se tirer de cet imbroglio.
Ma rêverie au fond de ce règne pénètre,
Quand, ne pouvant dormir, la nuit, à ma fenêtre,
Je songe, et que là-bas, dans l'ombre, à travers l'eau,
Je vois briller le phare auprès de Saint-Malo.

Donc ce moment existe ! il est ! Stupeur risible !
On le voit ; c'est réel, et ce n'est pas possible.
L'empire est là, refait par quelques sacripants.
Bonaparte le Grand dormait. Quel guet-apens !
Il dormait dans sa tombe, absous par la patrie.
Tout à coup des brigands firent une tuerie
Qui dura tout un jour et du soir au matin ;
Napoléon le Nain en sortit. Le destin,
De l'expiation implacable ministre,
Dans tout ce sang versé trempa son doigt sinistre
Pour barbouiller, affront à la gloire en lambeau,
Cette caricature au mur de ce tombeau.

Ce monde-là prospère. Il prospère, vous dis-je !
Embonpoint de la honte ! époque callipyge !
Il trône, ce cokney d'Eglinton et d'Epsom,
Qui, la main sur son cœur, dit : Je mens, ergo sum.
Les jours, les mois, les ans passent ; ce flegmatique,
Ce somnambule obscur, brusquement frénétique,
Que Schœlcher a nommé le président Obus,
Règne, continuant ses crimes en abus.
Ô spectacle ! en plein jour, il marche et se promène,
Cet être horrible, insulte à la figure humaine !
Il s'étale effroyable, ayant tout un troupeau
De Suins et de Fortouls qui vivent sur sa peau,
Montrant ses nudités, cynique, infâme, indigne,
Sans mettre à son Baroche une feuille de vigne !
Il rit de voir à terre et montre à Machiavel
Sa parole d'honneur qu'il a tuée en duel.
Il sème l'or ; - venez ! - et sa largesse éclate.
Magnan ouvre sa griffe et Troplong tend sa patte.
Tout va. Les sous-coquins aident le drôle en chef.
Tout est beau, tout est bon, et tout est juste ; bref,
L'église le soutient, l'opéra le constate.
Il vola ! Te Deum. Il égorgea ! cantate.

Lois, mœurs, maître, valets, tout est à l'avenant.
C'est un bivouac de gueux, splendide et rayonnant.
Le mépris bat des mains, admire, et dit : courage !
C'est hideux. L'entouré ressemble à l'entourage.
Quelle collection ! quel choix ! quel Œil-de-boeuf !
L'un vient de Loyola, l'autre vient de Babeuf !
Jamais vénitiens, romains et bergamasques
N'ont sous plus de sifflets vu passer plus de masques.
La société va sans but, sans jour, sans droit,
Et l'envers de l'habit est devenu l'endroit.
L'immondice au sommet de l'état se déploie.
Les chiffonniers, la nuit, courbés, flairant leur proie,
Allongent leurs crochets du côté du sénat.
Voyez-moi ce coquin, normand, corse, auvergnat :
C'était fait pour vieillir bélître et mourir cuistre ;
C'est premier président, c'est préfet, c'est ministre.
Ce truand catholique au temps jadis vivait
Maigre, chez Flicoteaux plutôt que chez Chevet ;
Il habitait au fond d'un bouge à tabatière
Un lit fait et défait, hélas, par sa portière,
Et griffonnait dès l'aube, amer, affreux, souillé,
Exhalant dans son trou l'odeur d'un chien mouillé.
Il conseille l'état pour ving-cinq mille livres
Par an. Ce petit homme, étant teneur de livres
Dans la blonde Marseille, au pays du mistral,
Fit des faux. Le voici procureur général.
Celui-là, qui courait la foire avec un singe,
Est député ; cet autre, ayant fort peu de linge,
Sur la pointe du pied entrait dans les logis
Où bâillait quelque armoire aux tiroirs élargis,
Et du bourgeois absent empruntait la tunique
Nul mortel n'a jamais, de façon plus cynique,
Assouvi le désir des chemises d'autrui ;
Il était grinche hier, il est juge aujourd'hui.
Ceux-ci, quand il leur plaît, chapelains de la clique,
Au saint-père accroupi font pondre une encyclique ;
Ce sont des gazetiers fort puissants en haut lieu,
Car ils sont les amis particuliers de Dieu
Sachez que ces béats, quand ils parlent du temple
Comme de leur maison, n'ont pas tort ; par exemple,
J'ai toujours applaudi quand ils ont affecté
Avec les saints du ciel des airs d'intimité ;
Veuillot, certe, aurait pu vivre avec Saint-Antoine.
Cet autre est général comme on serait chanoine,
Parce qu'il est très gras et qu'il a trois mentons.
Cet autre fut escroc. Cet autre eut vingt bâtons
Cassés sur lui. Cet autre, admirable canaille,
Quand la bise, en janvier, nous pince et nous tenaille,
D'une savate oblique écrasant les talons,
Pour se garer du froid mettait deux pantalons
Dont les trous par bonheur n'étaient pas l'un sur l'autre.
Aujourd'hui, sénateur, dans l'empire il se vautre.
Je regrette le temps que c'était dans l'égout.
Ce ventre a nom d'Hautpoul, ce nez a nom d'Argout.
Ce prêtre, c'est la honte à l'état de prodige.
Passons vite. L'histoire abrège, elle rédige
Royer d'un coup de fouet, Mongis d'un coup de pied,
Et fuit. Royer se frotte et Mongis se rassied ;
Tout est dit. Que leur fait l'affront ? l'opprobre engraissé.
Quant au maître qui hait les curieux, la presse,
La tribune, et ne veut pour son règne éclatant
Ni regards, ni témoins, il doit être content
Il a plus de succès encor qu'il n'en exige ;
César, devant sa cour, son pouvoir, son quadrige,
Ses lois, ses serviteurs brodés et galonnés,
Veut qu'on ferme les veux : on se bouche le nez.

Prenez ce Beauharnais et prenez une loupe ;
Penchez-vous, regardez l'homme et scrutez la troupe.
Vous n'y trouverez pas l'ombre d'un bon instinct.
C'est vil et c'est féroce. En eux l'homme est éteint
Et ce qui plonge l'âme en des stupeurs profondes,
C'est la perfection de ces gredins immondes.

À ce ramas se joint un tas d'affreux poussahs,
Un tas de Triboulets et de Sancho Panças.
Sous vingt gouvernements ils ont palpé des sommes.
Aucune indignité ne manque à ces bonshommes ;
Rufins poussifs, Verrès goutteux, Séjans fourbus,
Selles à tout tyran, sénateurs omnibus.
On est l'ancien soudard, on est l'ancien bourgmestre ;
On tua Louis seize, on vote avec de Maistre ;
Ils ont eu leur fauteuil dans tous les Luxembourgs ;
Ayant vu les Maurys, ils sont faits aux Sibours ;
Ils sont gais, et, contant leurs antiques bamboches,
Branlent leurs vieux gazons sur leurs vieilles caboches.
Ayant été, du temps qu'ils avaient un cheveu,
Lâches sous l'oncle, ils sont abjects sous le neveu.
Gros mandarins chinois adorant le tartare,
Ils apportent leur cœur, leur vertu, leur catarrhe,
Et prosternent, cagneux, devant sa majesté
Leur bassesse avachie en imbécillité.

Cette bande s'embrasse et se livre à des joies.
Bon ménage touchant des vautours et des oies !

Noirs empereurs romains couchés dans les tombeaux,
Qui faisiez aux sénats discuter les turbots,
Toi, dernière Lagide, ô reine au cou de cygne,
Prêtre Alexandre six qui rêves dans ta vigne,
Despotes d'Allemagne éclos dans le Rœmer,
Nemrod qui hais le ciel, Xercès qui bats la mer,
Caïphe qui tressas la couronne d'épine,
Claude après Messaline épousant Agrippine,
Caïus qu'on fit césar, Commode qu'on fit dieu,
Iturbide, Rosas, Mazarin, Richelieu,
Moines qui chassez Dante et brisez Galilée,
Saint-office, conseil des dix, chambre étoilée,
Parlements tout noircis de décrets et d'olims,
Vous sultans, les Mourads, les Achmets, les Sélims,
Rois qu'on montre aux enfants dans tous les syllabaires,
Papes, ducs, empereurs, princes, tas de Tibères !
Bourreaux toujours sanglants, toujours divinisés,
Tyrans ! enseignez-moi, si vous le connaissez,
Enseignez-moi le lieu, le point, la borne où cesse
La lâcheté publique et l'humaine bassesse !

Et l'archet frémissant fait bondir tout cela !
Bal à l'hôtel de ville, au Luxembourg gala.
Allons, juges, dansez la danse de l'épée !
Gambade, ô Dombidau, pour l'onomatopée !
Polkez, Fould et Maupas, avec votre écriteau,
Toi, Persil-Guillotine, au profil de couteau !

Ours que Boustrapa montre et qu'il tient par la sangle,
Valsez, Billault, Parieu, Drouyn, Lebœuf, Delangle !
Danse, Dupin ! dansez, l'horrible et le bouffon !
Hyènes, loups, chacals, non prévus par Buffon,
Leroy, Forey, tueurs au fer rongé de rouilles,
Dansez ! dansez, Berger, d'Hautpoul, Murat, citrouilles !

Et l'on râle en exil, à Cayenne, à Blidah !
Et sur le Duguesclin, et sur le Canada,
Des enfants de dix ans, brigands qu'on extermine,
Agonisent, brûlés de fièvre et de vermine !
Et les mères, pleurant sous l'homme triomphant,
Ne savent même pas où se meurt leur enfant !
Et Samson reparaît, et sort de ses retraites !
Et, le soir, on entend, sur d'horribles charrettes
Qui traversent la ville et qu'on suit à pas lents,
Quelque chose sauter dans des paniers sanglants !
Oh ! laissez ! laissez-moi m'enfuir sur le rivage !
Laissez-moi respirer l'odeur du flot sauvage !
Jersey rit, terre libre, au sein des sombres mers ;
Les genêts sont en fleur, l'agneau paît les prés verts ;
L'écume jette aux rocs ses blanches mousselines ;
Par moments apparaît, au sommet des collines,
Livrant ses crins épars au vent âpre et joyeux,
Un cheval effaré qui hennit dans les cieux !

Jersey, le 24 mai 1853.
Moi mouchard ?... oui, madame Phaïlle,
Comme on Vous nomme dans l'endroit,
Que Tu ravis avec ta taille,
Où tu prends du bout d'une paille,
Au temps chaud, ton sorbet... très froid.

À l'Ictinus ! près de la place
Et du palais de Médicis,
Tu t'asseyais, pâle, un peu lasse ;
Et ta grenadine à la glace
Souriait, rose, à mon cassis.

Beau café ; terrasse ; pratique
Chère aux chanteurs du vieux Faubourg ;
À proximité fantastique
De l'Odéon ; vue artistique
Sur les arbres du Luxembourg.

Je disais ? ah !... ceci, Madame,
Que s'il est un pauvre mouchard
Sur la galère noire où rame
L'esclave du Paris infâme,
Sans l'excuse d'être pochard,

C'est moi, je n'en connais pas d'autre,
Chefs ni roussins. C'est entendu.
Ah ! si ! j'en connais un... l'apôtre...
Ô catholiques, c'est le nôtre ;
Oui, le seul... qui se soit pendu.

Nul n'a ramassé son nom sale ;
L'amour n'a plus redit ce nom.
La chose était trop... colossale !
Qu'un père appelle... Élagabale
Son fils... à la rigueur... mais... non.

Ah ! Madame ! que ça de fête !
J'en connais un second : Javert.
Le Javert chéri du poète,
Qui dit la messe... avec sa tête !
Triste prêtre du bonnet vert !

Mais ça vous pose ! on vous renomme
Chez les gueux et chez les richards !
On croit troubler le pape à Rome !
Et ça fait de vous un grand homme,
Vénéré de tous les mouchards.

Mon Javert, dit-il, est honnête.
Honnête ! où vas-tu te fourrer ?
Ce n'est pas sublime, c'est bête :
Autant contempler la lunette
Où le trou du cul vient pleurer.

Un mouchard, mais ça vend son âme !
Comment, son âme ! son ami !
Ça vendrait son fils ; une femme !
Pourquoi non ? C'est dans... le programme,
On n'est pas honnête à demi.

Ça vendrait n'importe laquelle
D'entre les femmes d'à présent !
Quand je songe que la séquelle
Pourrait t'effleurer de son aile
Ne serait-ce qu'en te rasant,

Comme Éole, qui souffle et cause
Des ravages dans le faubourg
Où, la nuit, Montmartre repose,
Peut importuner une Rose
Dans le jardin du Luxembourg ;

Moins : comme le zéphir, qui rôde,
Vent, on peut dire, un peu balourd,
Mais bon zouave, allant en maraude,
Peut froisser la Fleur la plus chaude
Des plus blanches du Luxembourg ;

Moins : comme une anthère blessée
Par la brise folle qui court,
Sa chemisette retroussée,
Peut entêter une Pensée
La plus belle du Luxembourg.

Moins : comme la vergue cassée
D'un marin, retour de Cabourg,
Fier de sa flotte cuirassée,
Fait se tourner une Pensée
Vers le bassin du Luxembourg ;

Moins : comme une vesce élancée
Par une bague de velours,
Lui fichant sa douce fessée,
Distrait la plus sage Pensée
De l'un et l'autre Luxembourgs ;

Rien que ça ! ce serait la pire
Des injustices envers Toi.
Il est minuit, je me retire.
D'ailleurs, j'ai quelque chose à dire
Au Préfet de Police, moi.

Toi, toutes les femmes sont bonnes,
Tu m'entends ; seules, ou par deux ;
N'appartenant qu'à leurs personnes ;
Quant à tes mouchards... ces colonnes ?
Dis plutôt... ces bâtons merdeux,

Tu vas tous les foutre à la porte ;
Mais, en assurant leurs vieux jours ;
Jusqu'à l'heure où le char emporte,
La dernière... retraite... morte,
Et laisse faire les amours.

Ce sont tes pieds ? Chacun y pisse.
Honneur aux pieds estropiés !
Mais les tiens ! tu sais où ça glisse !
Donc... mon beau Préfet de Police,
Laisse-moi... te laver les pieds...

Assieds-toi ; jette au feu ta honte,
Au vent tous tes affreux papiers !
Fais remplir un bassin en fonte ;
Comme les pieds des douze, compte...
Laisse-moi... te laver les pieds...

Tes pieds aussi noirs que la suie,
Comme moi-même je les eus,
Baignant dans les eaux de sa pluie,
Et souffre que je les essuie
Avec le linge de JÉSUS.
EM Aug 2014
j'ai envie de toi d'une façon que tu ne pourra jamais comprendre, comme tu n'as jamais su me comprendre moi
je t'aime d'une force tel celle que je n'ai pas pu accumuler pour te quitter.
tu me manque d'une intensité semblable a celle dont mon coeur bat a chaque fois que pose les yeux sur toi.
je veux t'oublier autant que j'ai besoin de toi.
c'est juste difficile de t'aimer, difficile.. difficile! j'ai enfin trouver les mots parfaits pour expliquer notre relation: difficile, compliquer et presque impossible, mais pourtant rien ni personne peut me rendre plus heureuse ..ou malheureuse. toi et moi on n'est tellement differents, on voit rarement les choses du même perspective, et chaqu'un veux des choses differentes et a d'autres plans que l'autre, ça m'irrite des fois mais c'est aussi une des choses que j'adore chez toi, après tout n'est ce pas que deux opposés s'attirent? mais il y a autant de choses que j'aime chez toi que de choses qui me rendent folle, ces choses ce n'est que dernièrement que j'ai commencer a les remarquer, comme ton insensibilité, ton egoïsme, ta malhonnêteté, et ton inconsideration envers moi, enfaite touts ces défauts tu ne les as qu'avec moi, tellement que des fois
je penses que tu fais certaines choses juste pour me faire mal et si c'est réelement le cas je voudrais te félicité car encore une fois tu as réussis ta quête et eu ce que tu voulais. je me demande tout le temps pourquoi j'insiste a restée a tes côtés et enduré ta crualité envers moi mais je ne trouve jamais de répense apart "parce que je l'aime" mais est-ce suffisant? j'y peux rien, je n'arrive pas a t'oublier, je me suis trop attachée a toi, tu ne peux juste pas imaginé a quel point je t'adore, c'est juste inexpressif ..et j'admets aussi que je ne VEUX pas te laisser partir.. mais ce n'est pas de ma faute, tu a trop bien su comment me pièger et te jouer de moi pour me rendre carrément et complétement acro a toi, et maintenant je suis coincé dans ce piége, ce trou noir qu'est l'amour irréciproque
À Armand Silvestre


Un cachot. Une femme à genoux, en prière.

Une tête de mort est gisante par terre,

Et parle, d'un ton aigre et douloureux aussi.

D'une lampe au plafond tombe un rayon transi.


« Dame Reine. - Encor toi, Satan ! - Madame Reine.

- « Ô Seigneur, faites mon oreille assez sereine

« Pour ouïr sans l'écouter ce que dit le Malin ! »

- « Ah ! ce fut un vaillant et galant châtelain

« Que votre époux ! Toujours en guerre ou bien en fête,

« (Hélas ! j'en puis parler puisque je suis sa tête.)

« Il vous aima, mais moins encore qu'il n'eût dû.

« Que de vertu gâtée et que de temps perdu

« En vains tournois, en cours d'amour **** de sa dame

Qui belle et jeune prit un amant, la pauvre âme ! » -

- « Ô Seigneur, écartez ce calice de moi ! » -

- « Comme ils s'aimèrent ! Ils s'étaient juré leur foi

De s'épouser sitôt que serait mort le maître,

Et le tuèrent dans son sommeil d'un coup traître. »

- « Seigneur, vous le savez, dès le crime accompli,

J'eus horreur, et prenant ce jeune homme en oubli,

Vins au roi, dévoilant l'attentat effroyable,

Et pour mieux déjouer la malice du diable,

J'obtins qu'on m'apportât en ma juste prison

La tête de l'époux occis en trahison :

Par ainsi le remords, devant ce triste reste,

Me met toujours aux yeux mon action funeste,

Et la ferveur de mon repentir s'en accroît,

Ô Jésus ! Mais voici : le Malin qui se voit

Dupe et qui voudrait bien ressaisir sa conquête

S'en vient-il pas loger dans cette pauvre tête

Et me tenir de faux propos insidieux ?

Ô Seigneur, tendez-moi vos secours précieux ! »

- « Ce n'est pas le démon, ma Reine, c'est moi-même,

Votre époux, qui vous parle en ce moment suprême,

Votre époux qui, damné (car j'étais en mourant

En état de péché mortel), vers vous se rend,

Ô Reine, et qui, pauvre âme errante, prend la tête

Qui fut la sienne aux jours vivants pour interprète

Effroyable de son amour épouvanté. »

- « Ô blasphème hideux, mensonge détesté !

Monsieur Jésus, mon maître adorable, exorcise

Ce chef horrible et le vide de la hantise

Diabolique qui n'en fait qu'un instrument

Où souffle Belzébuth fallacieusement

Comme dans une flûte on joue un air perfide ! »

- « Ô douleur, une erreur lamentable te guide,

Reine, je ne suis pas Satan, je suis Henry ! » -

- « Oyez, Seigneur, il prend la voix de mon mari !

À mon secours, les Saints, à l'aide, Notre Dame ! » -

- « Je suis Henry, du moins, Reine, je suis son âme

Qui, par sa volonté, plus forte que l'enfer,

Ayant su transgresser toute porte de fer

Et de flamme, et braver leur impure cohorte,

Hélas ! vient pour te dire avec cette voix morte

Qu'il est d'autres amours encor que ceux d'ici,

Tout immatériels et sans autre souci

Qu'eux-mêmes, des amours d'âmes et de pensées.

Ah, que leur fait le Ciel ou l'enfer. Enlacées,

Les âmes, elles n'ont qu'elles-mêmes pour but !

L'enfer pour elles c'est que leur amour mourût,

Et leur amour de son essence est immortelle !

Hélas ! moi, je ne puis te suivre aux cieux, cruelle

Et seule peine en ma damnation. Mais toi,

Damne-toi ! Nous serons heureux à deux, la loi

Des âmes, je te dis, c'est l'alme indifférence

Pour la félicité comme pour la souffrance

Si l'amour partagé leur fait d'intimes cieux.

Viens afin que l'enfer jaloux, voie, envieux,

Deux damnés ajouter, comme on double un délice,

Tous les feux de l'amour à tous ceux du supplice,

Et se sourire en un baiser perpétuel ! »

« - Âme de mon époux, tu sais qu'il est réel

Le repentir qui fait qu'en ce moment j'espère

En la miséricorde ineffable du Père

Et du Fils et du Saint-Esprit ! Depuis un mois

Que j'expie, attendant la mort que je te dois,

En ce cachot trop doux encor, nue et par terre,

Le crime monstrueux et l'infâme adultère

N'ai-je pas, repassant ma vie en sanglotant,

Ô mon Henry, pleuré des siècles cet instant

Où j'ai pu méconnaître en toi celui qu'on aime ?

Va, j'ai revu, superbe et doux, toujours le même,

Ton regard qui parlait délicieusement

Et j'entends, et c'est là mon plus dur châtiment,

Ta noble voix, et je me souviens des caresses !

Or si tu m'as absoute et si tu t'intéresses

À mon salut, du haut des cieux, ô cher souci,

Manifeste-toi, parle, et démens celui-ci

Qui blasphème et ***** d'affreuses hérésies ! » -

- « Je te dis que je suis damné ! Tu t'extasies

En terreurs vaines, ô ma Reine. Je te dis

Qu'il te faut rebrousser chemin du Paradis,

Vain séjour du bonheur banal et solitaire

Pour l'amour avec moi ! Les amours de la terre

Ont, tu le sais, de ces instants chastes et lents :

L'âme veille, les sens se taisent somnolents,

Le cœur qui se repose et le sang qui s'affaisse

Font dans tout l'être comme une douce faiblesse.

Plus de désirs fiévreux, plus d'élans énervants,

On est des frères et des sœurs et des enfants,

On pleure d'une intime et profonde allégresse,

On est les cieux, on est la terre, enfin on cesse

De vivre et de sentir pour s'aimer au delà,

Et c'est l'éternité que je t'offre, prends-la !

Au milieu des tourments nous serons dans la joie,

Et le Diable aura beau meurtrir sa double proie,

Nous rirons, et plaindrons ce Satan sans amour.

Non, les Anges n'auront dans leur morne séjour

Rien de pareil à ces délices inouïes ! » -


La Comtesse est debout, paumes épanouies.

Elle fait le grand cri des amours surhumains,

Puis se penche et saisit avec ses pâles mains

La tête qui, merveille ! a l'aspect de sourire.

Un fantôme de vie et de chair semble luire

Sur le hideux objet qui rayonne à présent

Dans un nimbe languissamment phosphorescent.

Un halo clair, semblable à des cheveux d'aurore

Tremble au sommet et semble au vent flotter encore

Parmi le chant des cors à travers la forêt.

Les noirs orbites ont des éclairs, on dirait

De grands regards de flamme et noirs. Le trou farouche

Au rire affreux, qui fut, Comte Henry, votre bouche

Se transfigure rouge aux deux arcs palpitants

De lèvres qu'auréole un duvet de vingt ans,

Et qui pour un baiser se tendent savoureuses...

Et la Comtesse à la façon des amoureuses

Tient la tête terrible amplement, une main

Derrière et l'autre sur le front, pâle, en chemin

D'aller vers le baiser spectral, l'âme tendue,

Hoquetant, dilatant sa prunelle perdue

Au fond de ce regard vague qu'elle a devant...

Soudain elle recule, et d'un geste rêvant

(Ô femmes, vous avez ces allures de faire !)

Elle laisse tomber la tête qui profère

Une plainte, et, roulant, sonne creux et longtemps :

- « Mon Dieu, mon Dieu, pitié ! Mes péchés pénitents

Lèvent leurs pauvres bras vers ta bénévolence,

Ô ne les souffre pas criant en vain ! Ô lance

L'éclair de ton pardon qui tuera ce corps vil !

Vois que mon âme est faible en ce dolent exil

Et ne la laisse pas au Mauvais qui la guette !

Ô que je meure ! »

Avec le bruit d'un corps qu'on jette,

La Comtesse à l'instant tombe morte, et voici :

Son âme en blanc linceul, par l'espace éclairci

D'une douce clarté d'or blond qui flue et vibre

Monte au plafond ouvert désormais à l'air libre

Et d'une ascension lente va vers les cieux.


. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .


La tête est là, dardant en l'air ses sombres yeux

Et sautèle dans des attitudes étranges :

Telle dans les Assomptions des têtes d'anges,

Et la bouche ***** un gémissement long,

Et des orbites vont coulant des pleurs de plomb.
Sonnet.

Je m'en allais, les poings dans mes poches crevées ;
Mon paletot aussi devenait idéal ;
J'allais sous le ciel, Muse ! et j'étais ton féal ;
Oh ! là ! là ! que d'amours splendides j'ai rêvées !

Mon unique culotte avait un large trou.
- Petit-Poucet rêveur, j'égrenais dans ma course
Des rimes. Mon auberge était à la Grande-Ourse.
- Mes étoiles au ciel avaient un doux frou-frou

Et je les écoutais, assis au bord des routes,
Ces bons soirs de septembre où je sentais des gouttes
De rosée à mon front, comme un vin de vigueur ;

Où, rimant au milieu des ombres fantastiques,
Comme des lyres, je tirais les élastiques
De mes souliers blessés, un pied près de mon coeur !
Sonnet.

C'est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.

Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.

Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.
Sonnet.

Pascal avait son gouffre, avec lui se mouvant.
- Hélas ! tout est abîme, - action, désir, rêve,
Parole ! et sur mon poil qui tout droit se relève
Maintes fois de la Peur je sens passer le vent.

En haut, en bas, partout, la profondeur, la grève,
Le silence, l'espace affreux et captivant...
Sur le fond de mes nuits Dieu de son doigt savant
Dessine un cauchemar multiforme et sans trêve.

J'ai peur du sommeil comme on a peur d'un grand trou,
Tout plein de vague horreur, menant on ne sait où ;
Je ne vois qu'infini par toutes les fenêtres,

Et mon esprit, toujours du vertige hanté,
Jalouse du néant l'insensibilité.
Ah ! ne jamais sortir des Nombres et des Etres !
À Ernest Christophe.

Fière, autant qu'un vivant, de sa noble stature,
Avec son gros bouquet, son mouchoir et ses gants,
Elle a la nonchalance et la désinvolture
D'une coquette maigre aux airs extravagants.

Vit-on jamais au bal une taille plus mince ?
Sa robe exagérée, en sa royale ampleur,
S'écroule abondamment sur un pied sec que pince
Un soulier pomponné, joli comme une fleur.

La ruche qui se joue au bord des clavicules,
Comme un ruisseau lascif qui se frotte au rocher,
Défend pudiquement des lazzi ridicules
Les funèbres appas qu'elle tient à cacher.

Ses yeux profonds sont faits de vide et de ténèbres,
Et son crâne, de fleurs artistement coiffé,
Oscille mollement sur ses frêles vertèbres.
Ô charme d'un néant follement attifé.

Aucuns t'appelleront une caricature,
Qui ne comprennent pas, amants ivres de chair,
L'élégance sans nom de l'humaine armature.
Tu réponds, grand squelette, à mon goût le plus cher !

Viens-tu troubler, avec ta puissante grimace,
La fête de la Vie ? ou quelque vieux désir,
Éperonnant encor ta vivante carcasse,
Te pousse-t-il, crédule, au sabbat du Plaisir ?

Au chant des violons, aux flammes des bougies,
Espères-tu chasser ton cauchemar moqueur,
Et viens-tu demander au torrent des ******
De rafraîchir l'enfer allumé dans ton coeur ?

Inépuisable puits de sottise et de fautes !
De l'antique douleur éternel alambic !
A travers le treillis recourbé de tes côtes
Je vois, errant encor, l'insatiable aspic.

Pour dire vrai, je crains que ta coquetterie
Ne trouve pas un prix digne de ses efforts ;
Qui, de ces coeurs mortels, entend la raillerie ?
Les charmes de l'horreur n'enivrent que les forts !

Le gouffre de tes yeux, plein d'horribles pensées,
Exhale le vertige, et les danseurs prudents
Ne contempleront pas sans d'amères nausées
Le sourire éternel de tes trente-deux dents.

Pourtant, qui n'a serré dans ses bras un squelette,
Et qui ne s'est nourri des choses du tombeau ?
Qu'importe le parfum, l'habit ou la toilette ?
Qui fait le dégoûté montre qu'il se croit beau.

Bayadère sans nez, irrésistible gouge,
Dis donc à ces danseurs qui font les offusqués :
" Fiers mignons, malgré l'art des poudres et du rouge,
Vous sentez tous la mort ! Ô squelettes musqués,

Antinoüs flétris, dandys, à face glabre,
Cadavres vernissés, lovelaces chenus,
Le branle universel de la danse macabre
Vous entraîne en des lieux qui ne sont pas connus !

Des quais froids de la Seine aux bords brûlants du Gange,
Le troupeau mortel saute et se pâme, sans voir
Dans un trou du plafond la trompette de l'Ange
Sinistrement béante ainsi qu'un tromblon noir.

En tout climat, sous tout soleil, la Mort t'admire
En tes contorsions, risible Humanité,
Et souvent, comme toi, se parfumant de myrrhe,
Mêle son ironie à ton insanité ! "
Masmer Sep 2018
A celui dont le ciel a maudit les mirettes,
Comme vieil oiseau à l’aile artificielle.
Vole, bien peu adroit, accepte mais rejette,
En deuil de la clarté, et pleure sa lourde attelle.

Celui qui en dépit des voix et des regards
Ne tira pas la bride, au quadruple galop
S’enfonça dans le trou, la vie et son traquenard.
Et maintenant de son être recherche les morceaux.

Enfin, l’exotique reptile, exhibant ses atouts :
Sombres et ternes couleurs ornent son capuchon,
Pourtant si attirantes, quand il se tient debout.
Il porte ce qu’il trouve beau, c’est sa grande conviction.

Volatile épuisé, serpent ou équidé,
Le bipède leur donnera sa petite mine d’or,
Dans son pelage blanc, coton immaculé.
L’Homme vit uniquement pour défier la mort.
Hey here's a poem in French, because I like writing and I'm French so heck.
L'espoir luit comme un brin de paille dans l'étable.

Que crains-tu de la guêpe ivre de son vol fou ?

Vois, le soleil toujours poudroie à quelque trou.

Que ne t'endormais-tu, le coude sur la table ?


Pauvre âme pâle, au moins cette eau du puits glacé,

Bois-la. Puis dors après. Allons, tu vois, je reste,

Et je dorloterai les rêves de ta sieste,

Et tu chantonneras comme un enfant bercé.


Midi sonne. De grâce, éloignez-vous, madame.

Il dort. C'est étonnant comme les pas de femme

Résonnent au cerveau des pauvres malheureux.


Midi sonne. J'ai fait arroser dans la chambre.

Va, dors ! L'espoir luit comme un caillou dans un creux.

Ah ! quand refleuriront les roses de septembre !
Entre Muses et Furies
Il y a une seringue de cyprine amère
Où se coagule fréquemment ma Muse.
Elle entre dans tous ses états
M'injurie et me voue aux gémonies
En pleine crise de jalousie.

Ma muse est une guerrière blessée
D'une volée de bois vert et de cons
Elle veut me froisser, m'effacer, m'annihiler
Me priant de fourrer sa prétendue Rivale
De poèmes lubriques dans le trou de balle.

Et ma Sans-Rivale, ma Déesse, ma Chatte Sainte et Vierge
Ma Muse soi-disant végétarienne se révèle cannibale
De la pire espèce des tribus anthropophages
Et me déchiquette, moi son zmeu, son dragon nuageux,
Sa muse masculine, son pervers narcissique,
Son ombre réfléchie dans le miroir,
Me dépèce comme une hyène frénétique
Aux crocs d'ivoire en chaleur
Elle me saigne tant et tant
Que je suinte de tous mes lambeaux
Résine, sève, latex, musc
Comme une plantation hétéroclite et sauvage
D'hévéas, de pissenlits, de sapotilliers
D'ignames jaunes et de dachines.

Et quand rassasiée de ma gomme à mâcher
Certifiée bio et sans additif
Elle se barbouille les lèvres de ma saignée
Je lui murmure encore que c 'est elle Mon Unique,
Ma Précieuse Ombre, Ma Chatte Immaculée
Entre toutes les chattes, mon chewing gum préféré
Et que je bande pour ses entrailles
Cérébralement
Mystiquement.
Marie-Lyne Jul 2018
Ce qui manque
dans nos relations amoureuses
est la spontanéité
Que mon sort est affreux ! S'écriait un hibou :
Vieux, infirme, souffrant, accablé de misère,
Je suis isolé sur la terre,
Et jamais un oiseau n'est venu dans mon trou
Consoler un moment ma douleur solitaire.
Un pigeon entendit ces mots,
Et courut auprès du malade :
Hélas ! Mon pauvre camarade,
Lui dit-il, je plains bien vos maux.
Mais je ne comprends pas qu'un hibou de votre âge
Soit sans épouse, sans parents,
Sans enfants ou petits-enfants.
N'avez-vous point serré les nœuds du mariage
Pendant le cours de vos beaux ans ?
Le hibou répondit : non vraiment, mon cher frère :
Me marier ! Et pourquoi faire ?
J'en connaissais trop le danger.
Vouliez-vous que je prisse une jeune chouette,
Bien étourdie et bien coquette,
Qui me trahît sans cesse ou me fît enrager,
Qui me donnât des fils d'un méchant caractère,
Ingrats, menteurs, mauvais sujets,
Désirant en secret le trépas de leur père ?
Car c'est ainsi qu'ils sont tous faits.
Pour des parents, je n'en ai guère,
Et ne les vis jamais : ils sont durs, exigeants,
Pour le moindre sujet s'irritent,
N'aiment que ceux dont ils héritent ;
Encor ne faut-il pas qu'ils attendent longtemps.
Tout frère ou tout cousin nous déteste et nous pille.
Je ne suis pas de votre avis,
Répondit le pigeon : mais parlons des amis ;
Des orphelins c'est la famille :
Vous avez dû près d'eux trouver quelques douceurs.
- Les amis ! Ils sont tous trompeurs.
J'ai connu deux hiboux qui tendrement s'aimèrent
Pendant quinze ans, et, certain jour,
Pour une souris s'égorgèrent.
Je crois à l'amitié moins encor qu'à l'amour.
- Mais ainsi, Dieu me le pardonne !
Vous n'avez donc aimé personne ?
- Ma foi, non, soit dit entre nous.
- En ce cas-là, mon cher, de quoi vous plaignez-vous ?
Soudain je t'ai si fort pressée
Pour sentir ton cœur bien à moi,
Que je t'en ai presque blessée,
Et tu m'as demandé pourquoi.

Un mot, un rien, m'a tout à l'heure
Fait étreindre ainsi mon trésor,
Comme, au moindre vent qui l'effleure,
L'avare en hâte étreint son or ;

La porte de sa cave est sûre,
Il en tient dans son poing la clé,
Mais, par le trou de la serrure,
Un filet d'air froid a soufflé ;

Et pendant qu'il comptait dans l'ombre
Son trésor écu par écu,
Savourant le titre et le nombre,
Il a senti le souffle aigu !

Il serre en vain sa clé chérie,
Vainement il s'est verrouillé,
Avant d'y réfléchir il crie
Comme s'il était dépouillé !

C'est que l'instinct fait sentinelle,
C'est que l'âme du possesseur
N'ose jamais plier qu'une aile,
Ô ma sainte amie, ô ma sœur !

C'est que ma richesse tardive,
Fruit de mes soupirs quotidiens,
Me semble encore fugitive
Au moment même où je la tiens !

Et cette épargne que j'amasse
A beau grandir en sûreté,
Je crois, au moindre vent qui passe,
Qu'un ravisseur a fureté...

Et je fais aussitôt l'épreuve
De tout le deuil qui peut tenir
Dans une âme absolument veuve
Où l'amour n'a plus d'avenir.

Alors je tremble et te supplie
D'un anxieux et long regard...
Oh ! Pardonne-moi la folie
De trembler encore ; si **** !

Hélas ! L'habitude en est prise :
Tu n'as que si **** deviné
Combien le doute martyrise,
Impérissable une fois né.

Dans l'âge (qui n'est plus le nôtre)
Où bat le cœur à découvert,
Le mien, plus exposé qu'un autre,
Puisqu'il t'aimait, a plus souffert ;

Ah ! Tout cœur où l'amour habite
Recèle un pouvoir de souffrir
Dont il ignore la limite,
Tant qu'il souffre sans en mourir ;

Et j'ignorais, naïf encore,
Combien le calice est profond
Que ta main douce emmielle et dore
Sans jamais en montrer le fond ;

Car tu savais, déjà coquette,
Ménager longtemps la douleur
En faisant, d'un coup de baguette,
Naître un mirage dans un pleur.

Que de froideurs instantanées
Ont ébranlé longtemps ma foi !
Enfin la pente des années
T'a fait pencher le front sur moi,

Et j'ai cru que ma jalousie,
Humble tigresse aux reins ployés,
Bien rompue à ta fantaisie,
Dormait de fatigue à tes pieds ;

Voilà pourtant qu'une pensée,
Moins qu'un soupçon, moins qu'une erreur,
- Une rêverie insensée
M'a fait tressaillir de terreur ;

Cet éclair de peur indicible
Tout à coup m'a fait entrevoir,
Aux obscurs confins du possible,
Un abîme de désespoir.
Approchez-vous. Ceci, c'est le tas des dévots.
Cela hurle en grinçant un benedicat vos ;
C'est laid, c'est vieux, c'est noir. Cela fait des gazettes.
Pères fouetteurs du siècle, à grands coups de garcettes.
Ils nous mènent au ciel. Ils font, blêmes grimauds,
De l'âme et de Jésus des querelles de mots
Comme à Byzance au temps des Jeans et des Eudoxes.
Méfions-nous ; ce sont des gredins orthodoxes.
Ils auraient fait pousser des cris à Juvénal.
La douairière aux yeux gris s'ébat sur leur journal
Comme sur les marais la grue et la bécasse.
Ils citent Poquelin, Pascal, Rousseau, Boccace,
Voltaire, Diderot, l'aigle au vol inégal,
Devant l'official et le théologal.
L'esprit étant gênant, ces saints le congédient.
Ils mettent Escobar sous bande et l'expédient
Aux bedeaux rayonnants, pour quatre francs par mois.
Avec le vieux savon des jésuites sournois
Ils lavent notre époque incrédule et pensive,
Et le bûcher fournit sa cendre à leur lessive.
Leur gazette, où les mots de venin sont verdis,
Est la seule qui soit reçue au paradis.
Ils sont, là, tout-puissants ; et tandis que leur bande
Prêche ici-bas la dîme et défend la prébende,
Ils font chez Jéhovah la pluie et le beau temps.
L'ange au glaive de feu leur ouvre à deux battants
La porte bienheureuse, effrayante et vermeille ;
Tous les matins, à l'heure où l'oiseau se réveille,
Quand l'aube, se dressant au bord du ciel profond,
Rougit en regardant ce que les hommes font
Et que des pleurs de honte emplissent sa paupière,
Gais, ils grimpent là-haut, et, cognant chez saint-Pierre,
Jettent à ce portier leur journal impudent.
Ils écrivent à Dieu comme à leur intendant,
Critiquant, gourmandant, et lui demandant compte
Des révolutions, des vents, du flot qui monte,
De l'astre au pur regard qu'ils voudraient voir loucher,
De ce qu'il fait tourner notre terre et marcher
Notre esprit, et, d'un timbre ornant l'eucharistie,
Ils cachettent leur lettre immonde avec l'hostie.
Jamais marquis. voyant son carrosse broncher,
N'a plus superbement tutoyé son cocher ;
Si bien que, ne sachant comment mener le monde,
Ce pauvre vieux bon Dieu, sur qui leur foudre gronde,
Tremblant, cherchant un trou dans ses cieux éclatants,
Ne sait où se fourrer quand ils sont mécontents.
Ils ont supprimé Rome ; ils auraient détruit Sparte.
Ces drôles sont charmés de monsieur Bonaparte.
Lucas Pilleul Jun 2017
Quelle était belle, l'époque ou nous pouvions rêver.
Quelle était belle, l'époque ou nous nous entendions à merveille.
Ou est elle, d'ailleurs ? Depuis si longtemps que je l'ai perdue, et que je la cherche.

Pensant trouver mon bonheur dans le tiens, je t'ai demandé de partir.
Es tu plus heureuse ?
Moi non plus.
Pensant te retrouver un jour, mes espoirs de te revoir sont perdus.
Jamais, jamais, jamais, jamais, je ne recommencerais.

Et toi ?
Tant de lassitude entre nous. Cela ne pouvait plus durer. Rien ne pouvait me forcer à rester. Enfin si. Tout le pouvait. Mais la totalité, c'est le néant et je ne puis m'imaginer vivre sans cette faim inhumaine d'îvresse.
Si ce n'est pas de ta faute, est-ce celle du temps ?

Mais aussi, ne puis-je pas oublier une telle débauche. Une telle perte de temps.
Tant de larmes pour si peu de satisfaction.
Je n'en retiens qu'une chose, cetait une erreur. Mais comment la réparer ?
Je n'oserai plus croiser dans ton regard cet amour que tu me donnais.
Je ne pourrai plus imaginer subir telle honte.
Jalousie disais tu. Ce n'est pour moi pas une excuse. Rien ne t'excusera jamais plus.

Aurais-je au moins essayé de te sortir de ce trou si profond que même un géant parmi les géants ne saurait en sortir. Cette vie parsemée d'embûches ne me conviens plus, mais que puis je y faire.
#11
Chanson d'automne.

Déjà plus d'une feuille sèche
Parsème les gazons jaunis ;
Soir et matin, la brise est fraîche,
Hélas ! les beaux jours sont finis !

On voit s'ouvrir les fleurs que garde
Le jardin, pour dernier trésor :
Le dahlia met sa cocarde
Et le souci sa toque d'or.

La pluie au bassin fait des bulles ;
Les hirondelles sur le toit
Tiennent des conciliabules :
Voici l'hiver, voici le froid !

Elles s'assemblent par centaines,
Se concertant pour le départ.
L'une dit : " Oh ! que dans Athènes
Il fait bon sur le vieux rempart !

" Tous les ans j'y vais et je niche
Aux métopes du Parthénon.
Mon nid bouche dans la corniche
Le trou d'un boulet de canon. "

L'autre : " J'ai ma petite chambre
A Smyrne, au plafond d'un café.
Les Hadjis comptent leurs grains d'ambre
Sur le seuil d'un rayon chauffé.

" J'entre et je sors, accoutumée
Aux blondes vapeurs des chibouchs,
Et parmi les flots de fumée,
Je rase turbans et tarbouchs. "

Celle-ci : " J'habite un triglyphe
Au fronton d'un temple, à Balbeck.
Je m'y suspends avec ma griffe
Sur mes petits au large bec. "

Celle-là : " Voici mon adresse :
Rhodes, palais des chevaliers ;
Chaque hiver, ma tente s'y dresse
Au chapiteau des noirs piliers. "

La cinquième : " Je ferai halte,
Car l'âge m'alourdit un peu,
Aux blanches terrasses de Malte,
Entre l'eau bleue et le ciel bleu. "

La sixième : " Qu'on est à l'aise
Au Caire, en haut des minarets !
J'empâte un ornement de glaise,
Et mes quartiers d'hiver sont prêts. "

" A la seconde cataracte,
Fait la dernière, j'ai mon nid ;
J'en ai noté la place exacte,
Dans le pschent d'un roi de granit. "

Toutes : " Demain combien de lieues
Auront filé sous notre essaim,
Plaines brunes, pics blancs, mers bleues
Brodant d'écume leur bassin ! "

Avec cris et battements d'ailes,
Sur la moulure aux bords étroits,
Ainsi jasent les hirondelles,
Voyant venir la rouille aux bois.

Je comprends tout ce qu'elles disent,
Car le poète est un oiseau ;
Mais, captif ses élans se brisent
Contre un invisible réseau !

Des ailes ! des ailes ! des ailes !
Comme dans le chant de Ruckert,
Pour voler, là-bas avec elles
Au soleil d'or, au printemps vert !
On y revient ; il faut y revenir moi-même.
Ce qu'on attaque en moi, c'est mon temps, et je l'aime.
Certes, on me laisserait en paix, passant obscur,
Si je ne contenais, atome de l'azur,
Un peu du grand rayon dont notre époque est faite.

Hier le citoyen, aujourd'hui le poète ;  
Le « romantique » après le « libéral ». -  Allons,
Soit ; dans mes deux sentiers mordez mes deux talons.
Je suis le ténébreux par qui tout dégénère.
Sur mon autre côté lancez l'autre tonnerre.

Vous aussi, vous m'avez vu tout jeune, et voici
Que vous me dénoncez, bonhomme, vous aussi ;
Me déchirant le plus allégrement du monde,
Par attendrissement pour mon enfance blonde.
Vous me criez : « Comment, Monsieur ! qu'est-ce que c'est ?
- La stance va nu-pieds ! le drame est sans corset !
- La muse jette au vent sa robe d'innocence !
- Et l'art crève la règle et dit : C'est la croissance ! »
Géronte littéraire aux aboiements plaintifs,
Vous vous ébahissez, en vers rétrospectifs,
Que ma voix trouble l'ordre, et que ce romantique
Vive, et que ce petit, à qui l'Art Poétique
Avec tant de bonté donna le pain et l'eau,
Devienne si pesant aux genoux de Boileau !
Vous regardez mes vers, pourvus d'ongles et d'ailes,
Refusant de marcher derrière les modèles,
Comme après les doyens marchent les petits clercs ;
Vous en voyez sortir de sinistres éclairs ;
Horreur ! et vous voilà poussant des cris d'hyène
A travers les barreaux de la Quotidienne.

Vous épuisez sur moi tout votre calepin,
Et le père Bouhours et le père Rapin ;
Et m'écrasant avec tous les noms qu'on vénère,
Vous lâchez le grand mot : Révolutionnaire.

Et, sur ce, les pédants en choeur disent : Amen !
On m'empoigne ; on me fait passer mon examen ;
La Sorbonne bredouille et l'école griffonne ;
De vingt plumes jaillit la colère bouffonne :
« Que veulent ces affreux novateurs ? ça des vers ?
- Devant leurs livres noirs, la nuit, dans l'ombre ouverts,
- Les lectrices ont peur au fond de leurs alcôves.
- Le Pinde entend rugir leurs rimes bêtes fauves,
- Et frémit. Par leur faute aujourd'hui tout est mort ;
- L'alexandrin saisit la césure, et la mord ;
- Comme le sanglier dans l'herbe et dans la sauge,
- Au beau milieu du vers l'enjambement patauge ;
- Que va-t-on devenir ? Richelet s'obscurcit.
- Il faut à toute chose un magister dixit.
- Revenons à la règle, et sortons de l'opprobre ;
- L'hippocrène est de l'eau ; donc le beau, c'est le sobre.
- Les vrais sages ayant la raison pour lien,
- Ont toujours consulté, sur l'art, Quintilien ;
- Sur l'algèbre, Leibnitz; sur la guerre, Végèce. »

Quand l'impuissance écrit, elle signe : Sagesse.

Je ne vois pas pourquoi je ne vous dirais point
Ce qu'à d'autres j'ai dit sans leur montrer le poing.
Eh bien, démasquons-nous ! c'est vrai, notre âme est noire ;
Sortons du domino nommé forme oratoire.
On nous a vus, poussant vers un autre horizon
La langue, avec la rime entraînant la raison,

Lancer au pas de charge, en batailles rangées,
Sur Laharpe éperdu, toutes ces insurgées.
Nous avons au vieux style attaché ce brûlot :
Liberté ! Nous avons, dans le même complot,
Mis l'esprit, pauvre diable, et le mot, pauvre hère ;
Nous avons déchiré le capuchon, la haire,
Le froc, dont on couvrait l'Idée aux yeux divins.
Tous on fait rage en foule. Orateurs, écrivains,
Poètes, nous avons, du doigt avançant l'heure,
Dit à la rhétorique : - Allons, fille majeure,
Lève les yeux ! - et j'ai, chantant, luttant, bravant,
Tordu plus d'une grille au parloir du couvent ;
J'ai, torche en main, ouvert les deux battants du drame ;
Pirates, nous avons, à la voile, à la rame,
De la triple unité pris l'aride archipel ;
Sur l'Hélicon tremblant j'ai battu le rappel.
Tout est perdu ! le vers vague sans muselière !
A Racine effaré nous préférons Molière ;
O pédants ! à Ducis nous préférons Rotrou.
Lucrèce Borgia sort brusquement d'un trou,
Et mêle des poisons hideux à vos guimauves ;
Le drame échevelé fait peur à vos fronts chauves ;
C'est horrible ! oui, brigand, jacobin, malandrin,
J'ai disloqué ce grand niais d'alexandrin ;
Les mots de qualité, les syllabes marquises,
Vivaient ensemble au fond de leurs grottes exquises,
Faisaient la bouche en coeur et ne parlant qu'entre eux,
J'ai dit aux mots d'en bas : Manchots, boiteux, goîtreux,
Redressez-vous ! planez, et mêlez-vous, sans règles,
Dans la caverne immense et farouche des aigles !
J'ai déjà confessé ce tas de crimes-là ;
Oui, je suis Papavoine, Érostrate, Attila :
Après ?

Emportez-vous, et criez à la garde,
Brave homme ! tempêtez ! tonnez ! je vous regarde.

Nos progrès prétendus vous semblent outrageants ;
Vous détestez ce siècle où, quand il parle aux gens,
Le vers des trois saluts d'usage se dispense ;
Temps sombre où, sans pudeur, on écrit comme on pense,
Où l'on est philosophe et poète crûment,
Où de ton vin sincère, adorable, écumant,
O sévère idéal, tous les songeurs sont ivres.
Vous couvrez d'abat-jour, quand vous ouvrez nos livres,
Vos yeux, par la clarté du mot propre brûlés ;
Vous exécrez nos vers francs et vrais, vous hurlez
De fureur en voyant nos strophes toutes nues.
Mais où donc est le temps des nymphes ingénues,
Qui couraient dans les bois, et dont la nudité
Dansait dans la lueur des vagues soirs d'été ?
Sur l'aube nue et blanche, entr'ouvrant sa fenêtre,
Faut-il plisser la brume honnête et *****, et mettre
Une feuille de vigne à l'astre dans l'azur ?
Le flot, conque d'amour, est-il d'un goût peu sûr ?
Ô Virgile, Pindare, Orphée ! est-ce qu'on gaze,
Comme une obscénité, les ailes de Pégase,
Qui semble, les ouvrant au haut du mont béni,
L'immense papillon du baiser infini ?
Est-ce que le soleil splendide est un cynique ?
La fleur a-t-elle tort d'écarter sa tunique ?
Calliope, planant derrière un pan des cieux,
Fait donc mal de montrer à Dante soucieux
Ses seins éblouissants à travers les étoiles ?
Vous êtes un ancien d'hier. Libre et sans voiles,
Le grand Olympe nu vous ferait dire : Fi !
Vous mettez une jupe au Cupidon bouffi ;
Au clinquant, aux neuf soeurs en atours, au Parnasse
De Titon du Tillet, votre goût est tenace ;
Apollon vous ferait l'effet d'un Mohican ;
Vous prendriez Vénus pour une sauvagesse.

L'âge - c'est là souvent toute notre sagesse -

A beau vous bougonner tout bas : « Vous avez tort,
- Vous vous ferez tousser si vous criez si fort ;
- Pour quelques nouveautés sauvages et fortuites,
- Monsieur, ne troublez pas la paix de vos pituites.
- Ces gens-ci vont leur train ; qu'est-ce que ça vous fait ?
- Ils ne trouvent que cendre au feu qui vous chauffait.
- Pourquoi déclarez-vous la guerre à leur tapage ?
- Ce siècle est libéral comme vous fûtes page.
- Fermez bien vos volets, tirez bien vos rideaux,
- Soufflez votre chandelle, et tournez-lui le dos !
- Qu'est l'âme du vrai sage ? Une sourde-muette.
- Que vous importe, à vous, que tel ou tel poète,
- Comme l'oiseau des cieux, veuille avoir sa chanson ;
- Et que tel garnement du Pinde, nourrisson
- Des Muses, au milieu d'un bruit de corybante,
- Marmot sombre, ait mordu leur gorge un peu tombante ? »

Vous n'en tenez nul compte, et vous n'écoutez rien.
Voltaire, en vain, grand homme et peu voltairien,
Vous murmure à l'oreille : « Ami, tu nous assommes ! »
- Vous écumez ! - partant de ceci : que nous, hommes
De ce temps d'anarchie et d'enfer, nous donnons
L'assaut au grand Louis juché sur vingt grands noms ;
Vous dites qu'après tout nous perdons notre peine,
Que haute est l'escalade et courte notre haleine ;
Que c'est dit, que jamais nous ne réussirons ;
Que Batteux nous regarde avec ses gros yeux ronds,
Que Tancrède est de bronze et qu'Hamlet est de sable.
Vous déclarez Boileau perruque indéfrisable ;
Et, coiffé de lauriers, d'un coup d'oeil de travers,
Vous indiquez le tas d'ordures de nos vers,
Fumier où la laideur de ce siècle se guinde
Au pauvre vieux bon goût, ce balayeur du Pinde ;
Et même, allant plus ****, vaillant, vous nous criez :
« Je vais vous balayer moi-même ! »

Balayez.

Paris, novembre 1834.
Fable I, Livre II.

À M. Andrieux, de L'Institut.


Toi qui vis vraiment comme un sage,
Sans te montrer, sans te cacher,
Sans fuir les grands, sans les chercher,
Exemple assez rare en notre âge ;
Pardonne-moi, cher Andrieux,
Dans ces vers qu'aux vents je confie,
De dévoiler à tous les yeux
Ta secrète philosophie.

Certain Lapon des plus trapus,
Certain Cafre des plus camus,
Équipaient, comme on dit, de la bonne manière,
Un homme qui, fermant l'oreille à leurs raisons
Vantait l'astre éclatant qui préside aux saisons,
Enfante la chaleur, et produit la lumière.
- Peut-il ériger, s'il n'est fou,
En bienfaiteur de la nature,
Un astre qui, six mois, me cache sa figure,
Et va briller je ne sais où,
Tandis que je gèle en mon trou,
Malgré ma femme et ma fourrure ?
On conçoit que celui qui s'exprimait ainsi
N'était pas l'habitant de la zone torride.
Pour moi, disait cet autre, en mon climat aride,
Je ne gèle pas, Dieu merci !
Mais je rôtis en récompense ;
Et sans avoir l'honneur d'être Lapon, je pense
Qu'un fou, lui seul, a pu vanter
La douce et bénigne influence
Du soleil, qui ne luit que pour me tourmenter ;
Qui, d'un bout de l'année à l'autre,
Embrase la terre, les airs,
Et porte en mon pays, jusques au fond des mers,
La chaleur qu'il refuse au vôtre.
Le fou, qui cependant célébrait les bienfaits
Du roi de la plaine éthérée,
Fils de la zone tempérée,
N'était rien moins que fou, quoiqu'il fût né Français.
Sans se formaliser des vives apostrophes
Du nègre et du nain philosophes,
Seigneur Lapon, dit-il, votre raisonnement
Est sans réplique, en Sibérie ;
Comme le vôtre en Cafrerie,
Monsieur le noir ; mais franchement,
Autre part, c'est tout autrement.
En France, par exemple, on ne vous croirait guère.
L'astre à qui vous faites la guerre,
Là, par ses rayons bienfaisants,
De fleurs et de fruits, tous les ans,
Couvre mes champs et mon parterre ;
S'éloignant sans trop me geler,
S'approchant sans trop me brûler,
De mon climat, qu'il favorise ;
À la faucille, au soc, il livre tour à tour
Mes campagnes, qu'il fertilise
Par son départ et son retour.
Vous qui craignez le feu, vous qui craignez la glace
Venez donc à Paris. Gens d'excellent conseil
Disent qu'un sage ne se place
Trop près ni trop **** du soleil.
I.

Maintenant il se dit : - L'empire est chancelant
La victoire est peu sûre. -
Il cherche à s'en aller, furtif et reculant.
Reste dans la masure !

Tu dis : - Le plafond croule. Ils vont, si l'on me voit,
Empêcher que je sorte. -
N'osant rester ni fuir, tu regardes le toit,
Tu regardes la porte ;

Tu mets timidement la main sur le verrou.
Reste en leurs rangs funèbres !
Reste ! la loi qu'ils ont enfouie en un trou
Est là dans les ténèbres.

Reste ! elle est là, le flanc percé de leur couteau,
Gisante, et sur sa bière
Ils ont mis une dalle. Un pan de ton manteau
Est pris sous cette pierre !

Pendant qu'à l'Elysée en fête et plein d'encens
On chante, on déblatère,
Qu'on oublie et qu'on rit, toi tu pâlis ; tu sens
Ce spectre sous la terre !

Tu ne t'en iras pas ! quoi ! quitter leur maison
Et fuir leur destinée !
Quoi ! tu voudrais trahir jusqu'à la trahison,
Elle-même indignée !

Quoi ! tu veux renier ce larron au front bas
Qui t'admire et t'honore !
Quoi ! Judas pour Jésus, tu veux pour Barabbas
Etre Judas encore !

Quoi ! n'as-tu pas tenu l'échelle à ces fripons,
En pleine connivence ?
Le sac de ces voleurs ne fut-il pas, réponds,
Cousu par toi d'avance !

Les mensonges, la haine au dard froid et visqueux,
Habitent ce repaire ;
Tu t'en vas ! de quel droit ? étant plus renard qu'eux,
Et plus qu'elle vipère !

II.

Quand l'Italie en deuil dressa, du Tibre au Pô,
Son drapeau magnifique,
Quand ce grand peuple, après s'être couché troupeau,
Se leva république,

C'est toi, quand Rome aux fers jeta le cri d'espoir,
Toi qui brisas son aile,
Toi qui fis retomber l'affreux capuchon noir
Sur sa face éternelle !

C'est toi qui restauras Montrouge et Saint-Acheul,
Écoles dégradées,
Où l'on met à l'esprit frémissant un linceul,
Un bâillon aux idées.

C'est toi qui, pour progrès rêvant l'homme animal,
Livras l'enfant victime
Aux jésuites lascifs, sombres amants du mal,
En rut devant le crime !

Ô pauvres chers enfants qu'ont nourris de leur lait
Et qu'ont bercés nos femmes,
Ces blêmes oiseleurs ont pris dans leur filet
Toutes vos douces âmes !

Hélas ! ce triste oiseau, sans plumes sur la chair,
Rongé de lèpre immonde,
Qui rampe et qui se meurt dans leur cage de fer,
C'est l'avenir du monde !

Si nous les laissons faire, on aura dans vingt ans,
Sous les cieux que Dieu dore,
Une France aux yeux ronds, aux regards clignotants,
Qui haïra l'aurore !

Ces noirs magiciens, ces jongleurs tortueux,
Dont la fraude est la règle,
Pour en faire sortir le hibou monstrueux,
Ont volé l'oeuf de l'aigle !

III.

Donc, comme les baskirs, sur Paris étouffé,
Et comme les croates,
Créateurs du néant, vous avez triomphé
Dans vos haines béates ;

Et vous êtes joyeux, vous, constructeurs savants
Des préjugés sans nombre,
Qui, pareils à la nuit, versez sur les vivants
Des urnes pleines d'ombre !

Vous courez saluer le nain Napoléon ;
Vous dansez dans l'orgie.
Ce grand siècle est souillé ; c'était le Panthéon,
Et c'est la tabagie.

Et vous dites : c'est bien ! vous sacrez parmi nous
César, au nom de Rome,
L'assassin qui, la nuit, se met à deux genoux
Sur le ventre d'un homme.

Ah ! malheureux ! louez César qui fait trembler,
Adorez son étoile ;
Vous oubliez le Dieu vivant qui peut rouler
Les cieux comme une toile !

Encore un peu de temps, et ceci tombera ;
Dieu vengera sa cause !
Les villes chanteront, le lieu désert sera
Joyeux comme une rose !

Encore un peu de temps, et vous ne serez plus,
Et je viens vous le dire.
Vous êtes les maudits, nous sommes les élus.
Regardez-nous sourire !

Je le sais, moi qui vis au bord du gouffre amer
Sur les rocs centenaires,
Moi qui passe mes jours à contempler la mer
Pleine de sourds tonnerres !

IV.

Toi, leur chef, sois leur chef ! c'est là ton châtiment.
Sois l'homme des discordes !
Ces fourbes ont saisi le genre humain dormant
Et l'ont lié de cordes.

Ah ! tu voulus défaire, épouvantable affront !
Les âmes que Dieu crée ?
Eh bien, frissonne et pleure, atteint toi-même au front
Par ton œuvre exécrée !

À mesure que vient l'ignorance, et l'oubli,
Et l'erreur qu'elle amène,
À mesure qu'aux cieux décroît, soleil pâli,
L'intelligence humaine,

Et que son jour s'éteint, laissant l'homme méchant
Et plus froid que les marbres,
Votre honte, ô maudits, grandit comme au couchant
Grandit l'ombre des arbres !

V.

Oui, reste leur apôtre ! oui, tu l'as mérité.
C'est là ta peine énorme !
Regarde en frémissant dans la postérité !
Ta mémoire difforme.

On voit, louche rhéteur des vieux partis hurlants,
Qui mens et qui t'emportes,
Pendre à tes noirs discours, comme à des clous sanglants,
Toutes les grandes mortes,

La justice, la foi, bel ange souffleté
Par la goule papale,
La vérité, fermant les yeux, la liberté
Echevelée et pâle,

Et ces deux soeurs, hélas ! nos mères toutes deux,
Rome, qu'en pleurs je nomme,
Et la France sur qui, raffinement hideux,
Coule le sang de Rome !

Homme fatal ! l'histoire en ses enseignements
Te montrera dans l'ombre,
Comme on montre un gibet entouré d'ossements
Sur la colline sombre !

Jersey, le 24 janvier 1853.
I.

Bien ! pillards, intrigants, fourbes, crétins, puissances !
Attablez-vous en hâte autour des jouissances !
Accourez ! place à tous !
Maîtres, buvez, mangez, car la vie est rapide.
Tout ce peuple conquis, tout ce peuple stupide,
Tout ce peuple est à vous !

Vendez l'état ! coupez les bois ! coupez les bourses !
Videz les réservoirs et tarissez les sources !
Les temps sont arrivés.
Prenez le dernier sou ! prenez, gais et faciles,
Aux travailleurs des champs, aux travailleurs des villes !
Prenez, riez, vivez !

Bombance ! allez ! c'est bien ! vivez ! faites ripaille !
La famille du pauvre expire sur la paille,
Sans porte ni volet.
Le père en frémissant va mendier dans l'ombre ;
La mère n'ayant plus de pain, dénûment sombre,
L'enfant n'a plus de lait.

II.

Millions ! millions ! châteaux ! liste civile !
Un jour je descendis dans les caves de Lille
Je vis ce morne enfer.
Des fantômes sont là sous terre dans des chambres,
Blêmes, courbés, ployés ; le rachis tord leurs membres
Dans son poignet de fer.

Sous ces voûtes on souffre, et l'air semble un toxique
L'aveugle en tâtonnant donne à boire au phtisique
L'eau coule à longs ruisseaux ;
Presque enfant à vingt ans, déjà vieillard à trente,
Le vivant chaque jour sent la mort pénétrante
S'infiltrer dans ses os.

Jamais de feu ; la pluie inonde la lucarne ;
L'œil en ces souterrains où le malheur s'acharne
Sur vous, ô travailleurs,
Près du rouet qui tourne et du fil qu'on dévide,
Voit des larves errer dans la lueur livide
Du soupirail en pleurs.

Misère ! l'homme songe en regardant la femme.
Le père, autour de lui sentant l'angoisse infâme
Etreindre la vertu,
Voit sa fille rentrer sinistre sous la porte,
Et n'ose, l'œil fixé sur le pain qu'elle apporte,
Lui dire : D'où viens-tu ?

Là dort le désespoir sur son haillon sordide ;
Là, l'avril de la vie, ailleurs tiède et splendide,
Ressemble au sombre hiver ;
La vierge, rose au jour, dans l'ombre est violette ;
Là, rampent dans l'horreur la maigreur du squelette,
La nudité du ver ;

Là frissonnent, plus bas que les égouts des rues,
Familles de la vie et du jour disparues,
Des groupes grelottants ;
Là, quand j'entrai, farouche, aux méduses pareille,
Une petite fille à figure vieille
Me dit : J'ai dix-huit ans !

Là, n'ayant pas de lit, la mère malheureuse
Met ses petits enfants dans un trou qu'elle creuse,
Tremblants comme l'oiseau ;
Hélas ! ces innocents aux regards de colombe
Trouvent en arrivant sur la terre une tombe
En place d'un berceau !

Caves de Lille ! on meurt sous vos plafonds de pierre !
J'ai vu, vu de ces yeux pleurant sous ma paupière,
Râler l'aïeul flétri,
La fille aux yeux hagards de ses cheveux vêtue,
Et l'enfant spectre au sein de la mère statue !
Ô Dante Alighieri !

C'est de ces douleurs-là que sortent vos richesses,
Princes ! ces dénûments nourrissent vos largesses,
Ô vainqueurs ! conquérants !
Votre budget ruisselle et suinte à larges gouttes
Des murs de ces caveaux, des pierres de ces voûtes,
Du cœur de ces mourants.

Sous ce rouage affreux qu'on nomme tyrannie,
Sous cette vis que meut le fisc, hideux génie,
De l'aube jusqu'au soir,
Sans trêve, nuit et jour, dans le siècle où nous sommes
Ainsi que des raisins on écrase des hommes,
Et l'or sort du pressoir.

C'est de cette détresse et de ces agonies,
De cette ombre, où jamais, dans les âmes ternies,
Espoir, tu ne vibras,
C'est de ces bouges noirs pleins d'angoisses amères,
C'est de ce sombre amas de pères et de mères
Qui se tordent les bras,

Oui, c'est de ce monceau d'indigences terribles
Que les lourds millions, étincelants, horribles,
Semant l'or en chemin,
Rampant vers les palais et les apothéoses,
Sortent, monstres joyeux et couronnés de roses,
Et teints de sang humain !

III.

Ô paradis ! splendeurs ! versez à boire aux maîtres !
L'orchestre rit, la fête empourpre les fenêtres,
La table éclate et luit ;
L'ombre est là sous leurs pieds ! les portes sont fermées
La prostitution des vierges affamées
Pleure dans cette nuit !

Vous tous qui partagez ces hideuses délices,
Soldats payés, tribuns vendus, juges complices,
Évêques effrontés,
La misère frémit sous ce Louvre où vous êtes !
C'est de fièvre et de faim et de mort que sont faites
Toutes vos voluptés !

À Saint-Cloud, effeuillant jasmins et marguerites,
Quand s'ébat sous les fleurs l'essaim des favorites,
Bras nus et gorge au vent,
Dans le festin qu'égaie un lustre à mille branches,
Chacune, en souriant, dans ses belles dents blanches
Mange un enfant vivant !

Mais qu'importe ! riez ! Se plaindra-t-on sans cesse ?
Serait-on empereur, prélat, prince et princesse,
Pour ne pas s'amuser ?
Ce peuple en larmes, triste, et que la faim déchire,
Doit être satisfait puisqu'il vous entend rire
Et qu'il vous voit danser !

Qu'importe ! Allons, emplis ton coffre, emplis ta poche.
Chantez, le verre en main, Troplong, Sibour, Baroche !
Ce tableau nous manquait.
Regorgez, quand la faim tient le peuple en sa serre,
Et faites, au -dessus de l'immense misère,
Un immense banquet !

IV.

Ils marchent sur toi, peuple ! Ô barricade sombre,
Si haute hier, dressant dans les assauts sans nombre
Ton front de sang lavé,
Sous la roue emportée, étincelante et folle,
De leur coupé joyeux qui rayonne et qui vole,
Tu redeviens pavé !

À César ton argent, peuple ; à toi la famine.
N'es-tu pas le chien vil qu'on bat et qui chemine
Derrière son seigneur ?
À lui la pourpre ; à toi la hotte et les guenilles.
Peuple, à lui la beauté de ces femmes, tes filles,
À toi leur déshonneur !

V.

Ah ! quelqu'un parlera. La muse, c'est l'histoire.
Quelqu'un élèvera la voix dans la nuit noire.
Riez, bourreaux bouffons !
Quelqu'un te vengera, pauvre France abattue,
Ma mère ! et l'on verra la parole qui tue
Sortir des cieux profonds !

Ces gueux, pires brigands que ceux des vieilles races,
Rongeant le pauvre peuple avec leurs dents voraces,
Sans pitié, sans merci,
Vils, n'ayant pas de cœur, mais ayant deux visages,
Disent : - Bah ! le poète ! il est dans les nuages ! -
Soit. Le tonnerre aussi.

Le 19 janvier 1853.
Les sots sont un peuple nombreux,
Trouvant toutes choses faciles :
Il faut le leur passer, souvent ils sont heureux ;
Grand motif de se croire habiles.
Un âne, en broutant ses chardons,
Regardait un pasteur jouant, sous le feuillage,
D'une flûte dont les doux sons
Attiraient et charmaient les bergers du bocage.
Cet âne mécontent disait : ce monde est fou !
Les voilà tous, bouche béante,
Admirant un grand sot qui sue et se tourmente
À souffler dans un petit trou.
C'est par de tels efforts qu'on parvient à leur plaire,
Tandis que moi... suffit... allons-nous-en d'ici,
Car je me sens trop en colère.
Notre âne, en raisonnant ainsi,
Avance quelques pas, lorsque sur la fougère
Une flûte oubliée en ces champêtres lieux
Par quelque pasteur amoureux
Se trouve sous ses pieds. Notre âne se redresse,
Sur elle de côté fixe ses deux gros yeux ;
Une oreille en avant, lentement il se baisse,
Applique son naseau sur le pauvre instrument,
Et souffle tant qu'il peut. ô hasard incroyable !
Il en sort un son agréable.
L'âne se croit un grand talent,
Et tout joyeux s'écrie en faisant la culbute :
Eh ! Je joue aussi de la flûte !
De jeunes écoliers avaient pris dans un trou
Un hibou,
Et l'avaient élevé dans la cour du collège.
Un vieux chat, un jeune oison,
Nourris par le portier, étaient en liaison
Avec l'oiseau ; tous trois avaient le privilège
D'aller et de venir par toute la maison.
À force d'être dans la classe,
Ils avaient orné leur esprit,
Savaient par cœur Denys d'Halicarnasse
Et tout ce qu'Hérodote et Tite-Live ont dit.
Un soir, en disputant (des docteurs c'est l'usage),
Ils comparaient entre eux les peuples anciens.
Ma foi, disait le chat, c'est aux égyptiens
Que je donne le prix : c'était un peuple sage,
Un peuple ami des lois, instruit, discret, pieux,
Rempli de respect pour ses dieux ;
Cela seul, à mon gré, lui donne l'avantage.
J'aime mieux les athéniens,
Répondait le hibou : que d'esprit ! Que de grâce !
Et dans les combats quelle audace !
Que d'aimables héros parmi leurs citoyens !
A-t-on jamais plus fait avec moins de moyens ?
Des nations c'est la première.
Parbleu ! Dit l'oison en colère,
Messieurs, je vous trouve plaisants :
Et les romains, que vous en semble ?
Est-il un peuple qui rassemble
Plus de grandeur, de gloire, et de faits éclatants ?
Dans les arts, comme dans la guerre,
Ils ont surpassé vos amis.
Pour moi, ce sont mes favoris ;
Tout doit céder le pas aux vainqueurs de la terre.
Chacun des trois pédants s'obstine en son avis,
Quand un rat, qui de **** entendait la dispute,
Rat savant, qui mangeait des thèmes dans sa hutte,
Leur cria : je vois bien d'où viennent vos débats :
L'Égypte vénérait les chats,
Athènes les hiboux, et Rome, au capitole,
Aux dépens de l'état nourrissait des oisons :
Ainsi notre intérêt est toujours la boussole
Que suivent nos opinions.
Tu meurs d'envie de moi
Et tu me dis tout de go
J'ai envie de toi

Maintenant
Bande
Bande
Bande
Et tu chronomètres le temps
Qu'il me faudra pour atteindre
La taille exacte que tu désires
Et quand le petit soldat s'exécute
Au quart de tour comme tu l'exiges
Quand il pointe l'arme vers tes neiges éternelles
Tu dis : Garde à vous, fixe
Tu condamnes mes fesses au peloton d'exécution
Au clic de ton appareil photo
Tu tires à vue
Tu mitrailles à bout portant
Et quand tu es enfin satisfaite de la pose
Tu dis :
Déposez arme
Et je me dégonfle
Instantanément

Et tu exaltes, tu jubiles
De ta toute puissance
Je suis ta chose, ton pantin
Ton esclave
Tu es ma maîtresse
Et tu me flagelles à distance de ton flash.

Et tu exiges des photos explicites
Des gros plans, des détails intimes
De mes parties honteuses
Tu veux la vulve qui dort paisiblement sous mon aisselle
Tu veux la raie du cul qui se dessine dans le creux de mon coude

Tu veux la trique qui ronfle
Au coeur de la mangrove du mont de Venus

Tu veux le trou de mon cul dans le nombril béant
Que je forme de mes plantes de pied jointes
Tu veux que mon sein gauche secrète
A gogo des tasse de café chaud arabica

Tu veux tout
Tout de suite
Le tout et les parties
Sans filtre
Sans retouches

Tu dis que mains et mes doigts t'excitent
Et tu suces mes ongles pour en soutirer
Les envies et les cuticules

Et tu mordilles mes orteils
Lentement l'un après l'autre
Tu croques
Histoire de voir si je suis chatouilleux
Ou si je ne suis pas déjà mort

Et tu veux que je me batte en douce
Comme on bat la campagne
Comme on bat un cil et les cartes
Comme on bat le fer quand il est chaud
Comme on bat le grain pour le moudre
Comme on bat sa coulpe
Comme on bat la mesure
Et comme on bat son coeur
Je me bats en douce
Je te baptises de mon foutre
Je te fais des messes basses
Et je fais main basse sur tes envies
A voix basse
Je m'exécute
Je t'exécute
Car tu reignes vierge souveraine,
En sourdine, Osmose et Extase,
Dans mon royaume tantrique.

— The End —