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Mon papa, c'est le plus fort des papas.
Mon papa, c'est le plus beau des papas.
Mon papa, même quand il est fatigué, on dirait Richard Gere.
Mon papa, même si il est carnivore, moi, je l'aime quand même.
Mon papa, quand il mange, on dirait qu'il a 5 ans, mais moi, je l'aime quand même.
Mon papa, il a des voitures super cool qui font vroom.
Mon papa, quand il conduit, on dirait Michel Vaillant, même pas peur.
Mon papa, quand il me dit bonne nuit, j'ai même plus peur.
Les monstres sous mon lit, eux, ils se désintègrent avec la force des bisous de mon papa.
Mon papa, parfois, il ronfle et je l'aime quand même.
Mon papa, quand on est dans la piscine, il joue au crocrodile avec nous.
Mon papa, quand il porte des choses, les manches de sa chemise se déchire sous les   muscles.
Mon papa, avec une barbe, on dirait un homme des caverne, c'est trop cool.
Mon papa, quand il fait des câlins, on disparait sous ses couches d'amour.
Mon papa, quand il nous emmène faire du shopping, il supporte des heures et il sourit.
Mon papa, il nous laisse faire des trucs qui lui font peur, mais il veut nous faire plaisir, alors il dit oui.
Mon papa, il m'a laissé faire du saut en parachute, et je suis même pas morte.
Mon papa, il râle parfois mais on sait qu'en fait, c'est parce qu'il nous aime.
Mon papa, même quand il voyage, il pense à nous.
Mon papa, il nous emmène en voyage avec des photos tout le temps quand il travail.
Mon papa, il nous emmène en voyage tout le temps quand il est en vacances.
Mon papa, il fait des trucs de papa trop génial.
Par exemple, il connait nos restaurants préférés, et il sait ce qui nous fait plaisir.
Alors il nous y emmène.
Mon papa, même quand il est en colère, il est beau.
Mon papa, quand il sourit il est comme Thor, le dieu du tonnerre, il est puissant.
Du coup, parfois, ma maman elle fait un nervous break down.
Parce que mon papa il est trop beau c'est même pas normal.
Mon papa, il a un double menton pour que si un jour Game Of Thrones arrive dans la vraie vie, on pourra pas lui trancher la gorge.
Mon papa, il fait du vélo plus vite que le Tour de France. La preuve, ca fait des années qu'ils sont en France, mon papa, lui, il est déjà à Dubai.
Mon papa, parfois il oublie notre anniversaire quand on lui demande au pif, mais il oublie jamais de le souhaiter, donc on lui pardonne.
Mon papa, il voyage en first class.
Mon papa, il connait les aéroports mieux que James Bond.
Mon papa, il regarde des series TV de jeunes.
Mon papa, il porte des costards.
Mon papa, il nous emmène manger des dans endroits incroyables.
Mon papa, il nous emmène dans des hôtels de luxe.
Mon papa, il devrait être président du monde.
Mon papa, il est mieux que les autres papa parce que c'est le mien.
Mon papa, il est irremplaçable.  
Mon papa, si on m'en donnait un autre, j'en voudrais pas.
Mon papa, je veux que celui la.
Mon papa il est pas toujours là, mais c'est pas grave, parce qu'il est jamais ****.
Mon papa, il traverse le monde mais après il nous raconte, alors c'est cool.
Mon papa, il fait une super vinaigrette. Dommage que j'aime pas la vinaigrette.
Mon papa, quand il fait un barbeque, ca fait beaucoup de fumée et pas beaucoup de feu, mais c'est pour mieux nous impressioner quand il fait rôtir la viande.
Mon papa, il parle Anglais.
Mon papa, c'est le meilleur papa du monde.
Mon papa, je l'aime, même si maintenant, il a presque un demi siècle.
Mon papa, c'est comme un druide.
Ca meurt jamais.
C'est trop cool.
Mon papa, c'est comme une mode indémodable, tu veux jamais le remplacer, il est toujours tendance.
Mon papa, on peut pas le comparer a une mode fashion, parce que c'est un humain.
Mon papa, c'est le meilleur humain que je connaisse.
Avec ma maman et ma soeur et mon chat, mais chuuuuut.
C'est un secret.
Mais ce que je préfère à propos de mon papa, c'est que dès que je le vois, je peux lui dire:
"mon papa, je l'aime."
Thomas Jan 2022
Cette ville écrasée sous les signaux hallucinés
De commerces blindés et de business débridé
Jonchée des ordures mentales et des pourritures verbales,
à grignoté cet espace comme un rat patriarcal

Hantés par les chimères implantées au scalpel
Qui s’éclipsent dans un râle à chaque fois qu’on se réveille
Sur des trottoirs miteux qu'on arpente avec peine
Avec la boue sous nos pieds, et la crasse dans nos veines

On a plié sous le poids de ce que la ville nous a privé.
Dans les formes sa nuit odorante et gluante
Influencés par les gangs d'une valeur anarchisante
Et plongés en abimes au fond de cette nuit sanguine

On voudrait tout rejouer, vacillant, comme le phare
Qui contemple, hagard, la ruée des cafards
Et dans un dernier effort pour nous hypnotiser,
La ville nous livre en pâture aux chiens carbonisés

Le tintement des coupes dans la brume artificielle
Neutralise les rampants de cette tour de Babel
Et les sons du stylos sur papier parano
Sont remplacés par les cris des couteaux tranchant la peau

Et la chair et les os
Et du sang et des larmes
Du vacarme infernal
Des détonations cérébrales
Des entrailles putréfiées
Jailli un souffle empoisonné
Et nous restons médusé
Par l'absence d'humanité

Les rues scintillantes
Éclairées par la tété
La lueur violente  
Des bouches noircies et enfumées
Les grouillants salissants
Anonymes agonisants
Des cris que personne n’entend,
Des invisibles que personne ne défend

Figé comme crétin qui de colère crispe les poings
Étranger parmi les siens humilié comme un larbin
On reste allongés dans la poussière face contre terre
Mais on reste assuré que notre rage est salutaire

Déjà ça tremble sous les pieds des biens pensants
Déjà ça grogne aux oreilles des bienveillants
Alors on reste là à observer impunément
Des remparts occultants qui se fissurent singulièrement

Et du fond des cimetières revient une herbe un peu plus verte
Et du fond des ghettos un asticot rejoint la secte
De ceux qui croulent sous la promesse d'une existence
Qui maintiendra leur cerveau dans un état de complaisance

Mais on sait qu’un jour, notre printemps reviendra
Et on sait qu’un jour la chaleur nous stimulera
Et la lumière brillera pour tous les anges et les salauds
Et elle consumera tous les faisans et collabo

Et ils sentiront toute la menace des renégats
Et ils comprendront que c'en est fini ici-bas
Et ils trembleront devant la détermination
De ceux qui n'ont rien a perdre armés de pierres et de bâtons

Enfin on pourra se tirer
Briser les chaines a nos poignets
Et on pourra se libérer
De la douleur et de la fièvre
Finis les temps répréhensifs
Emplis de ténèbres et de peines
On cherchera la saveur
Et le parfum des jours meilleurs

Mais y'a personne aux commandes
Et dans une crise d'indifférence
On supprimera de nos états
Le ciment de paranoïa
Et on pourra s'envoler
Vers une idée de liberté
Et on pourra se reposer
Car on n'est pas fait pour vivre de cauchemars et de haine
La vie est un ensemble de hauts et de bas..
il n'y a rien qui puisse changer cela..
Tu n'as qu'a vivre correctement et tu gagneras ce combat..

La vie est remplie de surprise..
Tu peux etre riche et quand tu t'attends le moin,tout se volatise..
Tu peux etre pauvre et quand tu prend ton destin en main,tout se stabilise..

La vie,ce n'est pas avoir et obtenir
mais,plutot etre et devenir..
c'est comme ca que tu resteras a jamais dans des coeurs comme un souvenir..

La vie est un miracle..
avec confiance, evites les obstacles,
car ce n'est pas en regardant le spectacle,
que tu pourra etre au pinacle..

La vie est un mystere..
resoudre la a la facon adventuriere,
et de toi,tu seras fiere..

La vie n'est pas toujours celle qu'on esperer,
mais tant qu'on a la chance de respirer,
tant qu'on a le pouvoir de perseverer,
une vie meilleure,rien ne pourra en empecher..

Ne baisse jamais tes bras..
car ton jour viendra..

Tu peux te trouver confronter a de nombreuses problemes,
pensant toujours a te sortir de ces dilemmes..

Mais n'oublie jamais que tes problemes,

peut importe lesquels,
peuvent etre vaincus par ton perseverance graduel..
car la vie est belle..
french poem..
second french poem i've written up to today..
hope some of you understand french and that you like it..thanks
Paul d'Aubin Oct 2015
Adieu chère maison de mes ancêtres

Cette fois ci, le sort en est jeté,
Les acquéreurs improbables, les propriétaires chimériques,
ont consigne la somme convenue sur les fonds du notaire.
Et toi, chère maison, tu vas changer de famille et d'amours.
Désormais, nos enfances envolées, ne retrouveront plus le secours,
des vielles boiseries et des tapisseries centenaires,
de toutes ces armoire en châtaignier et ces commodes de noyer,
auxquels nous rattache encor comme un fil invisible,
tant de senteurs, d'images et souvenirs fanés.
Et le tic-tac mélodieux de la vieille horloge dans l'entrée du 19.
Et ces mansardes, chargées d'objets hétéroclites que nous aimons tant fouiller.
Quant au jardin qui aurait pu être un parc,
comment oublier ses massifs de groseilliers et ses fraises des bois ?
Et les plants de rhubarbe, la sauge aux grandes vertus, aux dires de grand-mère.
Ainsi que les allées de marguerites, attirant les abeilles,
plus ****, remplacées par des rosiers blancs, roses et rouges si odorants.
Cette maison de famille qui résista a tant de coups du sort,
a péri des impôts et des frais d'entretien du jardin,
du manque de modernisation aussi. Alors que tant de logements sans âme étaient construits.
Surtout de l'âge et du départ de sa chère maîtresse, ma mère, qui y avait trop froid et ne pouvait y vivre seule.
Et aussi un peu, ma franchise l'admet, du manque d'initiatives et de goût pour l'association de nous tous, de notre fratrie.
Certes l'on pourra trouver bien des excuses.
Les uns furent trop ****, les autres manquèrent de moyens.
Mais dans mon fors intérieur,
Je sais que cette maison manqua surtout de notre audace et de notre courage commun a la faire vivre.
Aussi notre maison de famille fut comme abandonnée a son sort par ses enfants disperses par la vie.
Pauvre maison, nous n'avons su te garder; puisses-tu tomber désormais dans des mains aimantes, artistes et vertes !

Paul Arrighi
Peut s’ouvrir un débat
long comme l’éternité
de savoir si vrai ou faux
avait raison Don Gomez
qui harangua son fils
en disant :
« Ce n’est que par le sang
Qu’on lave tel outrage. »

Ô quel mot fer,
quel mot acier,
sans une goute d’étain !
Le mot sans verdure,
le mot rouge sans mélange,
plus rouge que le sang,
visant perdre le souffle
au donneur de soufflet !
qui pourra le baptiser cannibalisme
ou bien légitime défense ?

Quoi qu’on dise, tranchons :
ce fut verser le sang.
Et jugeons :
Ce qu’à l’époque fut d’or
l’acte de le Cid1 Compeador
ne le serait point aujourd’hui.
C’est comme le triomphe d’Achille2
Sur son ennemi Hector.
Les deux grand guerriers, avides de sang
et de gloire malsaine,
vallées et plaines coururent,
lacs et rivières nagèrent,
étangs et marécages pataugèrent,
monts et collines gravirent,
et descendirent en volant,
se voulant l’un l’autre proie,
et l’emporta le plus criminel.

A l’Epoque Contemporaine
Pas toute victoire ne se couvre de lauriers.

La Pucelle d’Orléans ne fut-elle
brûlée vive par l’ennemi,
son tueur ignoré par tant,
et son Nom à jamais porta la couronne
à la façon de la Sainte Vierge
qui jamais ne lutta que contre le péchée,
et son arme au combat ne fut que piété,
contrairement à Charlemagne
qui fut couronné de fer
dont il eut son bon usage.

Le trépas d’un héro ne tue pas l’héroïsme.

Ce fut le cas, ce semble, du Prince
Né **** d’un palais royal.
Ce Prince qu’on le nomme :
Mohammed Bouazizi.
La montée au sommet ne fut pas improviste
ni sujet de surprise ;
c’est le fruit du courage bénit,
lequel conditionnera et la pluie et le soleil
dans tous les coins du monde.

1. Le Cid : Personnage Principal de la Tragi-comédie qui porte son nom de Pierre Corneille dont la première représentation eut lieu le 5 janvier 16372.
2. Achille et Hector sont les personnages les plus célèbres de L’Iliade d’Homère VIIIe siècle av. J.-C.
En mémoire du héro tunisien Mohammed Bouazizi
www.amazon.author/bonim007
I


Que ces vallons déserts, que ces vastes prairies

Où j'allais promener mes tristes rêveries,

Que ces rivages frais, que ces bois, que ces champs,

Que tout prenne une voix et retrouve des chants

Et porte jusqu'au sein de Ta Toute Puissance

Un hymne de bonheur et de reconnaissance !

Celle, qui dans un chaste et pur embrassement,

A reçu mon amour et mon premier serment,

Celle à qui j'ai juré de consacrer ma vie

Par d'injustes parents m'avait été ravie ;

Ils avaient repoussé mes pleurs, et les ingrats

Avaient osé venir l'arracher de mes bras ;

Et jaloux de m'ôter la dernière espérance

Qui pût me soutenir et calmer ma souffrance,

Un message trompeur nous avait informés

Que sur un bord lointain ses yeux s'étaient fermés.

Celui qui fut aimé, celui qui put connaître

Ce bonheur enivrant de confondre son être,

De vivre dans un autre, et de ne plus avoir

Que son cœur pour sentir, et que ses yeux pour voir,

Celui-là pourra seul deviner et comprendre

Ce qu'une voix humaine est impuissante à rendre ;

Celui-là saura seul tout ce que peut souffrir

Un homme, et supporter de tourments sans mourir.

Mais la main qui sur moi s'était appesantie

Semble de mes malheurs s'être enfin repentie.

Leur cœur s'est attendri, soit qu'un pouvoir caché,

Que sais-je ? Ou que la voix du remords l'ait touché.

Celle que je pleurais, que je croyais perdue,

Elle vit ! elle vient ! et va m'être rendue !

Ne demandez donc plus, amis, pourquoi je veux

Qu'on mêle ces boutons de fleurs dans mes cheveux.

Non ! Je n'ai point souffert et mes douleurs passées

En cet heureux instant sont toutes effacées ;

Que sont tous mes malheurs, que sont tous mes ennuis.

Et ces rêves de deuil qui tourmentaient mes nuits ?

Et moi ! J'osais du ciel accuser la colère !

Je reconnais enfin sa bonté tutélaire.

Et je bénis ces maux d'un jour qui m'ont appris

Que mes yeux ne devaient la revoir qu'à ce prix !


II


Quel bonheur est le mien ! Pourtant - ces deux années

Changent bien des projets et bien des destinées ;

- Je ne puis me celer, à parler franchement,

Que ce retour me gêne un peu, dans ce moment.

Certes, le souvenir de notre amour passé

N'est pas un seul instant sorti de ma pensée ;

Mais enfin je ne sais comment cela s'est fait :

Invité cet hiver aux bals chez le préfet.

J'ai vu sa fille aînée, et par étourderie

Risqué de temps en temps quelque galanterie :

Je convins aux parents, et fus bientôt admis

Dans cette intimité qu'on réserve aux amis.

J'y venais tous les soirs, je faisais la lecture,

Je présentais la main pour monter en voiture ;

Dans nos réunions en petit comité,

Toujours près de la fille, assis à son côté.

Je me rendais utile à tout, j'étais son page.

Et quand elle chantait, je lui tournais la page.

Enfin, accoutumé chaque jour à la voir.

60 Que sais-je ? J'ai rendu, sans m'en apercevoir,

Et bien innocemment, des soins, que je soupçonne

N'être pas dédaignés de la jeune personne :

Si bien que je ne sais trop comment m'arranger :

On jase, et les parents pourront bien exiger

Que j'ôte ce prétexte à la rumeur publique,

Et, quelque beau matin, vouloir que je m'explique.

C'est ma faute, après tout, je me suis trop pressé,

Et, comme un débutant, je me suis avancé.

Mais, d'un autre côté, comment prévoir… ? N'importe,

Mes serments sont sacrés, et mon amour l'emporte,

J'irai demain trouver le père, et s'il vous plaît,-

Je lui raconterai la chose comme elle est.

- C'est bien ! - Mais que va-t-on penser, que va-t-on dire ?

Le monde est si méchant, et si prompt à médire !

- Je le brave ! et s'il faut, je verserai mon sang...

Oui : mais toujours est-il que c'est embarrassant.


III


Comme tout ici-bas se flétrit et s'altère,

Et comme les malheurs changent un caractère !

J'ai cherché vainement, et n'ai point retrouvé

Cette aimable candeur qui m'avait captivé.

Celle que j'avais vue autrefois si craintive.

Dont la voix résonnait si douce et si plaintive,

Hautaine, au parler bref, et parfois emporté,

A rejeté bien **** cette timidité.

A moi, qui n'ai vécu, n'ai souffert que pour elle.

Est-ce qu'elle n'a pas déjà cherché querelle ?

Jetant sur le passé des regards curieux,

Elle m'a demandé d'un air impérieux

Si, pendant tout ce temps que j'ai passé **** d'elle.

Mon cœur à sa mémoire était resté fidèle :

Et de quel droit, bon Dieu ? Nous n'étions point liés.

Et nous aurions très bien pu nous être oubliés !

J'avais juré, promis ! - Qu'est-ce que cela prouve ?

Tous les jours, en amour, on jure ; et lorsqu'on trouve

Quelque distraction, on laisse rarement

Perdre l'occasion de trahir son serment :

Il n'est pas défendu d'avoir un cœur sensible,

Et ce n'est point du "tout un crime irrémissible.

Et puis d'ailleurs, après ce que j'ai découvert.

Entre nous, soyons franc, parlons à cœur ouvert :

J'en avais fait mon deuil, et la pauvre exilée

S'est bien de son côté quelque peu consolée ;

Et si je persistais à demander sa main.

C'était par conscience, et par respect humain ;

Je m'étais étourdi. Mais elle a, la première.

Fait ouvrir, par bonheur, mes yeux à la lumière,

Et certes, j'aime mieux encore, à beaucoup près,

Qu'elle se soit ainsi montrée avant qu'après.

Car enfin, rien n'est fait, au moins, et le notaire

N'a point à nos serments prêté son ministère.

- Mais quels emportements ! quels pleurs ! car elle croit

Exiger une dette et réclamer un droit.

Or il faut en finir : quoi qu'elle dise ou fasse,

J'en ai pris mon parti ; j'irai lui dire en face,

- Quoi ? - Que son caractère est à n'y pas tenir.

- Elle avait bien besoin aussi de revenir !

Nous étions si bien tous, quand son humeur altière

Vint troubler le repos d'une famille entière !

On nous la disait morte ; et je croirais aussi

Qu'il vaudrait beaucoup mieux que cela fût ainsi.
Quand je rêve sur la falaise,
Ou dans les bois, les soirs d'été,
Sachant que la vie est mauvaise,
Je contemple l'éternité.

A travers mon sort mêlé d'ombres,
J'aperçois Dieu distinctement,
Comme à travers des branches sombres
On entrevoit le firmament !

Le firmament ! où les faux sages
Cherchent comme nous des conseils !
Le firmament plein de nuages,
Le firmament plein de soleils !

Un souffle épure notre fange.
Le monde est à Dieu, je le sens.
Toute fleur est une louange,
Et tout parfum est un encens.

La nuit on croit sentir Dieu même
Penché sur l'homme palpitant.
La terre prie et le ciel aime.
Quelqu'un parle et quelqu'un entend.

Pourtant, toujours à notre extase,
Ô Seigneur, tu te dérobas ;
Hélas ! tu mets là-haut le vase,
Et tu laisses la lèvre en bas !

Mais un jour ton œuvre profonde,
Nous la saurons, Dieu redouté !
Nous irons voir de monde en monde
S'épanouir ton unité ;

Cherchant dans ces cieux que tu règles
L'ombre de ceux que nous aimons,
Comme une troupe de grands aigles
Qui s'envole à travers les monts !

Car, lorsque la mort nous réclame,
L'esprit des sens brise le sceau.
Car la tombe est un nid où l'âme
Prend des ailes comme l'oiseau !

Ô songe ! ô vision sereine !
Nous saurons le secret de tout,
Et ce rayon qui sur nous traîne,
Nous en pourrons voir l'autre bout !

Ô Seigneur ! l'humble créature
Pourra voir enfin à son tour
L'autre côté de la nature
Sur lequel tombe votre jour !

Nous pourrons comparer, poètes,
Penseurs croyant en nos raisons,
A tous les mondes que vous faites
Tous les rêves que nous faisons !




En attendant, sur cette terre,
Nous errons, troupeau désuni,
Portant en nous ce grand mystère :
Œil borné, regard infini.

L'homme au hasard choisit sa route ;
Et toujours, quoi que nous fassions,
Comme un bouc sur l'herbe qu'il broute,
Vit courbé sur ses passions.

Nous errons, et dans les ténèbres,
Allant où d'autres sont venus,
Nous entendons des voix funèbres
Qui disent des mots inconnus.

Dans ces ombres où tout s'oublie,
Vertu, sagesse, espoir, honneur,
L'un va criant : Élie ! Élie !
L'autre appelant : Seigneur ! Seigneur !

Hélas ! tout penseur semble avide
D'épouvanter l'homme orphelin ;
Le savant dit : Le ciel est vide !
Le prêtre dit : L'enfer est plein !

Ô deuil ! médecins sans dictames,
Vains prophètes aux yeux déçus,
L'un donne Satan à nos âmes,
L'autre leur retire Jésus !

L'humanité, sans loi, sans arche,
Suivant son sentier desséché,
Est comme un voyageur qui marche
Après que le jour est couché.

Il va ! la brume est sur la plaine.
Le vent tord l'arbre convulsif.
Les choses qu'il distingue à peine
Ont un air sinistre et pensif.

Ainsi, parmi de noirs décombres,
Dans ce siècle le genre humain
Passe et voit des figures sombres
Qui se penchent sur son chemin.

Nous, rêveurs, sous un toit qui croule,
Fatigués, nous nous abritons,
Et nous regardons cette foule
Se plonger dans l'ombre à tâtons !


*

Et nous cherchons, souci morose !
Hélas ! à deviner pour tous
Le problème que nous propose
Toute cette ombre autour de nous !

Tandis que, la tête inclinée,
Nous nous perdons en tristes vœux,
Le souffle de la destinée
Frissonne à travers nos cheveux.

Nous entendons, race asservie,
Ce souffle passant dans la nuit
Du livre obscur de notre vie
Tourner les pages avec bruit !

Que faire ? - À ce vent de la tombe,
Joignez les mains, baissez les yeux,
Et tâchez qu'une lueur tombe
Sur le livre mystérieux !

- D'où viendra la lueur, ô père ?
Dieu dit : - De vous, en vérité.
Allumez, pour qu'il vous éclaire,
Votre cœur par quelque côté !

Quand le cœur brûle, on peut sans crainte
Lire ce qu'écrit le Seigneur.
Vertu, sous cette clarté sainte,
Est le même mot que Bonheur.

Il faut aimer ! l'ombre en vain couvre
L'œil de notre esprit, quel qu'il soit.
Croyez, et la paupière s'ouvre !
Aimez, et la prunelle voit !

Du haut des cieux qu'emplit leur flamme,
Les trop lointaines vérités
Ne peuvent au livre de l'âme
Jeter que de vagues clartés.

La nuit, nul regard ne sait lire
Aux seuls feux des astres vermeils ;
Mais l'amour près de nous vient luire,
Une lampe aide les soleils.

Pour que, dans l'ombre où Dieu nous mène,
Nous puissions lire à tous moments,
L'amour joint sa lumière humaine
Aux célestes rayonnements !

Aimez donc ! car tout le proclame,
Car l'esprit seul éclaire peu,
Et souvent le cœur d'une femme
Est l'explication de Dieu !


* *

Ainsi je rêve, ainsi je songe,
Tandis qu'aux yeux des matelots
La nuit sombre à chaque instant plonge
Des groupes d'astres dans les flots !

Moi, que Dieu tient sous son empire,
J'admire, humble et religieux,
Et par tous les pores j'aspire
Ce spectacle prodigieux !

Entre l'onde, des vents bercée,
Et le ciel, gouffre éblouissant,
Toujours, pour l'œil de la pensée,
Quelque chose monte ou descend.

Goutte d'eau pure ou jet de flamme,
Ce verbe intime et non écrit
Vient se condenser dans mon âme
Ou resplendir dans mon esprit ;

Et l'idée à mon cœur sans voile,
A travers la vague ou l'éther,
Du fond des cieux arrive étoile,
Ou perle du fond de la mer !

Le 25 août 1839.
Paul d'Aubin Dec 2016


d' Enrique Díez-Canedo

"El desterrado"

Todo lo llevas contigo,
tú, que nada tienes.
Lo que no te han de quitar
los reveses
porque es tuyo y sólo tuyo,
porque es íntimo y perenne,
y es raíz, es tallo, es hoja,
flor y fruto, aroma y jugo,
todo a la vez, para siempre.
No es recuerdo que subsiste
ni anhelo que permanece;
no es imagen que perdura,
ni ficción, ni sombra. En este
sentir tuyo y sólo tuyo,
nada se pierde:
lo pasado y lo abolido,
se halla, vivo y presente,
se hace materia en tu cuerpo,
carne en tu carne se vuelve,
carne de la carne tuya,
ser del ser que eres,
uno y todos entre tantos
que fueron, y son, y vienen,
hecho de patria y de ausencia,
tiempo eterno y hora breve,
de nativa desnudez
y adquiridos bienes.
De aquellos imperturbables
amaneceres
en que la luz de tu estancia
se adueñaba tenue
pintando vidrios y cuadros,
libros y muebles;
de aquellos días de afanes
o placeres,
de vacilación o estudio,
de tenso querer, de inerte
voluntad; de cuantos hilos
tu vida tejen,
no hay una urdimbre quebrada
ni un matiz más débil. ..
Nadie podrá desterrarte
de estos continentes
que son carne y tierra tuya:
don sin trueque,
conquista sin despojo,
prenda de vida sin muerte.
Nadie podrá desterrarte;
tierra fuiste, tierra fértil,
y serás tierra, y más tierra
cuando te entierren.
No desterrado, enterrado
serás tierra, polvo y germen.

El desterrado. 1940

                                                           ­              *
Traduction de "L'exilé"

Tu portes tout avec toi,
Toi que n’as plus rien.
Qui n'existe que pour ce que tu laisses derrière toi.
Les revers, parce ils sont tiens et seulement tiens,
Parce que cette défaite est intime et définitive,
qu'elle est à la fois ta racine, ta tige, et aussi ta feuille,
mais aussi cette fleur et ce fruit, son parfum et son suc.
Tout à la fois et pour toujours.
Il n'y a pas de souvenir qui subsiste
ni de désir ardent qui reste.
Il n’y a pas d'image qui dure
ni même de fiction, ni d'ombre. Dans cette manière de ressentir,
Il n'y a que toi et seulement toi
rien ne se perds :
le passé est aboli.
Lui et elle se retrouvent vivants et présents,
la matière prend forme dans ton corps
une chair dans ta chair se retrouve
chair de ta propre chair,
être de l'être dont tu es.
Un et multiple entre tant
Qui furent, sont et furent
façonnés par leur patrie et aussi par son absence
de temps éternel et d’heure brève,
de nudité native
et de biens amassés
par ces aubes imperturbables,
dans lesquelles
la lumière de ton séjour
s'emparait de manière ténue
en peignant des verres, des tableaux,
des livres et des meubles ;
Lors de ces jours de labeurs
ou de plaisirs,
de vacillements ou d’études,
De tension propulsive, ou de volonté inerte.
Par combien de fils, de ta vie sont tissés.
Il n'y a pas de chaîne rompue
ni de nuances infimes ...
Personne ne pourra t'exiler de ces continents
Qui sont ta chair et ta Terre :
Toi l'Homme sans compromission
Sans conquête ni dépouille
Part de la vie sans mort.
D’une terre où tu es née, de cette Terre fertile.
Et tu trouveras prive de Terre
Quand ils t'enterreront,
Comme une poussière de grains et en germe.

"L’exilé."
1940
Pardonnez- moi cher(e)s Lectrices et Lecteurs, pour mon audace insensée et ma traduction maladroite et précaire du non Hispanophone que je suis. Mais je n'ai pu résister ayant été très ému presque bouleversé par ce texte écrit en 1940, soit en plein Exil Espagnol et au cœur de l'exil de la raison et de la bonté dans le ** me siècle qui pourrait encore avoir tant à nous signifier sur tant d'actuels exilés dont notre Planète regorge; notre Terre d'avidité et d'égoïsme aux naissances si peu contrôlées et aux ressources si mal réparties d' êtres humains, trop souvent en désespérance, d'une simple libre expression, de conditions de vie décentes et meilleures, trop souvent aussi hélas d'illusions d'un  mieux fallacieux en Europe et toujours d'une main tendue qui leur est trop souvent refusée. )
EM Aug 2014
j'ai envie de toi d'une façon que tu ne pourra jamais comprendre, comme tu n'as jamais su me comprendre moi
je t'aime d'une force tel celle que je n'ai pas pu accumuler pour te quitter.
tu me manque d'une intensité semblable a celle dont mon coeur bat a chaque fois que pose les yeux sur toi.
je veux t'oublier autant que j'ai besoin de toi.
c'est juste difficile de t'aimer, difficile.. difficile! j'ai enfin trouver les mots parfaits pour expliquer notre relation: difficile, compliquer et presque impossible, mais pourtant rien ni personne peut me rendre plus heureuse ..ou malheureuse. toi et moi on n'est tellement differents, on voit rarement les choses du même perspective, et chaqu'un veux des choses differentes et a d'autres plans que l'autre, ça m'irrite des fois mais c'est aussi une des choses que j'adore chez toi, après tout n'est ce pas que deux opposés s'attirent? mais il y a autant de choses que j'aime chez toi que de choses qui me rendent folle, ces choses ce n'est que dernièrement que j'ai commencer a les remarquer, comme ton insensibilité, ton egoïsme, ta malhonnêteté, et ton inconsideration envers moi, enfaite touts ces défauts tu ne les as qu'avec moi, tellement que des fois
je penses que tu fais certaines choses juste pour me faire mal et si c'est réelement le cas je voudrais te félicité car encore une fois tu as réussis ta quête et eu ce que tu voulais. je me demande tout le temps pourquoi j'insiste a restée a tes côtés et enduré ta crualité envers moi mais je ne trouve jamais de répense apart "parce que je l'aime" mais est-ce suffisant? j'y peux rien, je n'arrive pas a t'oublier, je me suis trop attachée a toi, tu ne peux juste pas imaginé a quel point je t'adore, c'est juste inexpressif ..et j'admets aussi que je ne VEUX pas te laisser partir.. mais ce n'est pas de ma faute, tu a trop bien su comment me pièger et te jouer de moi pour me rendre carrément et complétement acro a toi, et maintenant je suis coincé dans ce piége, ce trou noir qu'est l'amour irréciproque
Comme une ville qui s'allume
Et que le vent achève d'embraser,
Tout mon cœur brûle et se consume,
J'ai soif, oh ! j'ai soif d'un baiser.

Baiser de la bouche et des lèvres
Où notre amour vient se poser,
Plein de délices et de fièvres,
Ah ! j'ai soif, j'ai soif d'un baiser !

Baiser multiplié que l'homme
Ne pourra jamais épuiser,
Ô toi, que tout mon être nomme,
J'ai soif, oui, j'ai soif d'un baiser.

Fruit doux où la lèvre s'amuse,
Beau fruit qui rit de s'écraser,
Qu'il se donne ou qu'il se refuse,
Je veux vivre pour ce baiser.

Baiser d'amour qui règne et sonne
Au cœur battant à se briser,
Qu'il se refuse ou qu'il se donne,
Je veux mourir de ce baiser.
Je ne veux plus aimer que ma mère Marie.

Tous les autres amours sont de commandement.

Nécessaires qu'ils sont, ma mère seulement

Pourra les allumer aux coeurs qui l'ont chérie.


C'est pour Elle qu'il faut chérir mes ennemis,

C'est par Elle que j'ai voué ce sacrifice,

Et la douceur de coeur et le zèle au service,

Comme je la priais, Elle les a permis ...


C'est par Elle que j'ai voulu de ces chagrins,

C'est pour Elle que j'ai mon coeur dans les Cinq Plaies,

Et tous ces bons efforts vers les croix et les claies,

Comme je l'invoquais, Elle en ceignit mes reins.


Je ne veux plus penser qu'à ma mère Marie,

Siège, de la Sagesse et source des pardons,

Mère de France aussi, de qui nous attendons

Inébranlablement l'honneur de la patrie.


Marie Immaculée, amour essentiel,

Logique de la foi cordiale et vivace,

En vous aimant qu'est-il de bon que je ne fasse,

En vous aimant du seul amour, Porte du ciel ?
Ainsi, mon cher, tu t'en reviens
Du pays dont je me souviens
Comme d'un rêve,
De ces beaux lieux où l'oranger
Naquit pour nous dédommager
Du péché d'Ève.

Tu l'as vu, ce ciel enchanté
Qui montre avec tant de clarté
Le grand mystère ;
Si pur, qu'un soupir monte à Dieu
Plus librement qu'en aucun lieu
Qui soit sur terre.

Tu les as vus, les vieux manoirs
De cette ville aux palais noirs
Qui fut Florence,
Plus ennuyeuse que Milan
Où, du moins, quatre ou cinq fois l'an,
Cerrito danse.

Tu l'as vue, assise dans l'eau,
Portant gaiement son mezzaro,
La belle Gênes,
Le visage peint, l'oeil brillant,
Qui babille et joue en riant
Avec ses chaînes.

Tu l'as vu, cet antique port,
Où, dans son grand langage mort,
Le flot murmure,
Où Stendhal, cet esprit charmant,
Remplissait si dévotement
Sa sinécure.

Tu l'as vu, ce fantôme altier
Qui jadis eut le monde entier
Sous son empire.
César dans sa pourpre est tombé :
Dans un petit manteau d'abbé
Sa veuve expire.

Tu t'es bercé sur ce flot pur
Où Naples enchâsse dans l'azur
Sa mosaique,
Oreiller des lazzaroni
Où sont nés le macaroni
Et la musique.

Qu'il soit rusé, simple ou moqueur,
N'est-ce pas qu'il nous laisse au coeur
Un charme étrange,
Ce peuple ami de la gaieté
Qui donnerait gloire et beauté
Pour une orange ?

Catane et Palerme t'ont plu.
Je n'en dis rien ; nous t'avons lu ;
Mais on t'accuse
D'avoir parlé bien tendrement,
Moins en voyageur qu'en amant,
De Syracuse.

Ils sont beaux, quand il fait beau temps,
Ces yeux presque mahométans
De la Sicile ;
Leur regard tranquille est ardent,
Et bien dire en y répondant
N'est pas facile.

Ils sont doux surtout quand, le soir,
Passe dans son domino noir
La toppatelle.
On peut l'aborder sans danger,
Et dire : « Je suis étranger,
Vous êtes belle. »

Ischia ! C'est là, qu'on a des yeux,
C'est là qu'un corsage amoureux
Serre la hanche.
Sur un bas rouge bien tiré
Brille, sous le jupon doré,
La mule blanche.

Pauvre Ischia ! bien des gens n'ont vu
Tes jeunes filles que pied nu
Dans la poussière.
On les endimanche à prix d'or ;
Mais ton pur soleil brille encor
Sur leur misère.

Quoi qu'il en soit, il est certain
Que l'on ne parle pas latin
Dans les Abruzzes,
Et que jamais un postillon
N'y sera l'enfant d'Apollon
Ni des neuf Muses.

Il est bizarre, assurément,
Que Minturnes soit justement
Près de Capoue.
Là tombèrent deux demi-dieux,
Tout barbouillés, l'un de vin vieux,
L'autre de boue.

Les brigands t'ont-ils arrêté
Sur le chemin tant redouté
De Terracine ?
Les as-tu vus dans les roseaux
Où le buffle aux larges naseaux
Dort et rumine ?

Hélas ! hélas ! tu n'as rien vu.
Ô (comme on dit) temps dépourvu
De poésie !
Ces grands chemins, sûrs nuit et jour,
Sont ennuyeux comme un amour
Sans jalousie.

Si tu t'es un peu détourné,
Tu t'es à coup sûr promené
Près de Ravenne,
Dans ce triste et charmant séjour
Où Byron noya dans l'amour
Toute sa haine.

C'est un pauvre petit cocher
Qui m'a mené sans accrocher
Jusqu'à Ferrare.
Je désire qu'il t'ait conduit.
Il n'eut pas peur, bien qu'il fît nuit ;
Le cas est rare.

Padoue est un fort bel endroit,
Où de très grands docteurs en droit
Ont fait merveille ;
Mais j'aime mieux la polenta
Qu'on mange aux bords de la Brenta
Sous une treille.

Sans doute tu l'as vue aussi,
Vivante encore, Dieu merci !
Malgré nos armes,
La pauvre vieille du Lido,
Nageant dans une goutte d'eau
Pleine de larmes.

Toits superbes ! froids monuments !
Linceul d'or sur des ossements !
Ci-gît Venise.
Là mon pauvre coeur est resté.
S'il doit m'en être rapporté,
Dieu le conduise !

Mon pauvre coeur, l'as-tu trouvé
Sur le chemin, sous un pavé,
Au fond d'un verre ?
Ou dans ce grand palais Nani ;
Dont tant de soleils ont jauni
La noble pierre ?

L'as-tu vu sur les fleurs des prés,
Ou sur les raisins empourprés
D'une tonnelle ?
Ou dans quelque frêle bateau.
Glissant à l'ombre et fendant l'eau
À tire-d'aile ?

L'as-tu trouvé tout en lambeaux
Sur la rive où sont les tombeaux ?
Il y doit être.
Je ne sais qui l'y cherchera,
Mais je crois bien qu'on ne pourra
L'y reconnaître.

Il était ***, jeune et hardi ;
Il se jetait en étourdi
À l'aventure.
Librement il respirait l'air,
Et parfois il se montrait fier
D'une blessure.

Il fut crédule, étant loyal,
Se défendant de croire au mal
Comme d'un crime.
Puis tout à coup il s'est fondu
Ainsi qu'un glacier suspendu
Sur un abîme...

Mais de quoi vais-je ici parler ?
Que ferais-je à me désoler,
Quand toi, cher frère,
Ces lieux où j'ai failli mourir,
Tu t'en viens de les parcourir
Pour te distraire ?

Tu rentres tranquille et content ;
Tu tailles ta plume en chantant
Une romance.
Tu rapportes dans notre nid
Cet espoir qui toujours finit
Et recommence.

Le retour fait aimer l'adieu ;
Nous nous asseyons près du feu,
Et tu nous contes
Tout ce que ton esprit a vu,
Plaisirs, dangers, et l'imprévu,
Et les mécomptes.

Et tout cela sans te fâcher,
Sans te plaindre, sans y toucher
Que pour en rire ;
Tu sais rendre grâce au bonheur,
Et tu te railles du malheur
Sans en médire.

Ami, ne t'en va plus si ****.
D'un peu d'aide j'ai grand besoin,
Quoi qu'il m'advienne.
Je ne sais où va mon chemin,
Mais je marche mieux quand ma main
Serre la tienne.
Lorsque, par un décret des puissances suprêmes,
Le Poète apparaît en ce monde ennuyé,
Sa mère épouvantée et pleine de blasphèmes
Crispe ses poings vers Dieu, qui la prend en pitié :

- " Ah ! que n'ai-je mis bas tout un noeud de vipères,
Plutôt que de nourrir cette dérision !
Maudite soit la nuit aux plaisirs éphémères
Où mon ventre a conçu mon expiation !

Puisque tu m'as choisie entre toutes les femmes
Pour être le dégoût de mon triste mari,
Et que je ne puis pas rejeter dans les flammes,
Comme un billet d'amour, ce monstre rabougri,

Je ferai rejaillir ta haine qui m'accable
Sur l'instrument maudit de tes méchancetés,
Et je tordrai si bien cet arbre misérable,
Qu'il ne pourra pousser ses boutons empestés ! "

Elle ravale ainsi l'écume de sa haine,
Et, ne comprenant pas les desseins éternels,
Elle-même prépare au fond de la Géhenne
Les bûchers consacrés aux crimes maternels.

Pourtant, sous la tutelle invisible d'un Ange,
L'Enfant déshérité s'enivre de soleil,
Et dans tout ce qu'il boit et dans tout ce qu'il mange
Retrouve l'ambroisie et le nectar vermeil.

Il joue avec le vent, cause avec le nuage,
Et s'enivre en chantant du chemin de la croix ;
Et l'Esprit qui le suit dans son pèlerinage
Pleure de le voir *** comme un oiseau des bois.

Tous ceux qu'il veut aimer l'observent avec crainte,
Ou bien, s'enhardissant de sa tranquillité,
Cherchent à qui saura lui tirer une plainte,
Et font sur lui l'essai de leur férocité.

Dans le pain et le vin destinés à sa bouche
Ils mêlent de la cendre avec d'impurs crachats ;
Avec hypocrisie ils jettent ce qu'il touche,
Et s'accusent d'avoir mis leurs pieds dans ses pas.

Sa femme va criant sur les places publiques :
" Puisqu'il me trouve assez belle pour m'adorer,
Je ferai le métier des idoles antiques,
Et comme elles je veux me faire redorer ;

Et je me soûlerai de nard, d'encens, de myrrhe,
De génuflexions, de viandes et de vins,
Pour savoir si je puis dans un coeur qui m'admire
Usurper en riant les hommages divins !

Et, quand je m'ennuierai de ces farces impies,
Je poserai sur lui ma frêle et forte main ;
Et mes ongles, pareils aux ongles des harpies,
Sauront jusqu'à son coeur se frayer un chemin.

Comme un tout jeune oiseau qui tremble et qui palpite,
J'arracherai ce coeur tout rouge de son sein,
Et, pour rassasier ma bête favorite,
Je le lui jetterai par terre avec dédain ! "

Vers le Ciel, où son oeil voit un trône splendide,
Le Poète serein lève ses bras pieux,
Et les vastes éclairs de son esprit lucide
Lui dérobent l'aspect des peuples furieux :

- " Soyez béni, mon Dieu, qui donnez la souffrance
Comme un divin remède à nos impuretés
Et comme la meilleure et la plus pure essence
Qui prépare les forts aux saintes voluptés !

Je sais que vous gardez une place au Poète
Dans les rangs bienheureux des saintes Légions,
Et que vous l'invitez à l'éternelle fête,
Des Trônes, des Vertus, des Dominations.

Je sais que la douleur est la noblesse unique
Où ne mordront jamais la terre et les enfers,
Et qu'il faut pour tresser ma couronne mystique
Imposer tous les temps et tous les univers.

Mais les bijoux perdus de l'antique Palmyre,
Les métaux inconnus, les perles de la mer,
Par votre main montés, ne pourraient pas suffire
A ce beau diadème éblouissant et clair ;

Car il ne sera fait que de pure lumière,
Puisée au foyer saint des rayons primitifs,
Et dont les yeux mortels, dans leur splendeur entière,
Ne sont que des miroirs obscurcis et plaintifs ! "
La Rochefoucauld dit, Madame,
Qu'on ne doit pas parler de soi,
Ni ?.. ni ?.. de ?.. de ?.. sa ?.. sa ?.. sa femme.
Alors, ma conduite est infâme,
Voyez, je ne fais que ça, moi.

Je me moque de sa maxime.
Comme un fœtus dans un bocal,
J'enferme mon « moi » dans ma rime,
Ce bon « moi » dont me fait un crime
Le sévère Blaise Pascal.

Or, ce ne serait rien encore,
On excuse un... maudit travers ;
Mais j'enferme Toi que j'adore
Sur l'autel que mon souffle dore
Au Temple bâti par mes vers ;

Sous les plafonds de mon Poème,
Sur mes tapis égyptiens,
Dans des flots d'encens, moi qui T'aime,
Je me couche auprès de Toi-même
Comme auprès du Sphinx des Anciens ;

Tel qu'un Faust prenant pour fétiche
L'un des coins brodés de tes bas,
Je Te suis dans chaque hémistiche
Où Tu bondis comme une biche,
La Biche-Femme des Sabbats ;

Comme pour la Sibylle à Cumes,
Mon quatrain Te sert de trépied,
Où, dans un vacarme d'enclumes,
Je m'abattrai, couvert d'écumes,
Pour baiser le bout de ton pied ;

À chaque endroit de la césure,
D'un bout de rythme à l'autre bout,
Tu règnes avec grâce et sûre
De remplir toute la mesure,
Assise, couchée, ou debout.

Eh, bien ! j'ai tort, je le confesse :
On doit, jaloux de sa maison,
N'en parler pas plus qu'à la messe ;
Maxime pleine de sagesse !
J'ai tort, sans doute... et j'ai raison.

Si ma raison est peu touchante,
C'est que mon tort n'est qu'apparent :
Je ne parle pas, moi, je chante ;
Comme aux jours d'Orphée ou du Dante,
Je chante, c'est bien différent.

Je ne parle pas, moi, Madame.
Vous voyez que je n'ai pas tort,
Je ne parle pas de ma femme,
Je la chante et je clame, clame,
Je clame haut, sans crier fort.

Je clame et vous chante à voix haute.
Qu'il plaise aux cœurs de m'épier,
Lequel pourra me prendre en faute ?
Je ne compte pas sans mon hôte,
J'écris « ne vends » sur ce papier.

J'écris à peine, je crayonne.
Je le répète encor plus haut,
Je chante et votre Âme rayonne.
Comme les lyres, je résonne,
Oui... d'après La Rochefoucauld.

Ah ! Monsieur !.. le duc que vous êtes,
Dont la France peut se vanter,
Fait très bien tout ce que vous faites ;
Il dit aux femmes des poètes :
« Libre aux vôtres de vous chanter !

Dès qu'il ne s'agit plus de prose,
Qu'il ne s'agit plus des humains,
Au Mont où croît le Laurier-Rose,
Qu'on chante l'une ou l'autre chose,
Pour moi, je m'en lave les mains. »

Donc, sans épater les usages,
Je ferai, Madame, sur Vous
Dix volumes de six cents pages,
Que je destine... pas aux sages,
Tous moins amoureux que les fous.

Pour terminer, une remarque,
(Si j'ose descendre à ce ton,
Madame), après, je me rembarque,
Et je vais relire Plutarque
Dans le quartier du Panthéon :

Sans la poésie et sa flamme,
(Que Vous avez, bien entendu)
Aucun mortel, je le proclame,
N'aurait jamais connu votre âme,
Rose duParadis Perdu ;

Oui, personne, dans les Deux-Mondes,
N'aurait jamais rien su de Toi.
Sans ces... marionnettes rondes,
Les Vers bruns et les Rimes blondes,
Mais, oui, Madame, excepté moi.
À Madame Desloges, née Leurs.

Dans l'enclos d'un jardin gardé par l'innocence
J'ai vu naître vos fleurs avant votre naissance,
Beau jardin, si rempli d'oeillets et de lilas
Que de le regarder on n'était jamais las.

En me haussant au mur dans les bras de mon frère
Que de fois j'ai passé mes bras par la barrière
Pour atteindre un rameau de ces calmes séjours
Qui souple s'avançait et s'enfuyait toujours !
Que de fois, suspendus aux frêles palissades,
Nous avons savouré leurs molles embrassades,
Quand nous allions chercher pour le repos du soir
Notre lait à la cense, et longtemps nous asseoir
Sous ces rideaux mouvants qui bordaient la ruelle !
Hélas ! qu'aux plaisirs purs la mémoire est fidèle !
Errant dans les parfums de tous ces arbres verts,
Plongeant nos fronts hardis sous leurs flancs entr'ouverts,
Nous faisions les doux yeux aux roses embaumées
Qui nous le rendaient bien, contentes d'être aimées !
Nos longs chuchotements entendus sans nous voir,
Nos rires étouffés pleins d'audace et d'espoir
Attirèrent un jour le père de famille
Dont l'aspect, tout d'un coup, surmonta la charmille,
Tandis qu'un tronc noueux me barrant le chemin
M'arrêta par la manche et fit saigner ma main.

Votre père eut pitié... C'était bien votre père !
On l'eût pris pour un roi dans la saison prospère...
Et nous ne partions pas à sa voix sans courroux :
Il nous chassait en vain, l'accent était si doux !
En écoutant souffler nos rapides haleines,
En voyant nos yeux clairs comme l'eau des fontaines,
Il nous jeta des fleurs pour hâter notre essor ;
Et nous d'oser crier : « Nous reviendrons encor ! »

Quand on lavait du seuil la pierre large et lisse
Où dans nos jeux flamands l'osselet roule et glisse,
En rond, silencieux, penchés sur leurs genoux,
D'autres enfants jouaient enhardis comme nous ;
Puis, poussant à la fois leurs grands cris de cigales
Ils jetaient pour adieux des clameurs sans égales,
Si bien qu'apparaissant tout rouges de courroux
De vieux fâchés criaient : « Serpents ! vous tairez-vous ! »
Quelle peur ! ... Jamais plus n'irai-je à cette porte
Où je ne sais quel vent par force me remporte ?
Quoi donc ! quoi ! jamais plus ne voudra-t-il de moi
Ce pays qui m'appelle et qui s'enfuit ? ... Pourquoi ?

Alors les blonds essaims de jeunes Albertines,
Qui hantent dans l'été nos fermes citadines,
Venaient tourner leur danse et cadencer leurs pas
Devant le beau jardin qui ne se fermait pas.
C'était la seule porte incessamment ouverte,
Inondant le pavé d'ombre ou de clarté verte,
Selon que du soleil les rayons ruisselants
Passaient ou s'arrêtaient aux feuillages tremblants.
On eût dit qu'invisible une indulgente fée
Dilatait d'un soupir la ruelle étouffée,
Quand les autres jardins enfermés de hauts murs
Gardaient sous les verroux leur ombre et leurs fruits mûrs.
Tant pis pour le passant ! À moins qu'en cette allée,
Élevant vers le ciel sa tête échevelée,
Quelque arbre, de l'enclos habitant curieux,
Ne franchît son rempart d'un front libre et joyeux.

On ne saura jamais les milliers d'hirondelles
Revenant sous nos toits chercher à tire d'ailes
Les coins, les nids, les fleurs et le feu de l'été,
Apportant en échange un goût de liberté.
Entendra qui pourra sans songer aux voyages
Ce qui faisait frémir nos ailes sans plumages,
Ces fanfares dans l'air, ces rendez-vous épars
Qui s'appelaient au **** : « Venez-vous ? Moi, je pars ! »

C'est là que votre vie ayant été semée
Vous alliez apparaître et charmante et charmée,
C'est là que préparée à d'innocents liens
J'accourais... Regardez comme je m'en souviens !

Et les petits voisins amoureux d'ombre fraîche
N'eurent pas sitôt vu, comme au fond d'une crèche,
Un enfant rose et nu plus beau qu'un autre enfant,
Qu'ils se dirent entre eux : « Est-ce un Jésus vivant ? »

C'était vous ! D'aucuns noeuds vos mains n'étaient liées,
Vos petits pieds dormaient sur les branches pliées,
Toute libre dans l'air où coulait le soleil,
Un rameau sous le ciel berçait votre sommeil,
Puis, le soir, on voyait d'une femme étoilée
L'abondante mamelle à vos lèvres collée,
Et partout se lisait dans ce tableau charmant
De vos jours couronnés le doux pressentiment.

De parfums, d'air sonore incessamment baisée,
Comment n'auriez-vous pas été poétisée ?
Que l'on s'étonne donc de votre amour des fleurs !
Vos moindres souvenirs nagent dans leurs couleurs,
Vous en viviez, c'étaient vos rimes et vos proses :
Nul enfant n'a jamais marché sur tant de roses !

Mon Dieu ! S'il n'en doit plus poindre au bord de mes jours,
Que sur ma soeur de Flandre il en pleuve toujours !
Ah ! Si j'étais le cher petit enfant
Qu'on aime bien, mais qui pleure souvent,
*** comme un charme,
Sans une larme,
J'écouterais chanter l'heure et le vent...
(Je dis cela pour le petit enfant).

Si je logeais dans ce mouvant berceau,
Pour mériter qu'on m'apporte un cerceau,
Je serais sage
Comme une image,
Et je ferais moins de bruit qu'un oiseau...
(Je dis cela pour l'enfant du berceau).

Ah ! Si j'étais le blanc nourrisson,
Pour qui je fais cette belle chanson,
Tranquille à l'ombre,
Comme au bois sombre,
Je rêverais que j'entends le pinson...
(Je dis cela pour le blanc nourrisson).

Ah ! si j'étais l'ami des blancs poussins
Dormant entre eux, doux et vivants coussins
Sans que je pleure,
J'irais sur l'heure
Faire chorus avec ces petits saints...
(Je dis cela pour l'ami des poussins).

Si le cheval demandait à nous voir,
Riant d'aller nager à l'abreuvoir,
Fermant le gîte,
Je crierais vite :
« Demain l'enfant pourra vous recevoir !... »
(Je dis cela pour l'enfant qu'il vient voir).

Si j'entendais les loups hurler dehors
Bien défendu par les grands et les forts,
Fier comme un homme
Qui fait un somme,
Je répondrais : « Passez, Messieurs, je dors !... »
(Je dis cela pour les loups du dehors).

On n'entendit plus rien dans la maison,
Ni le rouet, ni l'égale chanson ;
La mère ardente,
Fine et prudente,
Fit l'endormie auprès de la cloison,
Et suspendit tout bruit dans la maison.
Quand le souffle divin qui flotte sur le monde
S'arrête sur mon âme ouverte au moindre vent,
Et la fait tout à coup frissonner comme une onde
Où le cygne s'abat dans un cercle mouvant !

Quand mon regard se plonge au rayonnant abîme,
Où luisent ces trésors du riche firmament,
Ces perles de la nuit que son souffle ranime,
Des sentiers du Seigneur innombrable ornement !

Quand d'un ciel de printemps l'aurore qui ruisselle
Se brise et rejaillit en gerbes de chaleur,
Que chaque atome d'air roule son étincelle,
Et que tout sous mes pas devient lumière ou fleur !

Quand tout chante ou gazouille, ou roucoule ou bourdonne,
Que d'immortalité tout semble se nourrir,
Et que l'homme, ébloui de cet air qui rayonne,
Croit qu'un jour si vivant ne pourra plus mourir !

Quand je roule en mon sein mille pensers sublimes,
Et que mon faible esprit, ne pouvant les porter,
S'arrête en frissonnant sur les derniers abîmes,
Et, faute d'un appui, va s'y précipiter !

Quand, dans le ciel d'amour où mon âme est ravie,
Je presse sur mon coeur un fantôme adoré,
Et que je cherche en vain des paroles de vie
Pour l'embraser du feu dont je suis dévoré !

Quand je sens qu'un soupir de mon âme oppressée
Pourrait créer un monde en son brûlant essor,
Que ma vie userait le temps, que ma pensée
En remplissant le ciel déborderait encor !

Jéhova ! Jéhova ! ton nom seul me soulage !
Il est le seul écho qui réponde à mon coeur !
Ou plutôt ces élans, ces transports, sans langage,
Sont eux-mêmes un écho de ta propre grandeur !

Tu ne dors pas souvent dans mon sein, nom sublime !
Tu ne dors pas souvent sur mes lèvres de feu :
Mais chaque impression t'y trouve et t'y ranime,
Et le cri de mon âme est toujours toi, mon Dieu !
Marie, qui voudrait votre beau nom tourner,
Il trouverait Aimer : aimez-moi donc, Marie,
Faites cela vers moi dont votre nom vous prie,
Votre amour ne se peut en meilleur lieu donner.


S'il vous plaît pour jamais un plaisir demener,
Aimez-moi, nous prendrons les plaisirs de la vie,
Pendus l'un l'autre au col, et jamais nulle envie
D'aimer en autre lieu ne nous pourra mener.


Si faut-il bien aimer au monde quelque chose :
Celui qui n'aime point, celui-là se propose
Une vie d'un Scythe, et ses jours veut passer


Sans goûter la douceur des douceurs la meilleure.
Eh, qu'est-il rien de doux sans Vénus ? las ! à l'heure
Que je n'aimerai point, puissé-je trépasser !
Fou
Que je sois un fou, qu'on le dise,
Je trouve ça tout naturel,
Ayant eu ma part de bêtise
Et commis plus d'une sottise,
Depuis que je suis... temporel.

Je suis un fou, quel avantage,
Madame ! un fou, songez-y bien,
Peut crier... se tromper d'étage,
Vous proposer... le mariage,
On ne lui dira jamais rien,

C'est un fou ; mais lui peut tout dire,
Lâcher parfois un terme vil,
Dans ce cas le mieux c'est d'en rire,
Se fâcher serait du délire,
À quoi cela servirait-il ?

C'est un fou. Si c'est un bonhomme
Laissant les gens à leurs métiers,
Peu contrariant, calme... en somme,
Distinguant un nez d'une pomme,
On lui pardonne volontiers.

Donc, je suis fou, je le révèle.
Nous l'avons, Madame, en dormant,
Comme dit l'autre, échappé belle ;
J'aime mieux être un sans cervelle
Que d'être un sage, assurément.

Songez donc ! si j'étais un sage,
Je fuirais les joyeux dîners ;
Je n'oserais voir ton corsage ;
J'aurais un triste et long visage
Et des lunettes sur le nez ;

Mais, je ne suis qu'un fou, je danse,
Je tambourine avec mes doigts
Sur la vitre de l'existence.
Qu'on excuse mon insistance,
C'est un fou qu'il faut que je sois !

C'est trop fort, me dit tout le monde,
Qu'est-ce que vous nous chantez là ?
Pourquoi donc, partout à la ronde,
À la brune comme à la blonde,
Parler de la sorte ? - Ah ! voilà !

Je vais même plus ****, personne
Ne pourra jamais me guérir,
Ni la sagesse qui sermonne,
Ni le bon Dieu, ni la Sorbonne,
Et c'est fou que je veux mourir.

C'est fou que je mourrai du reste,
Mais oui, Madame, j'en suis sûr,
Et d'abord... de ton moindre geste,
Fou... de ton passage céleste
Qui laisse un parfum de fruit mûr,

De ton allure alerte et franche,
Oui, fou d'amour, oui, fou d'amour,
Fou de ton sacré... coup de hanche,
Qui vous fiche au cœur la peur... blanche,
Mieux... qu'un roulement de tambour ;

Fou de ton petit pied qui vole
Et que je suivrais n'importe où,
Je veux dire... au Ciel ;... ma parole !
J'admire qu'on ne soit pas folle,
Je plains celui qui n'est pas fou.
Ô pucelle plus tendre
Qu'un beau bouton vermeil
Que le rosier engendre
Au lever du soleil,
D'une part verdissant
De l'autre rougissant !

Plus fort que le lierre
Qui se gripe à l'entour
Du chesne aimé, qu'il serre
Enlassé de maint tour,
Courbant ses bras épars
Sus luy de toutes parts,

Serrez mon col, maistresse,
De vos deux bras pliez ;  
D'un neud qui tienne et presse
Doucement me liez ;
Un baiser mutuel
Nous soit perpetuel.

Ny le temps, ny l'envie
D'autre amour desirer,
Ne pourra point ma vie
De vos lévres tirer ;
Ainsi serrez demourrons,
Et baisant nous mourrons.

En mesme an et mesne heure,
Et en même saison,
Irons voir la demeure
De la palle maison,
Et les champs ordonnez
Aux amants fortunez.

Amour par les fleurettes
Du printemps éternel
Voirra nos amourettes
Sous le bois maternel ;
Là nous sçaurons combien
Les amants ont de bien.

Le long des belles plaines
Et parmy les prez vers
Les rives sonnent pleines
De maints accords divers ;
L'un joue, et l'autre au son
Danse d'une chanson.

Là le beau ciel décueuvre
Tousjours un front benin,
Sur les fleurs la couleuvre
Ne ***** son venin,
Et tousjours les oyseaux
Chantent sur les rameaux ;

Tousjours les vens y sonnent
Je ne sçay quoy de doux,
Et les lauriers y donnent
Tousjours ombrages moux ;
Tousjours les belles fleurs
Y gardent leurs couleurs.

Parmy le grand espace
De ce verger heureux,
Nous aurons tous deux place
Entre les amoureux,
Et comme eux sans soucy
Nous aimerons aussi.

Nulle amie ancienne
Ne se dépitera,
Quand de la place sienne
Pour nous deux s'ostera,
Non celles dont les yeux
Prirent le cœur des dieux.
Le Meurtre, d'une main violente, brise les liens
Les plus sacrés,
La Mort vient enlever le jeune homme florissant,
Et le Malheur s'approche comme un ennemi rusé
Au milieu des jours de fête.
Schiller.

I.

Modérons les transports d'une ivresse insensée ;
Le passage est bien court de la joie aux douleurs ;
La mort aime à poser sa main lourde et glacée
Sur des fronts couronnés de fleurs.
Demain, souillés de cendre, humbles, courbant nos têtes,
Le vain souvenir de nos fêtes
Sera pour nous presque un remords ;
Nos jeux seront suivis des pompes sépulcrales ;
Car chez nous, malheureux ! l'hymne des saturnales
Sert de prélude au chant des morts.

II.

Fuis les banquets, fais trêve à ton joyeux délire,
Paris, triste cité ! détourne tes regards
Vers le cirque où l'on voit aux accords de la lyre
S'unir les prestiges des arts.
Chœurs, interrompez-vous ; cessez, danses légères ;
Qu'on change en torches funéraires
Ces feux purs, ces brillants flambeaux ; -
Dans cette enceinte, auprès d'une couche sanglante,
J'entends un prêtre saint dont la voix chancelante
Dit la prière des tombeaux.

Sous ces lambris, frappés des éclats de la joie,
Près d'un lit où soupire un mourant étendu,
D'une famille auguste, au désespoir en proie,
Je vois le cortège éperdu.
C'est un père à genoux, c'est un frère en alarmes,
Une sœur qui n'a point de larmes
Pour calmer ses sombres douleurs ;
Car ses affreux revers ont, dès son plus jeune âge,
Dans ses yeux, enflammés d'un si mâle courage,
Tari la source de ses pleurs.

Sur l'échafaud, aux cris d'un sénat sanguinaire,
Sa mère est morte en reine et son père en héros ;
Elle a vu dans les fers périr son jeune frère,
Et n'a pu trouver des bourreaux.
Et, quand des rois ligués la main brisa ses chaînes,
Longtemps, sur des rives lointaines,
Elle a fui nos bords désolés ;
Elle a revu la France, après tant de misères,
Pour apprendre, en rentrant au palais de ses pères,
Que ses maux n'étaient pas comblés.

Plus ****, c'est une épouse... Oh ! qui peindra ses craintes,
Sa force, ses doux soins, son amour assidu ?
Hélas ! et qui dira ses lamentables plaintes,
Quand tout espoir sera perdu ?
Quels étaient nos transports, ô vierge de Sicile,
Quand naguère à ta main docile
Berry joignit sa noble main !
Devais-tu donc, princesse, en touchant ce rivage,
Voir sitôt succéder le crêpe du veuvage
Au chaste voile de l'***** ?

Berry, quand nous vantions ta paisible conquête,
Nos chants ont réveillé le dragon endormi ;
L'Anarchie en grondant a relevé sa tête,
Et l'enfer même en a frémi.
Elle a rugi ; soudain, du milieu des ténèbres,
Clément poussa des cris funèbres,
Ravaillac agita ses fers ;
Et le monstre, étendant ses deux ailes livides,
Aux applaudissements des ombres régicides,
S'envola du fond des enfers.

Le démon, vers nos bords tournant son vol funeste,
Voulut, brisant ces lys qu'il flétrit tant de fois,
Epuiser d'un seul coup le déplorable reste
D'un sang trop fertile en bons rois.
Longtemps le sbire obscur qu'il arma pour son crime,
Rêveur, autour de la victime
Promena ses affreux loisirs ;
Enfin le ciel permet que son vœu s'accomplisse ;
Pleurons tous, car le meurtre a choisi pour complice
Le tumulte de nos plaisirs.

Le fer brille... un cri part : guerriers, volez aux armes !
C'en est fait ; la duchesse accourt en pâlissant ;
Son bras soutient Berry, qu'elle arrose de larmes,
Et qui l'inonde de son sang.
Dressez un lit funèbre : est-il quelque espérance ?...
Hélas ! un lugubre silence
A condamné son triste époux.
Assistez-le, madame, en ce moment horrible ;
Les soins cruels de l'art le rendront plus terrible,
Les vôtres le rendront plus doux.

Monarque en cheveux blancs, hâte-toi, le temps presse ;
Un Bourbon va rentrer au sein de ses aïeux ;
Viens, accours vers ce fils, l'espoir de ta vieillesse ;
Car ta main doit fermer ses yeux !
Il a béni sa fille, à son amour ravie ;
Puis, des vanités de sa vie
Il proclame un noble abandon ;
Vivant, il pardonna ses maux à la patrie ;
Et son dernier soupir, digne du Dieu qu'il prie,
Est encore un cri de pardon.

Mort sublime ! ô regrets ! vois sa grande âme et pleure,
Porte au ciel tes clameurs, ô peuple désolé !
Tu l'as trop peu connu ; c'est à sa dernière heure
Que le héros s'est révélé.
Pour consoler la veuve, apportez l'orpheline ;
Donnez sa fille à Caroline,
La nature encore a ses droits.
Mais, quand périt l'espoir d'une tige féconde,
Qui pourra consoler, dans se terreur profonde,
La France, veuve de ses rois ?

À l'horrible récit, quels cris expiatoires
Vont poussez nos guerriers, fameux par leur valeur !
L'Europe, qu'ébranlait le bruit de leurs victoires,
Va retentir de leur douleur.
Mais toi, que diras-tu, chère et noble Vendée ?
Si longtemps de sang inondée,
Tes regrets seront superflus ;
Et tu seras semblable à la mère accablée,
Qui s'assied sur sa couche et pleure inconsolée,
Parce que son enfant n'est plus !

Bientôt vers Saint-Denis, désertant nos murailles,
Au bruit sourd des clairons, peuple, prêtres, soldats,
Nous suivrons à pas lents le char des funérailles,
Entouré des chars des combats.
Hélas ! jadis souillé par des mains téméraires,
Saint-Denis, où dormaient ses pères,
A vu déjà bien des forfaits ;
Du moins, puisse, à l'abri des complots parricides,
Sous ces murs profanés, parmi ces tombes vides,
Sa cendre reposer en paix !

III.

D'Enghien s'étonnera, dans les célestes sphères,
De voir sitôt l'ami, cher à ses jeunes ans,
À qui le vieux Condé, prêt à quitter nos terres,
Léguait ses devoirs bienfaisants.
À l'aspect de Berry, leur dernière espérance,
Des rois que révère la France
Les ombres frémiront d'effroi ;
Deux héros gémiront sur leurs races éteintes,
Et le vainqueur d'Ivry viendra mêler ses plaintes
Aux pleurs du vainqueur de Rocroy.

Ainsi, Bourbon, au bruit du forfait sanguinaires,
On te vit vers d'Artois accourir désolé ;
Car tu savais les maux que laisse au cœur d'un père
Un fils avant l'âge immolé.
Mais bientôt, chancelant dans ta marche incertaine,
L'affreux souvenir de Vincennes
Vint s'offrir à tes sens glacés ;
Tu pâlis ; et d'Artois, dans la douleur commune,
Sembla presque oublier sa récente infortune,
Pour plaindre tes revers passés.

Et toi, veuve éplorée, au milieu de l'orage
Attends des jours plus doux, espère un sort meilleur ;
Prends ta sœur pour modèle, et puisse ton courage
Etre aussi grand que ton malheur !
Tu porteras comme elle une urne funéraire ;
Comme elle, au sein du sanctuaire,
Tu gémiras sur un cercueil ;
L'hydre des factions, qui, par des morts célèbres,
A marqué pour ta sœur tant d'époques funèbres,
Te fait aussi ton jour de deuil !

IV.

Pourtant, ô frêle appui de la tige royale,
Si Dieu par ton secours signale son pouvoir,
Tu peux sauver la France, et de l'hydre infernale
Tromper encor l'affreux espoir.
Ainsi, quand le Serpent, auteur de tous les crimes,
Vouait d'avance aux noirs abîmes
L'homme que son forfait perdit,
Le Seigneur abaissa sa farouche arrogance ;
Une femme apparut, qui, faible et sans défense,
Brisa du pied son front maudit.

Février 1820.
Fable IX, Livre II.


Au temps où les bêtes parlaient
Non pas hier pourtant, un grave personnage,
Un dindon, le Nestor des dindons de son âge,
Elevait quinze enfants, qui tous lui ressemblaient.
Tous, j'ai tort ; car l'un d'eux, et la chose est prouvée,
Éclos de la même couvée,
Des autres, toutefois, croissait fort différent :
Bien qu'il fût le plus jeune, il était le plus grand ;
S'il ne disputait pas la noirceur à l'ébène,
La blancheur de l'albâtre éclatait sur son corps ;
Son bec tranchant était retors
Comme un nez dit à la romaine ;
Ces yeux, si peu malins que ses jeunes amis
Portaient enchâssés sous leur crête,
Chez ce dindon manqué, pareils à deux rubis,
Etincelaient enfoncés dans sa tête.
Au lieu de ces ergots dont le coq orgueilleux
Laboure obscurément le fumier et la terre,
Ses pieds étaient armés de cette double serre
Qui porte l'échanson des dieux,
Et se joue avec le tonnerre.
On conçoit qu'un tel écolier
Aux leçons d'un coq-d'inde était fort peu docile ;
Chaque jour son humeur, de moins en moins facile,
Scandalisait le poulailler.
Le chat paraissait-il : « Vite, enfants, qu'on se cache ! »
Criait le surveillant, le premier à partir.
Dindonneaux de rentrer, mon drôle de sortir,
Et de narguer Raton jusque sous sa moustache.
L'autour ou l'épervier, sur le troupeau gloussant,
Faisaient-ils mine de s'abattre ;
Tandis que tout fuyait, sur ses pieds se dressant,
Le bec en l'air, mon drôle attendait pour combattre.
Ami des jeux, bien moins qu'ennemi du repos,
Jouait-il une fois ; il jouait Dieu sait comme !
De la cage à poulets se faisant un champ clos :
Tel, déjà capitaine au milieu des marmots,
Guesclin, dans un enfant, faisait voir un grand homme.
Bref, maint ami plumé se plaignait du héros.
Dindons étaient toujours les dindons de l'affaire ;
Dindons de répéter leur éternel propos :
C'est un mauvais sujet ; on n'en pourra rien faire.
Ce mauvais sujet, un beau jour,
Quand ses ailes furent venues,
Prit congé de la basse-cour,
Et, du premier essor, se perdit dans les nues.

Ainsi plus d'un héros futur,
Elevé dans un rang obscur,
En suivant son génie, agit contre la règle :
Dans le comptoir, Fabert ne rêvait que combats.
Mais pourquoi ? mais comment ? Amis, n'oubliez pas
Qu'une dinde parfois peut couver l'œuf d'un aigle.
Tu ne vas pas me croire.
Moi-même je n'en reviens pas !
Je suis traumatisé, grand brûlé,
Mutilé de guerre
Tout cela à cause de tes huit soeurs
Tes ombres femelles, les Muses.
Je te raconte, excuse les sanglots,
Les spasmes, les soubresauts de ton petit oiseau orphie
Dépecé, déplumé, vide de toute substance.
Ratatiné. Ratiboisé.
Tes fieffées soeurs, ces gredines m'ont violé !
M'entends-tu?
Je ne suis plus que l'ombre de moi-même
Sans tambour ni trompettes
En plein tunnel de Fréjus
Entre la France et l'Italie.
Je ne me souviens plus très bien du début de mon calvaire :
Je dormais à poings fermés
Je rêvais de toi et je sentais tes paumes chaudes
Qui me dorlotaient et me murmuraient des mots doux
Tu disais que j'étais l'oiseau lyre
L'oiseau de feu l'oiseau paon
Tu voulais que je pavane
En toi sur ton balcon
En faisant mine de regarder les étoiles
Et que comme Marlborough je m'en aille en guerre
Mironton mironton mirontaine
On se ravitaillait tous les deux pour supporter l'exil
Et de provisions en provisions nous ne sortions plus du lit.
Tu me disais "qui aime bien châtie bien"
Et "quand on s'aime on sème "
Et tu me châtiais de va et vient subtils
Et tu semais ma semence aux quatre vents
Sur les champs blancs et roses de ta chair
Tu disais no nu niet
Pour battre la mesure
No nu niet de ta petite voix
No nu niet de ta grosse voix
Une caresse pour marraine
Une caresse pour la Muse
J'étais aux anges
Je dormais du sommeil tranquille
Des orphies
Je croyais que c'étaient des formules bibliques
Et que tu baptisais ainsi l'oiseau
Nonuniet
Je croyais que c'était toi,
C'étaient tes ombres qui se relayaient
C'étaient elles qui étaient à la manoeuvre
Pour me punir de t'avoir choisie toi, mon ange,
Et pas elles, ces diablesses
Déguisées sous leurs masques de la comédia dell'arte.
Rien ne me fut épargné sous la férule de ces Amazones
A huit elles m'ont pénétré par mes neuf orifices
Ou étais-tu alors
Quand j'ai crié ton nom ?
J'ai perdu mon dernier pucelage
J'ai eu beau leur dire
Vietato l'ingresso qui !
Leur dire que j'étais Cagnolo Nogerola detto Roméo
Et que ma Muse à moi n'était aucune d'entre elles
Mais bel et bien toi, Giulietta Cappelletti,
Elles m'ont fait endurer ce que je souhaiterai pas
A mon pire ennemi, foi de Montecchi.
Elles m'ont tatoué la peau de long en large
De phrases inintelligibles
Elles ont gravé dans ma chair des choses insensées :
Chiudi gli occhi e sogna, Farinelli !
Dante, ti amo !
Portami ovunque tu sia. No !
Non smettere mai di splendere con il tuo sorriso !
Nacio nustra maravilhosa historia de amor !
Gracais mi amor por compartir un viaje tan romantico !
I love you forever
Elles m'ont dégusté comme on déguste
Un riso venere con gamberi e crema de zafferano
Elles m'ont emmaillotté de chapelets
Et de litanies
Elles m'ont marqué au chewing gum
Comme on marque au fer rouge
En me laissant leurs mots d'amour.
Je me suis retrouvé au centre de l'arène
Comme un gladiateur en guenilles
Et j'ai chanté de ma plus belle voix de castrat
Un Lascia ch'io pianga
Que n'aurait pas désavoué Haendel...
Me voilà à tes pieds ce matin, émasculé,
Implorant ta miséricorde, Muse bienfaitrice,
Je voudrais que tu me cautérises ces plaies
Que tu me soignes de tes Furies de soeurs
Tu me manques !
Concède-moi cent jours d'indulgence
Comme délai de latence
Le Ciel te le rendra au centuple !
Te saludo Mama
Del nostro Dio
Je sais que seul toi pourra effacer le traumatisme
Me débloquer, me redonner le sourire
Aurais-tu un peu de teinture d'arnica
De la racine de ***** contra et un peu de cyprine
Pour lentement me badigeonner?
L'ENFANT fantôme fend de l'homme
entre les piliers de pierre :
2ΠR, son tour de tête.
(La tour monte, attention au ciel)
Comme il mue, avec sa voix de rogomme
il effraye à tort ou raison l'orfraie empaillée
Qu'on ne voit pas à cause de la chaleur
à cause de la couleur
à cause de la douleur

xxJamais la boule en buis ne pourra retomber
Sur le bout de bois blanc du bilboquet.
Je suis pédéraste dans l'âme,
Je le dis tout haut et debout.
Assis, je changerais de gamme,
Et, couché sur un lit, Madame,
Je ne le dirais plus du tout.

La pédérastie est un vice :
C'est l'avis de mon médecin.
Je le crois, il n'est pas novice
Quand il soutient que l'exercice
Le plus naturel, le plus sain,

Sain, comme la mer et son hâle,
L'honneur même de la maison,
Qui fait le regard le moins pâle,
Le plus magnifiquement mâle,
Sans aucune comparaison,

Le plus ravissant sur la terre,
C'est de froisser le traversin
D'une femme qu'on... désaltère,
Quand elle serait adultère,
Quand elle n'aurait qu'un seul sein.

C'est là le sentiment intime
De tous les peuples sous le ciel ;
Et je me fous, pour la maxime,
Que l'Exception règne ou rime
Même d'un air spirituel ;

De tous, oui, autant que nous sommes,
Aussi bien du Chinois charmant
Que du Français, peintre de pommes ;
Et c'est l'opinion des hommes
Qui furent des hommes, vraiment,

Plus forts que ceux dont leur église
Met les cercueils an Panthéon ;
Ce sont ceux-là qu'on poétise,
Par exemple... Abraham... Moïse,
Et, si tu veux... Napoléon.

C'est l'opinion du plus sage
Chez les Slaves au regard clair,
Chez les Germains au doux visage,
Chez les Latins au beau langage,
Et chez les Bretons au cœur fier.

C'est la tienne, Aimée, et la nôtre ;
C'est celle de tout bon cerveau,
Qui n'a contre elle qu'un... apôtre,
Un monsieur pourtant comme un autre,
Son nom ?... devra rimer en veau.

- Son nom, voyons ? - Comment, Madame
Son nom ? mais puisqu'il n'est pas pur,
Il souillerait, ce nom infâme,
Tes chastes oreilles de femme ;
Et puis, moi, je n'en suis pas sûr.

Si c'était une calomnie
Qu'une apparence aide à courir,
Je ferais une vilenie ;
Son nom ? Ah ! jamais de la vie !
J'aimerais cent fois mieux mourir !

La jolie école qu'il fonde,
Sans ce nom-là, pourra planer
Dans une obscurité profonde ;
La plus belle fille du monde
Comme l'on dit, ne peut donner...

D'ailleurs, Madame, cette école
Ne fait pas beaucoup d'adhérents :
Il n'ont pas de porte-parole ;
Et c'est comme une offre un peu molle
Qui rit à des indifférents.

Cependant, sa présence agace
Ceux qui la soupçonnent dans l'air ;
Car ce soupçon va, se déplace,
Et finalement vous enlace
Comme la vague dans la mer.

Ces messieurs lisent la gazette,
Dînent en ville assez bien mis ;
Quelquefois courtisent Lisette ;
J'approuve cela, mais, mazette !
Je n'en... gueule pas mes amis.

Oui, ce vilain soupçon nous gêne
Et pourrait submerger un jour,
Près de la niche, avec la chaîne,
L'Amitié, cette belle chienne,
Qui hurle à sa lune d'amour.

Pour moi, vous remarquerez comme
J'ai quelque grâce à protester :
Passant pour la moitié d'un homme,
N'aurais-je pas le droit, en somme,
De chercher à me compléter ?

Bien mieux, tiens ! je ne suis pas large,
Mais le plus raide des paris
Qu'on me le tienne, et je me charge
Sous les yeux du public, en marge,
Du plus vieux mouchard de Paris !

Or, je ne suis pas pédéraste ;
Que serait-ce si je l'étais !
Voyez, Madame, quel contraste !
Ah ! par la perruque d'Éraste !
Et maintenant... si je pétais !
Sonnet.

C'est la Mort qui console, hélas ! et qui fait vivre ;
C'est le but de la vie, et c'est le seul espoir
Qui, comme un élixir, nous monte et nous enivre,
Et nous donne le coeur de marcher jusqu'au soir ;

A travers la tempête, et la neige, et le givre,
C'est la clarté vibrante à notre horizon noir ;
C'est l'auberge fameuse inscrite sur le livre,
Où l'on pourra manger, et dormir, et s'asseoir ;

C'est un Ange qui tient dans ses doigts magnétiques
Le sommeil et le don des rêves extatiques,
Et qui refait le lit des gens pauvres et nus ;

C'est la gloire des Dieux, c'est le grenier mystique,
C'est la bourse du pauvre et sa patrie antique,
C'est le portique ouvert sur les Cieux inconnus !
Marie-Lyne Feb 2017
Il y a des amours
qui sont inoubliables
Il y a des gens
qui ne nous ressemblent pas
Il y a des choses
qu'on ne pourra jamais expliquer
Il y a des films
plus vrais que nos vies
Il y a des soleils
plus froides que la neige
Il y a des places
plus sacrées que l'église
Il y a des sentiments
qui nous brûlent
Philosophes hardis, qui passez votre vie
A vouloir expliquer ce qu'on n'explique pas,
Daignez écouter, je vous prie,
Ce trait du plus sage des chats.
Sur une table de toilette
Ce chat aperçût un miroir ;
Il y saute, regarde, et d'abord pense voir
Un de ses frères qui le guette.
Notre chat veut le joindre, il se trouve arrêté.
Surpris, il juge alors la glace transparente,
Et passe de l'autre côté,
Ne trouve rien, revient, et le chat se présente.
Il réfléchit un peu : de peur que l'animal,
Tandis qu'il fait le tour, ne sorte,
Sur le haut du miroir il se met à cheval,
Deux pattes par ici, deux par là ; de la sorte
Partout il pourra le saisir.
Alors, croyant bien le tenir,
Doucement vers la glace il incline la tête,
Aperçoit une oreille, et puis deux... à l'instant,
A droite, à gauche il va jetant
Sa griffe qu'il tient toute prête :
Mais il perd l'équilibre, il tombe et n'a rien pris.
Alors, sans davantage attendre,
Sans chercher plus longtemps ce qu'il ne peut comprendre,
Il laisse le miroir et retourne aux souris :
Que m'importe, dit-il, de percer ce mystère ?
Une chose que notre esprit,
Après un long travail, n'entend ni ne saisit,
Ne nous est jamais nécessaire.
Gorba Jun 2020
Notre être, à l’incipit, apparaît minuscule
Puis se développe notre histoire jusqu’à son crépuscule
Une existence imaginée comme un cycle par quelques têtus
Constituée d’un début, d’une suite d’intrigues, et d’une fin, avant de nous voir repus

La partie la plus longue est communément appelée la vie
Selon le contexte certaines dérangent et d’autres donnent envie
Certaines sont accompagnées de louanges et d’autres de mépris
D’échecs qui démangent, et de réussites anodines qu’on oublie

Est-il raisonnable de se comparer et de se sentir misérable ?
Alors qu’en creusant un peu on trouverait facilement quelque chose de louable
Quelque chose que l’on a accompli pour aider une personne
Peu importe la teneur de l’effort, l’essentiel est que l’on donne
De sa personne, de son temps, de son pécule
Apportant ainsi un instant de joie, un sourire, en somme rien de ridicule
A quelqu’un dans le besoin, en détresse, ou se sentant inutile
Tel une montre suisse à laquelle il manquerait une pile
En oubliant que nous faisons tous partie d’un seul et même écosystème
Que la mort du phytoplancton* entraînerait l’extinction de la race humaine
Dans une époque où il semblerait que la réussite se mesure à la hauteur de ce qui est ou peut être consommé,
J’estime que nous sommes tous importants et avons tous une valeur
Inestimable, tout en étant palpable et faisant preuve de splendeur
Et qui ne se restreint pas seulement à quelques possessions futiles et prochainement démodées
Pauvreté et richesse se retrouvent souvent en cohabitation
Quelques âmes en peine et perdues rêvent de jouir un jour de la possibilité de posséder un avion
Alors qu’il est possible de voler et de voyager rien qu’avec de l’imagination
Que courir, c’est voler entre deux foulées, voler par intermittence
Que penser c’est voyager et contempler des pensées, sans avoir besoin de prendre des vacances
Il est possible de créer et d’exister via la culture d’une passion
Permettant la naissance d’un bien commun
Un bien immatériel ou non, portant un amour inconsidéré en son sein
Non par hasard mais par dessein.

« Au milieu des choses », on se retrouve parachuté
Dans un monde, une société qu’il est pénible de changer
Mais l’histoire française nous a montré
Qu’en nous y mettant tous ensemble rien ne pourra nous résister.
Les rumeurs du jardin disent qu'il va pleuvoir ;
Tout tressaille, averti de la prochaine ondée :
Et toi qui ne lis plus, sur ton livre accoudée,
Plaints-tu l'absent aimé qui ne pourra te voir ?

Là-bas, plaint son aile et mouillé sous l'ombrage,
Banni de l'horizon qu'il n'atteint que des yeux,
Appelant sa compagne et regardant les cieux,
Un ramier, comme toi, soupire de l'orage.

Laissez pleuvoir, ô cœurs solitaires et doux !
Sous l'orage qui passe il renaît tant de choses,
Le soleil sans la pluie ouvrirait-il les roses ?
Amants, vous attendez, de quoi vous plaignez-vous ?
En tes yeux nage une factice opale,
Et le charbon t'allonge les sourcils,
Mais ton regard sans douceur n'est que pâle
Sous tes gros cils de sépia noircis.

Ah ! Pauvre femme, il règne un froid de pierre
Dans la langueur menteuse de ce fard ;
Quand tu mettrais l'azur sous ta paupière,
Tu ne pourrais embellir ton regard !

Oui, porte envie aux yeux vrais qui nous laissent,
En se voilant, captivés d'autant mieux ;
Ceux-là sont beaux, même quand ils se baissent :
C'est le regard qui fait le prix des yeux.

Qui sait pourtant s'il faut qu'on te dédaigne,
S'il n'est plus rien, dans ton âme, à cueillir ?
Pour la sauver il suffit qu'on la plaigne,
Un dernier lis y pourra tressaillir.

Est-il si vain, ce rêve de jeunesse
Dont nous rions et que nous fîmes tous :
Guérir une âme où la vertu renaisse !
Si généreux, étions-nous donc si fous ?

Qui sait pourtant si tout ton maquillage
N'endigue pas des pleurs accumulés,
Qui brusquement y feraient leur sillage,
Pareils aux pleurs des yeux immaculés ?

Car tous les pleurs, de pécheresse ou d'ange,
Dans tous les yeux sont d'eau vive et de sel ;
L'onde en est pure, et rien de ce mélange,
S'il vient du cœur, n'est indigne du ciel ;

Vois Madeleine : elle y trône ravie
Pour une larme où Dieu se put mirer :
S'il t'en reste une, une ancienne, à pleurer,
Tu peux laver ta paupière et ta vie.
Chanson IV.

Plus étroit que la vigne à l'Ormeau se marie,
De bras souplement forts,
Du lien de tes mains, maîtresse, je te prie,
Enlace-moi le corps.

Et feignant de dormir, d'une mignarde face
Sur mon front penche-toi ;
Inspire, en me baisant, ton haleine et ta grâce
Et ton cœur dedans moi.

Puis appuyant ton sein sur le mien qui se pâme,
Pour mon mal apaiser,
Serre plus fort mon col, et me redonne l'âme
Par l'esprit d'un baiser.

Si tu me fais ce bien, par tes yeux je te jure,
Serment qui m'est si cher,
Que de tes bras aimez jamais autre aventure
Ne pourra m'arracher.

Mais souffrant doucement le joug de ton Empire,
Tant soit-il rigoureux,
Dans les champs Élysez un même navire
Nous passera tous deux.

Là, morts de trop aimer, sous les branches Myrtilles
Nous verrons tous les jours
Les anciens Héros auprès des Héroïnes
Ne parler que d'amours.

Tantôt nous danserons par les fleurs des rivages
Sous maints accords divers,
Tantôt lassés du bal irons sous les ombrages
Des Lauriers toujours verts ;

Où le mollet Zéphyr en haletant secoue
De soupirs printaniers
Ores les Orangers, ores mignard se joue
Entre les Citronniers.

Là du plaisant Avril la saison immortelle
Sans échange le suit :
La terre, sans labeur, de sa grasse mamelle,
Toute chose y produit.

D'en bas la troupe sainte autrefois amoureuse,
Nous honorant sur tous,
Viendra nous saluer, s'estimant bienheureuse
De s'accointer (1) de nous.

Puis nous faisant asseoir dessus l'herbe fleurie,
De toutes au milieu,
Nulle, en se retirant, ne sera point marrie
De nous quitter son lieu ;

Non celle (2) qu'un Taureau sous une peau menteuse
Emporta par la mer ;
Non celle (3) qu'Apollon vu, vierge dépiteuse,
En Laurier se former ;

Ni celles qui s'en vont toutes tristes ensemble,
Artemise et Didon ;
Ni cette belle Grecque, à qui ta beauté semble
Comme tu fais de nom.


1. S'accointer : S'approcher, se lier.
2. Europe.
3. Daphné.
Qui, toi, mon bien-aimé, t'attacher à mon sort,
Te parer d'une fleur que la tombe t'envie !
Lier tes jours de gloire à ma tremblante vie,
Et ton baiser d'amour au baiser de la mort !
Me suivre, toi si cher, aux rives enchantées
Que pour jamais bientôt mes pas auront quittées !
Mes pas que tu soutiens, qui te cherchaient toujours,
Dont la trace légère effleura le rivage
Où tu m'avais montré des fleurs et de beaux jours,
Où je vais devant toi passer comme un nuage !
Oui, devant toi ma vie incline son flambeau,
De ses pâles rayons le dernier va s'éteindre.
Ces fleurs, ces belles fleurs, que je ne puis atteindre,
Tu les effeuilleras un soir sur mon tombeau.

La Mort m'a regardée, et ta plainte adorable,
Ma jeunesse, tes vœux, rien ne doit l'attendrir.
Elle m'a regardée, et cette inexorable,
Quand j'écoutais ton chant, m'a dit : Tu vas mourir !

Oh ! non : prodigue encor les hymnes, les offrandes ;
Jette-lui ta couronne et tes lauriers en fleurs ;
Cache-moi dans ton sein, couvre-moi de guirlandes,
Et, longtemps immobile, elle craindra tes pleurs.
Conduis-moi près des flots. La nymphe qui soupire
Y rafraîchit l'air de sa voix :
Cet air doux et mortel, que ma bouche respire,
Brûle moins à l'ombre des bois.

Vois dans l'eau, vois ce lis, dont la tête abaissée
Semble se dérober au sourire des cieux :
Telle, craignant l'Amour et le cherchant des yeux,
J'essayais de te fuir, innocente et blessée.
Je demandais aux bois l'oubli de tes accents :
Un vague, un triste écho m'en rappelait les charmes,
Et dans les rameaux frémissants
Ton image venait s'attendrir à mes larmes.

Un jour, ce fut toi-même, un jour, à mes genoux,
Je te vis sous le saule, ami de mon jeune âge :
Je ne m'y trouvai plus seule avec ton image,
Il nous cachait ensemble, il se penchait sur nous.
Trop ****, hélas ! trop **** ; et ta flamme timide
Enhardit vainement mes timides secrets.
Tu les connus trop ****, et ma fuite rapide
T'abandonne à de longs regrets.

Oh ! que je crains pour toi l'aurore désolée
Qui ne pourra me rendre à tes vœux superflus,
Quand sa douce lueur, pour moi seule voilée,
Ne m'éveillera plus !
Mais le ruisseau répond, par un faible murmure,
Au souffle expirant des zéphyrs ;
La nymphe qui s'endort entraîne mes soupirs
À la source déjà moins pure.
Demain... L'écho plus triste a dit aussi : Demain.
Adieu, ma jeune vie ! adieu, toi que j'adore !
Ne gémis pas. Ce soir, je serre encor ta main :
Ce soir, efforce-toi de me sourire encore.
J'ai dit à l'esprit vain, à l'ostentation,

L'Ilion de l'orgueil futile, le Sion

De la frivolité sans cœur et sans entrailles,

La citadelle enfin du Faux :

« Croulez, murailles

Ridicules et pis, remparts bêtes et pis.

Contrescarpes, sautez comme autant de tapis

Qu'un valet matinal aux fenêtres secoue,

Fossés que l'eau remplit, concrétez-vous en boue

Qu'il ne reste plus rien qu'un souvenir banal

De tout votre appareil, et que cet arsenal,

Chics fougueux et froids, mots secs, phrase redondante,

Et cætera, se rende à l'émeute grondante

Des sentiments enfin naturels et réels. »


Ah ! j'en suis revenu, des « dandysmes » « cruels »

Vrais ou faux, dans la vie (accident ou coutume)

Ou dans l'art ou tout bêtement dans le costume.

Le vêtement de son état avec le moins

De taches et de trous possible, apte aux besoins,

Aux lies, aux chics qu'il faut, le linge, mal terrible

D'empois et d'amidon, le plus fréquent possible,

Et souple et frais autour du corps dispos aussi,

Voilà pour le costume, et quant à l'art, voici :


L'art tout d'abord doit être et paraître sincère

Et clair, absolument : c'est la loi nécessaire

Et dure, n'est-ce pas, les jeunes, mais la loi ;

Car le public, non le premier venu, mais moi,

Mais mes pairs et moi, par exemple, vieux complices,

Nous, promoteurs de vos, de nos pauvres malices.

Nous autres qu'au besoin vous sauriez bien chercher,

Le vrai, le seul Public qu'il faille raccrocher.

Le Public, pour user de ce mot ridicule,

Dorénavant il bat en retraite et recule

Devant vos trucs un peu trop niais d'aujourd'hui,

Tordu par le fou rire ou navré par l'ennui.

L'art, mes enfants, c'est d'être absolument soi-même,

Et qui m'aime me suive et qui me suit qu'il m'aime,

Et si personne n'aime ou me suit, allons seul.

Mais traditionnel et soyons notre aïeul !

Obéissons au sang qui coule dans nos veines

Et qui ne peut broncher en conjectures vaines.

Flux de verve gauloise et flot d'aplomb romain

Avec, puisqu'un peu Franc, de bon limon germain,

Moyennant cette allure et par cette assurance

Il pourra bien germer des artistes en France.

Mais, plus de fioritures, bons petits,

Ni de ce pessimisme et ni du cliquetis

De ce ricanement comme d'armes faussées,

Et ni de ce scepticisme en sottes fusées ;

Autrement c'est la mort et je vous le prédis

De ma voix de bonhomme, encore un peu. Jadis.

Foin ! d'un art qui blasphème et fi ! d'un art qui pose,

Et vive un vers bien simple, autrement c'est la prose.

La Simplicité, - c'est d'ailleurs l'avis rara, -

Ô la Simplicité, tout-puissant, qui l'aura

Véritable, au service, en outre, de la Vie

Elle vous rend bon, franc, vous demi-déifie.

Que dis-je ? elle vous déifie en Jésus-Christ

Par l'opération du même Saint-Esprit

Et l'humblesse sans nom de son Eucharistie,

Sur les siècles épand l'ordre et la sympathie,

Règne avec la candeur et lutte par la foi,

Mais la foi tout de go, sans peur et sans émoi

Ni de ces grands raffinements des exégètes,

Elle trempe les cœurs, rassérène les têtes,

Enfante la vertu, met en fuite le mal

Et fixerait le monde en son état normal

N'était la Liberté que Dieu dispense aux âmes

Et dont le premier homme et nous, nous abusâmes

Jusqu'aux tristes excès où nous nous épuisons

Dans des complexités comme autant de prisons.

Et puis, c'est l'unité désirable et suprême :

On vit simple, comme on naît simple, comme on aime

Quand on aime vraiment et fort, et comme on hait

Et comme l'on pardonne, au bout, lorsque l'on est

Purement, nettement simple et l'on meurt de même,

Comme on naît, comme on vit, comme on hait, comme on aime,


Car aimer c'est l'Alpha, fils, et c'est l'Oméga

Des simples que le Dieu simple et bon délégua

Pour témoigner de lui sur cette sombre terre

En attendant leur vol calme dans sa lumière.


Oui, d'être absolument soi-même, absolument !

D'être un brave homme épris de vivre, et réclamant

Sa place à toi, juste Soleil de tout le monde.

Sans plus se soucier, naïveté profonde !

De ce tiers, l'apparat, que du fracas, ce quart,

Pour le costume, dans la vie et quant à l'art ;

Dédaigneux au superlatif de la réclame,

Un digne homme amoureux et frère de la Femme,

Élevant ses enfants pour ici-bas et pour

Leur lot gagné dûment en le meilleur Séjour,

Fervent de la patrie et doux aux misérables,

Fier pourtant, partant, aux refus inexorables

Devant les préjugés et la banalité

Assumant à l'envi ce masque dégoûté

Qui rompt la patience et provoque la claque

Et, pour un peu, ferait défoncer la baraque !

Rude à l'orgueil tout en pitoyant l'orgueilleux,

Mais dur au fat et l'écrasant d'un mot joyeux

S'il juge toutefois qu'il en vaille la peine

Et que sa nullité soit digne de l'aubaine.


Oui, d'être et de mourir **** d'un siècle gourmé

Dans la franchise, ô vivre et mourir enfermé,

Et s'il nous faut, par surcroît, de posthumes socles,

Gloire au poète pur en ces jours de monocles !
Dans un missel datant du roi François premier,
Dont la rouille des ans a jauni le papier
Et dont les doigts dévots ont usé l'armoirie,
Livre mignon, vêtu d'argent sur parchemin,
L'un de ces fins travaux d'ancienne orfèvrerie
Où se sentent l'audace et la peur de la main,
J'ai trouvé cette fleur flétrie.

On voit qu'elle est très vieille au vélin traversé
Par sa profonde empreinte où la sève a percé.
Il se pourrait qu'elle eût trois cents ans ; mais n'importe,
Elle n'a rien perdu qu'un peu de vermillon,
Fard qu'elle eût vu tomber même avant d'être morte,
Qui ne brille qu'un jour, et que le papillon,
En passant, d'un coup d'aile emporte ;

Elle n'a pas perdu de son cœur un pistil,
Ni du frêle tissu de sa corolle un fil ;
La page ondule encore où sécha la rosée
De son dernier matin, mêlée à d'autres pleurs ;
La mort en la cueillant l'a seulement baisée,
Et, soigneuse, n'a fait qu'éteindre ses couleurs,
Mais ne l'a pas décomposée.

Une mélancolique et subtile senteur,
Pareille au souvenir qui monte avec lenteur,
L'arome du secret dans les cassettes closes,
Révèle l'âge ancien de ce mystique herbier ;
Il semble que les jours se parfument des choses,
Et qu'un passé d'amour ait l'odeur d'un sentier
Où le vent balaya des roses.

Et peut-être, dans l'air sombre et léger du soir,
Un cœur, comme une flamme, autour du vieux fermoir,
S'efforce, en palpitant, de se frayer passage ;
Et chaque soir peut-être il attend l'angelus,
Dans l'espoir qu'une main viendra tourner la page
Et qu'il pourra savoir si rien ne reste plus
De la fleur qui fut son hommage.

Eh bien ! Rassure-toi, chevalier qui partais
Pour combattre à Pavie et ne revins jamais ;
Ou page qui, tout bas, aimant comme on adore,
Fis un aveu d'amour d'un Ave Maria :
Cette fleur qui mourut sous des yeux que j'ignore,
Depuis les trois cents ans qu'elle repose là,
Où tu l'as mise elle est encore.
A notre premier rendez-vous , dis !
T'oublieras pas d'amener tes poupées
et ta corde à sauter et Robinson Crusoë
et moi c'est promis je ramènerai mes billes, mes osselets
et Vendredi.
On jouera au cerf-volant aussi c'est promis.
S'il y a du vent
Et s'il fait beau et qu'on en a envie
On fera du toboggan et on jouera à chat perché.
S 'il pleut on se mettra sous un porche et on jouera aux cartes.
tu sais jouer aux jeu des sept familles ?
sinon on pourra toujours essayer
les petits chevaux ou le jeu de l'oie.
Je te laisserai jouer avec mes soldats de plomb
et j'espère que tu me prêteras pour la journée
Ta dînette pour que je te prépare
Une menthe à l'eau ou un diabolo fraise.
S'il fait trop soleil
On se mettra à l'ombre
Et je te lirai les lignes de la main
et je te montrerai ma collection de timbres roumains.
Et s'il fait nuit et qu'on voit des fantômes
On se cachera sous les couvertures
Je t'apprendrai à faire de la bicyclette
Et des cocottes en papier
tu verras c'est fastoche
Et ça fout les chocottes aux fantômes !

Ah j 'oubliais ! J 'amènerai ma fronde aussi
Pour te dégommer de l'arbre une mangue bien mûre
Qu'on dégustera tous les deux en même temps
Et on promettra-jurera-crachera qu'on est amis pour toujours !

— The End —