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caroline royer Jan 2017
Monotone
monocorde
d'une voix sans timbre
d'une voix aphone
Je ploids sous le poids
de cette mélopée
sans fard
lente et lanscinante
inscrite dans mes chairs
en caractère gras
Mises à mal
par la vie
Mises à mort
Maintes fois
Et toujours on se relève
On revient
Et on erre dans cette vie
Mise à prix
Au marché des Sans Noms
Ta valeur n'a pas de prix
Que cela soit inscrit
En caractère gras
Sonnet.

C'est la Mort qui console, hélas ! et qui fait vivre ;
C'est le but de la vie, et c'est le seul espoir
Qui, comme un élixir, nous monte et nous enivre,
Et nous donne le coeur de marcher jusqu'au soir ;

A travers la tempête, et la neige, et le givre,
C'est la clarté vibrante à notre horizon noir ;
C'est l'auberge fameuse inscrite sur le livre,
Où l'on pourra manger, et dormir, et s'asseoir ;

C'est un Ange qui tient dans ses doigts magnétiques
Le sommeil et le don des rêves extatiques,
Et qui refait le lit des gens pauvres et nus ;

C'est la gloire des Dieux, c'est le grenier mystique,
C'est la bourse du pauvre et sa patrie antique,
C'est le portique ouvert sur les Cieux inconnus !
J'honore en secret la duègne
Que raillent tant de gens d'esprit,
La vertu ; j'y crois, et dédaigne
De sourire quand on en rit.

Ah ! Souvent l'homme qui se moque
Est celui que point l'aiguillon,
Et tout bas l'incrédule invoque
L'objet de sa dérision.

Je suis trop fier pour me contraindre
À la grimace des railleurs,
Et pas assez heureux pour plaindre
Ceux qui rêvent d'être meilleurs.

Je sens que toujours m'importune
Une loi que rien n'ébranla ;
Le monde (car il en faut une)
Parodie en vain celle-là ;

Qu'il observe la règle inscrite
Dans les mœurs ou les parchemins,
Je hais sa rapine hypocrite,
Comme celle des grands chemins.

Je hais son droit, aveugle aux larmes,
Son honneur qui lave un affront
En mesurant bien les deux armes,
Non les deux bras qui les tiendront,

Sa politesse meurtrière
Qui vous trahit en vous servant,
Et, pour vous frapper par derrière,
Vous invite à passer devant.

Qu'un plaisant nargue la morale,
Qu'un fourbe la plie à son vœu,
Qu'un géomètre la ravale
À n'être que prudence au jeu,

Qu'un dogme leurre à sa manière
L'égoïsme du genre humain,
Ajournant à l'heure dernière
L'avide embrassement du gain.

Qu'un cynisme, agréable au crime,
Devant le muet infini,
Voue au néant ceux qu'on opprime,
Avec l'oppresseur impuni !

Toujours en nous parle sans phrase
Un devin du juste et du beau,
C'est le cœur, et dès qu'il s'embrase
Il devient de foyer flambeau :

Il n'est plus alors de problème,
D'arguments subtils à trouver.
On palpe avec la torche même
Ce que les mots n'ont pu prouver.

Quand un homme insulte une femme,
Quand un père bat ses enfants,
La raison neutre assiste au drame,
Mais le cœur crie au bras : défends !

Aux lueurs du cerveau s'ajoute
L'éclair jailli du sein : l'amour !
Devant qui s'efface le doute
Comme un rôdeur louche au grand jour :

Alors la loi, la loi sans table,
Conforme à nos réelles fins,
S'impose égale et charitable,
On forme des souhaits divins :

On voudrait être un Marc-Aurèle,
Accomplir le bien pour le bien,
Pratiquer la vertu pour elle,
Sans jamais lui demander rien,

Hors la seule paix qui demeure
Et dont l'avènement soit sûr,
L'apothéose intérieure
Dont la conscience est l'azur !

Mais pourquoi, saluant ta tâche,
Inerte amant de la vertu,
Ô lâche, lâche, triple lâche,
Ce que tu veux, ne le fais-tu ?

— The End —