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Paul d'Aubin Oct 2013
Hommage élégiaque au poète indicible du Genêt, Giacomo Leopardi


Oh toi, Leopardi né à Recanati,
Tu portas sur la vie, le regard des «antiques»
Et même, les «lumières» semblaient pâles pour toi,
Du haut du belvédère de la pensée antique ;
Tu vivais en ton siècle comme un exilé,
Qui a connu l’âge d’or et se languit d’ennui.
Recanati, pour toi, était comme un caveau
Dont tu ne t’échappais qu’au travers de tes livres.
Ivre de grec et féru de latin,
Seule la bibliothèque était ta vraie amie.
Latiniste à huit ans, Helléniste à quatorze,
Si ton corps t’enfermait, ton esprit t’élevait ;
Bien haut, dans les hauteurs où dominent les aigles.
Très tôt dans la palette de tes talents immenses,
Tu sus choisir la muse comme cime des arts ;
Et devint son Mozart, ciselant de ses mots,
Que tu allais cueillir dans les champs de diamant,
Dans la Grecque éternelle qui irrigue l'Esprit,
Tu souffrais en silence ton époque mesquine.

Par ton hommage à Dante tu commenças d'écrire
Et souffrait tellement pour ta patrie meurtrie.
Ainsi tu ravivas la mémoire, des légions enfouies
Sous les neiges et les glaces de la Russie glaciale,
Là où, Napoléon, conduisit tes enfants
Où dans de vains combats ils moururent, si ****.
Admirant la nature tu en perçus la grandeur,
Mais en compris aussi les minéralités froides
Dont l'éternel retour se rit de nos soucis,
Alors que nous goûtons des lieux apprivoisées
Son chaos naît et renaît en "Bige Bang" convulsifs,
Et moins que des fourmis, elle se soucie de nous.
Gravissant les volcans tu pouvais contempler
Le peu de cas fait, de cités, jadis si glorieuses.
Tu pouvais mesurer l'immense solitude
Qui pétrifia Pascal et rend tout orgueil dérisoire,
Comme pure chimère dans les champs du Cosmos
Ou le temps ne suit pas, nos piètres horloges.
Et, pourtant gravissant les pentes du Vésuve
Du Genêt si chétif, tu saisis la grandeur ;
Celle même, des humains face à l'inexorable.
Mieux encore tu en appelas à la fraternité humaine,
Et face aux cataclysmes toujours renouvelés
Tu conseillas de ne pas y rajouter nos propres maux.
Toi que l'on désigna : "prince du pessimisme" ;
"Sombre amant de la Mort, pauvre Leopardi",
Tu fus plus bien plus que d'autres, un sceptique attentif,
Aux peines de tes frères, et à leurs vains combats,
Toi le savant chétif qui mourut à trente-neuf ans,
Tu goûtas la passion de cruelles qui repoussaient ta bosse.

Paul Arrighi ( Toulouse/France)
E-Mail : paul20.arrighi@numericable.fr
À Maurice Raynal.


S'étendant sur les côtes du cimetière
La maison des morts l'encadrait comme un cloître
À l'intérieur de ses vitrines
Pareilles à celles des boutiques de modes
Au lieu de sourire debout
Les mannequins grimaçaient pour l'éternité

Arrivé à Munich depuis quinze ou vingt jours
J'étais entré pour la première fois et par hasard
Dans ce cimetière presque désert
Et je claquais des dents
Devant toute cette bourgeoisie
Exposée et vêtue le mieux possible
En attendant la sépulture

Soudain
Rapide comme ma mémoire
Les yeux se rallumèrent
De cellule vitrée en cellule vitrée
Le ciel se peupla d'une apocalypse
Vivace
Et la terre plate à l'infini
Comme avant Galilée
Se couvrit de mille mythologies immobiles
Un ange en diamant brisa toutes les vitrines
Et les morts m'accostèrent
Avec des mines de l'autre monde

Mais leur visage et leurs attitudes
Devinrent bientôt moins funèbres
Le ciel et la terre perdirent
Leur aspect fantasmagorique

Les morts se réjouissaient
De voir leurs corps trépassés entre eux et la lumière
Ils riaient de leur ombre et l'observaient
Comme si véritablement
C'eût été leur vie passée

Alors je les dénombrai
Ils étaient quarante-neuf hommes
Femmes et enfants
Qui embellissaient à vue d'œil
Et me regardaient maintenant
Avec tant de cordialité
Tant de tendresse même
Que les prenant en amitié
Tout à coup
Je les invitai à une promenade
**** des arcades de leur maison

Et tous bras dessus bras dessous
Fredonnant des airs militaires
Oui tous vos péchés sont absous
Nous quittâmes le cimetière

Nous traversâmes la ville
Et rencontrions souvent
Des parents des amis qui se joignaient
À la petite troupe des morts récents
Tous étaient si gais
Si charmants si bien portants
Que bien malin qui aurait pu
Distinguer les morts des vivants

Puis dans la campagne
On s'éparpilla
Deux chevau-légers nous joignirent
On leur fit fête
Ils coupèrent du bois de viorne
Et de sureau
Dont ils firent des sifflets
Qu'ils distribuèrent aux enfants

Plus **** dans un bal champêtre
Les couples mains sur les épaules
Dansèrent au son aigre des cithares

Ils n'avaient pas oublié la danse
Ces morts et ces mortes
On buvait aussi
Et de temps à autre une cloche
Annonçait qu'un nouveau tonneau
Allait être mis en perce

Une morte assise sur un banc
Près d'un buisson d'épine-vinette
Laissait un étudiant
Agenouillé à ses pieds
Lui parler de fiançailles

Je vous attendrai
Dix ans ans vingt ans s'il le faut
Votre volonté sera la mienne

Je vous attendrai
Toute votre vie
Répondait la morte

Des enfants
De ce monde ou bien de l'autre
Chantaient de ces rondes
Aux paroles absurdes et lyriques
Qui sans doute sont les restes
Des plus anciens monuments poétiques
De l'humanité

L'étudiant passa une bague
À l'annulaire de la jeune morte
Voici le gage de mon amour
De nos fiançailles
Ni le temps ni l'absence
Ne nous feront oublier nos promesses
Et un jour nous aurons une belle noce
Des touffes de myrte
À nos vêtements et dans vos cheveux
Un beau sermon à l'église
De longs discours après le banquet
Et de la musique

De la musique
Nos enfants
Dit la fiancée
Seront plus beaux plus beaux encore
Hélas ! la bague était brisée
Que s'ils étaient d'argent ou d'or
D'émeraude ou de diamant
Seront plus clairs plus clairs encore
Que les astres du firmament
Que la lumière de l'aurore
Que vos regards mon fiancé
Auront meilleure odeur encore
Hélas ! la bague était brisée
Que le lilas qui vient d'éclore
Que le thym la rose ou qu'un brin
De lavande ou de romarin

Les musiciens s'en étant allés
Nous continuâmes la promenade

Au bord d'un lac
On s'amusa à faire des ricochets
Avec des cailloux plats
Sur l'eau qui dansait à peine

Des barques étaient amarrées
Dans un havre
On les détacha
Après que toute la troupe se fut embarquée
Et quelques morts ramaient
Avec autant de vigueur que les vivants

À l'avant du bateau que je gouvernais
Un mort parlait avec une jeune femme
Vêtue d'une robe jaune
D'un corsage noir
Avec des rubans bleus et d'un chapeau gris
Orné d'une seule petite plume défrisée

Je vous aime
Disait-il
Comme le pigeon aime la colombe
Comme l'insecte nocturne
Aime la lumière

Trop ****
Répondait la vivante
Repoussez repoussez cet amour défendu
Je suis mariée
Voyez l'anneau qui brille
Mes mains tremblent
Je pleure et je voudrais mourir

Les barques étaient arrivées
À un endroit où les chevau-légers
Savaient qu'un écho répondait de la rive
On ne se lassait point de l'interroger
Il y eut des questions si extravagantes
Et des réponses tellement pleines d'à-propos
Que c'était à mourir de rire
Et le mort disait à la vivante

Nous serions si heureux ensemble
Sur nous l'eau se refermera
Mais vous pleurez et vos mains tremblent
Aucun de nous ne reviendra
On reprit terre et ce fut le retour
Les amoureux s'entr'aimaient
Et par couples aux belles bouches
Marchaient à distances inégales
Les morts avaient choisi les vivantes
Et les vivants
Des mortes
Un genévrier parfois
Faisait l'effet d'un fantôme

Les enfants déchiraient l'air
En soufflant les joues creuses
Dans leurs sifflets de viorne
Ou de sureau
Tandis que les militaires
Chantaient des tyroliennes
En se répondant comme on le fait
Dans la montagne

Dans la ville
Notre troupe diminua peu à peu
On se disait
Au revoir
À demain
À bientôt
Beaucoup entraient dans les brasseries
Quelques-uns nous quittèrent
Devant une boucherie canine
Pour y acheter leur repas du soir

Bientôt je restai seul avec ces morts
Qui s'en allaient tout droit
Au cimetière

Sous les Arcades
Je les reconnus
Couchés
Immobiles
Et bien vêtus
Attendant la sépulture derrière les vitrines

Ils ne se doutaient pas
De ce qui s'était passé
Mais les vivants en gardaient le souvenir
C'était un bonheur inespéré
Et si certain
Qu'ils ne craignaient point de le perdre

Ils vivaient si noblement
Que ceux qui la veille encore
Les regardaient comme leurs égaux
Ou même quelque chose de moins
Admiraient maintenant
Leur puissance leur richesse et leur génie
Car y a-t-il rien qui vous élève
Comme d'avoir aimé un mort ou une morte
On devient si pur qu'on en arrive
Dans les glaciers de la mémoire
À se confondre avec le souvenir
On est fortifié pour la vie
Et l'on n'a plus besoin de personne.
A L Davies Jan 2013
last night i almost
gave up thinking of bronzy brazilian girls
perspiring pure coconut oil, eau de margherita ;
supermodelas eating my dreams like concord grapes, lionesses
lounging on new york balconies, lithe, reading céline.
(esti ginzburg, on the phone, considers another pomeranian) .
almost stopped.
almost derailed strange vogue-like fantasme of irina shayk, standing legs planted
left knee out-****** and foot
in ebony heel, cocked against the earth.
set being imitation of gloomy coal mine, east of prague. thin arms firmly controlling the
arc of her pickaxe, clothed in leather, high heels;
sheen of sweat holding her feline body in sweet embrace.
imagining that when shift's end buzzer echoes thru the tunnels she smokes a cigarette
on a bench in the women's locker, apple planted on old planking, elbows on her knees.
cover-alls peeled
down to her waist and her hair,
free at last.
(click)
on the tram back into the city all the smoked glass
cartier storefronts pass by like polaroids held in the hand. the same speed.
giggling, 'rina thinks of the six she could place
along her arm; gilt gold, brushed silver, diamant...

there are 11 smoked belmonts by the back steps; i did
little with the night. (tall shadow of a woman in a black dress and my mouth
a cotton ball)
that is to say:
i did almost give up thinking about bronzy braz ilia     g rls ,
-
but i didn't/and so there's nothing else.
'some girls' (insp.) / kanye west taught me a lot about supermodels.
Tout amoureux, de sa maîtresse,
Sur son coeur ou dans son tiroir,
Possède un gage qu'il caresse
Aux jours de regret ou d'espoir.

L'un d'une chevelure noire,
Par un sourire encouragé,
A pris une boucle que moire
Un reflet bleu d'aile de geai.

L'autre a, sur un cou blanc qui ploie,
Coupé par derrière un flocon
Retors et fin comme la soie
Que l'on dévide du cocon.

Un troisième, au fond d'une boîte,
Reliquaire du souvenir,
Cache un gant blanc, de forme étroite,
Où nulle main ne peut tenir.

Cet autre, pour s'en faire un charme,
Dans un sachet, d'un chiffre orné,
Coud des violettes de Parme,
Frais cadeau qu'on reprend fané.

Celui-ci baise la pantoufle
Que Cendrillon perdit un soir ;
Et celui-ci conserve un souffle
Dans la barbe d'un masque noir.

Moi, je n'ai ni boucle lustrée,
Ni gant, ni bouquet, ni soulier,
Mais je garde, empreinte adorée
Une larme sur un papier :

Pure rosée, unique goutte,
D'un ciel d'azur tombée un jour,
Joyau sans prix, perle dissoute
Dans la coupe de mon amour !

Et, pour moi, cette obscure tache
Reluit comme un écrin d'Ophyr,
Et du vélin bleu se détache,
Diamant éclos d'un saphir.

Cette larme, qui fait ma joie,
Roula, trésor inespéré,
Sur un de mes vers qu'elle noie,
D'un oeil qui n'a jamais pleuré !
Katrine Jul 2014
Kan jeg?
brænde mig selv ned
med hud og neglerod
hver en sprække
af fregnede smil
og skarpe vinterknogler
havde man fingre af kul
kunne man tegne sig selv op i silhuet
en skælvene kvindes
begyndende skygge tager form
på halvmånens blege papir
under fuldmånen er jeg
en lysende diamant
indtil da
danser jeg på tåspidsen om bålet
kan jeg se mig selv
gå op i røg og damp
stolt som den enøjede konge

Skal jeg?
presses sammen til
noget du ikke genkender
når vi støder ind i hinanden i gaderne
tilfældigt, selvfølgeligt
gyderne af vores
måneskinsvandringer
hvor vi drømte om en måne der var hel
skal jeg samle månens stykker sammen
uden dig til at smile når jeg ikke blot er konturer af vores drømme
og jeg lyser gyderne op

Må jeg?
glemme at du fandtes
den dag hvor der var måneformørkelse og du
ikke dukkede op i gyden
jeg så dig gå op i røg jeg så
at ilden i dit hjerte aldrig brændte for mig
må jeg vide at jeg kan blive en funklende diamant også efter at
jeg brændte mine fingre på dit hjerte
da du sagde at du elskede mig under månen
og jeg vidste at du var aftagende
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Paul d'Aubin Dec 2016
Des Cassandres incomprises ?


Elle maudissait encor le baiser refusé à celui qui aurait pu devenir son amant. Le bel et fier Apollon s’était vengé de son refus, en lui soufflant sur la bouche, afin que le don de divination, déjà donné, soit réduit à néant, et qu’elle ne fut jamais crue. Cruel sort qui la condamnait à connaître le futur, en restant incomprise aux yeux de toutes et de tous, parmi celles et ceux qu’elle chérissait, et auxquels elle voulait épargner le malheur. Aussi lorsque tu vis naître ton frère Pâris, tu informas ta mère des sombres présages que son devenir présentait pour la famille royale. Hélas, mal avisés, Priam et Hécube, après l’avoir éloigné finirent par lui donner une ambassade à Sparte. Ou il fut séduit et enleva Hélène la si belle. Puis vint ce jour funeste, quand tu vis, le port de Troie presque masqué par des milliers de voiles rouges, et autant de vaisseaux munis d’éperons. Tu ressentis, une peur panique, celle, de la mort, de toutes celles et ceux que tu aimais, et tu versas des larmes salées pour tous ces jeunes hommes qui allaient perdre la vie, dans des combats menés autours des remparts. Avant que les chevaux géants de bois, funestes, dont personne ne te crut pour le danger annoncé entrèrent dans la ville, alors que l’armée Achéenne faisait mine de se retirer. C’est ****, dans la nuit, qu’à la lueur des torches, les guerriers, sortirent des flancs des chevaux géants et jaillirent en hurlant, pour porter le malheur dans ta chère Troie. Glacée d’émotion et d’épouvante tu te réfugias auprès de l’autel sacre d’Athéna, Pour préserver ton corps gracieux des outrages de l’ennemi. Mais c’était sans compter sur Ajax le furieux, qui faisant fi de la protection sacrée que t’offrait le temple, te pris malgré tes cris et tes pleurs, déchira ta blanche tunique, te traina par les cheveux sur l’autel. Et violenta ton corps avec plus de brutalité que de désir. Tu aurais voulu mourir, mais Athéna, elle-même, insultée, comme Déesse, dans son propre temple, ne le voulut point. C’est le roi Agamemnon, qui te trouva déflorée, prostrée et en larmes, et te fit prisonnière, et te gardant en vie, pris la décision de te ramener à Mycènes. Tu le mis en garde contre la jalousie qu’allait éprouver sa femme, Clytemnestre Mais ce fut vain, et toi, déshonorée et prisonnière tu ne voulais plus vivre. Tu tendis ta gorge à cette jalouse implacable, peu après avoir débarqué Et son geste de mort fut ton soulagement, oh, toi devineresse, jamais crue.
Après Cassandre la Troyenne, il y eut d’autres fameuses Cassandre. Louise Michel, institutrice porta sa flamme aux Communards, Et faite prisonnière réclama une mort qu’on n’osa pas lui donner. Transformant sa peine de déportation en Nouvelle Calédonie, Ou elle refusa de faire chorus contre les canaques. Enfin libérée elle soutint ses sœurs et frères, les prolétaires, et brandit le drapeau noir des Libertaire, qui faisait si peur. Cette Femme admirable resta souvent incomprise, dans ses combats et sa soif d’un Monde plus humain. Cette solitude aussi doit être le sceau des Cassandre. De l’autre côté du Rhin, et même, en Pologne a Zamość, naquit une nouvelle Cassandre. Fière comme un aigle, pensive comme une colombe, elle avait pour prénom Rosa, mais pas de celles avec épines, Son nom était Luxemburg, et c’était vraiment un être de lumières. Une pensée étincelante, une volonté de duchesse Espagnole, et une lucidité aussi grande que les feux de ses passions. Rosa lutta, dès le début contre la guerre et la capitulation des esprits, devant ces monstres d’acier, de feu et de gaz moutarde. Qui allaient ravager l’Europe en fauchant des millions de vies. Mais dans cet empire si discipliné, elle fut emprisonnée, pour lui faire expier son opposition à cette guerre fratricide, et afin que les consciences restassent bien éteintes. Mais son courage était sans borne avec son amant Leo Jogiches, Et la force de conviction de Karl Liebknecht. Ayant passé la majeure partie de la guerre, emprisonnée, elle étudiait sans répit et faisait parvenir des articles, pour ses amis de la « ligue Spartacus ». Elle défendait la Liberté, comme le vrai diamant du socialisme à venir. Mais les États-majors militaires et politiques la haïssaient. Libérée par la chute du kaiser, elle reprit sa passion, de journaliste à la plume de feu à la «Rote Fahne.» Elle s’efforçait d’éclairer des masses trompées par des bergers par trop intéressés, timorés et menteurs. Elle rejetait aussi toute illusion de putsch et de violence armée. Hélas, elle ne fut pas écoutée par les irréfléchis à la parole haute, ni par les têtes remplies de vent et encor imprégnèes par les usages récents de tant de violences inoculées durant et par ces années de guerre et de tueries. Ces hâtifs et ces simplistes au verbe haut déclenchèrent l’émeute dans Berlin, qui allait devenir leur commun linceul. Elle décida cependant de ne pas se désolidariser des révoltés, D’ailleurs arrête-on sans digue un torrent furieux ? Rosa, refusa d’ajouter l’enjeu de sa survie et sa propre peur à la désorientation générale de ses camarades. Consciente de l’échec, Rosa écrivit son dernier article sur : « L’ordre règne à Berlin, L’ordre règne à Varsovie », « l’ordre règne à Paris », « l’ordre règne à Berlin ». Tous les demi-siècles, les gardiens de « l’ordre », lancent ainsi dans un des foyers de la lutte mondiale leurs bulletins de victoire Et ces « vainqueurs » qui exultent ne s’aperçoivent pas qu’un « ordre», qui a besoin d’être maintenu périodiquement par de sanglantes hécatombes, va inéluctablement à sa perte.» Puis Rosa, rentra chez elle, sans prendre de précaution ni se cacher vraiment. Nourrissait-elle quelconque illusion sur son ennemi, Gustav Noske? Lequel revendiqua, pour lui-même, le douteux honneur d’avoir tenu le rôle d’un « chien sanglant » Ou avait-elle, plutôt du mal à regarder l’horreur de la haine et les tréfonds de la barbarie ? Amenée par les soldats des corps francs elle fut interrogée et se tut. Puis, ce beau front pensif et cette tête bouillonnante d'avenirs reçut de violents coups de crosse, avant que les barbares ne lui tirent une balle dans la tête,
et ne la jettent inanimée dans le canal.
Une Cassandre de plus était victime de la froide cruauté,
et des peurs qu'inspiraient la création d'une société nouvelle.
Mais l'esprit des Cassandre survit dans les braises de la lucidité
Aujourd'hui, nous avons probablement des Cassandre parmi nous,
dans les braises de la vérité en marche, qu’il nous faut oser écouter en les aidant à dessiller nos yeux encore clos. dont l’esprit s’est forgé.

Paul Arrighi.
Paul d'Aubin Jan 2014
La Llorona

(ce poéme écrit après avoir écouté la chanson est
dédié à Frida Kahlo et à Joan Baez)

Sur les remparts de Tenochtitlan
tu ne sors qu'à la nuit couchante
les nuits ou la lune est orange tourne
rouge de sang et d'amertume.
Tu fais briller ta chevelure
de geai, tel un diamant noir,
ton nom est "Llorona la belle"
qui nous appelle de ses pleurs.
Et tente de nous attirer
Avec sa voix rauque et ses pleurs.

Tu annonces la venue de ceux
par qui la mort doit advenir.
Car telle est ta prophétie
magicienne, du Monde Indien.
Surtout passant, ferme les yeux
et retiens ton amour naissant
car la Llorona ne vient pas
pour te serrer dans ses bras
et te donner sa douce peau,
Ni te couvrir de baisers.

Elle se fait messagère de malheur.
Et annonce les temps nouveaux
D’où surgiront les hommes barbus, bardés de fer
avec ces animaux fabuleux
Et leur bâton de foudre et de tonnerre
qui tuent mieux que la guerre fleurie.
Son chant est hymne funèbre
ou la prophétie s'accomplit
dans les cliquetis d’acier,
la maudite soif de l’or
et le feu des bûchers.

Garde toi de suivre « la pleureuse »
qui t'annonce les jours maudits,
ou le sang indien va couler
et le Peuple être mis en servage.
Loran ta beauté est venin
cartes présages sont les flèches
que nous lancent les "temps nouveaux".
Pleurons, tous, notre liberté
et les jours de cendre venus,
et la chute des Dieux serpents.

Paul Arrighi, Toulouse
(ce poéme écrit après avoir écouté la chanson est
dédié à Frida Kahlo et à Joan Baez)
Paul d'Aubin Dec 2014
atherien [1]

Que tu étais vive et jolie
sous les flambées très ondulées
de ta chevelure rousse,
comme un incendie en brousse.

Ardente et vive tu étais,
à soigner les corps et les maux,
de tes malades, un peu tes enfants,
dont je crois que tu n’avais pas.

Dans ton cabinet de la « rue des soupirs »,
tu ravissais des vies promises
à la Mort hideuse et cruelle
qui se vengea de cette offense.

Et pourtant ta science et ta passion
resteront inoubliées de tes malades
et ta photo de la belle naïade continue à nous charmer
dans la salle d’attente comme un diamant très pur.

Oh, jeune docteur Soleilhavoup
Comment se fait il que tu la vie t’ait été ôtée si tôt
par l’infâme camarde, hélas, de la vie toujours victorieuse ?
vielle blafarde qui hait les médecins comme autant d’obstacles à la malfaisance de sa faux.

Paul Arrighi – Toulouse – le 15-11-2008

[1] Ce poème fut commencé le 24 -01-2009, sous le choc et la douleur du décès d’une jeune doctoresse si secourables. Jamais alors je n’imaginais que, ce si jeune femme ait pu partir la première. Son décès fulgurant vient l’injustice et le chaos qui régissent le règne des maladies et l’insolent scandale des jeunes vies écourtées.
( Elegy for The youg doctor Catherine Soleilhavoup from Touluse
I.

L'ÉGLISE est vaste et haute. À ses clochers superbes
L'ogive en fleur suspend ses trèfles et ses gerbes ;
Son portail resplendit, de sa rose pourvu ;
Le soir fait fourmiller sous la voussure énorme
Anges, vierges, le ciel, l'enfer sombre et difforme,
Tout un monde effrayant comme un rêve entrevu.

Mais ce n'est pas l'église, et ses voûtes, sublimes,
Ses porches, ses vitraux, ses lueurs, ses abîmes,
Sa façade et ses tours, qui fascinent mes yeux ;
Non ; c'est, tout près, dans l'ombre où l'âme aime à descendre
Cette chambre d'où sort un chant sonore et tendre,
Posée au bord d'un toit comme un oiseau joyeux.

Oui, l'édifice est beau, mais cette chambre est douce.
J'aime le chêne altier moins que le nid de mousse ;
J'aime le vent des prés plus que l'âpre ouragan ;
Mon cœur, quand il se perd vers les vagues béantes,
Préfère l'algue obscure aux falaises géantes.
Et l'heureuse hirondelle au splendide océan.

II.

Frais réduit ! à travers une claire feuillée
Sa fenêtre petite et comme émerveillée
S'épanouit auprès du gothique portail.
Sa verte jalousie à trois clous accrochée,
Par un bout s'échappant, par l'autre rattachée,
S'ouvre coquettement comme un grand éventail.

Au-dehors un beau lys, qu'un prestige environne,
Emplit de sa racine et de sa fleur couronne
- Tout près de la gouttière où dort un chat sournois -
Un vase à forme étrange en porcelaine bleue
Où brille, avec des paons ouvrant leur large queue,
Ce beau pays d'azur que rêvent les Chinois.

Et dans l'intérieur par moments luit et passe
Une ombre, une figure, une fée, une grâce,
Jeune fille du peuple au chant plein de bonheur,
Orpheline, dit-on, et seule en cet asile,
Mais qui parfois a l'air, tant son front est tranquille,
De voir distinctement la face du Seigneur.

On sent, rien qu'à la voir, sa dignité profonde.
De ce cœur sans limon nul vent n'a troublé l'onde.
Ce tendre oiseau qui jase ignore l'oiseleur.
L'aile du papillon a toute sa poussière.
L'âme de l'humble vierge a toute sa lumière.
La perle de l'aurore est encor dans la fleur.

À l'obscure mansarde il semble que l'œil voie
Aboutir doucement tout un monde de joie,
La place, les passants, les enfants, leurs ébats,
Les femmes sous l'église à pas lents disparues,
Des fronts épanouis par la chanson des rues,
Mille rayons d'en haut, mille reflets d'en bas.

Fille heureuse ! autour d'elle ainsi qu'autour d'un temple,
Tout est modeste et doux, tout donne un bon exemple.
L'abeille fait son miel, la fleur rit au ciel bleu,
La tour répand de l'ombre, et, devant la fenêtre,
Sans faute, chaque soir, pour obéir au maître,
L'astre allume humblement sa couronne de feu.

Sur son beau col, empreint de virginité pure,
Point d'altière dentelle ou de riche guipure ;
Mais un simple mouchoir noué pudiquement.
Pas de perle à son front, mais aussi pas de ride,
Mais un œil chaste et vif, mais un regard limpide.
Où brille le regard que sert le diamant ?

III.

L'angle de la cellule abrite un lit paisible.
Sur la table est ce livre où Dieu se fait visible,
La légende des saints, seul et vrai panthéon.
Et dans un coin obscur, près de la cheminée,
Entre la bonne Vierge et le buis de l'année,
Quatre épingles au mur fixent Napoléon.

Cet aigle en cette cage ! - et pourquoi non ? dans l'ombre
De cette chambre étroite et calme, où rien n'est sombre,
Où dort la belle enfant, douce comme son lys,
Où tant de paix, de grâce et de joie est versée,
Je ne hais pas d'entendre au fond de ma pensée
Le bruit des lourds canons roulant vers Austerlitz.

Et près de l'empereur devant qui tout s'incline,
- Ô légitime orgueil de la pauvre orpheline ! -
Brille une croix d'honneur, signe humble et triomphant,
Croix d'un soldat, tombé comme tout héros tombe,
Et qui, père endormi, fait du fond de sa tombe
Veiller un peu de gloire auprès de son enfant.

IV.

Croix de Napoléon ! joyau guerrier ! pensée !
Couronne de laurier de rayons traversée !
Quand il menait ses preux aux combats acharnés,
Il la laissait, afin de conquérir la terre,
Pendre sur tous les fronts durant toute la guerre ;
Puis, la grande œuvre faite, il leur disait : Venez !

Puis il donnait sa croix à ces hommes stoïques,
Et des larmes coulaient de leurs yeux héroïques ;
Muets, ils admiraient leur demi-dieu vainqueur ;
On eût dit qu'allumant leur âme avec son âme,
En touchant leur poitrine avec son doigt de flamme,
Il leur faisait jaillir cette étoile du cœur !

V.

Le matin elle chante et puis elle travaille,
Sérieuse, les pieds sur sa chaise de paille,
Cousant, taillant, brodant quelques dessins choisis ;
Et, tandis que, songeant à Dieu, simple et sans crainte,
Cette vierge accomplit sa tâche auguste et sainte,
Le silence rêveur à sa porte est assis.

Ainsi, Seigneur, vos mains couvrent cette demeure.
Dans cet asile obscur, qu'aucun souci n'effleure,
Rien qui ne soit sacré, rien qui ne soit charmant !
Cette âme, en vous priant pour ceux dont la nef sombre,
Peut monter chaque soir vers vous sans faire d'ombre
Dans la sérénité de votre firmament !

Nul danger ! nul écueil ! - Si ! l'aspic est dans l'herbe !
Hélas ! hélas ! le ver est dans le fruit superbe !
Pour troubler une vie il suffit d'un regard.
Le mal peut se montrer même aux clartés d'un cierge.
La curiosité qu'a l'esprit de la vierge
Fait une plaie au cœur de la femme plus ****.

Plein de ces chants honteux, dégoût de la mémoire,
Un vieux livre est là-haut sur une vieille armoire,
Par quelque vil passant dans cette ombre oublié ;
Roman du dernier siècle ! œuvre d'ignominie !
Voltaire alors régnait, ce singe de génie
Chez l'homme en mission par le diable envoyé.

VI.

Epoque qui gardas, de vin, de sang rougie,
Même en agonisant, l'allure de l'orgie !
Ô dix-huitième siècle, impie et châtié !
Société sans dieu, par qui Dieu fus frappée !
Qui, brisant sous la hache et le sceptre et l'épée,
Jeune offensas l'amour, et vieille la pitié !

Table d'un long festin qu'un échafaud termine !
Monde, aveugle pour Christ, que Satan illumine !
Honte à tes écrivains devant les nations !
L'ombre de tes forfaits est dans leur renommée
Comme d'une chaudière il sort une fumée,
Leur sombre gloire sort des révolutions !

VII.

Frêle barque assoupie à quelques pas d'un gouffre !
Prends garde, enfant ! cœur tendre où rien encor ne souffre !
Ô pauvre fille d'Ève ! ô pauvre jeune esprit !
Voltaire, le serpent, le doute, l'ironie,
Voltaire est dans un coin de ta chambre bénie !
Avec son œil de flamme il t'espionne, et rit.

Oh ! tremble ! ce sophiste a sondé bien des fanges !
Oh ! tremble ! ce faux sage a perdu bien des anges !
Ce démon, noir milan, fond sur les cœurs pieux,
Et les brise, et souvent, sous ses griffes cruelles,
Plume à plume j'ai vu tomber ces blanches ailles
Qui font qu'une âme vole et s'enfuit dans les cieux !

Il compte de ton sein les battements sans nombre.
Le moindre mouvement de ton esprit dans l'ombre,
S'il penche un peu vers lui, fait resplendir son œil.
Et, comme un loup rôdant, comme un tigre qui guette,
Par moments, de Satan, visible au seul poète,
La tête monstrueuse apparaît à ton seuil !

VIII.

Hélas ! si ta main chaste ouvrait ce livre infâme,
Tu sentirais soudain Dieu mourir dans ton âme.
Ce soir tu pencherais ton front triste et boudeur
Pour voir passer au **** dans quelque verte allée
Les chars étincelants à la roue étoilée,
Et demain tu rirais de la sainte pudeur !

Ton lit, troublé la nuit de visions étranges,
Ferait fuir le sommeil, le plus craintif des anges !
Tu ne dormirais plus, tu ne chanterais plus,
Et ton esprit, tombé dans l'océan des rêves,
Irait, déraciné comme l'herbe des grèves,
Du plaisir à l'opprobre et du flux au reflux !

IX.

Oh ! la croix de ton père est là qui te regarde !
La croix du vieux soldat mort dans la vieille garde !
Laisse-toi conseiller par elle, ange tenté !
Laisse-toi conseiller, guider, sauver peut-être
Par ce lys fraternel penché sur ta fenêtre,
Qui mêle son parfum à ta virginité !

Par toute ombre qui passe en baissant la paupière !
Par les vieux saints rangés sous le portail de pierre !
Par la blanche colombe aux rapides adieux !
Par l'orgue ardent dont l'hymne en longs sanglots se brise !
Laisse-toi conseiller par la pensive église !
Laisse-toi conseiller par le ciel radieux !

Laisse-toi conseiller par l'aiguille ouvrière,
Présente à ton labeur, présente à ta prière,
Qui dit tout bas : Travaille ! - Oh ! crois-la ! - Dieu, vois-tu,
Fit naître du travail, que l'insensé repousse,
Deux filles, la vertu, qui fait la gaîté douce,
Et la gaîté, qui rend charmante la vertu !

Entends ces mille voix, d'amour accentuées,
Qui passent dans le vent, qui tombent des nuées,
Qui montent vaguement des seuils silencieux,
Que la rosée apporte avec ses chastes gouttes,
Que le chant des oiseaux te répète, et qui toutes
Te disent à la fois : Sois pure sous les cieux !

Sois pure sous les cieux ! comme l'onde et l'aurore,
Comme le joyeux nid, comme la tour sonore,
Comme la gerbe blonde, amour du moissonneur,
Comme l'astre incliné, comme la fleur penchante,
Comme tout ce qui rit, comme tout ce qui chante,
Comme tout ce qui dort dans la paix du Seigneur !

Sois calme. Le repos va du cœur au visage ;
La tranquillité fait la majesté du sage.
Sois joyeuse. La foi vit sans l'austérité ;
Un des reflets du ciel, c'est le rire des femmes ;
La joie est la chaleur que jette dans les âmes
Cette clarté d'en haut qu'on nomme Vérité.

La joie est pour l'esprit une riche ceinture.
La joie adoucit tout dans l'immense nature.
Dieu sur les vieilles tours pose le nid charmant
Et la broussaille en fleur qui luit dans l'herbe épaisse ;
Car la ruine même autour de sa tristesse
A besoin de jeunesse et de rayonnement !

Sois bonne. La bonté contient les autres choses.
Le Seigneur indulgent sur qui tu te reposes
Compose de bonté le penseur fraternel.
La bonté, c'est le fond des natures augustes.
D'une seule vertu Dieu fait le cœur des justes,
Comme d'un seul saphir la coupole du ciel.

Ainsi, tu resteras, comme un lys, comme un cygne,
Blanche entre les fronts purs marqués d'un divin signe
Et tu seras de ceux qui, sans peur, sans ennuis,
Des saintes actions amassant la richesse,
Rangent leur barque au port, leur vie à la sagesse
Et, priant tous les soirs, dorment toutes les nuits !

Le poète à lui-même.

Tandis que sur les bois, les prés et les charmilles,
S'épanchent la lumière et la splendeur des cieux,
Toi, poète serein, répands sur les familles,
Répands sur les enfants et sur les jeunes filles,
Répands sur les vieillards ton chant religieux !

Montre du doigt la rive à tous ceux qu'une voile
Traîne sur le flot noir par les vents agité ;
Aux vierges, l'innocence, heureuse et noble étoile ;
À la foule, l'autel que l'impiété voile ;
Aux jeunes, l'avenir ; aux vieux, l'éternité !

Fais filtrer ta raison dans l'homme et dans la femme.
Montre à chacun le vrai du côté saisissant.
Que tout penseur en toi trouve ce qu'il réclame.
Plonge Dieu dans les cœurs, et jette dans chaque âme
Un mot révélateur, propre à ce qu'elle sent.

Ainsi, sans bruit, dans l'ombre, ô songeur solitaire,
Ton esprit, d'où jaillit ton vers que Dieu bénit,
Du peuple sous tes pieds perce le crâne austère ; -
Comme un coin lent et sûr, dans les flancs de la terre
La racine du chêne entr'ouvre le granit.

Du 24 au 29 juin 1839.
Du er diamanter, jeg kan mærke mit hjerteslag.
Og du føler at du er i live igen.
Oplevelser igennem hinder af koldsvedende løfter.
Vinden på stranden flyvende gennem mit hår.
Hvis vi kun har det her liv, med idéfyldte tanker
Lad os nyde det sammen, for husk;
Det er mørkest lige inden - du står op.
Så jeg føler at jeg er i live igen.
Jeg er din diamant, jeg kan mærke dit hjerteslag.
Du får mig til at føle.
marriegegirl Jul 2014
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Photographie : Caroline Tran | vidéographe: Studio205films | planification de l'événement: Catherine Cindy Leo | gâteau : Simplement Sweets | Restauration : Patina Restauration | Cheveux et Maquillage : Thérèse Huang Maquillage \u0026Hair Design | Dj : Shine Divertissement | Dessert Toile de fond : Pitbulls Et Posies | Planification et conception: CCL Mariages et Evénements | Réception et cérémonie Lieu: AT \u0026 T Center | Location
http://modedomicile.com


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Paul d'Aubin May 2014
Liberté Egalité Fraternité,  
le vrai Triptyque Républicain

En hommage à nos ancêtres qui surent être ambitieux et fonder un triptyque toujours primordial, jamais accompli ni vraiment réalisé.

LIBERTE !

Frêle comme doigts d’enfants,
Plus précieuse qu’un diamant,
Ton seul parfum nous enivre
Et comme, un bon vin, nous grise.
Tu es hymne à la vie
Qui fait lever des envies.
Tu suscite des passions,
Libère des émotions.
Tu fus conquise de haute lutte
Par nos ancêtres en tumulte.
Ils nous donnèrent pour mission

D’en multiplier les brandons.
A trop de Peuples, elle fait défaut.
Elle ne supporte aucun bâillon
Car si l’être vit bien de pain,
Il veut aussi choisir son chemin.
Si tous les pouvoirs la craignent,
Ma, si belle, tu charmes et envoute,
Mets les tyrans en déroute,
Sœur de Marianne la belle.

*
EGALITE !

Elle fut la devise d’Athènes,
Et révérée par les Romains.
Elle naquit en 89, avec la liberté du Peuple,
Est fille de Révolution.
Elle abolit les distinctions
Séparant les êtres sans raison.
Ouvre la voie à tous talents
Sans s’encombrer de parchemins.
C’est un alcool enivrant
Que l’égalité des droits.
C’est aussi une promesse
De secourir celui qui choit.
Si l’égalité fait tant peur,
C’est que son regard de lynx

Perce les supercheries
Et voit les hommes tels qu’ils sont.

FRATERNITE !

Elle coule, coule comme le miel,
Nectar de la ruche humaine.
Elle sait embellir nos vies,
Et faire reculer la grisaille,
Du calcul, froid et égoïste.
Dans la devise Républicaine
Elle tient la baguette de l’orchestre.
Comme un peintre inspiré, elle met,
Sur la toile, vive et vermillon.
Elle nous incite à l’humanisme.
Elle est petite fille de 89, fille de quarante –huit
Mais sut renaître en 68.
Elle est crainte par les puissants,
Qui n’ont jamais connu qu’argent,
C’est pourtant une essence rare.
Dans les temps durs, elle se cache,
Mais vient ouvrir la porte
Au Résistant pourchassé. Elle n’hésite pas aujourd’hui
À secourir un «sans papier»
Sa sœur est générosité.
Elle est la valeur suprême,
Qui rend possible le «vivre ensemble»
Et permet même au solitaire
De faire battre un cœur solidaire.
La fraternité reste la vraie conquête de l’humain.

Paul d’Aubin (Paul Arrighi) à Toulouse; France.
Paul d'Aubin May 2014
Le Joaillier des Mots

Il était joaillier des mots,
sans que l’on ne sût pourquoi
peut être cherchait il le soleil
qui trop souvent nous est masqué,
et nous cache le sens profond
de la beauté de notre vie.
Il était homme du commun,
pas très brillant dans les affaires,
car souvent son Esprit volait,
**** des chiffres et de l’âpre lutte
que l’Homme se mène à lui-même.
C’était un luthier sans harpe.
Il voyait du rêve partout,
et voulait les fermer dans les mots.
qui, s’égrenaient comme des perles
et s’écoulaient comme des notes,
la musique était Poésie
la poésie se faisait musique.
Il était joaillier des mots,
à l’heure ou tous sont morts de peur
et courent comme gibier traqué
plutôt que de goûter la vie.
Il n’avait pas peur de manquer,
moins encore de posséder,
son seul souci était de vivre.
Il n’aimait guère la violence,
qui endeuille la vie des êtres
n’avait aucun impératif
qui rend esclave des idées,
mais son sourire était de miel,
et son rire était cristallin.
L’amitié était sa boussole,
et l’humain son diamant secret.
Jamais il n’injuriait la vie
et il jouait avec les mots
comme un peintre avec son pinceau
s’efforce d’embellir la vie.

Paul d’Aubin (Paul Arrighi)
à Toulouse en France.
A quoi passer la nuit quand on soupe en carême ?
Ainsi, le verre en main, raisonnaient deux amis.
Quels entretiens choisir, honnêtes et permis,
Mais gais, tels qu'un vieux vin les conseille et les aime ?

Rodolphe

Parlons de nos amours ; la joie et la beauté
Sont mes dieux les plus chers, après la liberté.
Ébauchons, en trinquant, une joyeuse idylle.
Par les bois et les prés, les bergers de Virgile
Fêtaient la poésie à toute heure, en tout lieu ;
Ainsi chante au soleil la cigale-dorée.
D'une voix plus modeste, au hasard inspirée,
Nous, comme le grillon, chantons au coin du feu.

Albert

Faisons ce qui te plaît. Parfois, en cette vie,
Une chanson nous berce et nous aide à souffrir,
Et, si nous offensons l'antique poésie,
Son ombre même est douce à qui la sait chérir.

Rodolphe

Rosalie est le nom de la brune fillette
Dont l'inconstant hasard m'a fait maître et seigneur.
Son nom fait mon délice, et, quand je le répète,
Je le sens, chaque fois, mieux gravé dans mon coeur.

Albert

Je ne puis sur ce ton parler de mon amie.
Bien que son nom aussi soit doux à prononcer,
Je ne saurais sans honte à tel point l'offenser,
Et dire, en un seul mot, le secret de ma vie.

Rodolphe

Que la fortune abonde en caprices charmants
Dès nos premiers regards nous devînmes amants.
C'était un mardi gras dans une mascarade ;
Nous soupions ; - la Folie agita ses grelots,
Et notre amour naissant sortit d'une rasade,
Comme autrefois Vénus de l'écume des flots.

Albert

Quels mystères profonds dans l'humaine misère !
Quand, sous les marronniers, à côté de sa mère,
Je la vis, à pas lents, entrer si doucement
(Son front était si pur, son regard si tranquille ! ),
Le ciel m'en est témoin, dès le premier moment,
Je compris que l'aimer était peine inutile ;
Et cependant mon coeur prit un amer plaisir
À sentir qu'il aimait et qu'il allait souffrir !

Rodolphe

Depuis qu'à mon chevet rit cette tête folle,
Elle en chasse à la fois le sommeil et l'ennui ;
Au bruit de nos baisers le temps joyeux s'envole,
Et notre lit de fleurs n'a pas encore un pli.

Albert

Depuis que dans ses yeux ma peine a pris naissance,
Nul ne sait le tourment dont je suis déchiré.
Elle-même l'ignore, - et ma seule espérance
Est qu'elle le devine un jour, quand j'en mourrai.

Rodolphe

Quand mon enchanteresse entr'ouvre sa paupière,
Sombre comme la nuit, pur comme la lumière,
Sur l'émail de ses yeux brille un noir diamant.

Albert

Comme sur une fleur une goutte de pluie,
Comme une pâle étoile au fond du firmament,
Ainsi brille en tremblant le regard de ma vie.

Rodolphe

Son front n'est pas plus grand que celui de Vénus.
Par un noeud de ruban deux bandeaux retenus
L'entourent mollement d'une fraîche auréole ;
Et, lorsqu'au pied du lit tombent ses longs cheveux,
On croirait voir, le soir, sur ses flancs amoureux,
Se dérouler gaiement la mantille espagnole.

Albert

Ce bonheur à mes yeux n'a pas été donné
De voir jamais ainsi la tête bien-aimée.
Le chaste sanctuaire où siège sa pensée
D'un diadème d'or est toujours couronné.

Rodolphe

Voyez-la, le matin, qui gazouille et sautille ;
Son coeur est un oiseau, - sa bouche est une fleur.
C'est là qu'il faut saisir cette indolente fille,
Et, sur la pourpre vive où le rire pétille,
De son souffle enivrant respirer la fraîcheur.

Albert

Une fois seulement, j'étais le soir près d'elle ;
Le sommeil lui venait et la rendait plus belle ;
Elle pencha vers moi son front plein de langueur,
Et, comme on voit s'ouvrir une rose endormie,
Dans un faible soupir, des lèvres de ma mie,
Je sentis s'exhaler le parfum de son coeur.

Rodolphe

Je voudrais voir qu'un jour ma belle dégourdie,
Au cabaret voisin de champagne étourdie,
S'en vînt, en jupon court, se glisser dans tes bras.
Qu'adviendrait-il alors de ta mélancolie ?
Car enfin toute chose est possible ici-bas.

Albert

Si le profond regard de ma chère maîtresse
Un instant par hasard s'arrêtait sur le tien,
Qu'adviendrait-il alors de cette folle ivresse ?
Aimer est quelque chose, et le reste n'est rien.

Rodolphe

Non, l'amour qui se tait n'est qu'une rêverie.
Le silence est la mort, et l'amour est la vie ;
Et c'est un vieux mensonge à plaisir inventé,
Que de croire au bonheur hors, de la volupté !
Je ne puis partager ni plaindre ta souffrance
Le hasard est là-haut pour les audacieux ;
Et celui dont la crainte a tué l'espérance
Mérite son malheur et fait injure aux dieux.

Albert

Non, quand leur âme immense entra dans la nature,
Les dieux n'ont pas tout dit à la matière impure
Qui reçut dans ses flancs leur forme et leur beauté.
C'est une vision que la réalité.
Non, des flacons brisés, quelques vaines paroles
Qu'on prononce au hasard et qu'on croit échanger,
Entre deux froids baisers quelques rires frivoles,
Et d'un être inconnu le contact passager,
Non, ce n'est pas l'amour, ce n'est pas même un rêve,
Et la satiété, qui succède au désir,
Amène un tel dégoût quand le coeur se soulève,
Que je ne sais, au fond, si c'est peine ou plaisir.

Rodolphe

Est-ce peine ou plaisir, une alcôve bien close,
Et le punch allumé, quand il fait mauvais temps ?
Est-ce peine ou plaisir, l'incarnat de la rose,
La blancheur de l'albâtre et l'odeur du printemps ?
Quand la réalité ne serait qu'une image,
Et le contour léger des choses d'ici-bas,
Me préserve le ciel d'en savoir davantage !
Le masque est si charmant, que j'ai peur du visage,
Et même en carnaval je n'y toucherais pas.

Albert

Une larme en dit plus que tu n'en pourrais dire.

Rodolphe

Une larme a son prix, c'est la soeur d'un sourire.
Avec deux yeux bavards parfois j'aime à jaser ;
Mais le seul vrai langage au monde est un baiser.

Albert

Ainsi donc, à ton gré dépense ta paresse.
O mon pauvre secret ! que nos chagrins sont doux !

Rodolphe

Ainsi donc, à ton gré promène ta tristesse.
O mes pauvres soupers ! comme on médit de vous !

Albert

Prends garde seulement que ta belle étourdie
Dans quelque honnête ennui ne perde sa gaieté.

Rodolphe

Prends garde seulement que ta rose endormie
Ne trouve un papillon quelque beau soir d'été.

Albert

Des premiers feux du jour j'aperçois la lumière.

Rodolphe

Laissons notre dispute et vidons notre verre.
Nous aimons, c'est assez, chacun à sa façon.
J'en ai connu plus d'une, et j'en sais la chanson.
Le droit est au plus fort, en amour comme en guerre,
Et la femme qu'on aime aura toujours raison.
Obscuritate rerum verba saepè obscurantur.
GERVASIUS TILBERIENSIS.


Amis, ne creusez pas vos chères rêveries ;
Ne fouillez pas le sol de vos plaines fleuries ;
Et quand s'offre à vos yeux un océan qui dort,
Nagez à la surface ou jouez sur le bord.
Car la pensée est sombre ! Une pente insensible
Va du monde réel à la sphère invisible ;
La spirale est profonde, et quand on y descend,
Sans cesse se prolonge et va s'élargissant,
Et pour avoir touché quelque énigme fatale,
De ce voyage obscur souvent on revient pâle !

L'autre jour, il venait de pleuvoir, car l'été,
Cette année, est de bise et de pluie attristé,
Et le beau mois de mai dont le rayon nous leurre,
Prend le masque d'avril qui sourit et qui pleure.
J'avais levé le store aux gothiques couleurs.
Je regardais au **** les arbres et les fleurs.
Le soleil se jouait sur la pelouse verte
Dans les gouttes de pluie, et ma fenêtre ouverte
Apportait du jardin à mon esprit heureux
Un bruit d'enfants joueurs et d'oiseaux amoureux.

Paris, les grands ormeaux, maison, dôme, chaumière,
Tout flottait à mes yeux dans la riche lumière
De cet astre de mai dont le rayon charmant
Au bout de tout brin d'herbe allume un diamant !
Je me laissais aller à ces trois harmonies,
Printemps, matin, enfance, en ma retraite unies ;
La Seine, ainsi que moi, laissait son flot vermeil
Suivre nonchalamment sa pente, et le soleil
Faisait évaporer à la fois sur les grèves
L'eau du fleuve en brouillards et ma pensée en rêves !

Alors, dans mon esprit, je vis autour de moi
Mes amis, non confus, mais tels que je les vois
Quand ils viennent le soir, troupe grave et fidèle,
Vous avec vos pinceaux dont la pointe étincelle,
Vous, laissant échapper vos vers au vol ardent,
Et nous tous écoutant en cercle, ou regardant.
Ils étaient bien là tous, je voyais leurs visages,
Tous, même les absents qui font de longs voyages.
Puis tous ceux qui sont morts vinrent après ceux-ci,
Avec l'air qu'ils avaient quand ils vivaient aussi.
Quand j'eus, quelques instants, des yeux de ma pensée,
Contemplé leur famille à mon foyer pressée,
Je vis trembler leurs traits confus, et par degrés
Pâlir en s'effaçant leurs fronts décolorés,
Et tous, comme un ruisseau qui dans un lac s'écoule,
Se perdre autour de moi dans une immense foule.

Foule sans nom ! chaos ! des voix, des yeux, des pas.
Ceux qu'on n'a jamais vus, ceux qu'on ne connaît pas.
Tous les vivants ! - cités bourdonnant aux oreilles
Plus qu'un bois d'Amérique ou des ruches d'abeilles,
Caravanes campant sur le désert en feu,
Matelots dispersés sur l'océan de Dieu,
Et, comme un pont hardi sur l'onde qui chavire,
Jetant d'un monde à l'autre un sillon de navire,
Ainsi que l'araignée entre deux chênes verts
Jette un fil argenté qui flotte dans les airs !

Les deux pôles ! le monde entier ! la mer, la terre,
Alpes aux fronts de neige, Etnas au noir cratère,
Tout à la fois, automne, été, printemps, hiver,
Les vallons descendant de la terre à la mer
Et s'y changeant en golfe, et des mers aux campagnes
Les caps épanouis en chaînes de montagnes,
Et les grands continents, brumeux, verts ou dorés,
Par les grands océans sans cesse dévorés,
Tout, comme un paysage en une chambre noire
Se réfléchit avec ses rivières de moire,
Ses passants, ses brouillards flottant comme un duvet,
Tout dans mon esprit sombre allait, marchait, vivait !
Alors, en attachant, toujours plus attentives,
Ma pensée et ma vue aux mille perspectives
Que le souffle du vent ou le pas des saisons
M'ouvrait à tous moments dans tous les horizons,
Je vis soudain surgir, parfois du sein des ondes,
A côté des cités vivantes des deux mondes,
D'autres villes aux fronts étranges, inouïs,
Sépulcres ruinés des temps évanouis,
Pleines d'entassements, de tours, de pyramides,
Baignant leurs pieds aux mers, leur tête aux cieux humides.

Quelques-unes sortaient de dessous des cités
Où les vivants encor bruissent agités,
Et des siècles passés jusqu'à l'âge où nous sommes
Je pus compter ainsi trois étages de Romes.
Et tandis qu'élevant leurs inquiètes voix,
Les cités des vivants résonnaient à la fois
Des murmures du peuple ou du pas des armées,
Ces villes du passé, muettes et fermées,
Sans fumée à leurs toits, sans rumeurs dans leurs seins,
Se taisaient, et semblaient des ruches sans essaims.
J'attendais. Un grand bruit se fit. Les races mortes
De ces villes en deuil vinrent ouvrir les portes,
Et je les vis marcher ainsi que les vivants,
Et jeter seulement plus de poussière aux vents.
Alors, tours, aqueducs, pyramides, colonnes,
Je vis l'intérieur des vieilles Babylones,
Les Carthages, les Tyrs, les Thèbes, les Sions,
D'où sans cesse sortaient des générations.

Ainsi j'embrassais tout : et la terre, et Cybèle ;
La face antique auprès de la face nouvelle ;
Le passé, le présent ; les vivants et les morts ;
Le genre humain complet comme au jour du remords.
Tout parlait à la fois, tout se faisait comprendre,
Le pélage d'Orphée et l'étrusque d'Évandre,
Les runes d'Irmensul, le sphinx égyptien,
La voix du nouveau monde aussi vieux que l'ancien.

Or, ce que je voyais, je doute que je puisse
Vous le peindre : c'était comme un grand édifice
Formé d'entassements de siècles et de lieux ;
On n'en pouvait trouver les bords ni les milieux ;
A toutes les hauteurs, nations, peuples, races,
Mille ouvriers humains, laissant partout leurs traces,
Travaillaient nuit et jour, montant, croisant leurs pas,
Parlant chacun leur langue et ne s'entendant pas ;
Et moi je parcourais, cherchant qui me réponde,
De degrés en degrés cette Babel du monde.

La nuit avec la foule, en ce rêve hideux,
Venait, s'épaississant ensemble toutes deux,
Et, dans ces régions que nul regard ne sonde,
Plus l'homme était nombreux, plus l'ombre était profonde.
Tout devenait douteux et vague, seulement
Un souffle qui passait de moment en moment,
Comme pour me montrer l'immense fourmilière,
Ouvrait dans l'ombre au **** des vallons de lumière,
Ainsi qu'un coup de vent fait sur les flots troublés
Blanchir l'écume, ou creuse une onde dans les blés.

Bientôt autour de moi les ténèbres s'accrurent,
L'horizon se perdit, les formes disparurent,
Et l'homme avec la chose et l'être avec l'esprit
Flottèrent à mon souffle, et le frisson me prit.
J'étais seul. Tout fuyait. L'étendue était sombre.
Je voyais seulement au ****, à travers l'ombre,
Comme d'un océan les flots noirs et pressés,
Dans l'espace et le temps les nombres entassés !

Oh ! cette double mer du temps et de l'espace
Où le navire humain toujours passe et repasse,
Je voulus la sonder, je voulus en toucher
Le sable, y regarder, y fouiller, y chercher,
Pour vous en rapporter quelque richesse étrange,
Et dire si son lit est de roche ou de fange.
Mon esprit plongea donc sous ce flot inconnu,
Au profond de l'abîme il nagea seul et nu,
Toujours de l'ineffable allant à l'invisible...
Soudain il s'en revint avec un cri terrible,
Ébloui, haletant, stupide, épouvanté,
Car il avait au fond trouvé l'éternité.

Mai 1830.
Beks Paradox May 2015
La beauté d'un lever de soleil ,
la beauté d'un diamant ,
la beauté de l'océan .

Même la beauté de cet univers ne pouvait être comparé à ce sourire ,
ce sourire gracieux pourrait commencer un battement de coeur,
ses sourires pourraient réchauffer le cœur le plus froid de l'humanité.

Votre sourire est la perfection ,
vos sourires est la plus brillante ,
Je pourrais survivre si elle était seule avec votre sourire.

Votre sourire apporter une joie mille,
votre sourire épargnez-moi un mal de coeur,
votre sourire me épargne de chagrins ,
sans votre sourire, le monde ne serait pas un meilleur endroit .
I.

L'esprit des sages te contemple,
Mystérieuse Humilité,
Porte étroite et basse du temple
Auguste de la vérité !
Vertu que Dieu place à la tête
Des vertus que l'ange au ciel fête ;
Car elle est la perle parfaite
Dans l'abîme du siècle amer ;
Car elle rit sous l'eau profonde,
**** du plongeur et de la sonde.
Préférant aux écrins du monde
Le cœur farouche de la mer.
C'est vers l'humanité fidèle
Que mes oiseaux s'envoleront ;
Vers les fils, vers les filles d'elle,
Pour sourire autour de leur front ;
Vers Jeanne d'Arc et Geneviève
Dont l'étoile au ciel noir se lève,
Dont le paisible troupeau rêve,
Oublieux du loup, qui s'enfuit ;
Douces porteuses de bannière,
Qui refoulaient, à leur manière,
L'impur Suffolk vers sa tanière,
L'aveugle Attila dans sa nuit.

Sur la lyre à la corde amère
Où le chant d'un dieu s'est voilé,
Ils iront saluer Homère
Sous son haillon tout étoile.
Celui pour qui jadis les Iles
Et la Grèce étaient sans asiles,
Habite aujourd'hui dans nos villes
La colonne et le piédestal ;
Une fontaine à leur flanc jase,
Où l'enfant puise avec son vase,
Et la rêverie en extase,
Avec son urne de cristal.
**** des palais sous les beaux arbres
Où les paons, compagnons des dieux,
Traînent dans la blancheur des marbres
Leurs manteaux d'azur, couverts d'yeux ;
Où, des bassins que son chant noie
L'onde s'échevelle et poudroie :
Laissant ce faste et cette joie,
Mes strophes abattront leur vol,
Pour entendre éclater, superbe,
La voix la plus proche du Verbe,
Dans la paix des grands bois pleins d'herbe
Où se cache le rossignol.
Lorsqu'au fond de la forêt brune
Pas une feuille ne bruit,
Et qu'en présence de la lune
Le silence s'épanouit,
Sous l'azur chaste qui s'allume,
Dans l'ombre où l'encens des fleurs fume,
Le rossignol qui se consume
Dans l'extatique oubli du jour,
Verse un immense épithalame
De son petit gosier de flamme,
Où s'embrasent l'accent et l'âme
De la nature et de l'amour !

II.

C'est Dieu qui conduisait à Rome,
Mettant un bourdon dans sa main,
Ce saint qui ne fut qu'un pauvre homme,
Hirondelle de grand chemin,
Qui laissa tout son coin de terre,
Sa cellule de solitaire.
Et la soupe du monastère,
Et son banc qui chauffe au soleil,
Sourd à son siècle, à ses oracles,
Accueilli des seuls tabernacles,
Mais vêtu du don des miracles
Et coiffé du nimbe vermeil.

Le vrai pauvre qui se délabre,
Lustre à lustre, été par été,
C'était ce règne, et non saint Labre,
Qui lui faisait la charité
De ses vertus spirituelles,
De ses bontés habituelles,
Léger guérisseur d'écrouelles,
Front penché sur chaque indigent,
Fière statue enchanteresse
De l'austérité, que Dieu dresse,
Au bout du siècle de l'ivresse,
Au seuil du siècle de l'argent.

Je sais que notre temps dédaigne
Les coquilles de son chapeau,
Et qu'un lâche étonnement règne
Devant les ombres de sa peau ;
L'âme en est-elle atténuée ?
Et qu'importe au ciel sa nuée,
Qu'importe au miroir sa buée,
Si Dieu splendide aime à s'y voir !
La gangue au diamant s'allie ;
Toi, tu peins ta lèvre pâlie,
Luxure, et toi, vertu salie,
C'est là ton fard mystique et noir.

Qu'importe l'orgueil qui s'effare,
Ses pudeurs, ses rebellions !
Vous, qu'une main superbe égare
Dans la crinière des lions,
Comme elle égare aux plis des voiles,
Où la nuit a tendu ses toiles,
Aldébaran et les étoiles,
Frères des astres, vous, les poux
Qu'il laissait paître sur sa tête,
Bon pour vous et dur pour sa bête,
Dites, par la voix du poète,
À quel point ce pauvre était doux !

Ah ! quand le Juste est mort, tout change :
Rome au saint mur pend son haillon,
Et Dieu veut, par des mains d'Archange,
Vêtir son corps d'un grand rayon ;
Le soleil le prend sous son aile,
La lune rit dans sa prunelle,
La grâce comme une eau ruisselle
Sur son buste et ses bras nerveux ;
Et le saint, dans l'apothéose
Du ciel ouvert comme une rose,
Plane, et montre à l'enfer morose
Des étoiles dans ses cheveux !

Beau paysan, ange d'Amette,
Ayant aujourd'hui pour trépieds
La lune au ciel, et la comète,
Et tous les soleils sous vos pieds ;
Couvert d'odeurs délicieuses,
Vous, qui dormiez sous les yeuses,
Vous, que l'Eglise aux mains pieuses
Peint sur l'autel et le guidon,
Priez pour nos âmes, ces gouges,
Et pour que nos cœurs, las des bouges,
Lavent leurs péchés noirs et rouges
Dans les piscines du pardon !

III.

Aimez l'humilité ! C'est elle
Que les mages de l'Orient,
Coiffés d'un turban de dentelle,
Et dont le Noir montre en riant
Un blanc croissant qui l'illumine,
Offrant sur les coussins d'hermine
Et l'or pur et la myrrhe fine,
Venaient, dans l'encens triomphant,
Grâce à l'étoile dans la nue,
Adorer, sur la paille nue,
Au fond d'une étable inconnue,
Dans la personne d'un enfant.
Ses mains, qui sont des fleurs écloses,
Aux doux parfums spirituels,
Portent de délicates roses,
À la place des clous cruels.
Ecarlates comme les baies
Dont le printemps rougit les haies,
Les cinq blessures de ses plaies,
Dont l'ardeur ne peut s'apaiser,
Semblent ouvrir au vent des fièvres,
Sur sa chair pâle aux blancheurs mièvres,
La multitude de leurs lèvres
Pour l'infini de son baiser.
Au pied de la croix découpée
Sur le sombre azur de Sion,
Une figure enveloppée
De silence et de passion,
Immobile et de pleurs vêtue,
Va grandir comme une statue
Que la foi des temps perpétue,
Haute assez pour jeter sur nous,
Nos deuils, nos larmes et nos râles,
Son ombre aux ailes magistrales,
Comme l'ombre des cathédrales
Sur les collines à genoux.
Près de la blanche Madeleine,
Dont l'époux reste parfumé
Des odeurs de son urne pleine,
Près de Jean le disciple aimé,
C'est ainsi qu'entre deux infâmes,
Honni des hommes et des femmes,
Pour le ravissement des âmes,
Voulut éclore et se flétrir
Celui qui, d'un cri charitable,
Appelante pauvre à sa table,
Etait bien le Dieu véritable
Puisque l'homme l'a fait mourir !

Maintenant que Tibère écoute
Rire le flot, chanter le nid !
Olympe, un cri monte à ta voûte,
Et c'est : Lamma Sabacthani !
Les dieux voient s'écrouler leur nombre.
Le vieux monde plonge dans l'ombre,
Usé comme un vêtement sombre
Qui se détache par lambeaux.
Un empire inconnu se fonde,
Et Rome voit éclore un monde
Qui sort de la douleur profonde
Comme une rose du tombeau !
Des bords du Rhône aux bords du Tigre
Que Néron fasse armer ses lois,
Qu'il sente les ongles du tigre
Pousser à chacun de ses doigts ;
Qu'il contemple, dans sa paresse,
Au son des flûtes de la Grèce,
Les chevilles de la négresse
Tourner sur un rythme énervant ;
Déjà, dans sa tête en délire,
S'allume la flamme où l'Empire
De Rome et des Césars expire
Dans la fumée et dans le vent !

IV.

Humilité ! loi naturelle,
Parfum du fort, fleur du petit !
Antée a mis sa force en elle,
C'est sur elle que l'on bâtit.
Seule, elle rit dans les alarmes.
Celui qui ne prend pas ses armes,
Celui qui ne voit pas ses charmes
À la clarté de Jésus-Christ,
Celui là, sur le fleuve avide
Des ans profonds que Dieu dévide,
Aura fui comme un feuillet vide
Où le destin n'a rien écrit !
Paul d'Aubin May 2016
Le manifestant

Il avait manifesté, tant et plus.
Dans l'après 68, casqué,
parmi tant de jeunes copines et copains.
Il courait vite alors et cela valait mieux.
Car la police n'était pas tendre.
Mais c'était comme un rituel
de courses, de lacrymos
et de chevelures dénouées.
L'époque semblait alors grand ouverte,
à la jeunesse, aux guitares et aux robes à fleurs.
Tandis que les posters du «Che» régnaient sur les murs des chambres d'adolescents.
Lorsque Franco, le cacochyme, l’infâme,
voulut, avant de mourir, accroître sa moisson de victimes.
Cela chauffa fort devant le consulat
Espagnol, à Toulouse.
Il fallait maîtriser la peur des détonations,
et se tenir bien droit dans la chaîne,
lorsque les hommes casqués qui
avaient aussi peur que nous,
reçurent l'ordre de charger.
Sales moments pour les services d'ordre,
Entre chocs de casques contre casques,
Tels des chevaliers des temps jadis,
avec leurs heaumes.
Puis les années passèrent, les copains s'égayèrent.
La venue de l'âge adulte déboulait dans nos vies,
avec sa part de réalisations et d'oublis des serments.
Certains tournèrent complètement casaque,
et commencèrent à se prendre au sérieux,
en jouant aux patrons branches ou aux conseilleurs officieux.
D'autres furent laissés pour compte.
et s'en prirent aux plus faibles qu'eux,
votèrent pour le borgne et sa fille
qui leur promettaient de rendre de
rebâtir la France en rendant la vie
plus dure a de pauvres hères basanés.
qu'ils suspectaient si sottement
de réduire leur part de droits sociaux.
C'était des temps bien médiocres à
l'haleine fétide.
Dans les cafés, les propos volaient bas,
Comme des projectiles
et les plus hargneux régnaient par leurs outrances,
comme le loup cervier sur la meute apeurée.
Et puis, fut élu, François Hollande, non par son charisme mais surtout par défaut.
Il avait l'air bonhomme paraissait bienveillant.
Et puis Sarko nous avait épuisés
et exaspères,
par son ego de montgolfière, son agitation incessante,
et sa manie de dresser les uns contre les autres,
et de courir sus aux boucs émissaires.
Nous n'attendions pas un Zorro, mais nous eûmes droit au sergent Garcia,
Et funeste erreur, ce Président apaisé, trop tranquille,
fit appel à Manuel Valls, ce querelleur, cet hidalgo ombrageux.
Alors s'instaura le temps des reniements et des provocations répétées,
ou il fallait battre sa coulpe et ne plus prononcer le mot «socialisme».
C’était l’éternelle fable du nouveau et des vieux !
Mais ce nouveau avait un air et un goût de ranci et de Finances aussi.
Comme comme une cerise bien amère sur le gâteau et ces goûts d'alcool frelaté,
surgit la «loi Travail» comme un pied de nez
fait à celles et ceux qui en manquaient
Et dont le cout baissait incessamment
Nous fumes beaucoup à nous réveiller hagards,
et à reprendre le chemin des manifs,
Ou nous virent des «robocops» super équipés,
nous serrer de trop près; ambiance détestable,
pendant que nos mandants, élus pour faire tout autre chose.
S'efforçaient de nous enfumer et de créer maintes diversions.
C'était moins marrant qu'en notre jeunesse.
Mais il fallait ne pas lâcher, pour transmettre l'Esprit et la Flamme.
Nous avions quand même, la gorge serrée,
de voir d'ancien amis raconter des salades,
et se battre désormais pour la préservation de leurs postes,
Et de quelques prébendes.
Mais comment était-ce arrive ?
Comment avaient-ils pu oublier ce qu'ils avaient été !
Et venir défendre ce qu'ils avaient combattu ?
L'histoire est bien cyclique et l'être fragile comme un roseau.
Ça ne fait rien, j'étais redevenu manifestant, opposant.
Je gardais comme l'oiseau bleu ma conscience pour moi.
Et je pourrais dire un Jour à mon enfant,
«Le plus beau diamant est ta vérité intérieure et ta conscience
Maintien ton Esprit pur avant que de prétendre changer le Monde.»

Paul Daubin
Paul d'Aubin Sep 2016
Les mariés de Drémil-Lafage

Nadjet et Jonathan
S'étaient choisis
Et se marièrent civilement
En la mairie de Saint-Orens.
L'adjoint était empli de bonne volonté
Et apporta aux jeunes époux
Le sourire de la République.
Puis nous nous rendîmes
A Drémil-Lafage où
Plus de quarante ans avant
J'avais collé des affiches.
Les nouveaux mariés avaient
Loué une berline noire,
Et la robe de la mariée resplendissait,
De ce blanc éclatant de neige.
Se prolongeant d'une longue traîne.
Je n’oublierai pas non plus
La cravate de Toinou, achetée à Venise,
comme un zeste  de Woodstock.
Nous nous rendîmes sous un auvent,
Et y connurent des aperçus sur la vie passée,
De Nadjet et de Jonathan,
Qui s'étaient connus au lycée Déodat de Séverac,
Ce grand Musicien Occitan,
Avaient eu le coup de foudre
Et plus **** avaient pris leur décision
De s'unir à Barcelone qui est comme Florence,
Ville des amours de diamant pur.
Un rituel du sable nous surpris tous
Mêlant deux variétés de sable,
En un creuset de sable commun.
Ce symbole fit grande impression
Et apporta une touche spirituelle
Alors qu'un Olivier assez petit,
Mais noueux et robuste
Décorait la pelouse,
Ainsi qu'une fontaine
Arrosant des galets,
Et des roseaux, hauts dressés.
Nadjet aux yeux de braise
Allait de groupe en groupe
Voletant comme une abeille.
La beauté, la grâce, la gentillesse
Des mariés faisaient merveille
Et je songeais à toutes ces
Histoires de famille bien différentes
Au travers de la Méditerranée
Qui s'étaient entrecroisées puis unies
Dans ce pays Toulousain de briques
Au sein de ces peuples au langage chantant,
Depuis si longtemps mêlés
Ayant dû rester eux même et évoluer
De tous ces apports d'Orient,
Si bien rappelés par Abder, le gentleman des deux rives.
Je suis sûr que dans ce restaurant,
Si proche d'un terrain de golf
Que les mariés avaient mis
La boule blanche au cœur du bonheur
Et pris un Ticket gagnant
Pour cet avenir si souhaitable de Paix
Que nous les aiderons a construire
Avec amour et mesure,
Du moins tant qu' il nous restera
Un souffle d'influence
Sur le train de ce Monde aux civilisations
S’entrecroisant trop souvent sans vraiment se connaître  
Qui va si vite et donne parfois
Quelques vertiges, à nous, les parents.
Le repas fut succulent et varié,
Allant crescendo jusqu'à la pièce montée
Qui illumina nos papilles,
Puis les coupes de champagne «Tsarine»
Amenèrent cet effluve slave,
Là où la Méditerranée et l'Occitanie
S'étaient joints comme deux corps
Et deux Esprits tellement curieux
De se découvrir et de s'aimer.
Jeunes mariés et chères civilisations cousines
Ne laissez pas passer vos chances d’entente et de bonheur,
Dans ce Monde où l'on voudrait
Nous faire croire qu'il est fatigué et fermé,
Alors que tant de promesses de créations
Sont possibles et doivent être tenues.

Paul Arrighi
Avec tout votre esprit, la belle indifférente,
Avec tous vos grands airs de rigueur nonchalante,
Qui nous font tant de mal et qui vous vont si bien,
Il n'en est pas moins vrai que vous n'y pouvez rien.

Il n'en est pas moins vrai que, sans qu'il y paraisse,
Vous êtes mon idole et ma seule maîtresse ;
Qu'on n'en aime pas moins pour devoir se cacher,
Et que vous ne pouvez, Ninon, m'en empêcher.

Il n'en est pas moins vrai qu'en dépit de vous-même,
Quand vous dites un mot vous sentez qu'on vous aime,
Que, malgré vos mépris, on n'en veut pas guérir,
Et que d'amour de vous, il est doux de souffrir.

Il n'en est pas moins vrai que, sitôt qu'on vous touche,
Vous avez beau nous fuir, sensitive farouche,
On emporte de vous des éclairs de beauté,
Et que le tourment même est une volupté.

Soyez bonne ou maligne, orgueilleuse ou coquette,
Vous avez beau railler et mépriser l'amour,
Et, comme un diamant qui change de facette,
Sous mille aspects divers vous montrer tour à tour ;

Il n'en est pas moins vrai que je vous remercie,
Que je me trouve heureux, que je vous appartiens,
Et que, si vous voulez du reste de ma vie,
Le mal qui vient de vous vaut mieux que tous les biens.

Je vous dirai quelqu'un qui sait que je vous aime :
C'est ma Muse, Ninon ; nous avons nos secrets.
Ma Muse vous ressemble, ou plutôt, c'est vous-même ;
Pour que je l'aime encor elle vient sous vos traits.

La nuit, je vois dans l'ombre une pâle auréole,
Où flottent doucement les contours d'un beau front ;
Un rêve m'apparaît qui passe et qui s'envole ;
Les heureux sont les fous : les poètes le sont.

J'entoure de mes bras une forme légère ;
J'écoute à mon chevet murmurer une voix ;
Un bel ange aux yeux noirs sourit à ma misère ;
Je regarde le ciel, Ninon, et je vous vois ;

Ô mon unique amour, cette douleur chérie,
Ne me l'arrachez pas quand j'en devrais mourir !
Je me tais devant vous ; - quel mal fait ma folie ?
Ne me plaignez jamais et laissez-moi souffrir.
Ne me sois pas marâtre, ô nature chérie,
Redonne un peu de sève à la plante flétrie
Qui ne veut pas mourir ;
Les torrents de mes yeux ont noyé sous leur pluie
Son bouton tout rongé que nul soleil n'essuie
Et qui ne peut s'ouvrir.

Air vierge, air de cristal, eau, principe du monde,
Terre qui nourris tout, et toi, flamme féconde,
Rayon de l'oeil de Dieu,
Ne laissez pas mourir, vous qui donnez la vie,
La pauvre fleur qui penche et qui n'a d'autre envie
Que de fleurir un peu !

Étoiles, qui d'en haut voyez valser les mondes,
Faites pleuvoir sur moi, de vos paupières blondes,
Vos pleurs de diamant ;
Lune, lis de la nuit, fleur du divin parterre,
Verse-moi tes rayons, ô blanche solitaire,
Du fond du firmament !

Oeil ouvert sans repos au milieu de l'espace,
Perce, soleil puissant, ce nuage qui passe !
Que je te voie encor,
Aigles, vous qui fouettez le ciel à grands coups d'ailes,
Griffons au vol de feu, rapides hirondelles,
Prêtez-moi votre essor !

Vents, qui prenez aux fleurs leurs âmes parfumées
Et les aveux d'amour aux bouches bien-aimées ;
Air sauvage des monts,
Encor tout imprégné des senteurs du mélèze,
Brise de l'océan où l'on respire à l'aise,
Emplissez mes poumons !

Avril, pour m'y coucher, m'a fait un tapis d'herbe ;
Le lilas sur mon front s'épanouit en gerbe,
Nous sommes au printemps.
Prenez-moi dans vos bras, doux rêves du poète,
Entre vos seins polis posez ma pauvre tête
Et bercez-moi longtemps.

**** de moi, cauchemars, spectres des nuits ! Les roses,
Les femmes, les chansons, toutes les belles choses
Et tous les beaux amours,
Voilà ce qu'il me faut. Salut, ô muse antique,
Muse au frais laurier vert, à la blanche tunique,
Plus jeune tous les jours !

Brune aux yeux de lotus, blonde à paupière noire,
Ô grecque de Milet, sur l'escabeau d'ivoire
Pose tes beaux pieds nus,
Que d'un nectar vermeil la coupe se couronne !
Je bois à ta beauté d'abord, blanche Théone,
Puis aux dieux inconnus.

Ta gorge est plus lascive et plus souple que l'onde ;
Le lait n'est pas si pur et la pomme est moins ronde,
Allons, un beau baiser !
Hâtons-nous, hâtons-nous ! Notre vie, ô Théone,
Est un cheval ailé que le temps éperonne ;
Hâtons-nous d'en user.

Chantons Io, péan ! ... mais quelle est cette femme
Si pâle sous son voile ? Ah ! C'est toi, vieille infâme !
Je vois ton crâne ras,
Je vois tes grands yeux creux, prostituée immonde,
Courtisane éternelle environnant le monde
Avec tes maigres bras !
G Apr 2015
Rouge
Comme les pétales de roses
Envolées
Qui bougent,
Afin que j’ose
Te donner un baiser.

Orange
Comme la pleine lune
Qui séduit
Étrange,
Ta caresse opportune
Qui glisse et s’enfuit.

Jaune
Comme le diamant
De couleur
Trouvé dans la faune,
Je saisi dans l’instant
Et ton sourire cajoleur.

Vert
Comme l’espoir
Qui s’installe
A découvert
Dans tes yeux noirs
Ou rayonne l’amour fatal.

Bleu
Comme le ciel pur
Aux reflets
Délicieux
Qui dessine notre futur,
Sans regrets.

Indigo
Qui es-tu ?
Plus bleu que bleu
Un faux ?
San vertu ?
Alors ami, fais le beau.

Enfin s’immisce le Violet
Dans le noir de l’encre
De tes tatouages.
Alors j’ouvre les volets
De nos amours tendres
Sans ambages.
Amours multicolores-le 16 juillet 2014, pour Charles
Paul d'Aubin Dec 2015
Les mansardes de Luchon

C'était un peu comme la proue du vaisseau amiral,
et ses petits fanaux clignant de l'œil, la nuit,
luisant sur la maison comme des lumignons
Et son toit bleu d’ardoises en était embelli
et mieux, nous étions hauts, aussi hauts que la vie.
Ces «Mansardes» nous y dormions durant les saisons des curistes,
y montant doucement, respectant les consignes,
de traiter dignement les précieux locataires.
Pour Régis et pour moi, c'étaient douces manies
que nous nous gardions, de contrarier en vain.
Dans la chambrette blanche austère ou je dormais
les livres me tombaient des yeux bien après la lumière
et j'écoutais aussi, les pas sur les trottoirs
des passants noctambules qui passaient en riant
et je scrutais aussi les fenêtres d'en face.
Grand-Mère ronflait parfois dans la chambre à côté
Avec son poudrier et son eau de Cologne
exhalant des senteurs de rose et de vanille.
Dans la chambre à côte était Régis, mon frère
Qui me passait parfois la B.D, «Blé le roc».
Oh, comme je les aimais, ces modestes mansardes,
Nous étions jeunes alors, et tout était diamant :
Filles des locataires aux cheveux dénoués
ou bien nos jeux guerriers et nos arcs et nos lances
et ces folles lectures menées jusqu'au petit matin.

Paul Arrighi
Blanche fille aux cheveux roux,
Dont la robe par ses trous
Laisse voir la pauvreté
Et la beauté,

Pour moi, poète chétif,
Ton jeune corps maladif,
Plein de taches de rousseur,
A sa douceur.

Tu portes plus galamment
Qu'une reine de roman
Ses cothurnes de velours
Tes sabots lourds.

Au lieu d'un haillon trop court,
Qu'un superbe habit de cour
Traîne à plis bruyants et longs
Sur tes talons ;

En place de bas troués,
Que pour les yeux des roués
Sur ta jambe un poignard d'or
Reluise encor ;

Que des noeuds mal attachés
Dévoilent pour nos péchés
Tes deux beaux seins, radieux
Comme des yeux ;

Que pour te déshabiller
Tes bras se fassent prier
Et chassent à coups mutins
Les doigts lutins,

Perles de la plus belle eau,
Sonnets de maître Belleau
Par tes galants mis aux fers
Sans cesse offerts,

Valetaille de rimeurs
Te dédiant leurs primeurs
Et contemplant ton soulier
Sous l'escalier,

Maint page épris du hasard,
Maint seigneur et maint Ronsard
Épieraient pour le déduit
Ton frais réduit !

Tu compterais dans tes lits
Plus de baisers que de lis
Et rangerais sous tes lois
Plus d'un Valois !

- Cependant tu vas gueusant
Quelque vieux débris gisant
Au seuil de quelque Véfour
De carrefour ;

Tu vas lorgnant en dessous
Des bijoux de vingt-neuf sous
Dont je ne puis, oh ! pardon !
Te faire don.

Va donc ! sans autre ornement,
Parfum, perles, diamant,
Que ta maigre nudité,
Ô ma beauté !
I.

À qui donc le grand ciel sombre
Jette-t-il ses astres d'or ?
Pluie éclatante de l'ombre,
Ils tombent...? - Encor ! encor !

Encor ! - lueurs éloignées,
Feux purs, pâles orients,
Ils scintillent... - ô poignées
De diamant effrayants !

C'est de la splendeur qui rôde,
Ce sont des points univers,
La foudre dans l'émeraude !
Des bleuets dans des éclairs !

Réalités et chimères
Traversant nos soirs d'été !
Escarboucles éphémères
De l'obscure éternité !

De quelle main sortent-elles ?
Cieux, à qui donc jette-t-on
Ces tourbillons d'étincelles ?
Est-ce à l'âme de Platon ?

Est-ce à l'esprit de Virgile ?
Est-ce aux monts ? est-ce au flot vert ?
Est-ce à l'immense évangile
Que Jésus-Christ tient ouvert ?

Est-ce à la tiare énorme
De quelque Moïse enfant
Dont l'âme a déjà la forme
Du firmament triomphant ?

Ces feux-là vont-ils aux prières ?
À qui l'Inconnu profond
Ajoute-t-il ces lumières,
Vagues flammes de son front ?

Est-ce, dans l'azur superbe,
Aux religions que Dieu,
Pour accentuer son verbe,
Jette ces langues de feu ?

Est-ce au-dessus de la Bible
Que flamboie, éclate et luit
L'éparpillement terrible
Du sombre écrin de la nuit ?

Nos questions en vain pressent
Le ciel, fatal ou béni.
Qui peut dire à qui s'adressent
Ces envois de l'infini ?

Qu'est-ce que c'est que ces chutes
D'éclairs au ciel arrachés ?
Mystère ! Sont-ce des luttes ?
Sont-ce des hymens ? Cherchez.

Sont-ce les anges du soufre ?
Voyons-nous quelque essaim bleu
D'argyraspides du gouffre
Fuir sur des chevaux de feu ?

Est-ce le Dieu des désastres,
Le Sabaoth irrité,
Qui lapide avec des astres
Quelque soleil révolté ?
À Joseph, comte de S.
Cuncta supercilio.
HORACE.


Dans une grande fête, un jour, au Panthéon,
J'avais sept ans, je vis passer Napoléon.
Pour voir cette figure illustre et solennelle,
Je m'étais échappé de l'aile maternelle ;
Car il tenait déjà mon esprit inquiet.
Mais ma mère aux doux yeux, qui souvent s'effrayait
En m'entendant parler guerre, assauts et bataille,
Craignait pour moi la foule, à cause de ma taille.

Et ce qui me frappa, dans ma sainte terreur,
Quand au front du cortège apparut l'empereur,
Tandis que les enfants demandaient à leurs mères
Si c'est là ce héros dont on fait cent chimères,
Ce ne fut pas de voir tout ce peuple à grand bruit,
Le suivre comme on suit un phare dans la nuit
Et se montrer de ****, sur la tête suprême,
Ce chapeau tout usé plus beau qu'un diadème,
Ni, pressés sur ses pas, dix vassaux couronnés
Regarder en tremblant ses pieds éperonnés,
Ni ses vieux grenadiers, se faisant violence,
Des cris universels s'enivrer en silence ;
Non, tandis qu'à genoux la ville tout en feu,
Joyeuse comme on est lorsqu'on n'a qu'un seul vœu
Qu'on n'est qu'un même peuple et qu'ensemble on respire,
Chantait en chœur : VEILLONS AU SALUT DE L'EMPIRE !

Ce qui me frappa, dis-je, et me resta gravé,
Même après que le cri sur la route élevé
Se fut évanoui dans ma jeune mémoire,
Ce fut de voir, parmi ces fanfares de gloire,
Dans le bruit qu'il faisait, cet homme souverain
Passer muet et grave ainsi qu'un dieu d'airain.

Et le soir, curieux, je le dis à mon père,
Pendant qu'il défaisait son vêtement de guerre,
Et que je me jouais sur son dos indulgent
De l'épaulette d'or aux étoiles d'argent.
Mon père secoua la tête sans réponse.
Mais souvent une idée en notre esprit s'enfonce ;
Ce qui nous a frappés nous revient par moments,
Et l'enfance naïve a ses étonnements.

Le lendemain, pour voir le soleil qui s'incline,
J'avais suivi mon père en haut de la colline
Qui domine Paris du côté du levant,
Et nous allions tous deux, lui pensant, moi rêvant.
Cet homme en mon esprit restait comme un prodige,
Et, parlant à mon père : Ô mon père, lui dis-je,
Pourquoi notre empereur, cet envoyé de Dieu,
Lui qui fait tout mouvoir et qui met tout en feu,
A-t-il ce regard froid et cet air immobile ?
Mon père dans ses mains prit ma tête débile,
Et me montrant au **** l'horizon spacieux :
« Vois, mon fils, cette terre, immobile à tes yeux,
Plus que l'air, plus que l'onde et la flamme, est émue,
Car le germe de tout dans son ventre remue.
Dans ses flancs ténébreux, nuit et jour en rampant
Elle sent se plonger la racine, serpent
Qui s'abreuve aux ruisseaux des sèves toujours prêtes,
Et fouille et boit sans cesse avec ses mille têtes.
Mainte flamme y ruisselle, et tantôt lentement
Imbibe le cristal qui devient diamant,
Tantôt, dans quelque mine éblouissante et sombre,
Allume des monceaux d'escarboucles sans nombre,
Ou, s'échappant au jour, plus magnifique encor,
Au front du vieil Etna met une aigrette d'or.
Toujours l'intérieur de la terre travaille.
Son flanc universel incessamment tressaille.
Goutte à goutte, et sans bruit qui réponde à son bruit,
La source de tout fleuve y filtre dans la nuit.
Elle porte à la fois, sur sa face où nous sommes,
Les blés et les cités, les forêts et les hommes.
Vois, tout est vert au ****, tout rit, tout est vivant.
Elle livre le chêne et le brin d'herbe au vent.
Les fruits et les épis la couvrent à cette heure.
Eh bien ! déjà, tandis que ton regard l'effleure,
Dans son sein que n'épuise aucun enfantement,
Les futures moissons tremblent confusément.

« Ainsi travaille, enfant, l'âme active et féconde
Du poète qui crée et du soldat qui fonde.
Mais ils n'en font rien voir. De la flamme à pleins bords
Qui les brûle au dedans, rien ne luit au dehors.
Ainsi Napoléon, que l'éclat environne
Et qui fit tant de bruit en forgeant sa couronne,
Ce chef que tout célèbre et que pourtant tu vois,
Immobile et muet, passer sur le pavois,
Quand le peuple l'étreint, sent en lui ses pensées,
Qui l'étreignent aussi, se mouvoir plus pressées.

« Déjà peut-être en lui mille choses se font,
Et tout l'avenir germe en son cerveau profond.
Déjà, dans sa pensée immense et clairvoyante,
L'Europe ne fait plus qu'une France géante,
Berlin, Vienne, Madrid, Moscou, Londres, Milan,
Viennent rendre à Paris hommage une fois l'an,
Le Vatican n'est plus que le vassal du Louvre,
La terre à chaque instant sous les vieux trônes s'ouvre
Et de tous leurs débris sort pour le genre humain
Un autre Charlemagne, un autre globe en main.
Et, dans le même esprit où ce grand dessein roule,
Des bataillons futurs déjà marchent en foule,
Le conscrit résigné, sous un avis fréquent,
Se dresse, le tambour résonne au front du camp,
D'ouvriers et d'outils Cherbourg couvre sa grève,
Le vaisseau colossal sur le chantier s'élève,
L'obusier rouge encor sort du fourneau qui bout,
Une marine flotte, une armée est debout !
Car la guerre toujours l'illumine et l'enflamme,
Et peut-être déjà, dans la nuit de cette âme,
Sous ce crâne, où le monde en silence est couvé,
D'un second Austerlitz le soleil s'est levé ! »

Plus ****, une autre fois, je vis passer cet homme,
Plus grand dans son Paris que César dans sa Rome.
Des discours de mon père alors. je me souvins.
On l'entourait encor d'honneurs presque divins,
Et je lui retrouvai, rêveur à son passage,
Et la même pensée et le même visage.
Il méditait toujours son projet surhumain.
Cent aigles l'escortaient en empereur romain.
Ses régiments marchaient, enseignes déployées ;
Ses lourds canons, baissant leurs bouches essuyées,
Couraient, et, traversant la foule aux pas confus,
Avec un bruit d'airain sautaient sur leurs affûts.
Mais bientôt, au soleil, cette tête admirée
Disparut dans un flot de poussière dorée ;
Il passa. Cependant son nom sur la cité
Bondissait, des canons aux cloches rejeté ;
Son cortège emplissait de tumultes les rues ;
Et, par mille clameurs de sa présence accrues,
Par mille cris de joie et d'amour furieux,
Le peuple saluait ce passant glorieux.

Novembre 1830.
Marco Bo Sep 2018
early morning
steeped
like a diamond
you shine

that trickle of water
close to you
as thy dew
at rest  
I long to be
...
mattina presto
intrisa
come un diamante
brilli

quel rivolo d'acqua
vicino a te
come tua rugiada
in quiete
vorrei essere
...
temprano en la mañana
empapada
como un diamante
tu brillas

ese chorrito de agua
cerca de ti
como tu rocío
en paz
quisiera ser
...
tôt le matin
trempé
comme un diamant
tu brille

ce filet d'eau
près de vous
comme ta rosée
au repos
je voudrais être
Marco Bo Oct 2018
early morning
steeped
like a diamond
you shine

that trickle of water
close to you
as thy dew
at rest
I long to be
...
mattina presto
intrisa
come un diamante
brilli

quel rivolo d'acqua
vicino a te
come tua rugiada
in quiete
vorrei essere
...
temprano en la mañana
empapada
como un diamante
tu brillas

ese chorrito de agua
cerca de ti
como tu rocío
en paz
quisiera ser
...
tôt le matin
trempé
comme un diamant
tu brille

ce filet d'eau
près de vous
comme ta rosée
au repos
je voudrais être
Peut-être un jour l'époux selon l'amour, l'épouse
Selon l'amour, selon l'ordre d'Emmanuel,
Sans que lui soit jaloux, sans qu'elle soit jalouse,

Leurs doigts libres pliés au travail manuel,
Fervents comme le jour où leurs cœurs s'épousèrent,
Nourriront dans leur âme un feu venu du ciel ;

Le feu du dieu charmant que les bourreaux brisèrent,
Le feu délicieux du véritable amour,
Dont les âmes des Saints lucides s'embrasèrent ;

Tourterelle et ramier, au sommet de leur tour
Mystique, ils placeront leur nid sur lequel règne
La chasteté, couleur de l'aurore et du jour,

L'entière chasteté, celle où l'âme se baigne,
Qui prend l'encens de l'âme et les roses du corps,
Que symbolise un lis et que l'enfant enseigne ;

Celle qui fait les saints, celle qui fait les forts,
Mystérieuse loi que notre âme devine
En voyant les yeux clos et les doigts joints des morts

Rêvant de Nazareth, sous cette loi divine,
Ils fondront leurs regards et marieront leurs voix
Dans l'idéal baiser que l'âme s'imagine.

Qu'ils dorment sur la planche ou sur le lit des rois,
Le monde les ignore, et leur secret sommeille
Mieux qu'un trésor caché sous l'herbe au fond des bois.

La nuit seule le conte à l'étoile vermeille ;
Pour eux, laissant la route aux cavaliers fougueux
Dans le discret sentier où l'âme les surveille,

Ils ne sont jamais deux, le nombre belliqueux,
Jamais deux, car l'amour sans fin les accompagne,
Toujours ''Trois'', car Jésus est sans cesse avec eux.

Paisibles pèlerins à travers la campagne
Et la ville où leurs pieds fleurent l'odeur du thym ;
Et l'époux reste amant, et la Vierge est compagne.

De l'aurore de soie au couchant de satin,
Leur doux travail embaume, et leur pur sommeil prie,
De l'étoile du soir et celle du matin.

Ce sont des enfants blancs de la Vierge Marie,
Rose de l'univers par la simplicité,
Et mère glorieuse autant qu'endolorie.

C'est Elle qui leur ouvre, étonnant la clarté,
Sur ses genoux un livre, où leur cœur voit le rêve,
Sous son manteau céleste et bleu comme l'été.

Pudique autant que Jeanne, autant que Geneviève,
L'épouse file et songe au lys du charpentier ;
L'époux travaille et songe à l'innocence d'Ève.

Avec sa main trempée au flot du bénitier,
Chaque jour dans l'Église où son âme s'abreuve,
Les doigts fiers de tourner les pages du psautier,

Pour les pauvres amours qui marchent dans l'épreuve,
Les membres de Jésus dont le faubourg est plein,
Pour le lit du vieillard et l'habit de la veuve,

Elle file le chanvre, elle file le lin,
Comme elle file aussi le sommeil du malade,
Et le rire innocent du petit orphelin.

Musique d'or du cœur qui vibre et persuade,
Sa parole fait croire et se mettre à genoux
Le plus méchant, qu'elle aime ainsi qu'un camarade.

Elle est plus sérieuse et meilleure que nous ;
Il n'a que les beaux traits de notre ressemblance ;
Couple prédestiné, délicieux époux !

Ils ont la joie, ils ont l'amour par excellence !
Leurs cœurs extasiés de grâce sont vêtus ;
Car ils ont dépouillé toute la violence.

Sortis forts des combats vaillamment combattus,
Ils font vaguer leur corps et se mouvoir leur âme
Dans le jardin vivant de toutes les vertus.

Pour plaire à la beauté pure qui les réclame,
Elle veut demeurer intacte, ainsi qu'un fruit,
Dans la virginité naturelle à la femme.

Docile au rayon d'or qui traverse sa nuit,
Écoutant vaguement le monde qui va naître,
Comme des grandes eaux dont on entend le bruit,

Pour lui, content d'aimer Jésus et de connaître
Le sens prodigieux de ses simples discours,
Il met en Dieu son cœur, ses sens et tout son être,

Respirant l'humble fleur de ses chastes amours,
Ne prenant que l'odeur de la race éternelle,
Ne cueillant pas le fruit qui réjouit toujours.

Car cette part amère à la race charnelle,
C'est la part du mystère et la part du lion,
Et c'est votre avenir, Seigneur, qui couve en elle.

Car nous sommes les fils de la rébellion ;
Nos fronts sont irrités et nos cœurs taciturnes,
Et la mort est pour nous la loi du talion.

Fils du désir d'Adam sous des ailes nocturnes,
Engendrés hors la loi des chastes paradis,
Nous errons sur la terre, et puisons dans nos urnes,

Avec des vins impurs l'oubli des jours maudits ;
Partageant nos trésors tout pleins de convoitise,
Tel autour d'une table un groupe de bandits.

Mais peut-être qu'un jour, sous les yeux de l'Église,
Verra luire l'époux comme un diamant pur,
Et l'épouse fleurir comme une perle exquise.

Et ce couple idéal brûlera d'un feu sûr.
Marbre de Paros.

Un jour, au doux rêveur qui l'aime,
En train de montrer ses trésors,
Elle voulut lire un poème,
Le poème de son beau corps.

D'abord, superbe et triomphante
Elle vint en grand apparat,
Traînant avec des airs d'infante
Un flot de velours nacarat :

Telle qu'au rebord de sa loge
Elle brille aux Italiens,
Ecoutant passer son éloge
Dans les chants des musiciens.

Ensuite, en sa verve d'artiste,
Laissant tomber l'épais velours,
Dans un nuage de batiste
Elle ébaucha ses fiers contours.

Glissant de l'épaule à la hanche,
La chemise aux plis nonchalants,
Comme une tourterelle blanche
Vint s'abattre sur ses pieds blancs.

Pour Apelle ou pour Cléoméne,
Elle semblait, marbre de chair,
En Vénus Anadyomène
Poser nue au bord de la mer.

De grosses perles de Venise
Roulaient au lieu de gouttes d'eau,
Grains laiteux qu'un rayon irise,
Sur le frais satin de sa peau.

Oh ! quelles ravissantes choses,
Dans sa divine nudité,
Avec les strophes de ses poses,
Chantait cet hymne de beauté !

Comme les flots baisant le sable
Sous la lune aux tremblants rayons,
Sa grâce était intarissable
En molles ondulations.

Mais bientôt, lasse d'art antique,
De Phidias et de Vénus,
Dans une autre stance plastique
Elle groupe ses charmes nus.

Sur un tapis de Cachemire,
C'est la sultane du sérail,
Riant au miroir qui l'admire
Avec un rire de corail ;

La Géorgienne indolente,
Avec son souple narguilhé,
Etalant sa hanche opulente,
Un pied sous l'autre replié.

Et comme l'odalisque d'Ingres,
De ses reins cambrant les rondeurs,
En dépit des vertus malingres,
En dépit des maigres pudeurs !

Paresseuse odalisque, arrière !
Voici le tableau dans son jour,
Le diamant dans sa lumière ;
Voici la beauté dans l'amour !

Sa tête penche et se renverse ;
Haletante, dressant les seins,
Aux bras du rêve qui la berce,
Elle tombe sur ses coussins.

Ses paupières battent des ailes
Sur leurs globes d'argent bruni,
Et l'on voit monter ses prunelles
Dans la nacre de l'infini.

D'un linceul de point d'Angleterre
Que l'on recouvre sa beauté :
L'extase l'a prise à la terre ;
Elle est morte de volupté !

Que les violettes de Parme,
Au lieu des tristes fleurs des morts
Où chaque perle est une larme,
Pleurent en bouquets sur son corps !

Et que mollement on la pose
Sur son lit, tombeau blanc et doux,
Où le poète, à la nuit close,
Ira prier à deux genoux.
(À Villiers de l'Isle-Adam)

Dans un palais, soie et or, dans Ecbatane,
De beaux démons, des satans adolescents,
Au son d'une musique mahométane,
Font litière aux Sept Péchés de leurs cinq sens.

C'est la fête aux Sept Péchés : ô qu'elle est belle !
Tous les désirs rayonnaient en feux brutaux ;
Les Appétits, pages prompts que l'on harcèle,
Promenaient des vins roses dans des cristaux.

Des danses sur des rythmes d'épithalames
Bien doucement se pâmaient en longs sanglots
Et de beaux choeurs de voix d'hommes et de femmes
Se déroulaient, palpitaient comme des flots.

Et la bonté qui s'en allait de ces choses
Était puissante et charmante tellement
Que la campagne autour se fleurit de roses
Et que la nuit paraissait en diamant.

Or, le plus beau d'entre tous ces mauvais anges
Avait seize ans sous sa couronne de fleurs.
Les bras croisés sur les colliers et les franges,
Il rêve, l'oeil plein de flammes et de pleurs.

En vain la fête autour se faisait plus folle,
En vain les Satans, ses frères et ses soeurs,
Pour l'arracher au souci qui le désole,
L'encourageaient d'appels de bras caresseurs :

Il résistait à toutes câlineries,
Et le chagrin mettait un papillon noir
A son cher front tout brûlant d'orfèvreries.
Ô l'immortel et terrible désespoir !

Il leur disait : " Ô vous, laissez-moi tranquille ! "
Puis, les ayant baisés tous bien tendrement,
Il s'évada d'avec eux d'un geste agile,
Leur laissant aux mains des pans de vêtement.

Le voyez-vous sur la tour la plus céleste
Du haut palais avec une torche au poing ?
Il la brandit comme un héros fait d'un ceste,
D'en bas on croit que c'est une aube qui point.

Qu'est-ce qu'il dit de sa voix profonde et tendre
Qui se marie au claquement clair du feu
Et que la lune est extatique d'entendre ?
"Oh ! je serai celui-là qui créera Dieu !

"Nous avons tous trop souffert, anges et hommes,
De ce conflit entre le Pire et le Mieux.
Humilions, misérables que nous sommes,
Tous nos élans dans le plus simple des voeux.

"Ô vous tous, ô nous tous, ô les pécheurs tristes,
Ô les gais Saints, pourquoi ce schisme têtu ?
Que n'avons-nous fait, en habiles artistes,
De nos travaux la seule et même vertu ?

"Assez et trop de ces luttes trop égales !
Il va falloir qu'enfin se rejoignent les
Sept Péchés aux Trois Vertus Théologales !
Assez et trop de ces combats durs et laids !

"Et pour réponse à Jésus qui crut bien faire
En maintenant l'équilibre de ce duel,
Par moi l'enfer dont c'est ici le repaire
Se sacrifie à l'amour universel !"

La torche tombe de sa main éployée,
Et l'incendie alors hurla s'élevant,
Querelle énorme d'aigles rouges noyée
Au remous noir de la fumée et du vent.

L'or fond et coule à flots et le marbre éclate ;
C'est un brasier tout splendeur et tout ardeur ;
La soie en courts frissons comme de l'ouate
Vole à flocons tout ardeur et tout splendeur.

Et les Satans mourants chantaient dans les flammes,
Ayant compris, comme s'ils étaient résignés.
Et de beaux choeurs de voix d'hommes et de femmes
Montaient parmi l'ouragan des bruits ignés.

Et lui, les bras croisés d'une sorte fière,
Les yeux au ciel où le feu monte en léchant,
Il dit tout bas une espèce de prière,
Qui va mourir dans l'allégresse du chant.

Il dit tout bas une espèce de prière,
Les yeux au ciel où le feu monte en léchant...
Quand retentit un affreux coup de tonnerre,
Et c'est la fin de l'allégresse et du chant.

On n'avait pas agréé le sacrifice :
Quelqu'un de fort et de juste assurément
Sans peine avait su démêler la malice
Et l'artifice en un orgueil qui se ment.

Et du palais aux cent tours aucun vestige,
Rien ne resta dans ce désastre inouï,
Afin que par le plus effrayant prodige
Ceci ne fût qu'un vain rêve évanoui...

Et c'est la nuit, la nuit bleue aux mille étoiles ;
Une campagne évangélique s'étend,
Sévère et douce, et, vagues comme des voiles,
Les branches d'arbre ont l'air d'ailes s'agitant.

De froids ruisseaux courent sur un lit de pierre ;
Les doux hiboux nagent vaguement dans l'air
Tout embaumé de mystère et de prière :
Parfois un flot qui saute lance un éclair.

La forme molle au **** monte des collines
Comme un amour encore mal défini,
Et le brouillard qui s'essore des ravines
Semble un effort vers quelque but réuni.

Et tout cela comme un coeur et comme une âme,
Et comme un verbe, et d'un amour virginal
Adore, s'ouvre en une extase et réclame
Le Dieu clément qui nous gardera du mal.
À Stéphane Mallarmé


Il parle italien avec un accent russe.

Il dit : « Chère, il serait précieux que je fusse

Riche, et seul, tout demain et tout après-demain.

Mais riche à paver d'or monnayé le chemin

De l'Enfer, et si seul qu'il vous va falloir prendre

Sur vous de m'oublier jusqu'à ne plus entendre

Parler de moi sans vous dire de bonne foi :

Qu'est-ce que ce monsieur Félice ? Il vend de quoi ? »


Cela s'adresse à la plus blanche des comtesses.


Hélas ! toute grandeurs, toutes délicatesses,

Cœur d'or, comme l'on dit, âme de diamant,

Riche, belle, un mari magnifique et charmant

Qui lui réalisait toute chose rêvée,

Adorée, adorable, une Heureuse, la Fée,

La Reine, aussi la Sainte, elle était tout cela,

Elle avait tout cela.

Cet homme vint, vola

Son cœur, son âme, en fit sa maîtresse et sa chose

Et ce que la voilà dans ce doux peignoir rose

Avec ses cheveux d'or épars comme du feu,

Assise, et ses grands yeux d'azur tristes un peu.


Ce fut une banale et terrible aventure

Elle quitta de nuit l'hôtel. Une voiture

Attendait. Lui dedans. Ils restèrent six mois

Sans que personne sût où ni comment. Parfois

On les disait partis à toujours. Le scandale

Fut affreux. Cette allure était par trop brutale

Aussi pour que le monde ainsi mis au défi

N'eût pas frémi d'une ire énorme et poursuivi

De ses langues les plus agiles l'insensée.

Elle, que lui faisait ? Toute à cette pensée,

Lui, rien que lui, longtemps avant qu'elle s'enfuît,

Ayant réalisé son avoir (sept ou huit

Millions en billets de mille qu'on liasse

Ne pèsent pas beaucoup et tiennent peu de place.)

Elle avait tassé tout dans un coffret mignon

Et le jour du départ, lorsque son compagnon

Dont du rhum bu de trop rendait la voix plus tendre

L'interrogea sur ce colis qu'il voyait pendre

À son bras qui se lasse, elle répondit : « Ça

C'est notre bourse. »

Ô tout ce qui se dépensa !

Il n'avait rien que sa beauté problématique

(D'autant pire) et que cet esprit dont il se pique

Et dont nous parlerons, comme de sa beauté,

Quand il faudra... Mais quel bourreau d'argent ! Prêté,

Gagné, volé ! Car il volait à sa manière,

Excessive, partant respectable en dernière

Analyse, et d'ailleurs respectée, et c'était

Prodigieux la vie énorme qu'il menait

Quand au bout de six mois ils revinrent.


Le coffre

Aux millions (dont plus que quatre) est là qui s'offre

À sa main. Et pourtant cette fois - une fois

N'est pas coutume - il a gargarisé sa voix

Et remplacé son geste ordinaire de prendre

Sans demander, par ce que nous venons d'entendre.

Elle s'étonne avec douceur et dit : « Prends tout

Si tu veux. »

Il prend tout et sort.


Un mauvais goût

Qui n'avait de pareil que sa désinvolture

Semblait pétrir le fond même de sa nature,

Et dans ses moindres mots, dans ses moindres clins d'yeux,

Faisait luire et vibrer comme un charme odieux.

Ses cheveux noirs étaient trop bouclés pour un homme,

Ses yeux très grands, tout verts, luisaient comme à Sodome.

Dans sa voix claire et lente un serpent s'avançait,

Et sa tenue était de celles que l'on sait :

Du vernis, du velours, trop de linge, et des bagues.

D'antécédents, il en avait de vraiment vagues

Ou pour mieux dire, pas. Il parut un beau soir,

L'autre hiver, à Paris, sans qu'aucun pût savoir

D'où venait ce petit monsieur, fort bien du reste

Dans son genre et dans son outrecuidance leste.

Il fit rage, eut des duels célèbres et causa

Des morts de femmes par amour dont on causa.

Comment il vint à bout de la chère comtesse,

Par quel philtre ce gnome insuffisant qui laisse

Une odeur de cheval et de femme après lui

A-t-il fait d'elle cette fille d'aujourd'hui ?

Ah, ça, c'est le secret perpétuel que berce

Le sang des dames dans son plus joli commerce,

À moins que ce ne soit celui du Diable aussi.

Toujours est-il que quand le tour eut réussi

Ce fut du propre !


Absent souvent trois jours sur quatre,

Il rentrait ivre, assez lâche et vil pour la battre,

Et quand il voulait bien rester près d'elle un peu,

Il la martyrisait, en manière de jeu,

Par l'étalage de doctrines impossibles.


· · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·


Mia, je ne suis pas d'entre les irascibles,

Je suis le doux par excellence, mais, tenez,

Ça m'exaspère, et je le dis à votre nez,

Quand je vous vois l'œil blanc et la lèvre pincée,

Avec je ne sais quoi d'étroit dans la pensée

Parce que je reviens un peu soûl quelquefois.

Vraiment, en seriez-vous à croire que je bois

Pour boire, pour licher, comme vous autres chattes,

Avec vos vins sucrés dans vos verres à pattes

Et que l'Ivrogne est une forme du Gourmand ?

Alors l'instinct qui vous dit ça ment plaisamment

Et d'y prêter l'oreille un instant, quel dommage !

Dites, dans un bon Dieu de bois est-ce l'image

Que vous voyez et vers qui vos vœux vont monter ?

L'Eucharistie est-elle un pain à cacheter

Pur et simple, et l'amant d'une femme, si j'ose

Parler ainsi consiste-t-il en cette chose

Unique d'un monsieur qui n'est pas son mari

Et se voit de ce chef tout spécial chéri ?

Ah, si je bois c'est pour me soûler, non pour boire.

Être soûl, vous ne savez pas quelle victoire

C'est qu'on remporte sur la vie, et quel don c'est !

On oublie, on revoit, on ignore et l'on sait ;

C'est des mystères pleins d'aperçus, c'est du rêve

Qui n'a jamais eu de naissance et ne s'achève

Pas, et ne se meut pas dans l'essence d'ici ;

C'est une espèce d'autre vie en raccourci,

Un espoir actuel, un regret qui « rapplique »,

Que sais-je encore ? Et quant à la rumeur publique,

Au préjugé qui hue un homme dans ce cas,

C'est hideux, parce que bête, et je ne plains pas

Ceux ou celles qu'il bat à travers son extase,

Ô que nenni !


· · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·


« Voyons, l'amour, c'est une phrase

Sous un mot, - avouez, un écoute-s'il-pleut,

Un calembour dont un chacun prend ce qu'il veut,

Un peu de plaisir fin, beaucoup de grosse joie

Selon le plus ou moins de moyens qu'il emploie,

Ou pour mieux dire, au gré de son tempérament,

Mais, entre nous, le temps qu'on y perd ! Et comment !

Vrai, c'est honteux que des personnes sérieuses

Comme nous deux, avec ces vertus précieuses

Que nous avons, du cœur, de l'esprit, - de l'argent,

Dans un siècle que l'on peut dire intelligent

Aillent !... »


· · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · ·


Ainsi de suite, et sa fade ironie

N'épargnait rien de rien dans sa blague infinie.

Elle écoutait le tout avec les yeux baissés

Des cœurs aimants à qui tous torts sont effacés,

Hélas !

L'après-demain et le demain se passent.

Il rentre et dit : « Altro ! Que voulez-vous que fassent

Quatre pauvres petits millions contre un sort ?

Ruinés, ruinés, je vous dis ! C'est la mort

Dans l'âme que je vous le dis. »

Elle frissonne

Un peu, mais sait que c'est arrivé.

- « Ça, personne,

« Même vous, diletta, ne me croit assez sot

Pour demeurer ici dedans le temps d'un saut

De puce. »

Elle pâlit très fort et frémit presque,

Et dit : « Va, je sais tout. » - « Alors c'est trop grotesque

Et vous jouez là sans atouts avec le feu.

- « Qui dit non ? » - « Mais je suis spécial à ce jeu. »

- « Mais si je veux, exclame-t-elle, être damnée ? »

- « C'est différent, arrange ainsi ta destinée,

« Moi, je sors. » « Avec moi ! » - « Je ne puis aujourd'hui. »

Il a disparu sans autre trace de lui

Qu'une odeur de soufre et qu'un aigre éclat de rire.


Elle tire un petit couteau.

Le temps de luire

Et la lame est entrée à deux lignes du cœur.

Le temps de dire, en renfonçant l'acier vainqueur :

« À toi, je t'aime ! » et la justice la recense.


Elle ne savait pas que l'Enfer c'est l'absence.
Cette vallée est triste et grise : un froid brouillard

Pèse sur elle ;

L'horizon est ridé comme un front de vieillard ;

Oiseau, gazelle,

Prêtez-moi votre vol ; éclair, emporte-moi !

Vite, bien vite,

Vers ces plaines du ciel où le printemps est roi,

Et nous invite

À la fête éternelle, au concert éclatant

Qui toujours vibre,

Et dont l'écho lointain, de mon cœur palpitant

Trouble la fibre.

Là, rayonnent, sous l'oeil de Dieu qui les bénit,

Des fleurs étranges,

Là, sont des arbres où gazouillent comme un nid

Des milliers d'anges ;

Là, tous les sons rêves, là, toutes les splendeurs

Inabordables

Forment, par un ***** miraculeux, des chœurs

Inénarrables !

Là, des vaisseaux sans nombre, aux cordages de feu

Fendent les ondes

D'un lac de diamant où se peint le ciel bleu

Avec les mondes ;

Là, dans les airs charmés, volèrent des odeurs

Enchanteresses,

Enivrant à la fois les cerveaux et les cœurs

De leurs caresses.

Des vierges, à la chair phosphorescente, aux yeux

Dont l'orbe austère

Contient l'immensité sidérale des cieux

Et du mystère,

Y baisent chastement, comme il sied aux péris,

Le saint poète,

Qui voit tourbillonner des légions d'esprits

Dessus sa tête.

L'âme, dans cet Éden, boit à flots l'idéal,

Torrent splendide,

Qui tombe des hauts lieux et roule son cristal

Sans une ride.

Ah ! pour me transporter dans ce septième ciel,

Moi, pauvre hère,

Moi, frêle fils d'Adam, cœur tout matériel,

**** de la terre,

**** de ce monde impur où le fait chaque jour

Détruit le rêve,

Où l'or remplace tout, la beauté, l'art, l'amour,

Où ne se lève

Aucune gloire un peu pure que les siffleurs

Ne la déflorent,

Où les artistes pour désarmer les railleurs

Se déshonorent,

**** de ce bagne où, hors le débauché qui dort,

Tous sont infâmes,

**** de tout ce qui vit, **** des hommes, encor

Plus **** des femmes,

Aigle, au rêveur hardi, pour l'enlever du sol,

Ouvre ton aile !

Éclair, emporte-moi ! Prêtez-moi votre vol,

Oiseau, gazelle !
Vous avez un regard singulier et charmant ;
Comme la lune au fond du lac qui la reflète,
Votre prunelle, où brille une humide paillette,
Au coin de vos doux yeux roule languissamment ;

Ils semblent avoir pris ses feux au diamant ;
Ils sont de plus belle eau qu'une perle parfaite,
Et vos grands cils émus, de leur aile inquiète,
Ne voilent qu'à demi leur vif rayonnement.

Mille petits amours, à leur miroir de flamme,
Se viennent regarder et s'y trouvent plus beaux,
Et les désirs y vont rallumer leurs flambeaux.

Ils sont si transparents, qu'ils laissent voir votre âme,
Comme une fleur céleste au calice idéal
Que l'on apercevrait à travers un cristal.
Étoiles, qui d'en haut voyez valser les mondes,
Faites pleuvoir sur moi, de vos paupières blondes,
Vos pleurs de diamant ;
Lune, lis de la nuit, fleur du divin parterre,
Verse-moi tes rayons, ô blanche solitaire,
Du fond du firmament !

Oeil ouvert sans repos au milieu de l'espace,
Perce, soleil puissant, ce nuage qui passe !
Que je te voie encor ;
Aigles, vous qui fouettez le ciel à grands coups d'ailes,
Griffons au vol de feu, rapides hirondelles,
Prêtez-moi votre essor !

Vents, qui prenez aux fleurs leurs âmes parfumées
Et les aveux d'amour aux bouches bien-aimées ;
Air sauvage des monts,
Encor tout imprégné des senteurs du mélèze ;
Brise de l'Océan où l'on respire à l'aise,
Emplissez mes poumons !

Avril, pour m'y coucher, m'a fait un tapis d'herbe ;
Le lilas sur mon front s'épanouit en gerbe,
Nous sommes au printemps.
Prenez-moi dans vos bras, doux rêves du poète,
Entre vos seins polis posez ma pauvre tête
Et bercez-moi longtemps.

**** de moi, cauchemars, spectres des nuits ! Les roses,
Les femmes, les chansons, toutes les belles choses
Et tous les beaux amours,
Voilà ce qu'il me faut. Salut, ô muse antique,
Muse au frais laurier vert, à la blanche tunique,
Plus jeune tous les jours !

Brune aux yeux de lotus, blonde à paupière noire,
Ô Grecque de Milet, sur l'escabeau d'ivoire
Pose tes beaux pieds nus ;
Que d'un nectar vermeil la coupe se couronne !
Je bois à ta beauté d'abord, blanche Théone,
Puis aux dieux inconnus.

Ta gorge est plus lascive et plus souple que l'onde ;
Le lait n'est pas si pur et la pomme est moins ronde.
Allons, un beau baiser !
Hâtons-nous, hâtons-nous ! Notre vie, ô Théone,
Est un cheval ailé que le Temps éperonne,
Hâtons-nous d'en user.

Chantons Io, Péan !... Mais quelle est cette femme
Si pâle sous son voile ? Ah ! c'est toi, vieille infâme !
Je vois ton crâne ras ;
Je vois tes grands yeux creux, prostituée immonde,
Courtisane éternelle environnant le monde
Avec tes maigres bras !
La chose fut exquise et fort bien ordonnée.
C'était au mois d'avril, et dans une journée
Si douce, qu'on eût dit qu'amour l'eût faite exprès.
Thérèse la duchesse à qui je donnerais,
Si j'étais roi, Paris, si j'étais Dieu, le monde,
Quand elle ne serait que Thérèse la blonde ;
Cette belle Thérèse, aux yeux de diamant,
Nous avait conviés dans son jardin charmant.
On était peu nombreux. Le choix faisait la fête.
Nous étions tous ensemble et chacun tête à tête.
Des couples pas à pas erraient de tous côtés.
C'étaient les fiers seigneurs et les rares beautés,
Les Amyntas rêvant auprès des Léonores,
Les marquises riant avec les monsignores ;
Et l'on voyait rôder dans les grands escaliers
Un nain qui dérobait leur bourse aux cavaliers.

A midi, le spectacle avec la mélodie.
Pourquoi jouer Plautus la nuit ? La comédie
Est une belle fille, et rit mieux au grand jour.
Or, on avait bâti, comme un temple d'amour,
Près d'un bassin dans l'ombre habité par un cygne,
Un théâtre en treillage où grimpait une vigne.
Un cintre à claire-voie en anse de panier,
Cage verte où sifflait un bouvreuil prisonnier,
Couvrait toute la scène, et, sur leurs gorges blanches,
Les actrices sentaient errer l'ombre des branches.
On entendait au **** de magiques accords ;
Et, tout en haut, sortant de la frise à mi-corps,
Pour attirer la foule aux lazzis qu'il répète,
Le blanc Pulcinella sonnait de la trompette.
Deux faunes soutenaient le manteau d'Arlequin ;
Trivelin leur riait au nez comme un faquin.
Parmi les ornements sculptés dans le treillage,
Colombine dormait dans un gros coquillage,
Et, quand elle montrait son sein et ses bras nus,
On eût cru voir la conque, et l'on eût dit Vénus.
Le seigneur Pantalon, dans une niche, à droite,
Vendait des limons doux sur une table étroite,
Et criait par instants : " Seigneurs, l'homme est divin.
- Dieu n'avait fait que l'eau, mais l'homme a fait le vin. "
Scaramouche en un coin harcelait de sa batte
Le tragique Alcantor, suivi du triste Arbate ;
Crispin, vêtu de noir, jouait de l'éventail ;
Perché, jambe pendante, au sommet du portail,
Carlino se penchait, écoutant les aubades,
Et son pied ébauchait de rêveuses gambades.

Le soleil tenait lieu de lustre ; la saison
Avait brodé de fleurs un immense gazon,
Vert tapis déroulé sous maint groupe folâtre.
Rangés des deux côtés de l'agreste théâtre,
Les vrais arbres du parc, les sorbiers, les lilas,
Les ébéniers qu'avril charge de falbalas,
De leur sève embaumée exhalant les délices,
Semblaient se divertir à faire les coulisses,
Et, pour nous voir, ouvrant leurs fleurs comme des yeux,
Joignaient aux violons leur murmure joyeux ;
Si bien qu'à ce concert gracieux et classique,
La nature mêlait un peu de sa musique.

Tout nous charmait, les bois, le jour serein, l'air pur,
Les femmes tout amour, et le ciel tout azur.

Pour la pièce, elle était fort bonne, quoique ancienne,
C'était, nonchalamment assis sur l'avant-scène,
Pierrot qui haranguait, dans un grave entretien,
Un singe timbalier à cheval sur un chien.

Rien de plus. C'était simple et beau. - Par intervalles,
Le singe faisait rage et cognait ses timbales ;
Puis Pierrot répliquait. - Écoutait qui voulait.
L'un faisait apporter des glaces au valet ;
L'autre, galant drapé d'une cape fantasque,
Parlait bas à sa dame en lui nouant son masque ;
Trois marquis attablés chantaient une chanson ;
Thérèse était assise à l'ombre d'un buisson :
Les roses pâlissaient à côté de sa joue,
Et, la voyant si belle, un paon faisait la roue.

Moi, j'écoutais, pensif, un profane couplet
Que fredonnait dans l'ombre un abbé violet.

La nuit vint, tout se tut ; les flambeaux s'éteignirent ;
Dans les bois assombris les sources se plaignirent.
Le rossignol, caché dans son nid ténébreux,
Chanta comme un poète et comme un amoureux.
Chacun se dispersa sous les profonds feuillages ;
Les folles en riant entraînèrent les sages ;
L'amante s'en alla dans l'ombre avec l'amant ;
Et, troublés comme on l'est en songe, vaguement,
Ils sentaient par degrés se mêler à leur âme,
A leurs discours secrets, à leurs regards de flamme,
A leur coeur, à leurs sens, à leur molle raison,
Le clair de lune bleu qui baignait l'horizon.
De Thalie,

Plus jolie,

Quand Mars enchante les jeux,

Cette Muse

Qui s'amuse

Semble rire dans ses yeux.


L'amour même

D'un emblème

Entoure son front charmant :

Pour couronne,

Il lui donne,

La perle et le diamant.


Sans rivale,

Sans égale,

Elle règne avec douceur.

Une Grâce

Suit sa trace,

Elle croit suivre une sœur.


Comme Aurore

Est encore

Plus belle en versant des pleurs,

Quelques larmes,

Sur ses charmes,

Semblent rouler sur des fleurs.
Une brume couvrait l'horizon ; maintenant,
Voici le clair midi qui surgit rayonnant ;
Le brouillard se dissout en perles sur les branches,
Et brille, diamant, au collier des pervenches.
Le vent souffle à travers les arbres, sur les toits
Du hameau noir cachant ses chaumes dans les bois ;
Et l'on voit tressaillir, épars dans les ramées,
Le vague arrachement des tremblantes fumées ;
Un ruisseau court dans l'herbe, entre deux hauts talus,
Sous l'agitation des saules chevelus ;
Un orme, un hêtre, anciens du vallon, arbres frères
Qui se donnent la main des deux rives contraires,
Semblent, sous le ciel bleu, dire : « A la bonne foi ! »
L'oiseau chante son chant plein d'amour et d'effroi,
Et du frémissement des feuilles et des ailes
L'étang luit sous le vol des vertes demoiselles.
Un bouge est là, montrant dans la sauge et le thym
Un vieux saint souriant parmi des brocs d'étain,
Avec tant de rayons et de fleurs sur la berge,
Que c'est peut-être un temple ou peut-être une auberge.
Que notre bouche ait soif, ou que ce soit le coeur,
Gloire au Dieu bon qui tend la coupe au voyageur !
Nous entrons. « Qu'avez-vous ! - Des oeufs frais,
de l'eau fraîche. »
On croit voir l'humble toit effondré d'une crèche.
A la source du pré, qu'abrite un vert rideau,
Une enfant blonde alla remplir sa jarre d'eau,
Joyeuse et soulevant son jupon de futaine.
Pendant qu'elle plongeait sa cruche à la fontaine,
L'eau semblait admirer, gazouillant doucement,
Cette belle petite aux yeux de firmament.
Et moi, près du grand lit drapé de vieilles serges,
Pensif, je regardais un Christ battu de verges.
Eh ! qu'importe l'outrage aux martyrs éclatants,
Affront de tous les lieux, crachat de tous les temps,
Vaine clameur d'aveugle, éternelle huée
Où la foule toujours s'est follement ruée !

Plus ****, le vagabond flagellé devient Dieu.
Ce front noir et saignant semble fait de ciel bleu,
Et, dans l'ombre, éclairant palais, temple, masure,
Le crucifix blanchit et Jésus-Christ s'azure.
La foule un jour suivra vos pas ; allez, saignez,
Souffrez, penseurs, des pleurs de vos bourreaux baignés !
Le deuil sacre les saints, les sages, les génies ;
La tremblante auréole éclôt aux gémonies,
Et, sur ce vil marais, flotte, lueur du ciel,
Du cloaque de sang feu follet éternel.
Toujours au même but le même sort ramène :
Il est, au plus profond de notre histoire humaine,
Une sorte de gouffre, où viennent, tour à tour,
Tomber tous ceux qui sont de la vie et du jour,
Les bons, les purs, les grands, les divins, les célèbres,
Flambeaux échevelés au souffle des ténèbres ;
Là se sont engloutis les Dantes disparus,
Socrate, Scipion, Milton, Thomas Morus,
Eschyle, ayant aux mains des palmes frissonnantes.
Nuit d'où l'on voit sortir leurs mémoires planantes !
Car ils ne sont complets qu'après qu'ils sont déchus.
De l'exil d'Aristide, au bûcher de Jean Huss,
Le genre humain pensif - c'est ainsi que nous sommes -
Rêve ébloui devant l'abîme des grands hommes.
Ils sont, telle est la loi des hauts destins penchant,
Tes semblables, soleil ! leur gloire est leur couchant ;
Et, fier Niagara dont le flot gronde et lutte,
Tes pareils : ce qu'ils ont de plus beau, c'est leur chute.

Un de ceux qui liaient Jésus-Christ au poteau,
Et qui, sur son dos nu, jetaient un vil manteau,
Arracha de ce front tranquille une poignée
De cheveux qu'inondait la sueur résignée,
Et dit : « Je vais montrer à Caïphe cela ! »
Et, crispant son poing noir, cet homme s'en alla.
La nuit était venue et la rue était sombre ;
L'homme marchait ; soudain, il s'arrêta dans l'ombre,
Stupéfait, pâle, et comme en proie aux visions,
Frémissant ! - Il avait dans la main des rayons.

Forêt de Compiègne, juin 1837.

— The End —